VOUS NE SEREZ
POINT ADULTÈRES
Le lien qui unit le
mari et la femme est très étroit. Partant, rien ne peut leur être
plus agréable que de se sentir aimés l’un de l’autre d’un amour
tendre et loyal. Au contraire, rien ne saurait leur être plus
pénible que de voir cet amour, qu’ils se doivent et qui est si
légitime, s’en aller honteusement vers d’autres. Il était donc juste
et absolument dans l’ordre qu’après la Loi qui protège la vie de
l’homme contre le meurtre. Dieu plaçât immédiatement celle qui
défend l’adultère, afin que personne n’osât violer ou détruire cette
union si sainte et si honorable du Mariage, ce foyer si ardent de
Charité et d’amour.
Mais en traitant cette
matière, le Pasteur ne devra manquer ni de circonspection ni de
prudence. Il traitera ce sujet avec la réserve la plus mesurée.
n’est-il pas à craindre en effet qu’en voulant expliquer longuement
et en détail les différentes manières de transgresser ce précepte,
il ne vienne à dire des choses qui pourraient troubler les âmes
délicates au lieu de les éclairer ?
Or, ce Commandement est
très étendu et fort complexe. Et pourtant le Pasteur ne doit rien
passer sous silence. Chaque chose doit venir à sa place.
Il se divise en deux
parties, l’une qui défend formellement l’adultère, l’autre qui nous
commande implicitement la chasteté de l’âme et du corps.
Commençons d’abord par
ce qui est défendu.
§ I. — DE L’ADULTÈRE.
L’adultère est la
violation du droit le plus sacré qui unit par serment inviolable les
Epoux l’un à l’autre. L’Epoux qui manquerait de fidélité à son
Epouse commettrait une faute très grave ; quiconque libre pécherait
avec une personne non libre, se rendrait gravement coupable aux yeux
de Dieu.
Selon Saint Ambroise et
Saint Augustin, ce Commandement porté contre l’adultère s’étend à
tout ce qui est déshonnête et impur. Et nos Saints Livres, ceux de
l’Ancien, comme ceux du nouveau testament, ne nous permettent pas
d’être d’un avis différent. Ainsi, outre l’adultère, d’autres genres
de libertinage sont encore punis dans Moise. La Genèse nous rapporte
un jugement de Juda contre sa belle-fille , et le Deutéronome défend
positivement qu’aucune des filles d’Israël ne se livre au mal .
Tobie faisait cette exhortation à son fils : « Gardez-vous, ô mon
fils, de toute impudicité » ; et l’Ecclésiastique nous dit : « Rougissez
de jeter les yeux sur une femme de mauvaise vie. »
Dans l’Evangile,
Notre-Seigneur Jésus-Christ nous assure « que du cœur sortent
les adultères et les intentions mauvaises qui rendent l’homme
coupable. » Quant à Saint Paul, c’est dans une foule de
passages, et dans les termes les plus sévères, qu’il flétrit ce
péché. Ici il dit : « La volonté de Dieu est que vous soyez
saints et que vous évitiez l’impudicité ; là Fuyez ce vice ;
ailleurs Evitez les impudiques ; puis Qu’on n’entende pas
même parler parmi vous de ce péché, ni d’impureté de quelque sorte,
ni d’avarice ; puis encore : ni les impudiques, ni les
adultères, ni les efféminés, ni les abominables ne seront héritiers
du Royaume de Dieu. »
La principale raison
pour laquelle l’adultère est expressément défendu dans ce
Commandement, c’est que, outre la turpitude qui lui est commune avec
toutes les autres espèces d’impuretés, il est en même temps un acte
d’injustice flagrante non seulement contre le prochain, mais même
contre la société civile. Il est certain d’ailleurs que celui qui ne
sait pas s’abstenir des autres péchés d’impureté sera bien vite
entraîné jusqu’à l’adultère.
