Découvrir les œuvres de Sœur
Marie-Aimée de Jésus
Sœur Marie-Aimée de
Jésus est, de nos jours et comme la plupart des grands mystiques non
encore béatifiés, très peu connue. C'est dommage car, son œuvre
consacrée à Jésus-Christ, Fils de Dieu, contient, non
seulement de nombreux arguments théologiques, valables tout autant
de nos jours qu'au temps d'Ernest Renan, mais également des conseils
très importants pour les âmes qui désirent vivre à fond la volonté
de Dieu, dans une union intime et étroite avec leur Seigneur.
– Sur l'union divine et
la transformation de l'âme en Dieu
– La vie cachée en Dieu
Les douze
degrés du silence
Nous avons vu
ci-dessus que Sœur Marie-Aimée de Jésus,
vers 1860, fut surprise par une de ses sœurs, comme en extase dans
sa cellule, dont la porte était ouverte. Elle semblait écouter
quelque chose. En fait, elle recevait du Seigneur “Les douze
degrés du silence”, dont nous allons donner ci-dessous, les
idées essentielles.
Le silence prépare les
saints et les achève. Dieu, le Père éternel n'a qu'une Parole, son
Verbe. "Ce mot: silence, qu'il est beau!"
Écoutons maintenant le
silence "entendu" par Sœur Marie-Aimée de Jésus. Tout d'abord il
convient de "parler peu aux créatures et beaucoup à Dieu:
silence au monde, aux nouvelles, silence avec les âmes les plus
justes." Puis, c'est le silence dans le travail et dans les
mouvements: des yeux, des oreilles, de la voix. Dieu appelle
l'âme au désert pour qu'elle goûte les prémices de l'union divine,
dans le recueillement. Puis vient le silence de l'imagination
et le silence de la mémoire, "silence de l'action de grâce
qu'il faut saturer du souvenir des miséricordes de Dieu." Alors,
faisant silence aux créatures, l'âme "se retirera dans les
plus intimes profondeurs de ce lieu caché où repose la Majesté
inaccessible du Saint des saints, et Jésus... lui révélera ses
secrets..." L'âme n'aura plus que dégoût pour ce qui n'est pas
Dieu.
Le silence du cœur
s'établit: silence des affections, des antipathies, des désirs, et
même du zèle et des soupirs. "Un cœur dans le silence, c'est un
cœur vierge, c'est une mélodie pour le Cœur de Dieu... Dans ce
silence, l'âme commence à apprendre la première note de ce sacré
cantique qui est le chant des cieux."
Maintenant il faut
passer au silence de la nature et de l'amour-propre. L'âme
doit se taire face à sa corruption, à sa bassesse, à son incapacité.
Elle se taira face aux mépris pour atteindre le silence de la
douceur et de l'humilité. La nature se taira devant les joies ou les
plaisirs, elle "fera silence dans les peines ou les
contradictions, dans les jeûnes, les veilles, les fatigues, le froid
et le chaud. Silence dans la santé, la maladie, les privations;
c'est le silence éloquent de la vraie pauvreté et de la pénitence.
C'est le silence du moi humain passant dans le vouloir divin. Ce
silence est au-dessus de la nature."
Marie-Aimée de Jésus
nous fait avancer plus loin et parvenir jusqu'au silence de
l'esprit, "en faisant taire ses pensées inutiles, agréables,
naturelles, celles-là qui nuisent au silence de l'esprit et non la
pensée elle-même qui ne peut pas cesser d'exister. Notre esprit veut
la vérité... Or, la vérité essentielle, c'est Dieu... Silence aussi
aux raisonnements subtils qui affaiblissent la volonté et dessèchent
l'amour..." Silence dans l'intention, aux recherches
personnelles, et silence à l'orgueil qui se recherche en tout,
partout et toujours... Puis vient le silence du jugement,
quant aux personnes et aux choses. "Ne pas juger, c'est ne pas
laisser voir son opinion... C'est le silence de la bienheureuse et
sainte enfance, c'est le silence des parfaits, le silence des anges
et des archanges alors qu'ils suivent les ordres de Dieu..."
Le Seigneur a autre
chose à nous apprendre: le silence de la volonté. C'est le
silence de celui qui a Dieu pour Maître. "Ce silence est celui de
la victime sur l'autel, c'est le silence de l'agneau que l'on
dépouille de sa toison, c'est le silence dans les ténèbres... C'est
le silence dans les angoisses du cœur dans les douleurs de l'âme...
qui se sent repoussée... le silence sans autre plainte que l'amour.
