

CHAPITRE XVII
LA CRÉATION SELON LE SEXE: QUE
RÉPONDRE A CEUX QUI SONT EN DIFFICULTÉ DE SAVOIR COMMENT,
SI LA PROCRÉATION EST UNE SUITE DE LA FAUTE, LES ÂMES SERAIENT VENUES A L'EXISTENCE
DANS LE CAS OÙ LES PREMIERS HOMMES SE SERAIENT MAINTENUS HORS DU PÉCHÉ
Objection: sans division
sexuelle, l'humanité ne pouvait se développer
Avant d'explorer l'objet de ce
chapitre, peut-être vaut-il mieux chercher la solution d'une difficulté de nos
adversaires. Ils disent qu'avant la faute, le récit ne parle ni d'enfantement,
ni des douleurs qui l'accompagnent, ni d'instinct de procréation. Quand Dieu
chasse Adam et Ève du paradis après leur faute et que la femme est condamnée aux
douleurs de l'enfantement, alors seulement Adam vient connaître sa compagne en
mariage et la première procréation a lieu. Si donc dans le Paradis il n'y avait
ni mariage ni douleurs ni enfantement, il est, à leur avis, nécessaire d'en
conclure que la multiplication de la vie humaine ne se serait pas faite, si le
bienfait de l'immortalité ne nous avait été enlevé pour nous faire mortels et si
le mariage, grâce aux naissances, n'avait préservé la nature, en amenant à la
vie de nouveaux êtres à la place des disparus. Si bien que d'une certaine façon
la faute qui s'introduit dans la vie humaine eut son utilité: sans elle, la race
humaine en serait restée au couple primitif, puisque la crainte de la mort
n'aurait pas été là pour pousser la nature à se reproduire.
Résurrection: retour au
premier état
Sur ces points, une fois de plus,
la vérité, quelle qu'elle soit, ne saurait apparaître dans son évidence qu'aux
initiés, comme Paul, des mystères indicibles du paradis. Pour nous, voici notre
avis: un jour où les Sadducéens faisaient objection à la doctrine de la
Résurrection et où, pour confirmer leur thèse, ils mettaient en avant le cas de
cette femme mariée successivement à sept frères, en demandant à qui après la
Résurrection elle appartiendrait, le Seigneur, non seulement pour instruire les
Sadducéens, mais aussi pour faire connaître aux âges à venir le mystère de la
vie dans la Résurrection, dit: « A la résurrection ni les hommes ni les femmes
ne se marieront; car ils ne peuvent plus mourir: ils sont semblables aux Anges
et fils de Dieu, étant fils de la Résurrection »
. La grâce de
la Résurrection ne nous est pas présentée autrement que comme le rétablissement
dans le premier état de ceux qui sont tombés. En effet la grâce que nous
attendons est le retour à la première vie, où sera ramené dans le paradis celui
qui en avait été chassé.
Premier état: angélique
Si, une fois rétablie dans l'ordre,
notre vie va de pair avec celle des Anges, c'est que la vie avant la faute était
en quelque façon angélique
. Aussi notre
retour au premier état nous rend-il semblables aux Anges. Or, comme on sait,
bien que le mariage n'existe pas chez eux, leurs armées constituent des myriades
infinies. Ainsi le décrit Daniel dans ses visions. Donc, comme eux, si le péché
ne nous avait transformés et fait déchoir de l'état d'égalité où nous étions
avec eux, nous n'aurions pas eu besoin du mariage pour nous multiplier.
Multiplication des Anges
Le mode de multiplication de la
nature angélique peut être indicible et impensable aux conjectures humaines: ce
qui est sûr, c'est qu'il y en a un. Ce mode de multiplication aurait été aussi
celui des hommes dont la nature est si proche de celle des anges et il aurait
porté l'humanité jusqu'au terme fixé par la volonté de son Créateur. Et si
quelqu'un a du mal à concevoir ce mode de génération pour l'humanité, dans le
cas où elle n'aurait pas eu besoin du concours du mariage, à notre tour, nous le
prierons de nous dire comment les anges existent et comment leurs myriades
constituent une espèce unique et en même temps peuvent être dénombrées. A celui
donc qui met en avant l'impossibilité pour l'homme d'être sans le mariage, nous
sommes fondés à donner cette réponse: l'homme serait sans le mariage comme les
anges eux-mêmes, puisque notre ressemblance avec les anges avant la chute nous
est prouvée par le rétablissement des choses dans leur premier état.
Raison de la création
selon le sexe
Maintenant que nous avons élucidé
cette question, revenons à notre premier propos: comment, après la constitution
de l'image, Dieu a-t-il façonné dans son ouvrage la division en mâle et femelle?
Pour répondre à cette question, nos précédentes considérations vont nous être
utiles.
Celui qui amène toutes choses à
l'être et qui, dans son propre vouloir, forme tout l'homme selon l'image divine,
répugne à voir se constituer la plénitude numérique des âmes humaines par les
apports successifs de générations; sa puissance presciente conçoit globalement
dans son ensemble toute la nature humaine et l'élève au pied d'égalité avec les
anges. Mais, comme sa puissance qui voit tout lui montre à l'avance la déviation
de notre liberté hors de la route droite et la chute qui s'ensuit, loin de la
vie des anges, afin de ne pas mutiler le total des âmes humaines qui ont perdu
le mode d'accroissement de l'espèce angélique, Dieu, pour ces raisons, établit
pour notre nature un moyen plus adapté à notre glissement dans le péché: au lieu
de la noblesse des anges, il nous donne de nous transmettre la vie les uns aux
autres, comme les brutes et les êtres sans intelligence. De là vient sans doute
que le grand David, prenant en pitié la misère humaine, gémit sur nous en ces
termes: « L'homme qui était en dignité n'a pas compris »
, — en
dignité, c'est-à-dire dans un état pareil à celui des anges. A cause de cela,
continue-t-il, il a été rejeté dans la compagnie des bêtes sans raison et leur
est devenu semblable. Il est réellement devenu bestial, celui qui a reçu ce
genre de naissance qui le fait déchoir, à cause de son penchant vers la matière.
CHAPITRE XVIII
LES DISPOSITIONS ANIMALES QUI SONT
EN NOUS VIENNENT DE NOTRE PARENTÉ
AVEC LA NATURE IRRATIONNELLE
Vie présente de
l'humanité. Origine des « pathè »
Tel est, selon moi, le principe de
chacune des « dispositions passionnelles », qui, jaillissant comme d'une source,
ont débordé sur la vie humaine
. La preuve en
est en ce que ces mouvements qui se manifestent chez nous nous sont communs avec
les animaux. En effet on ne peut strictement attribuer à la nature humaine, qui
porte les traits de la forme même de Dieu, l'origine de ces dispositions. Mais
comme les animaux sont venus dans le monde avant l'homme et que, pour la raison
dite plus haut, ils lui ont communiqué quelque chose de leur nature, à savoir ce
qui concerne la naissance, l'homme a aussi en commun avec eux leurs autres
particularités.
