Le poison

Notre société contemporaine a rejeté tous les commandements de Dieu pour mieux jouir de son confort. Pourtant, elle n’offre le plus souvent que le spectacle du malheur, fruit du poison de Satan, cette toxine qui fait tant souffrir.

Le poison qui nous tue, c’est l’orgueil. L’orgueil, tout le monde connaît. Dans certains milieux il est même exalté, recommandé. Mais, si on est un peu intelligent, on ne le manifeste pas trop car on se rend vite compte combien la vantardise est stupide. Dans de nombreux milieux scientifiques on ne parle pas d’orgueil non plus, on parle de modestie. Les problèmes abordés sont, en effet, tellement complexes, que les vrais savants se sentent rapidement dépassés et tellement vulnérables face aux forces ou aux mystères de la nature. Ils ne peuvent qu’être modestes. Modestes, oui, mais pas forcément humbles, car le poison est toujours là, plus caché mais tout aussi nocif. Les savants sont généralement modestes face à leurs travaux, mais ils peuvent être très orgueilleux en se comparant à leurs collègues, ou jaloux de ceux qui réussissent mieux qu’eux.

L’orgueil est un poison qui fausse absolument tout. Il est présent en permanence dans nos cœurs et nos esprits, parfois à des doses homéopathiques, mais il est toujours là. C’est un poison qui agit lentement, qui instille ses produits toxiques sans qu’on y prenne garde. Et ces toxines sont si douces, si indétectables qu’on ne s’en méfie pas. Pourtant elles sont redoutables, d’autant plus redoutables et dangereuses qu’on les croit bénéfiques. Elle sont redoutables car elles pénètrent partout, elles infestent et infectent tout...

Il est une expression qui met bien en évidence la nocivité de l’orgueil, c’est “l’envers du cœur”. Cette expression est comme un révélateur; en fait, c’est notre inconscient qui cache ce poison. Aussi, lorsque, presque inconsciemment, nos pensées nous conduisent vers des jugements téméraires, des pensées d’amour-propre ou de jalousie, tournons-nous vers le Seigneur et demandons-Lui de nettoyer et de purifier très vite l’envers de notre cœur. C’est, en effet, toujours l’envers de notre cœur qui, ayant soigneusement enfoui les toxines maléfiques, empêche l’endroit du cœur de répondre aux appels de la raison et de l’amour. Car le poison est là, infiltré et solidement établi; l’infection est soigneusement cachée, mais elle est toujours présente, endémique, prête à reprendre vie, à se fortifier, en un mot, à poursuivre son lent travail d’intoxication, voire de putréfaction, de notre âme. Le cancer fait son chemin, discrètement, sournoisement; on ne le découvrira que lorsqu’il sera trop tard.

Souvent l’on découvre, en étudiant la vie des saints, que Jésus veut souvent leur faire prendre conscience de leur misère, de leur faiblesse. Jésus veut qu’ils découvrent la perversité de l’orgueil qui fausse tout sans que nous y prenions garde. Il veut aussi qu’ils pénètrent davantage dans la vertu qu’Il aime particulièrement: l’humilité. Cette vertu, qui fut et qui est toujours celle de Jésus, “doux et humble de Cœur”, ne nous est pas naturelle: c’est comme si Satan, voulant nous détruire de l’intérieur, l’avait arrachée de notre cœur pour la remplacer par son poison perfide et mortel.

Les saints se sont tous aperçus, un jour ou l’autre, et avec horreur, que nombre de leurs actions, même les meilleures, étaient infestées par ce poison mortel.

Questions:

 Comment se débarrasser de cette infection? Quel antibiotique utiliser? Réponse:

 L’humilité.

Questions:

 Oui, mais comment l’ingérer? Quelles doses prendre?

Réponses:

 Doses illimitées, et à tout instant.

Et si l’on suit cette médecine à la lettre, un jour on découvre que l’humilité c’est vraiment la porte du bonheur. D’accord! Mais qu’est-ce, au juste, que l’humilité?