C'est le silence du crucifiement... c'est le silence de l'agonie de
Jésus-Christ... Rien n'est plus digne de Dieu que cette sorte de
louange dans la douleur..."
Il faut enfin se taire
avec soi-même, s'oublier soi-même, se laisser seule, toute seule
avec Dieu; c'est le silence avec soi-même. " c'est le
silence du néant,plus héroïque que le silence de la mort." Ce
silence conduit au silence avec Dieu. "Silence avec Dieu,
c'est adhérer à Dieu, se présenter, s'exposer devant Dieu, s'offrir
à Lui, s'anéantir devant Lui, l'adorer, L'aimer, L'écouter,
l'entendre et se reposer en Lui. C'est le silence de l'éternité,
c'est l'union de l'âme avec Dieu."
À l'école de
l'Amour
Ce petit texte est une
conversation entre Dieu et Marie-Aimée de Jésus. Jésus dit un jour à
ses disciples: "Celui qui m'aime m'écoute, mon Père l'aimera,
nous viendrons à lui et nous ferons en lui notre demeure."
Marie-Aimée s'informe: "Dîtes-moi, ô mon Dieu, ce qu'est une âme
qui habite en vous, et en laquelle vous habitez... car vous m'avez
dit: 'Je suis ton salut et ta vie; demeure en moi, et tu trouveras
la paix.' Et moi j'ai dit: 'Ma vie c'est l'amour, et l'amour c'est
l'union'. Et j'ai senti et je sens encore une eau courante qui
m'entraîne et qui me crie sans cesse: 'Va à Dieu! Va à Dieu!' Ô
union divine!... Nuit et jour ce mot retentit au fond de mon cœur...
Ma vie à moi, c'est mon Dieu, c'est mon Christ, c'est l'adorable
Trinité! Et pour vivre de cette vie, il n'est rien que je ne veuille
souffrir, dussé-je mourir de mille morts. Parlez-moi Seigneur de
cette union sacrée... Qu'est-ce que cette âme en laquelle vous
demeurez et qui demeure en vous?"
Le Seigneur répondit
longuement:
-"C'est une âme qui,
docile à ma parole a jeté ses filets et s'est avancée en pleine
eau... une âme toute livrée à mes conduites. C'est une âme qui a
tout quitté pour me suivre... pour posséder le tout de Dieu... Cette
âme... a trouvé le trésor caché, la perle inconnue: son Dieu. L''âme
prédestinée à l'union sacrée est une arche précieuse... Nul ne peut
la toucher sans allumer le feu de ma colère. C'est une fleur que je
me suis réservée de toute éternité: nul ne peut la cueillir... C'est
une chaste colombe qui habite près des grandes eaux afin de se
purifier... C'est un vase vide que je remplis de ma plénitude, une
amante fidèle... qui a ravi le Cœur du grand Roi... C'est une vierge
chérie de son Créateur, Moi, le Verbe, qui repose au milieu des lis.
Nuit et jour elle me contemple...elle admire les infinies
perfections de ma divinité... C'est un miroir sans tache, dans
lequel se reflète ma beauté suprême..."
Mais qui peut ravir
ainsi ce cœur passionné, s'interroge Marie-Aimée? Qui peut éblouir
cet œil illuminé? "Mon Dieu! Non, il n'y a que vous d'aimable!
Laissez quelques instants de silence à mon amour, et puis, ô mon
tout! daignez m'apprendre ce que fait cette créature transformée,
vous qui voulez trouver en elle vos délices? Que fait elle pour
répondre à vos préférences divines?
-Une seule chose,
elle m'aime!... L'amour, voilà la force qui l'anime, la puissance
qui la domine, le génie suprême qui l'inspire; et l'amour c'est
l'Esprit-Saint dont le souffle puissant peut seul ramener les âmes
dociles à la divine Unité... Cette âme va droit au but et s'avance
ainsi de vertus en vertus, de clartés en clartés, jusqu'au jour de
la gloire éternelle. L'œil de son intérieur est toujours fixé sur
moi... son cœur devine et prévient mes désirs.. Quelle sera la
beauté de cette âme qui cède sans se lasser... aux exigences de mon
insatiable amour disposant en son intérieur les mystérieux degrés
par lesquels elle s'élève jusqu'à ma grandeur en m'attirant jusqu'à
sa petitesse?"