La colère ne peut être un point de
ressemblance entre Dieu et l'homme; le plaisir ne saurait non plus définir la
nature supérieure et la lâcheté, l'audace, le désir des grands biens, la haine
de toute condition inférieure et tous les sentiments semblables ne sont guère
des notes qui conviennent à la Divinité. Ces caractères, c'est de la nature
irrationnelle que la nature humaine les tire. Toutes les protections qui servent
à la conservation de la vie animale, transportées dans la vie humaine, donnent
ces mouvements des « passions ». Ainsi le courage préserve les carnivores; la
recherche de la volupté est la sauvegarde des plus féconds. Ceux qui n'ont pas
de forces, la lâcheté les protège et la crainte ceux qui sont d'une prise facile
aux forts; la gloutonnerie garde ceux qui sont d'un grand embonpoint. Et quand
ils ne peuvent contenter leurs plaisirs, les animaux connaissent aussi le
chagrin. Dans la constitution de l'homme, toutes ces dispositions et autres
semblables se sont introduites à la suite de notre naissance animale. Qu'on me
permette une comparaison entre l'image de l'homme et l'une de ces curieuses
créations des sculpteurs. De même que dans certains modelages, l'on voit
sculptée une double forme, que les artistes ont imaginée pour la stupeur des
passants, représentant dans une seule tête deux visages d'aspect différent, de
même, semble-t-il, l'homme porte la ressemblance de deux objets opposés. Par son
esprit déiforme, il porte les traits de la beauté de Dieu; par les poussées en
lui de ces « mouvements », la similitude de la brute.
Vie humaine dans ces
pathè; leur prolifération
Souvent aussi son raisonnement
s'abrutit, par son penchant et son comportement animal et la plus mauvaise
partie de notre être recouvre la meilleure. Lorsqu'en effet quelqu'un ramène
toute son activité spirituelle à ces « mouvements » et force son raisonnement à
se faire leur serviteur, il se produit un renversement de l'empreinte de Dieu en
nous vers l'image de la brute; toute notre nature est reconstruite à ce modèle,
comme si notre raisonnement ne cultivait plus que les principes des passions et
les faisait proliférer en abondance. Mettant son activité particulière à leur
service, il donne naissance à un véritable amas d'absurdités, Ainsi le désir de
la volupté dont le principe en nous est notre ressemblance avec les animaux
prend dans les péchés des hommes une telle extension et donne naissance à de
telles variétés de fautes de plaisir qu'on n'en trouve pas de pareilles chez les
animaux. L'excitation à la colère est de même famille que l'instinct des bêtes,
mais chez nous elle se développe par l'aide que lui apportent nos raisonnements.
De là viennent le ressentiment, l'envie, le mensonge, les embûches,
l'hypocrisie. Tous ces sentiments sont le produit de la mauvaise culture de
l'esprit. Si en effet ces mouvements sont privés de l'aide de nos raisonnements,
la colère n'a ni durée ni vigueur: comme une bulle d'eau, à peine née, elle
crève. Ainsi ce qui est gloutonnerie chez les porcs devient chez nous cupidité
et la hauteur du cheval devient de l'orgueil. Tous les instincts qui venaient
chacun de la nature irrationnelle de la bête, chez nous sont transformés en
vices par le mauvais usage de l'esprit.
Domination de ces
mouvements
À l'inverse, si le raisonnement
impose sa domination à ces mouvements, il donne à chacun d'eux la forme de la
vertu
. La colère
devient de la force, la timidité de la prudence, la crainte de la facilité à se
soumettre; la haine devient le détournement du vice, la force de l'amour donne
le désir de la vraie beauté. Un tempérament hautain se met au-dessus de ses
passions et garde son âme de la servitude du mal. Le grand Apôtre loue cette
sorte de redressement de l'âme, quand il nous invite sans cesse à avoir des
pensées élevées
. Ainsi l'on
comprend sans mal que tous ces mouvements, dirigés en haut par l'activité
supérieure de l'esprit, deviennent conformes à la beauté de l'image divine.
Image obscurcie
Mais comme l'inclination produite
en nous par le péché nous alourdit et nous porte vers le bas, la plupart du
temps, c'est le contraire qui a lieu. La partie supérieure de l'âme est bien
plus tirée vers le bas par la lourdeur de la nature irrationnelle qu'elle
n'aspire vers les hauteurs notre lourdeur matérielle. Aussi fréquemment notre
misère fait méconnaître le don divin et, comme un masque hideux, les mouvements
de la chair recouvrent les beautés de l'image. C'est l'excuse de ceux qui,
s'attachant à ces constatations, font difficulté d'admettre qu'il y ait en nous
la forme divine.
Les âmes d'élite
Mais grâce à ceux dont la vie s'est
redressée, on peut encore voir parmi les hommes l'image divine. Si en effet une
vie toute aux passions et à la chair nous dissuade d'admettre en l'homme la
parure de la beauté de Dieu, la vie de celui qui par la vertu s'est élevé loin
des souillures consolidera en nous une meilleure idée de l'homme. Il est plus
simple de prendre un exemple: la souillure du péché a effacé la beauté de leur
nature en certains hommes dont les fautes sont connues, comme Jéchonias ou
quelque autre célèbre par ses vices. Mais si vous regardez Moïse ou ceux qui lui
ont ressemblé, ils ont gardé dans sa pureté la forme de l'image. Et la vue de
ceux en qui l'image n'a pas été obscurcie confirme notre foi en la création de
l'homme comme image de Dieu.
Espoir de délivrance
Malgré tout, quelqu'un rougit
peut-être de la nécessité où nous sommes de manger comme les animaux pour
entretenir notre vie et il en conclut qu'il est indigne de croire l'homme à
l'image de Dieu. Eh bien! qu'il espère que cette charge sera un jour enlevée à
la nature dans la vie que nous attendons: « Le royaume de Dieu, comme dit
l'Apôtre, n'est pas manger et boire »
et le
Seigneur a affirmé que l'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute
parole sortant de la bouche de Dieu
. La
résurrection fera paraître en nous une vie semblable à celle des anges. Or pour
les anges, il n'est pas question de manger. Nous avons donc tout ce qu'il faut
pour croire qu'un jour l'homme sera débarrassé de cette charge, lui qui vivra
comme les anges.
CHAPITRE XIX
CONTRE CEUX QUI FONT DE LA
NOURRITURE ET DE LA BOISSON LES BIENS DONT NOUS ESPÉRONS LA JOUISSANCE,
SOUS PRÉTEXTE QUE L'ÉCRITURE FAIT CONSISTER EN EUX LA VIE ORIGINELLE DANS LE
PARADIS
Ce ne sera pas, dit-on peut-être,
au même genre de vie qu'à l'origine que l'homme reviendra alors, si précisément
dans le premier état nous étions dans la nécessité de manger, tandis qu'après la
résurrection nous serons délivrés de cette charge. Pour ma part, quand je lis
l'Écriture
, je ne puis
admettre qu'il s'agisse de nourriture corporelle pas plus que de jouissance
charnelle, mais d'un plaisir tout autre, présentant bien une analogie avec le
plaisir du corps, mais dont la jouissance s'adresse à l'âme seule. « Mangez des
pains qui m'appartiennent », ordonne la Sagesse à ceux qui ont faim; et le
Seigneur béatifie ceux qui ont faim de cette nourriture, à savoir: « Si
quelqu'un a soif, dit-il, qu'il vienne à moi et qu'il boive »
. Et le grand
Isaïe: «Buvez à la joie », ordonne-t-il à ceux qui sont capables de comprendre
la sublimité de sa doctrine. On trouve aussi contre les coupables cette menace
prophétique, qu'ils seront punis par la faim
. La faim
n'est pas ici une disette de pain et d'eau, mais le manque de Parole; car
l'Écriture ne veut parler ni du pain ni de l'eau, mais de la faim d'entendre les
paroles du Seigneur.