Il est donc facile de
comprendre qu’en défendant l’adultère, Dieu a défendu en même temps
toute sorte d’impureté, capable de souiller le corps. De plus le
libertinage intérieur du cœur est également défendu, car cette Loi
est essentiellement spirituelle. nous en avons la preuve dans ces
paroles de Notre-Seigneur Jésus-Christ : « Vous savez qu’il a été
dit aux Anciens: vous ne serez point adultères ; mais Moi Je vous
dis que quiconque regarde une femme avec une intention mauvaise, a
déjà commis t’adultère dans son cœur. »
Voilà ce qu’il nous a
semblé que le Pasteur pouvait dire en public sur cette matière, en y
ajoutant toutefois ce que le Saint Concile de Trente a décrété
contre les adultères, et contre ceux qui s’exposent à vivre dans
l’habitude du mal et des fréquentations mauvaises. Il laissera de
côté toutes les autres variétés de péchés contre ce Commandement,
pour n’en parler qu’en particulier, et encore, selon que les
circonstances et la situation des personnes lui en feront un devoir:
Il reste à expliquer
maintenant la partie du précepte qui commande.
§ II. — CE QUI eST COMMANDÉ PAR LE SIXIÈME
COMMANDEMENT.
Il faut donc apprendre
aux Fidèles et les exhorter très vivement à pratiquer avec tout le
soin possible la vertu de pureté , « à se purifier de tout ce qui
souille la chair et l’esprit, poursuivant l’œuvre de leur
sanctification dans la crainte de Dieu. » Il faut surtout leur
faire remarquer que, si la vertu de chasteté brille d’un éclat
particulier dans ceux qui gardent religieusement l’excellente et
divine vertu de virginité, elle peut aussi être pratiquée par ceux
qui vivent dans le célibat, et même par les personnes mariées qui
savent se conserver pures et innocentes de tous les excès défendus.
Les saints Pères nous
indiquent un grand nombre de remèdes pour nous apprendre à réprimer
et à dompter nos passions. Le Pasteur ne manquera pas de les faire
connaître aux Fidèles, en les expliquant avec tout le soin possible.
§ III. — REMÈDES CONTRE LES MAUVAISES PENSÉES.
Ces remèdes sont de
deux sortes: les uns sont du domaine de la pensée, les autres
appartiennent à l’action.
Les remèdes qui
procèdent de la pensée consistent principalement en ce que nous
comprenions très bien tout ce qu’il y a de honteux et de pernicieux
dans le péché d’impureté. Cette connaissance une fois acquise, il
nous sera plus facile de le détester. Or ce qui nous fait sentir
combien ce crime est funeste, c’est que ceux qui ont le malheur de
le commettre, sont par le fait repoussés et exclus du Royaume de
Dieu. Voilà bien le dernier de tous les maux.
Sans doute, ce malheur
est commun à tous les péchés mortels, mais le péché dont nous
parlons a cela de particulier que ceux qui s’en rendent coupables,
pèchent contre leur propre corps. C’est l’enseignement de l’Apôtre.
Il dit expressément : « Fuyez l’impudicité ; tous les autres
péchés se commettent hors de nous ; mais celui qui s’abandonne à
l’impudicité pèche contre lui-même, » c’est-à-dire qu’il se fait
injure en profanant sa sainteté. Voilà pourquoi Saint Paul dit
encore aux Thessaloniciens : « La volonté de Dieu c’est que vous
deveniez des Saints, et que vous évitiez l’impudicité, et que chacun
de vous sache posséder son corps dans la sainteté et l’honnêteté, ne
suivant point les entraînements de la passion, comme font les
nations qui ignorent Dieu. » Ensuite, ce qui est plus criminel
encore, c’est que le Chrétien qui pèche honteusement avec une femme
de mauvaise vie, profane ses membres qui sont les membres de
Notre-Seigneur Jésus-Christ. « Ne savez-vous pas, dit
l’Apôtre , que vos corps sont les membres de Jésus-Christ ?
Peut-on transformer des membres de Jésus-Christ en instruments de
péché ? A Dieu ne plaise I ne savez-vous pas que celui qui pèche
avec une femme de mauvaise vie se réduit au plus honteux
esclavage ? » D’ailleurs, au témoignage du même Apôtre , le
Chrétien est le Temple du Saint-Esprit, et violer ce temple,
n’est-ce pas en chasser cet esprit de Dieu.