Marie-Aimée s'étonne
que son Seigneur mette ainsi sa haute perfection à la portée de sa
faiblesse. Elle s'écrie:
-"Je puis donc, tout
indigne que j'en suis, aspirer à ce baiser de votre bouche, qui
n'est autre chose qu'une union très étroite avec vous... Mais
dîtes-moi, ô Seigneur, quelle est l'innocence de cette âme qui
participe... à votre pureté infinie?...
-C'est une vierge
entre les pures vierges que j'honore de mon intime familiarité...
Elle n'est plus du monde... Dans ce temple très pur on n'entend nul
bruit; tout y est silence, paix, recueillement... Qui peut
comprendre le prix des oraisons qui s'élèvent de ce sanctuaire
jusqu'au trône de ma Majesté?... Elle est vraiment vierge, cette
créature qui ne vit que de ma propre vie. Elle est du nombre de
celles qui, la lampe à la main, attendent l'arrivée de l'Époux..."
Marie-Aimée se demande
quelle est l'humilité de cette bien-aimée et tremble en pensant à
ses chutes possibles; mais le Seigneur répond:
-"Dans ma sainteté
elle découvre ses moindres taches... Elle est toute fondue dans ma
divine volonté... Elle me cherche jusqu'à ce qu'elle me trouve...
Cette âme s'élance, avec le même amour, vers la croix ou vers le
trône qu'elle espère... Cette âme fidèle s'enivre des eaux
sanglantes du Calvaire... Mais qu'elles sont rares ces âmes
intrépides et toutes pures qui ont compris la chasteté spirituelle
et la virginité de l'esprit, qui sont éprises de la folie de la
croix, et que l'amour de leur Dieu a rendues insensées!
-Oui, Seigneur,
elles sont rares ces âmes, trop rares après tant d'appels de votre
amour!" Et, s'adressant à sainte Thérèse, la Mère de son carmel,
arrivée au bout d'une course amoureuse de part et d'autre,
Marie-Aimée constate que Dieu et elle se rencontrèrent dans le
baiser de l'union. Quant à elle, Marie-Aimée, "c'est la
miséricorde de Dieu qui la jette en Lui, l'enivre de bonheur en la
faisant mourir à elle-même... Oui, elle veut se jeter à pleine âme
dans cette mer sans limite et toujours avancer jusqu'à n'être plus
qu'une seule chose avec Dieu; c'est le baiser sacré après lequel
elle aspire."
La vierge
féconde
Dans ce petit écrit, il
semble que Marie-Aimée revienne sur l'un de ses problèmes d'enfant:
tout est fécond, dans la nature; n'y aurait-il que les vierges de
Jésus à être en dehors de ce privilège? Mais "son âme ignorait
encore qu'elle possédait le germe divin." Le Dieu des petits et
des humbles lui fit comprendre que, "dans la pensée de Dieu, la
virginité ne devait pas être séparée de la fécondité divine".
Certes, les vierges n'enfanteront pas comme Marie enfanta Jésus,
"mais elles doivent enfanter Jésus-Christ en elles, comme
Jésus-Christ lui-même les a enfantées à la grâce, c'est-à-dire
spirituellement... Or cela se fait, mystiquement, par la
transformation...
Tous les chrétiens
sont appelés, par le baptême, à faire vivre Jésus-Christ en eux...
Par la profession religieuse, qui est une profession de virginité,
les épouses du Verbe sont destinées, par état spécial, à le
reproduire, à le continuer en elles-mêmes... elle ne doivent pas
chercher une autre raison d'être que celle de donner vie à
Jésus-Christ." Marie-Aimée explique ces choses difficiles; elle
écrit: "Dans cette extase de bonheur et de pureté, le céleste
Époux lui fit comprendre de quelle confusion, de quel opprobre
temporel ou éternel seront couvertes les vierges stériles dans le
Christ... Il lui montra la gloire qui doit couronner les vierges
fidèles ayant su, après s'être unies au Verbe, le faire naître et
grandir en elles et lui donner croissance, jusqu'à l'âge parfait, au
prix de leur propre destruction..."