Quand donc on parle de la
plantation de Dieu dans l'Eden (Eden signifie « jouissance »), il faut penser à
un fruit en rapport avec elle et ne pas hésiter à en faire la nourriture de
l'homme, sans songer pour cette vie du paradis à notre nourriture passagère et
fuyante: « Vous mangerez, dit Dieu, de tout arbre qui est dans le Paradis »
. Qui donnera
à celui qui a la véritable faim cet arbre-là, celui qui est dans le paradis, cet
arbre qui renferme tout bien, qui est désigné par ce mot « tout », et dont
l'Écriture accorde à l'homme la participation? En ce mot qui désigne un ensemble
et s'élève au-dessus de tout, est contenu naturellement l'idée de tout bien et
par un seul arbre est signifié le tout. Qui m'écartera au contraire de goûter à
cet arbre mélangé et participant de deux genres? Ceux qui y regardent de près
voient clairement quel est ce « tout », dont le fruit est la vie et aussi quel
est cet arbre au fruit mélangé, dont le terme est la mort? Celui, en effet, qui
remet sans réserve à l'homme la jouissance du tout, le détourne absolument par
ses paroles et ses conseils de toucher à ces biens « mélangés »
. Pour
interpréter cette parole, les meilleurs maîtres me semblent être le grand David
et le sage Salomon. Tous les deux pensent que le bienfait unique de la
jouissance qui nous est accordée, c'est le vrai Bien lui-même, qui est
précisément « tout bien ». David dit: « Jouissez du Seigneur »
et Salomon
nomme « arbre de vie cette Sagesse même » qui est le Seigneur
.
Donc l'expression « tout arbre »
désigne la même chose que l'arbre de vie, celui dont l'Écriture fait don pour sa
nourriture à celui qui a été façonné selon Dieu. Un autre arbre est entièrement
distingué de celui-là: c'est celui dont la manducation met en nous la
connaissance du bien et du mal: non que de sa nature, il produise en partie l'un
et l'autre de ces opposés, mais il fait fleurir un fruit tout mélangé, composé
des qualités contraires. Le maître de la vie nous empêche d'en manger; le
serpent nous le conseille, afin de donner ainsi une entrée à la mort. Et son
conseil est persuasif, car il entoure le fruit de belles couleurs et de charme,
afin qu'il paraisse agréable et qu'il excite en nous le désir d'en goûter.
CHAPITRE XX
LA VIE DANS LE PARADIS ET L'ARBRE
DÉFENDU
L'origine du mal.
Définition de mots
Quel est cet arbre, plein de
plaisir pour les sens, qui enferme la connaissance mélangée du bien et du mal?
Je pense ne pas m'éloigner de la vérité, en partant, sur cette question, d'un
point évident. A mon avis, à cet endroit de l'Écriture, « connaissance »
n'équivaut pas à «science » et, d'après l'usage scripturaire, je trouve une
différence entre « connaissance » et « discernement ». L'apôtre dit bien, en
effet, qu'un homme aux dispositions d'esprit parfaites et aux sens purifiés peut
« discerner » le bien du mal
. Aussi il
donne ce conseil de « juger de tout », car, dit-il, le discernement appartient à
l'homme spirituel
. Le mot
« connaissance », lui, ne paraît pas désigner partout la science et le pur
savoir, mais plutôt une disposition intérieure vis-à-vis de ce qui nous est
agréable. Ainsi « le Seigneur a, connu ceux qui lui appartiennent »
. Et il dit à
Moïse: «Je t'ai connu de préférence aux autres »
. Aux damnés,
celui qui sait tout dit ces mots: « Jamais je ne vous ai connus »
.
Nature du mal: un mélange
Donc l'arbre qui produit cette
connaissance mélangée est parmi les choses interdites. Un mélange d'éléments
opposés compose ce fruit, dont le serpent est le défenseur. Peut-être la raison
en est-elle que le mal ne se présente jamais dans sa nudité, tel qu'il est
réellement. Le vice serait sans efficacité, s'il ne se colorait de quelque
beauté excitant le désir chez celui qui se laisse tromper. En tout cas, à nous,
le mal se présente toujours sous forme de mélange: dans ses profondeurs, il
tient la mort comme un piège caché; mais par une apparence trompeuse, il fait
paraître une image du bien: la belle couleur de l'argent semble un bien pour les
avares, ce qui n'empêche pas l'avarice d'être la racine de tous les maux.
Glisserait-on vers le bourbier infect de la licence, si le plaisir n'était un
bien désirable pour celui qui par cet appât se laisse entraîner vers les
passions?
Ainsi des
autres fautes: leur action corruptrice est cachée. Dès l'abord elles semblent
désirables et sont recherchées comme un bien à la suite d'une tromperie par ceux
qui n'y regardent pas de près.
Puis donc que la plupart mettent le
bien dans ce qui charme les sens et qu'un même mot désigne le bien réel et le
bien apparent, le désir qui se porte vers le mal comme si c'était un bien, est
appelé par l'Écriture la « connaissance du bien et du mal », ce mot de
connaissance voulant exprimer cette disposition intérieure et ce mélange.
Ni mal absolu, ni bien
absolu
Ni un mal absolu, puisque la bonté
fleurit tout autour, ni un bien sans mélange, puisque le mal s'y cache, mais un
mélange des deux, tel est le fruit de l'arbre défendu, selon l'Écriture qui n'a
d'autre but que de répéter cette vérité que le bien réel est par nature sans
composition, que sa forme est simple et qu'il est étranger à toute duplicité et
à toute union avec son contraire, tandis que le mal est bigarré et se présente
de telle sorte qu'on le tient pour une chose et qu'à l'expérience il se révèle
tout autre: sa connaissance, c'est-à-dire la prise de contact avec lui dans
l'expérience, est le commencement et le fondement de la mort et de la
corruption.
La tentation
C'est pourquoi le Serpent met en
avant le fruit mauvais du péché, mais sans mettre au grand jour le mal tel qu'il
est par nature: l'homme ne serait pas trompé par le mal, s'il éclatait à ses
yeux; mais le démon, faisant briller la grâce extérieure des apparences et,
comme un charlatan, charmant notre goût par quelque plaisir des sens, apparaît à
la femme digne de confiance, ainsi que dit l'Écriture: « Et la femme vit que le
fruit était bon à manger et agréable à voir et agréable à contempler. Ayant pris
du fruit, elle en mangea »
. Cette
nourriture est pour les hommes la mère de la mort. Et cela est précisément le
mélange des fruits que porte l'arbre, l'Écriture voulant indiquer clairement le
sens selon lequel elle déclare ce bois capable de faire connaître le bien et le
mal: il a la malice de ces poisons qui sont préparés avec du miel: selon qu'ils
flattent le sens, ils paraissent bons; selon qu'ils font périr celui qui les
prend, ils sont le dernier des maux.