En ce qui concerne
l’adultère, il ne faut pas oublier qu’il renferme en lui-même une
injustice très grande. Car, suivant la doctrine de Saint Paul, ceux
que le mariage unit sont tellement soumis au pouvoir l’un de l’autre
, qu’ils ne sont plus seuls maîtres d’eux-mêmes. Ils sont au
contraire enchaînés entre eux et asservis l’un à l’autre, au point
que le mari doit se conformer à la volonté de la femme, et la femme
à celle du mari. Et par conséquent, celui des deux qui viole un
droit légitime en devenant infidèle à son serment, commet une
injustice très criminelle. Et comme la crainte de l’infamie est un
motif très puissant pour porter les hommes à l’accomplissement de ce
qui est ordonné, et pour les détourner de ce qui est défendu, le
Pasteur aura grand soin de montrer aux Fidèles que l’adultère
imprime sur le front de celui qui le commet un stigmate d’ignominie.
nos Livres saints nous disent expressément: « Celui qui est
adultère perdra son âme par la folie de son cœur. Il amassera sur sa
tête l’opprobre et la honte, et son infamie ne s’effacera jamais. »
Enfin la sévérité des
châtiments réservés aux adultères nous démontre suffisamment la
grandeur de leur crime. On sait que la Loi de Moïse les condamnait à
être lapidés. Bien plus, ne lisons-nous pas que pour le crime d’un
seul, non seulement Dieu a frappé le coupable, mais une ville tout
entière, celle des Sichimites ? La Sainte Ecriture nous fournit
encore plusieurs autres exemples des châtiments exercés par Dieu
contre ceux qui violent ce Commandement. Le Pasteur fera bien de les
rassembler et de les raconter aux Fidèles, pour les détourner de
plus en plus de ces excès abominables. Ainsi furent détruits les
habitants de Sodome et des villes voisines, les israélites qui
avaient péché avec les filles de Moab dans le désert, et les
Benjamites.
Et même ceux qui
échappent à la mort, n’échappent ni aux douleurs, ni aux tourments
cruels dont ils sont souvent la victime. Ils sont punis du plus
terrible des châtiments, l’aveuglement de l’esprit. Dès lors ils ne
tiennent plus compte de rien. Dieu, réputation, dignité, enfants,
eux-mêmes, tout est oublié. Ils deviennent ainsi tellement pervers
et incapables, qu’on, ne peut leur confier rien d’important, et
qu’ils ne sont plus guère propres à aucune fonction sérieuse.
L’exemple de David et de Salomon nous le prouve bien. Le premier,
après son adultère, se trouva tout à coup si différent de lui-même,
que de très doux qu’il était, il devint cruel et barbare, et qu’il
fit exposer à une mort certaine un de ses plus zélés serviteurs, le
fidèle Urie. Le second, livré tout entier à ses honteuses passions,
en vint à cet excès d’abandonner sa religion et d’adorer les faux
dieux. tant il est vrai que ce péché, comme dit le Prophète Osée ,
« emporte le cœur de l’homme, » et le plus souvent même, « le
rend aveugle ».
§ IV. — AUTRES REMÈDES CONTRE L’IMPURETÉ.
Venons maintenant aux
remèdes qui sont du domaine de l’action.
Le premier est de fuir
l’oisiveté. C’est en s’énervant dans ce vice, comme dit Ezéchiel ,
que les Sodomites se précipitèrent dans les désordres si honteux de
leurs horribles débauches,
Le second est d’éviter
l’intempérance avec le plus grand soin. « Je les ai rassasiés,
dit le Prophète, et ils ont commis l’adultère. » En effet,
c’est une cause d’impureté que de prendre des aliments avec excès.