L’humilité

Considérons une immense spirale semblable à celles des galaxies. Dieu, d’un seul regard et en dehors des temps liés à chaque galaxie, voit la totalité de chacune des galaxies de sa Création. Dieu voit, et sa puissance pénètre jusqu’au plus profond de chaque composant, jusqu’au plus intime de chaque être vivant, jusqu’au fond du cœur de chaque homme. D’un seul regard instantané et éternel, Dieu voit. Il voit en même temps le passé, le présent, l’avenir; car tout est présent et actuel pour Dieu.

Ainsi Dieu voit, d’un seul regard, toutes les galaxies de la Création. Il voit notre galaxie, notre système solaire, la terre et les hommes, tous les hommes, ceux des millénaires passés, ceux d’aujourd’hui, et ceux des siècles qui viendront. Et Il voit comment, dans les galaxies commandées par de puissantes forces, gravitationnelles, électromagnétiques et autres, tous les événements interagissent les uns sur les autres. Pour le regard de Dieu il n’y a que l’instantanéité de son éternité.

Tous les hommes de tous les temps sont là, devant le regard de Dieu. Dieu voit toutes les forces bonnes qu’Il a crées et qui influent les unes sur les autres. Dieu voit aussi le Mauvais qui veut détruire. Dieu voit Babylone qui construit des villes gigantesques, des tours aussi hautes que des montagnes. Tous les hommes parlent la même langue: pour construire un monde aussi puissant que Dieu, il faut pouvoir se comprendre, et vite... On a donc imaginé des communications rapides, et le Satan en profite pour faire passer toute sa haine à travers des œuvres bonnes que Dieu avait confiées à la sagacité humaine. Hélas! Le monde moderne est entre les mains du Mauvais, le monde moderne court à sa perte.

Comme toutes les forces agissent les unes sur les autres; les forces sales d’aujourd’hui souillent le futur comme elles ont souillé aussi le passé. Le péché des hommes d’aujourd’hui influence la pensée des hommes du passé comme il risque de semer des ruines dans le futur du monde. La Création est une; elle a été blessée par le péché originel qui est peut-être le péché des hommes d’aujourd’hui... Ainsi, chacun de nos péchés est peut-être aussi la cause des misères des hommes du passé et de l’Agonie de Jésus et de sa mort sur la Croix.  

On comprend mieux alors les choix de Jésus lors de ses grandes tentations au désert. Jésus ne sera ni un chef d’état, ni un grand seigneur puissant, ni un financier qui mène le monde grâce à son pouvoir et à son argent. Jésus ne fera rien de sensationnel que la science future pourrait mettre en cause. Non, Jésus sera humble, doux, sans argent, sans pouvoir. Jésus sera contredit, méconnu, critiqué, méprisé... Et quand l’Heure sera venue, Jésus choisira la Croix qu’Il avait désirée d’un si grand désir.

Sur le moment on est un peu surpris... Vivre ainsi quand on se prétend le Messie! Puis peu à peu on comprend pourquoi le Seigneur a fait ce choix. C’est clair, lumineux, sans appel: Dieu-Amour ne peut pas être un tyran, ni un riche, ni un grand seigneur. Dieu amour est bon, juste, humble... Dieu est Père. Et son Fils, son Unique avec qui Il ne fait qu’UN, ne peut qu’être doux et humble. Quelle merveille! Quelle merveille la douceur de Dieu, la douceur de Jésus! La grandeur de Dieu, son immensité, son infinitude, c’est sa douceur, c’est son humilité. C’est sa puissance qui est pour nous miséricorde...

Chacun peut dès lors se resituer à sa vraie place dans le Corps mystique de Jésus et se dire: “Quelle merveille que Dieu voie tous les hommes, individuellement, ces hommes si petits, si insignifiants, si minuscules, pratiquement si inexistants, et pourtant vivants parce qu’Il le veut!”