Ses suites
Lors donc que ce poison funeste eut
produit ses effets sur la vie humaine, alors l'homme, dont la création et le
nom sont pleins de grandeur, cette image de la nature divine, devint semblable,
comme dit le Prophète
, aux
créatures frivoles. Et ainsi l'image ne réside plus que dans les parties les
plus sublimes de notre être; les tristesses et les misères de la vie présente
n'ont rien à voir avec notre ressemblance divine.
CHAPITRE XXI
L'ESPÉRANCE DE LA RÉSURRECTION SE
FONDE PLUS ENCORE SUR LA NÉCESSITÉ DE L'ORDRE DES CHOSES
QUE SUR LES PAROLES DE L'ÉCRITURE
Le terme du mal
Le vice n'est pas si fort qu'il
puisse avoir le dessus sur la puissance du bien et l'inconstance de notre nature
ne saurait avoir plus de force ou de stabilité que la sagesse de Dieu. Car
l'être toujours mobile et changeant ne peut l'emporter en fixité sur celui qui,
établi dans le bien, est toujours identique à lui-même. Tandis que le vouloir
divin, partout et toujours, reste immuable, notre nature mobile ne s'arrête pas,
même dans le mal.
Si c'est vers le bien que le
mouvement perpétuel entraîne un être, jamais, à cause de l'infini de son objet,
ce mouvement ne cessera de l'emporter plus avant, car jamais il n'atteindra la
limite de celui qu'il cherche et dont la saisie lui permettrait un arrêt
. Mais
s'il tend au terme opposé, lorsqu'il a accompli la course du vice et qu'il est
parvenu à son sommet, alors l'élan qui l'emporte ne trouvant nulle part où
s'arrêter, à la fin de tout ce parcours dans le vice, nécessairement tourne vers
le bien. Car le vice ne peut aller jusqu'à l'illimité, mais contenu
nécessairement dans des bornes, selon toute logique, à la limite, il passe au
bien.
Le retour nécessaire au
bien
Ainsi, comme j'ai dit, notre
nature, dans son mouvement perpétuel, repart sur le chemin du bien, car le
souvenir des erreurs passées lui a appris à ne plus se laisser prendre aux mêmes
fautes. Et notre course reprendra dans le bien, parce que la nature du mal doit
être enclose dans des limites.
Selon les astronomes, en ce monde
tout rempli de lumière, l'ombre est formée par l'interposition du corps de la
terre. Mais l'ombre, d'après la forme sphérique de celle-ci, est enfermée sur la
partie arrière par les rayons du soleil et prend la forme d'un cône. Le soleil,
lui, plusieurs fois plus grand que la terre, l'encercle de toutes parts de ses
rayons et, à la limite du cône, réunit entre eux les points d'attache de la
lumière. Supposons maintenant que l'on puisse franchir la limite de la zone
obscure; l'on se trouvera dans une lumière jamais interrompue par les ténèbres
. De la même
façon, lorsque ayant franchi la limite du vice, nous serons parvenus au sommet
de l'ombre formée par le péché, de nouveau nous établirons notre vie dans la
lumière, car la nature du bien comparée à l'étendue du vice déborde infiniment
toutes limites. De nouveau, nous connaîtrons le paradis, de nouveau nous
connaîtrons cet arbre, qui est l'arbre de vie. De nouveau, la beauté de l'image
et notre première dignité
. Ici
je n'entends parler d'aucun de ces biens, dont Dieu a fait aux hommes un besoin
pour leur vie, mais de l'espérance d'un autre royaume, dont la description
demeure impossible.
CHAPITRE XXII
CONTRE CEUX QUI DEMANDENT POURQUOI,
SI LA RÉSURRECTION EST UN TRÉS GRAND BIEN, ELLE N'A PAS LIEU DÈS MAINTENANT,
MAIS N'EST ESPÉRÉE QU'APRÉS LA RÉVOLUTION DU TEMPS
Longueur de l'attente
Attachons-nous à suivre notre
étude. Quelqu'un à qui la douceur de notre espérance a peut-être donné des ailes
trouvera dur et pénible de ne pas obtenir plus tôt ces biens dépassant tout
sentiment et toute connaissance humaine et ce laps de temps qui nous sépare de
l'objet de nos désirs lui sera intolérable. N'allons pas, comme des enfants,
resserrer nos cœurs et nous fâcher de ce court délai apporté à la réalisation de
notre joie
. Puisque
l'intelligence et la sagesse règlent tout, il faut bien penser qu'aucun
événement particulier ne leur échappe.
Vous me demanderez la raison pour
laquelle cette existence douloureuse ne se change pas tout de suite en celle que
nous désirons, mais pourquoi elle se prolonge dans la lourdeur charnelle jusqu'à
des temps fixés et attend le terme de l'accomplissement universel, pour délivrer
l'humanité du mors qu'elle porte et la faire enfin passer dans la liberté
absolue de la vie bienheureuse et impassible. La vérité seule pourrait dire si
la raison que nous invoquons lui est conforme. En tout cas, voici ce qui nous
est venu à l'esprit.
Rappel de la double
création: L'image. Adam
Je reprends ce que j'ai dit au
début: « Faisons l'homme, dit Dieu, à notre image et ressemblance. Et Dieu fit
l'homme; à l'image de Dieu, Il le fit. » Cette image de Dieu, qui réside en la
nature humaine prise dans son ensemble, a atteint sa perfection. Adam, à ce
moment, n'existait pas encore. En effet, étymologiquement, d'après ceux qui
savent l'hébreu, Adam signifie « ce qui est formé de terre ». Aussi l'Apôtre,
qui connaît bien sa langue maternelle, appelle l'homme fait de la terre « le
terreux »
, traduisant
en grec le nom d'Adam. Donc l'homme a été fait selon l'image, c'est-à-dire la
nature du tout, la créature semblable à Dieu. La toute-puissance de sa sagesse
n'a pas produit une partie seulement de ce tout, mais en bloc tout le « plérôme
» de notre nature. Il savait bien, lui qui a en ses mains les limites de toutes
choses, selon le mot de l'Écriture: « En sa main, sont les limites de la terre »
, il savait,
lui qui connaît chaque être avant même son apparition, et il tenait dans sa
pensée le nombre exact de tous les individus composant l'humanité.
Mode de procréation de
l'humanité
Comme Dieu vit dans l'ouvrage que
nous étions notre inclination vers le mal et comme il vit que, par notre
déchéance spontanée de la dignité que nous partagions avec les anges, nous
chercherions à nous unir avec ce qui était au-dessous de nous, pour ce motif il
mêla à sa propre image quelque chose de l'irrationnel. Car ce n'est pas à la
nature divine et bienheureuse que peut appartenir la division en mâle et
femelle. Dieu applique à l'homme un caractère du règne animal, refusant à notre
race le mode de propagation en rapport avec la grandeur de notre création. Ce
n'est pas en effet lorsqu'il créa l'homme à son image qu'il y adjoignit le
pouvoir de se développer et de se multiplier, mais lorsqu'il divisa l'homme en
mâle et en femelle. Alors il dit: « Croissez et multipliez-vous et remplissez la
terre »
. Ce genre
d'accroissement n'est pas un caractère de la nature divine, mais de l'animal,
comme le fait entendre le récit qui prête d'abord ces paroles à Dieu quand il
s'agit des animaux. Car si, avant la division en mâle et femelle, il avait
prononcé ces mots pour donner à l'homme le pouvoir de se multiplier, nous
n'aurions pas besoin de ce mode de reproduction qui est celui des animaux.