C’est ce que notre Seigneur veut nous faire entendre, quand Il nous
dit: « prenez garde de laisser vos cœurs s’appesantir dans
l’intempérance et l’ivresse. » Saint Paul nous dit aussi: « Ne
vous enivrez point par le vin, d’où naît la luxure. »
Mais ce qui allume le
plus ordinairement la passion impure dans les cœur », ce sont les
regards. C’est pourquoi Notre-Seigneur nous dit: « Si votre œil
vous scandalise, arrachez-le, et jetez-le loin de vous. »
Les Prophètes avaient parlé dans le même sens. « J’ai fait un
pacte avec mes yeux, dit Job , pour éviter toute pensée
dangereuse. » Et d’ailleurs, nous avons des exemples presque
innombrables des désordres qui ont eu leur source dans la curiosité
mauvaise des regards. Il n’y a qu’à se rappeler le péché de David,
celui du roi de Sichem, et enfin celui des vieillards qui se firent
les calomniateurs de Suzanne.
Les parures trop
élégantes, si bien faites, malheureusement, pour attirer les
regards, sont encore une des sources les plus ordinaires de
l’impureté. De là cet avertissement que nous donne l’Ecclésiaste:
« détournez vos yeux d’une femme parée ». Et comme les femmes
sont d’ordinaire trop attachées aux ornements du corps, il est
nécessaire que le Pasteur les avertisse de temps en temps d’éviter
ce défaut, et même de leur faire entendre sur ce point le langage
sévère de l’Apôtre Saint Pierre: « Que les femmes ne se parent
point au dehors par l’art de leur chevelure, par les ornements d’or,
ni par la beauté des vêtements. » Et Saint Paul, de son côté,
leur défend « les cheveux frisés, les ornements d’or, les
pierres précieuses, les vêtements somptueux. » Souvent en effet
ces ornements extérieurs ont fait perdre le véritable ornement de
l’âme et du corps.
Mais si la trop grande
recherche dans la parure porte habituellement au péché de
l’impureté, les discours et entretiens déshonnêtes n’y conduisent
pas moins. Les propos obscènes sont comme une flamme ardente qui
allume dans le cœur des jeunes gens le feu de l’impureté. « Les
entretiens mauvais corrompent les bonnes mœurs, » dit l’Apôtre .
Il en est de même des chants trop tendres, et trop efféminés, des
danses, des livres licencieux ou peu chastes, ainsi que des tableaux
qui représentent quelque chose de honteux. toutes ces choses doivent
être évitées avec le plus grand soin, car elles sont capables
d’éveiller des sentiments dangereux dans le cœur de la jeunesse et
de l’exposer au péril. Sur ce point le Pasteur doit surtout
recommander aux Fidèles d’observer religieusement ce que le saint
Concile de Trente a réglé avec tant de sagesse et de piété.
Si l’on met tous ses
soins à éviter tout ce que nous venons de rappeler, on ne laisse
presque pas de place à la passion impure. Mais il ne faut pas
oublier que les moyens les plus puissants pour la comprimer et la
réduire sont la Confession fréquente et la fréquente Communion, avec
des prières assidues et ferventes, l’aumône et le jeûne. La chasteté
est un don de Dieu ; qu’Il ne refuse jamais à ceux qui le demandent
comme il faut. « Il ne permet pas que nous soyons tentés
au-dessus de nos forces. »
Enfin il faut exercer
le corps non seulement par des jeûnes, et spécialement par ceux que
l’Eglise prescrit, mais aussi par des veilles, par de pieux
pèlerinages, et par d’autres mortifications. C’est le moyen de
dompter nos appétits mauvais, et de produire des actes très
méritoires de la vertu de tempérance. « Ceux qui combattent dans
l’arène, dit Saint Paul , [en parlant de la mortification],
s’abstiennent de toutes choses, et cependant ce n’est que pour
obtenir une couronne corruptible, au lieu que la nôtre est
incorruptible. » Peu après il ajoute: « Je châtie mon corps
et je le réduis en servitude, de crainte qu’après avoir prêché aux
autres, je ne sois réprouvé moi-même. » Ailleurs il dit encore:
« ne cherchez pas à contenter votre choir dans ses désirs ».
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