Marie-Aimée cite les
paroles de sainte Agnès: "J'aime le Christ! En l'aimant, je suis
pure; en m'unissant à lui, je suis chaste; en l'embrassant, en
l'enfantant, je suis vierge." Puis Marie-Aimée précise:
"L'enfantement mystique auquel nous sommes destinées, ne s'opère que
par un saint commerce d'amour et de pureté avec le Père et le divin
Esprit, que le consentement nécessaire est, de notre part, une
adhésion continuelle à la mort à nous-mêmes par la fidélité... Pour
enfanter Jésus-Christ, il faut mourir, pour le reproduire,
s'effacer; pour devenir un autre lui-même, cesser d'être soi-même;
pour le faire croître, diminuer et s'anéantir: c'est une seule et
même opération."
Sur l'union
divine et la transformation de l'âme en Dieu
En 1871, Sœur
Marie-Aimée de Jésus fit une retraite en s'inspirant des thèmes de
"La Montée du Carmel", de Saint Jean de la Croix. Elle retint
d'abord les quatre choses qui font obstacle à l'union à Dieu et à la
transformation en lui:
– les attaches,
aussi petites soient-elles
– les passions
volontaires,
– les fautes,
même minimes, accomplies par habitude,
– les
mouvements des passions et les imperfections.
Après s'être
sérieusement examinée, Marie-Aimée de Jésus se sentie indifférente à
tout: non, elle n'avait pas d'attache, ni aux peines, ni aux joies,
ni aux honneurs, ni aux humiliations, ni à son pays, à l'habit
qu'elle portait. Elle se sentait prête à tous sacrifier. Elle
n'avait pas non plus de passions volontaires, mais elle découvrit
que sa volonté était parfois trop faible. Elle découvrit quelques
fautes d'habitude qui revenaient assez souvent: manque de
ponctualité, par exemple. Enfin, il lui sembla qu'elle aurait peu à
faire pour résister aux mouvements de passion, mais elle n'était pas
encore parfaitement maîtresse d'elle-même. Il lui fallait donc
utiliser les trois moyens proposés pour détruire les obstacles à
l'union divine: imiter Notre Seigneur Jésus-Christ en toutes choses,
renoncer pour son amour à tout plaisir, même spirituel, enfin, se
porter toujours aux choses les plus difficiles.
Marie-Aimée découvrit
que depuis son enfance elle pratiquait ces trois choses, mais de
manière très imparfaite, ce qui l'empêchait de s'unir parfaitement à
Dieu, malgré les besoin impétueux qu'elle en avait: ces
imperfections l'empêchaient de rejoindre Dieu, d'où ses résolutions:
– prendre
l'habitude de parler et d'agir avec beaucoup de charité,
– prendre
l'habitude de ne jamais se mettre en retard,
– taire toutes
ses impressions,
– veiller sur
ses premiers mouvements imparfaits et les étouffer.
Alors,
Marie-Aimée de Jésus "entra avec une ferveur incroyable dans
cette nuit obscure ou mortification des sens et des passions, car
elle était vraiment enflammée par cet amour inquiet, dont parle
saint Jean de la Croix... Cette espérance lui donna un courage, un
amour qu'elle ne connaissait pas encore..." Alors elle se sentit
disposée à souffrir aussi longtemps qu'il le faudrait pour être
enfin unie à Dieu. Elle raconte: "Soudain il se passa en moi
quelque chose d'extraordinaire, et Notre Seigneur me demanda si je
ne croyais pas qu'il pût faire en quelques jours ce que je lui
demandais..." Elle répondit positivement et elle sentit soudain
un grand changement dans son âme:elle n'avait plus que dégoût pour
les choses de la terre et sa volonté était réellement fortifiée.
Elle conçut un grand déplaisir de ses infidélités et un grand mépris
pour elle-même.
"Ses plus petites négligences lui
semblèrent des crimes; elle se voyait mille fois pire que les
malheureux
qui avaient brûlé les maisons, tué nos prêtres, profané nos églises,
troublé nos pieux asiles."
Une contrition sincère
suivit, et Marie-Aimée se sentit embrasée d'un amour inexprimable et
très unie à Dieu. Elle tomba dans une sorte de repos dont elle ne
sortit que dix à douze minutes plus tard, rassasiée de Dieu et
affamée tout ensemble, car, écrit-elle, "plus on s'approche de
Dieu, plus on veut s'en approcher, plus on s'unit à Lui, plus on
veut s'y unir; plus on participe à Dieu, si je puis m'exprimer
ainsi, plus on est insatiable?"