Création du temps
Alors que la plénitude de
l'humanité avait été préméditée par l' « activité presciente » de Dieu et que
cette plénitude devait se réaliser par ce genre de naissance animale, Dieu dont
le gouvernement ordonne et délimite exactement toutes choses, puisque ce mode
de génération était rendu nécessaire pour nous par ce glissement vers en bas
qu'il avait prévu, lui qui voit le futur comme le présent, Dieu établit à
l'avance le temps nécessaire à la constitution de l'humanité, en sorte que la
venue des âmes dans leur nombre fixe règle la durée et que le courant du temps
s'arrêtera, lorsqu'il ne sera plus utile à la venue de la race humaine
.
La fin des temps
Avec l'achèvement de la génération
humaine, le temps cessera définitivement et alors toutes choses retourneront à
leurs éléments primitifs. Dans ce bouleversement universel, l'humanité aussi
sera transformée et de son état périssable et terrestre, passera dans un état
impassible et éternel. C'est à quoi le divin Apôtre me semble avoir songé,
lorsqu'il prédit dans son Épître aux Corinthiens l'arrêt soudain du temps et le
renouvellement de tout ce qui est soumis au mouvement: « Je vous annonce,
dit-il, un mystère: tous, nous ne nous endormirons pas dans la mort, mais tous
nous serons transformés, dans un instant indivisible, en un clin d’œil, au son
de la dernière trompette »
. A mon sens,
puisque le plérôme de l'humanité est parvenu à son terme selon la mesure prévue,
par le fait que le nombre des âmes n'a plus désormais à s'accroître, l'Apôtre
veut dire qu'un instant suffira à la transformation de la création et il
exprime par cet instant indivisible et ce clin d’œil cette limite du temps qui
n'a ni partie ni extension. Aussi celui qui est parvenu à cet ultime sommet du
temps, après lequel il n'y a plus de division temporelle, ne peut obtenir cette
révolution transformante de la mort que si la trompette de la Résurrection a
d'abord retenti pour réveiller tous les morts et faire passer tous ensemble dans
l'immortalité ceux qui resteront en vie; ceux-ci deviendront semblables aux
autres que la résurrection aura transformés, au point de n'être plus entraînés
vers le bas par le poids de leur chair et de ne plus être retenus à terre par
leur masse, mais de vivre dans les espaces célestes. « Nous serons ravis, en
effet, dit l'Apôtre, dans les nuages, à la rencontre du Seigneur, dans les
airs, et ainsi pour toujours, nous serons avec le Seigneur »
. Supportons
donc le temps qui s'étend nécessairement le long du développement de l'humanité.
L'attente d'Abraham, des
Patriarches, de David
Tous les patriarches qui entourent
Abraham eurent le désir de voir la béatitude et ils ne cessèrent d'espérer la
patrie céleste, comme dit l'Apôtre. Cependant ils demeurent encore dans l'espoir
de ce bienfait, tandis que Dieu dispose les choses pour notre bien, selon la
parole de l'Apôtre, afin, dit-il, qu'ils ne parviennent pas au terme sans nous.
Si donc ceux qui viennent de loin supportent ce délai, si la seule vue de ces
biens par la foi et l'espérance n'a pas empêché leur amour, selon l'Apôtre, et
s'ils se reposent dans la certitude de la jouissance future sur la foi de la
promesse, que doivent faire beaucoup d'entre nous, dont la vie ne manifeste
guère l'espoir de ces biens supérieurs? L'âme du prophète défaillait de désir et
il avoue dans les Psaumes l'amour dont il est possédé, disant qu'il ne se tient
plus d'être dans la maison du Seigneur, même si on doit le mettre à la dernière
place. Car il préfère sans comparaison y être le dernier, plutôt que d'être le
premier sous les tentes de ceux qui passent leur vie dans le péché. Pourtant il
supportait ce délai, alors qu'il n'avait de bonheur que dans l'au-delà et aimait
mieux quelques instants avec Dieu que mille années sur terre. « Un seul jour
dans vos demeures vaut mieux que mille ans »
, dit-il. Il
ne trouvait pas mauvais le gouvernement nécessaire du monde et il lui paraissait
suffisant au bonheur de l'humanité de ne l'avoir vu qu'en espérance. C'est
pourquoi, à la fin de son Psaume, il dit: « Seigneur, Dieu des puissances,
bienheureux l'homme qui espère en toi ». Nous non plus, nous ne devons pas
resserrer nos cœurs, si la réalisation de nos espérances tarde un peu; nous
devons plutôt mettre tous nos soins à ne pas en être exclus.
Attente de la moisson
Qu'on prédise à un ignorant qu'à
l'été la moisson viendra, que les greniers seront pleins et qu'en ce temps
d'abondance, les tables seront chargées de mets, vous traiteriez de fou celui
qui aurait hâte d'avoir devant lui la moisson, quand il faut d'abord semer et
donner de sa peine, si l'on veut voir les fruits. Alors, que vous le vouliez ou
non, la moisson viendra au temps fixé. Mais ils ne la verront pas du même œil,
celui qui par ses soins aura préparé pour lui la récolte et celui qui devant la
moisson sera resté sans la préparer. De la même façon, je pense, alors que tous,
nous savons par les oracles divins que le temps viendra de la transformation,
nous n'avons pas à nous soucier du moment (le Christ a bien dit que ce n'était
pas à nous de savoir les circonstances et l'époque) et à échafauder des
raisonnements qui ne feront que gâter notre espérance de la Résurrection
. Mais
appuyés solidement sur la foi de ce que nous attendons, il faut nous assurer à
l'avance le bienfait à venir par l'excellence de notre vie.
CHAPITRE XXIII
SI L'UNIVERS A EU UN
COMMENCEMENT, IL FAUT NÉCESSAIREMENT LUI RECONNAÎTRE UN TERME
Lien nécessaire entre les
théories sur le commencement du monde et celles sur sa fin
Si quelqu'un, considérant le
déroulement régulier de l'univers, par lequel il se fait une idée de
l'espacement temporel, avoue ne pas admettre cet arrêt de tout mouvement prédit
dans l'Écriture, cet homme-là évidemment ne croit pas davantage qu'à l'origine
Dieu ait donné l'existence au ciel et à la terre. Celui qui reconnaît une
origine au mouvement n'a pas un doute sur son terme et celui qui ne lui
reconnaît pas un terme n'en admet pas non plus le commencement. Nous, de même
que nous pensons que l'agencement harmonieux des siècles est l'œuvre de la
parole divine, croyant, comme dit l'Apôtre, que le visible vient de l'invisible,
nous portons la même foi en la parole de Dieu, qui nous prédit l'arrêt
nécessaire des choses.
Soumission à la foi
La question du « comment », il faut
la rejeter de notre curiosité: sur ce point encore, nous recevons avec foi que
le monde visible a son harmonie définitive dans un monde qui n'est pas encore
manifesté et nous laissons de côté la recherche de ce qui est hors de nos
prises.