Éblouis, émerveillés, presque en adoration mais inondés de bonheur, nous pouvons laisser jaillir de chacun de nos cœurs une nouvelle action de grâce: “Seigneur! ouvre nos cœurs à ton Amour! Ouvre nos cœurs à ta Miséricorde. Rends-nous confiants, pleinement confiants en Toi et en ta Miséricorde. Ouvre nos cœurs à ton Amour, Jésus! Ouvre nos cœurs à ton Cœur, à ta joie, à ton bonheur. Ouvre nos cœurs à la joie de ton Cœur qui est fontaine intarissable de la joie des anges et des hommes. Ouvre nos cœurs à la joie de ton Cœur, fontaine immortelle de pureté, et source de la vérité. Ouvre nos cœurs à la joie de ton Cœur, ô Jésus, la joie éternelle de Dieu.”

Ô Jésus, source de pureté, fais de nos cœurs comme un miroir de ta pureté, un miroir auquel, peu à peu, Tu effaceras toutes les traces qui le ternissent encore, un miroir auquel Tu arracheras tout ce qui peut le ternir afin qu’il reflète, pour tous ceux vers qui Tu nous enverras, l’image de ta pureté insondable et inexprimable.

Jésus! Rends-nous purs, pour ta joie et la joie de tous nos frères les hommes, ouvre nos cœurs à ton Cœur, fais-leur découvrir ton humilité et laisse-nous T’adorer.

Depuis que le monde existe, les hommes ont éprouvé le besoin d’adorer quelque chose, ou quelqu’un, mais quoi, mais qui? Constatant l’existence d’une force très supérieure à eux, mais ne pouvant la voir ni l’entendre, les hommes se sont fabriqué des idoles et les ont adorées. Par leur intermédiaire ils cherchaient à se concilier les bonnes grâces des dieux ou des esprits qu’ils ne connaissaient pas, ou qu’ils ne devinaient que par la manifestation des forces naturelles qu’ils redoutaient par-dessus tout. Mais qu’est-ce qu’adorer?

L’adoration, c’est la reconnaissance de la présence d’un Créateur, infiniment puissant, de qui nous dépendons entièrement. Quand nous sommes laissés à nous-mêmes, à nos seules forces, nous prenons forcément conscience que ne pouvons rien, absolument rien et que notre dépendance est totale; et nous ne pouvons que nous incliner, et reconnaître puis accepter notre contingence. Reconnaissant l’existence et la présence de Dieu Créateur dont nous recevons tout, Dieu créateur mais aussi Personne qui nous aime et que nous pouvons aimer, réalisant que Dieu nous fait connaître que tout vient de Lui et qu’Il pourrait nous supprimer d’un simple coup de crayon, mais qu’Il ne le fait pas car Dieu n’est pas qu’une intelligence abstraite et aveugle, Dieu est aussi Amour, nous nous mettons à genoux: nous adorons... et nous aimons Dieu qui nous aime... Car Dieu aime l’homme, sa créature et lui demande, en retour, de L’aimer: car l’Amour ne peut être Amour que s’il y a échange d’amour, échange mutuel et permanent. C’est cela aussi l’adoration: aimer d’amour l’Infiniment Immense, aimer d’amour l’Amour Créateur qui nous aime et désire notre amour pour nous donner l’Amour.

Le corps mystique du Christ

Certaines religiosités recherchent la fusion totale et définitive avec la divinité, le Grand Tout. Mais cette fusion, c’est en réalité la dissolution de tout l’être dans le néant. L’homme, alors, perd toute notion de lui-même puisqu’il disparaît, même si pour cela il a dû traverser d’interminables réincarnations. Pour nous, Chrétiens, Dieu n’est pas un vague Grand Tout anonyme, Il est Amour, donc une Personne, Quelqu’un qui désire établir des relations amoureuses avec sa créature préférée: l’Homme. Comment cela peut-il se faire puisqu’il y a eu, il y a et il y aura, des milliards d’hommes dans la création? Comment Dieu peut-Il avoir de vraies relations amoureuses avec chacun d’entre nous? Réponse: dans le Corps mystique du Christ.