La retraite avance;
Marie-Aimée ne se reconnaît plus; elle est de plus en plus
transformée en Dieu et elle se demande si le ciel est autre chose.
Oui, répond-elle immédiatement, "parce que je ne vois pas mon
Dieu; je jouis de Lui comme un aveugle, par la foi et l'amour. Oui
encore, parce qu'au ciel on ne peut plus le perdre." Par
ailleurs, elle éprouve un ardent désir du salut des âmes et de leur
perfection, et se propose d'y travailler par la prière.
À tous ces désirs
succédèrent de nouvelles inquiétudes d'amour et elle comprit la
nécessité d'une constante vigilance. La retraite avançait... Notre
Seigneur montra à Marie-Aimée comment la doctrine de saint Jean de
la Croix était déjà renfermée dans l'Évangile, et elle fut conduite
à méditer le Notre Père. L'âme s'élance dans le sein de Dieu, dans
le tout de Dieu, au-dessus de tout: des personnes, des choses,
d'elle-même, des vertus, des dons extraordinaires, au-dessus de tout
ce qui n'est pas Dieu. Elle n'a pas d'autre projet que la volonté de
Dieu. Mais, connaissant ses faiblesses, elle a besoin d'être nourrie
de la sainte Eucharistie. Elle demande pardon à Dieu pour ses fautes
et celles de ses frères, et elle pardonne... mais elle craint et
elle supplie Notre-Seigneur de la délivrer du mal. Elle peut se
reposer en Dieu: "Amen!"
Marie-Aimée est unie à
Dieu par la foi. Mais le corps, que devient-il? "L'âme le conduit
par la grâce sous l'empire de laquelle il devient totalement
soumis..." Véritablement ce n'est plus Marie-Aimée qui vit,
c'est Jésus qui vit en elle. Jésus lui a montré "comment son âme
à lui, Jésus, tendait, adhérait au Verbe et s'efforçait d'atteindre
à la sublimité des actes qu'il voulait faire par son humanité."
Marie-Aimée comprit que "dans l'union hypostatique il n'y a
qu'une personne en Jésus-Christ, avec la distinction des deux
natures, et aussi comment l'union de l'âme avec Dieu s'accomplit sur
le modèle de l'union de l'humanité de Jésus-Christ avec la
Divinité... Ô heureux état!... C'est une carrière qui s'ouvre plutôt
en Dieu que vers Dieu!"
La vie cachée
en Dieu
"La vie cachée en Dieu
est un petit poème, une prière, que nous transcrivons ci-dessous
intégralement. Marie-Aimée s'adresse à Dieu.
Cachez-moi pour
toujours dans votre ombre divine,
Adorable invisible! En vous cachez-moi bien!
Entre vos bras, mon tout, qu'un feu secret me mine,
Heureuse de vous voir, fière de n'être rien..;
Seigneur, à tout
regard daignez donc me soustraire,
Mais pour vous, paraissez! Que tout monte vers vous!
Ah! Je sens tressaillir mon abjecte poussière
Qui pressent votre gloire, ô mon divin Époux!
Incline, ô nuit, sur
moi, tes ombres si propices;
Saint oubli, ma grandeur, sois-moi comme un tombeau.
Qu'on n'admire que Vous, Vous mes chères délices!
Car vous seul êtes Dieu! Car vous seul êtes Dieu!
Pour moi, de votre
croix que l'opprobre m'enivre,
Que je sache partout, en tout m'anéantir...
Si dans un petit coin il fait si bon de vivre,
Dans un petit coin d'ombre il fera bon mourir!
Être délaissé là,
comme chose inutile,
Se taire, s'oublier, s'amoindrir chaque jour,
Au milieu des mépris garder l'âme tranquille,
Qui pour vous exalter, ne le peut, mon Amour?
Se tenir à l'écart
sans jamais le paraître,
Rechercher seulement l'approbation de Dieu,
Recevoir simplement les caresses du Maître,
S'effacer, s'immoler, toujours et en tout lieu!...
Arrive le trépas! De
cette vigne obscure
Jésus calme la crainte et le saint tremblement:
Elle s'écoule en Dieu, semblable à l'onde pure,
Qui, sans laisser de trace, a fui dans le torrent...
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