Examen nécessaire
Sur plus d'un point, pourtant, nous
pouvons être dans l'embarras et y trouver occasion de doutes sérieux sur notre
foi. Des esprits habitués à la controverse peuvent se permettre par des
arguments vraisemblables et logiques de mettre notre foi sens dessus dessous, en
ne tenant pas pour vraie la doctrine de l'Écriture sur la création matérielle,
qui enseigne avec force l'origine de toutes choses en Dieu.
Arguments de ceux qui
tiennent l'éternité de la matière
Ceux qui tiennent la doctrine
contraire, en effet, s'efforcent d'établir que la matière est coéternelle à
Dieu et pour fonder cette façon de penser, ils usent des arguments suivants
: d'un côté,
la nature de Dieu est simple, sans matière, sans qualité, grandeur ou
composition; elle ne connaît aucune délimitation extérieure. De l'autre, toute
matière se définit par son extension dans l'espace et est soumise à la
perception sensible, puisqu'elle se fait connaître à nous par la couleur, la
forme extérieure, le poids, la quantité, la résistance et toutes les autres
qualités dont on ne peut absolument pas admettre l'existence dans la nature
divine. Or comment imaginer que la matière vienne d'un être immatériel? que ce
qui a des dimensions vienne de ce qui n'en a pas? Si l'on croit que la matière
tire de Dieu son origine, il faut admettre que d'une façon inexplicable elle est
en Dieu, d'où elle viendrait ainsi à l'existence. Mais si la matière est en
Dieu, comment celui qui la contient est-il immatériel? Il faut en dire autant de
toutes les autres caractéristiques de la nature matérielle: si la quantité est
en Dieu, comment Dieu est-il sans elle? S'il contient en lui l'être composé,
comment est-il simple, sans parties ni composition? Aussi on doit conclure: ou
Dieu est nécessairement matériel, puisque la matière tire de lui son origine,
ou, si on veut éviter cette conséquence, il faut supposer qu'il prend hors de
lui la matière dont il a besoin pour la formation de l'univers. En conséquence,
si la matière était hors de Dieu, il faudrait absolument admettre un principe
différent de lui, qui lui soit coéternel et n'ait pas d'origine. On en vient à
poser la coexistence de deux principes sans commencement ni origine, celui dont
l'art réalise le monde et celui sur lequel il s'applique. Une telle théorie qui
admet comme une nécessité la coexistence éternelle de Dieu et de la matière est
une approbation donnée aux idées des Manichéens qui mettent sur le même plan,
comme incréées l'une et l'autre, la cause matérielle et la nature du bien
.
Notre foi en la
Résurrection fondée sur la foi dans le commencement des choses
Nous, nous croyons que tout vient
de Dieu, sur l'affirmation de l'Écriture. Quant à dire comment tout était en
Dieu, nous estimons ne pas devoir nous y arrêter, comme à un point dépassant
notre raison. Nous croyons que tout est possible à la puissance divine: d'amener
à l'existence ce qui n'est pas, comme de donner à ce qui existe les qualités qui
lui conviennent.
La conclusion logique est donc: si
pour tirer les choses du néant à l'être, la puissance du vouloir divin suffit,
de la même façon lorsque nous ferons appel à cette même puissance pour cette
restauration universelle des choses, nous n'admettrons rien qui sorte de la
vraisemblance. Cependant je crois possible de persuader par quelques raisons
ceux qui nous font de subtiles difficultés sur la matière; ainsi nous ne
paraîtrons pas, par manque d'arguments, passer à côté de la discussion.
CHAPITRE XXIV
RÉFUTATION DE CEUX QUI TIENNENT LA
COEXISTENCE ÉTERNELLE DE DIEU ET DE LA MATIÈRE
Nous n'avons pas à classer parmi
les opinions indémontrables notre opinion sur la matière, qui fait dépendre
l'existence de celle-ci de l'Être purement spirituel et sans matière. Nous
découvrirons en effet que la matière n'est faite tout entière que d'un ensemble
de qualités dont nous ne pouvons la dépouiller une à une sans la rendre
absolument incompréhensible à la raison. Par ailleurs chaque espèce de qualité
peut être mentalement isolée du sujet où elle se trouve. Or la raison est un
mode de connaissance spirituel, qui n'a rien de corporel. Ainsi prenez un
vivant, du bois, ou quelque autre objet ayant une organisation matérielle;
souvent nous considérons par abstraction, à part du sujet où elles sont, des
qualités dont l'idée que nous nous en faisons se distingue nettement d'une autre
considérée en même temps. Ainsi l'idée que nous avons de la couleur diffère de
celle de poids, de quantité et de toucher. La malléabilité d'un corps, sa double
épaisseur, ses autres qualités ne se confondent, dans notre idée, ni entre elles
ni avec le corps en question. Pour chacune d'elles, nous trouvons une définition
propre qui la signifie et qui ne la confond pas avec quelqu'une des autres
qualités considérées en ce corps. Si donc la couleur est un « objet de pensée »
et de même la résistance, la quantité et toutes les autres propriétés des corps,
et si en même temps, lorsque l'on enlève au corps considéré chacune de ces
qualités, on fait disparaître par le fait toute l'idée que nous en avons, il
serait logique de supposer que la rencontre de ces qualités dont l'absence se
trouve être cause de la disparition du corps, donne naissance aux êtres
matériels. Comme il n'y a pas de corps, sans qu'il n'y ait en même temps
couleur, forme extérieure, résistance, étendue, pesanteur et toutes les autres
particularités, — attributs qui, pris à part, ne sont pas un corps, mais se sont
révélés quelque chose d'autre, — ainsi à l'inverse, leur rencontre donne
l'existence aux corps. Mais si la compréhension de chacune de ces propriétés est
un « acte d'intelligence » et si la Divinité est aussi par nature une «
substance intelligible », il n'y a rien d'invraisemblable à ce que ces qualités
soient des principes purement spirituels venant d'une nature incorporelle pour
la production des corps: la nature spirituelle donne l'existence à des forces
spirituelles et la rencontre de celles-ci donne naissance à la matière
.
Mais ces considérations sont hors
de notre sujet. Il nous faut revenir à la foi: d'elle nous recevons que
l’univers tire son origine à partir du non-être et grâce à elle, quand
l’Écriture nous apprend qu’il sera à nouveau établi dans un nouvel état, nous
l’admettons sans hésiter.
CHAPITRE XXV
COMMENT UN INCROYANT PEUT ÊTRE
AMENÉ À CROIRE CE QU'ENSEIGNE L'ÉCRITURE SUR LA RÉSURRECTION
L'Évangile fonde la foi
en la Résurrection
Quelqu'un voyant la corruption des
corps et jaugeant la Divinité à la mesure de ses forces soutient peut-être
l'impossibilité de notre enseignement sur la Résurrection, sous prétexte qu'il
ne peut admettre l'arrêt des êtres soumis au mouvement et le retour à la vie
d'êtres qui ne se meuvent plus. Cet adversaire trouvera d'abord une excellente
preuve de la vérité de la Résurrection, en examinant combien est digne de foi
l'annonce qui en est faite: en particulier, il fondera son assentiment sur la
réalisation actuelle de prophéties faites dans le passé. En effet, dans le
nombre et la diversité des récits de la Sainte Écriture, il est possible de se
demander si l'ensemble des prédictions qui s'y trouvent tient du mensonge ou de
la vérité et de se faire par là une idée sur la doctrine de la Résurrection. Si
ailleurs les paroles sont mensongères et s'écartent avec évidence de la vérité,
la prophétie sur la Résurrection, elle aussi, sera fausse. Si, au contraire, les
faits confirment la vérité de tout le reste, il serait logique d'en conclure à
l'exactitude des prophéties sur la Résurrection. Rappelons donc une ou deux de
ces prédictions et confrontons l'événement avec elles, afin de connaître par là
la vérité de la Parole divine.
Le but cherché par le
Christ en ses prédictions
Tout le monde connaît l'ancienne
prospérité du peuple d'Israël, qui égalait toutes les puissances de la terre. On
se rappelle les palais de Jérusalem, ses remparts, ses tours, la grandeur du
temple. Devant ces merveilles, les disciples sont remplis d'étonnement et ils
croient devoir attirer sur elles le regard du Seigneur, tellement leur
admiration est grande. Ils adressent au Christ ces mots que rapporte l'Évangile:
« Quelles grandes œuvres! quelles constructions! »
Mais lui,
leur fait entrevoir le désert qui sera en cet endroit et la disparition de ces
beautés, tandis qu'ils sont tout à l'admiration du présent; il leur dit que dans
peu il ne subsistera rien de ce qu'ils voient.
Puis, au moment de sa Passion, aux
femmes qui l'accompagnent en gémissant sur son injuste condamnation, sans
regarder au vrai sens des événements, le Christ donne le conseil de se taire sur
ses malheurs, qui ne méritent pas de larmes, et de conserver leurs gémissements
et leurs lamentations pour le vrai jour des pleurs, lorsque la ville sera cernée
par le siège et que les malheurs se presseront tellement sur elle que l'on
enviera celle qui n'a pas enfanté
. Il prédit
le crime de ces mères qui mangeront leurs enfants, tandis qu'il proclame heureux
le sein qui ces jours-là restera stérile.
Où sont maintenant ces palais? où
est le temple? où sont ses murailles? où sont les défenses des tours? où est la
puissance des Israélites? N'ont-ils pas été dispersés presque par toute la terre
et la ruine de leurs palais n'a-t-elle pas accompagné leur chute?
Le Seigneur, à mon avis, n'a pas
fait ces prédictions en vue des faits eux-mêmes: quel avantage y avait-il pour
les auditeurs à apprendre à l'avance des événements certains? Ils les
connaîtraient par expérience, même s'ils n'en savaient rien auparavant. Le
Christ cherchait à les amener logiquement à la foi en des événements plus
importants. La preuve d'expérience donnée par les premiers serait la preuve de
la vérité des seconds
.
Pédagogie du Christ:
gradation dans les miracles
Si un agriculteur explique la
puissance cachée dans une semence et si l'homme à qui il parle, ignorant
l'agriculture, ne le croit pas sur parole, il suffit au paysan, pour prouver ce
qu'il dit, de montrer dans une seule semence ce qu'il y a dans toutes celles
d'un « médimne » et par elle de se porter garant de tout le reste. Quand on a vu
un seul grain de blé ou d'orge ou toute autre graine contenue dans un « médimne
» devenir un épi après son ensemencement en terre, on ne peut pas plus douter de
l'ensemble que d'un seul. Aussi, à mon avis, le mystère de la Résurrection est
suffisamment, prouvé, si les autres prédictions sont reconnues justes. Bien
plus, nous avons l'expérience de la Résurrection et nous en sommes instruits,
non pas tant par des discours, que par les faits eux-mêmes. Étant donné que la
Résurrection constitue une merveille incroyable, le Christ commence par des
miracles moins extraordinaires et habitue doucement notre foi à de plus grands.
Une mère qui adapte la nourriture à son enfant, allaite de son sein au début la
bouche encore tendre et humide; puis, quand poussent les dents et que l'enfant
grandit, elle ne commence pas à lui offrir un pain dur et impossible à digérer,
qui par sa rudesse blesserait des gencives molles et sans exercice, mais avec
ses propres dents elle mâche le pain, pour le mesurer et l'adapter à la force de
celui à qui elle le donne; enfin, quand le permet le développement des forces de
l'enfant, elle le conduit doucement de nourritures plus tendres à une nourriture
plus solide. Ainsi le Seigneur, vis-à-vis de la faiblesse de l'esprit humain:
nous nourrissant et nous allaitant par des miracles comme un enfant encore
imparfait, il donne d'abord une idée de la puissance qu'il a pour nous
ressusciter par la guérison d'un mal incurable: cette action est grande, mais
pas telle que nous ne puissions y croire.
La belle-mère de Simon
Il commande à la forte fièvre qui
brûlait la belle-mère de Simon
, et le mal
disparaît, si bien que celle dont on attendait la mort a la force de servir à
manger à ceux qui étaient présents
.
Le fils de l'officier de
Capharnaüm
Ensuite il manifeste un peu plus sa
puissance, en rendant à la vie le fils de l'officier royal qui, de l'avis de
tous, était en danger et que l'on s'attendait à voir mourir (il était en effet
sur le point de mourir, dit l'Évangile, et le père criait: « Descends avant que
ne meure mon enfant »
. Il montre
un peu plus sa puissance par le fait qu'il ne s'est pas même approché de
l'endroit où était le malade, mais que de loin il lui a rendu la vie par la
force de son commandement.
Le fils du chef de la
Synagogue
De nouveau il s'élève régulièrement
à des miracles plus grands. S'étant mis en route pour aller vers l'enfant du
chef de la Synagogue
, il
s'attarde volontairement en chemin à rendre publique la guérison cachée de
l'hémorroïsse, comme pour laisser le temps à la mort d'emporter le malade. Or
l'âme était depuis peu séparée du corps et les pleureuses se pressaient là avec
des cris funèbres et des lamentations: lui, d'un mot, comme s'il s'agissait du
sommeil, fait lever l'enfant et le rend à la vie. Ainsi il conduit d'une marche
régulière la faiblesse humaine vers des œuvres plus grandes.
Le fils de la veuve de
Naïm
Puis il s'élève encore dans ses
miracles et, par une puissance plus grande, il met les hommes sur la route de la
foi en la Résurrection. L'Écriture
parle de
Naïm, ville de Judée. En cette ville, était le fils unique d'une veuve; il
n'était plus un enfant, encore au rang des adolescents: il atteignait l'âge
d'homme. L'Écriture l'appelle un « jeune homme ». Le récit dit beaucoup en
quelques lignes: c'est un vrai chant de deuil. La mère du mort, dit-il, était
veuve. Vous voyez la profondeur du malheur et combien en peu de mots l'Écriture
rend tout le tragique du mal. Que dit-elle en effet? que la mère n'avait même
plus l'espoir d'avoir d'autres enfants pour se guérir de la perte de celui-là:
« Cette femme était veuve. » Elle ne pouvait porter ses yeux sur un autre enfant
qui remplacerait le disparu: « Ce fils était unique. » La grandeur de ce
malheur, tous ceux qui ne sont pas étrangers à la nature la comprendront sans
peine: elle n'avait connu que lui dans ses entrailles, elle n'avait allaité que
lui à son sein; lui seul était la gaieté de sa table; lui seul illuminait de
joie la maison, quand elle le voyait jouer, travailler, faire de la gymnastique,
vivre joyeux, s'en aller en public, dans les palestres ou dans les assemblées de
jeunes; lui seul était tout ce qu'il y a de doux et de précieux aux yeux d'une
mère. Il était en âge de se marier et était l'unique rejeton de sa famille, le
rameau de sa succession et le bâton de sa vieillesse. La mention de l'âge, en
particulier, est encore un chant de deuil: l'Écriture, le désignant comme un «
jeune homme », exprime la fleur de l'âge qui s'est consumée, le duvet encore
tendre, la barbe qui pousse à peine et les joues encore brillantes de beauté.
Que devait donc éprouver la mère? Ses entrailles brûlaient comme un feu. Quelle
amertume devait avoir son chant de deuil, tandis qu'elle entourait le cadavre
dans ses bras! Comme elle devait retarder pour le mort les soins funèbres et se
remplir du malheur par des gémissements incessants. Alors l'Évangile n'omet pas
non plus ce trait: « La voyant, Jésus fut remué profondément. S'avançant, il
toucha le cercueil et les porteurs s'arrêtèrent. Puis il dit au mort: « Jeune
homme, je te le dis, lève-toi. Et il le rendit vivant à sa mère. » Bien qu'il ne
fût pas encore déposé dans le tombeau, le jeune homme était mort depuis assez
longtemps. L'ordre du Seigneur est le même que précédemment, mais le miracle est
plus grand.
Lazare
Le Christ s'en va maintenant
accomplir un miracle plus sublime, afin que les œuvres visibles nous fassent
approcher du miracle incroyable de la Résurrection. Un des amis et familiers du
Seigneur était malade: il s'appelait Lazare. Le Seigneur, qui se trouvait loin
de lui, refuse de visiter son ami, afin de donner à la mort en l'absence de la
Vie occasion et puissance de faire son œuvre par la maladie. Le Seigneur en
Galilée signifie à ses disciples l'état de Lazare; il leur dit en particulier
qu'il va partir pour aller le voir et faire lever celui qui est couché. Ceux-ci,
peu assurés devant la brutalité des Juifs, trouvent pleine de difficultés et de
risques la présence de Jésus en Judée au milieu de ceux qui veulent Le tuer.
Aussi ils tardent et remettent toujours. Enfin, avec le temps, ils quittent la
Galilée: le Seigneur les dominait par sa puissance et les conduisait. Il devait
les initier à Béthanie aux préfigurations de la Résurrection universelle.
Quatre jours s'étaient écoulés
depuis l'événement; les rites habituels avaient été accomplis pour le mort et le
corps était déposé dans le tombeau. Sans doute le cadavre se gonflait déjà; il
commençait à se corrompre et à se dissoudre dans les profondeurs de la terre,
selon les lois normales. C'était un objet à fuir, lorsque la nature se vit
contrainte de rendre de nouveau à la vie ce qui déjà se dissolvait et était
d'une odeur repoussante. Alors l'œuvre de la résurrection universelle est amenée
à l'évidence par une merveille que tous peuvent constater. Il ne s'agit pas ici
d'un homme qui se relève d'une maladie grave ou qui, près du dernier soupir, est
ramené à la vie; il ne s'agit pas de faire revivre un enfant qui vient de mourir
ou de délivrer du cercueil un jeune homme que l'on portait en terre. Il s'agit
d'un homme âgé qui est mort et dont le cadavre, déjà flétri et gonflé, tombe en
dissolution au point que ses proches ne supportent pas de faire approcher le
Seigneur du tombeau, à cause de la mauvaise odeur du corps qui y est déposé. Or
cet homme, par une seule parole, est rendu à la vie et ainsi est fondée
l'assurance de la Résurrection: ce que nous attendons pour le tout, nous l'avons
concrètement réalisé sur une partie. De même, en effet, que dans la rénovation
de l'univers, comme dit l'Apôtre, le Christ lui-même descendra en un clin d'œil,
à la voix de l'Archange, et par la trompette fera lever les morts pour
l'immortalité
, de la même
façon maintenant celui qui, au commandement donné, secoue dans le tombeau la
mort comme on secoue un songe et qui laisse tomber la corruption des cadavres
qui l'atteignait déjà, bondit du tombeau dans son intégrité et en pleine santé,
sans que les bandelettes qui entourent ses pieds et ses mains l'empêchent de
sortir.
Sa propre résurrection
Est-ce là peu de chose pour fonder
notre foi en la Résurrection des morts? Cherchez-vous encore d'autres
témoignages pour confirmer votre jugement sur ce point? Eh bien! Ce n'est pas
sans raison, je crois, que le Seigneur, voulant traduire la pensée des hommes à
son sujet, dit ces mots aux Capharnaïtes: « Sans doute, m'appliquerez-vous ce
proverbe: « Médecin, guéris-toi toi-même »
. Celui qui
sur les corps des autres a habitué les hommes à la merveille de la Résurrection
devait affermir sur lui-même la foi en sa parole. Vous voyez qu'un appel de lui
produit son effet chez les autres: des hommes sur le point de mourir, l'enfant
qui vient à peine d'expirer, le jeune homme porté au tombeau, le mort déjà
corrompu, tous, à un seul commandement, sont rappelés également à la vie. Vous
demandez où sont ceux qui sont morts dans des blessures et dans le sang, afin
que la défaillance en ce point de sa puissance vivifiante n'amène pas le doute
sur ses bienfaits: voyez celui dont les mains ont été transpercées par les
clous, voyez celui dont le côté a été traversé par la lance. Portez vos doigts à
l'endroit des clous. Avancez votre main dans la blessure faite par la lance.
Vous pourrez constater de combien la pointe de celle-ci a dû s'enfoncer à
l'intérieur, en calculant sa pénétration par la largeur de la blessure. La plaie
laisse la place à une main d'homme! Vous pouvez supposer combien le fer est allé
profond. Si cet homme est ressuscité, on peut bien conclure en redisant le mot
de l'Apôtre: « Comment certains disent-ils qu'il n'y a pas de Résurrection des
morts? »
Conclusion: la foi dans
sa simplicité
Le témoignage des événements passés
confirme donc la vérité de toute prédiction du Seigneur: non seulement la
Résurrection nous est enseignée par des paroles, mais, grâce à ceux-là même que
la résurrection a rendus à la vie, les faits nous donnent la preuve de la
promesse. Maintenant, quel argument reste-t-il à ceux qui ne croient pas? Nous
laisserons là tous ceux qui se fondent sur la « philosophie » ou sur de vaines
erreurs pour repousser la foi dans sa simplicité et nous donnerons notre
assentiment sans réserve aux brèves paroles du Prophète qui nous enseigne la
manière dont se fera ce don: « On leur enlèvera, dit-il, le souffle et ils
expireront et ils retourneront en leur poussière. Tu enverras ton Esprit et ils
seront créés et tu renouvelleras la face de la terre »
. Alors le
Seigneur trouvera sa joie en ses œuvres, les pécheurs ayant débarrassé la terre.
Comment pourrait-on appeler quelqu'un pécheur, quand le péché n'existe plus?



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