Dieu Créateur n’a pas agi à la légère, dans le désordre, quand Il pensa sa création. Quand le Créateur pensa l’Homme, à son image Il le fit homme et femme. “Homme et femme Il le fit “. Toute l’humanité était destinée à construire le Corps du Fils unique, ce Corps mystique que les anges devaient adorer. Satan se révolta, refusa d’adorer l’Homme-Jésus dans son Corps mystique, et décida de le détruire. Le grand Malheureux voulait le malheur de l’Homme. Mais qu’est-ce que le Corps mystique du Christ, et quel lien y a-t-il entre le Corps mystique du Christ et le spectacle si douloureux de notre monde?

Jésus est la tête et le Cœur de son Corps mystique; son Corps mystique sera, ou est déjà, constitué par les innombrables pierres vivantes que sont les saints, les saints du Ciel ou de la terre... Chaque homme, dans son Cœur, est une des pierres vivantes qui construisent son Cœur. 

Le Corps mystique du Christ est constitué de milliard d’éléments, de pierres vivantes irremplaçables, uniques, ayant chacune une fonction propre: sa vocation. Chaque homme est unique car la vocation de chaque homme est unique. Chaque pièce ne peut fonctionner normalement que si elle est à sa place. Et c’est là que le poison intervient. Voici que les pierres vivantes se sont mises à envier, pour des raisons qui n’en sont pas, la place des autres; elles se sont mises à se comparer, à se juger, à se jalouser... Chacune se trouve tellement mieux, tellement plus intéressante que les autres! Tellement plus grande ou plus utile que sa voisine! Insensiblement le poison détruit l’harmonie, et il espère bien pouvoir tout détruire.

Poursuivons notre raisonnement. Dès l’origine Dieu nous avait pensés. Dans sa grande sagesse, Il savait ce que seraient la vocation de chaque homme et la place où Il voulait le mettre. Il connaissait l’endroit où chaque homme  fonctionnerait le mieux dans la grande construction du Corps mystique du Fils. Dans la pensée créatrice de Dieu, il y a les apôtres, les martyrs, les confesseurs, les saints de toutes sortes; et il y a aussi tous ceux qui vivent parfaitement, pour mieux les rendre visibles, l’ensemble des vertus, source du bonheur, les vertus vécues parfaitement par Jésus dans notre monde. Ainsi chacun homme doit vivre, à sa place, le charisme spécifique que Dieu lui confie. Un charisme ou une fraction de charisme pour chacun... car, si le Corps mystique est infini, surtout dans ses vertus, ses charismes et sa sainteté, l’homme est, pris individuellement, fini, petit, et seulement capable d’aimer, s’il accepte l’Amour.

Conclusion

Chaque homme doit faire avec ce que le Seigneur lui confie pour arriver au bonheur et à la sainteté qu’Il désire pour chacun de nous. Et ce n’est pas facile à cause du poison qui nous infecte et infectera tous les hommes, jusqu’à la vie éternelle. C’est pourquoi, Dieu nous veut humbles, et seulement humbles. Rares sont ceux qui font de grandes choses, mais tous sont appelés à réaliser pleinement leur seule et unique vocation, celle que l’Amour de Dieu désire pour chacun de nous, et dans l’humilité. Et cela n’est pas aisé, surtout quand on contemple le spectacle du monde où règne l’orgueil et tant de monstruosités.  Aussi, pour éviter des jugements trop durs sur les actes des hommes pécheurs et privés de Dieu, nous ne pouvons que prier pour eux: 

 Vois, Jésus, tous ces adolescents que l’on a privés de Toi, à qui on ne donne que des nourritures pourries, des nourritures empoisonnées. Vois Jésus tous ces pauvres gosses désespérés qui ne savent pas pourquoi on les a mis sur terre et qui s’en vont criant leur haine...

 Jésus, vois aussi tous ces petits enfants à qui on n’apprend plus rien, à qui on ne donne plus rien de ce qui est leur vie. Jésus! Ces pauvres petits mourront bientôt d’inanition: comment ces pauvres tout petits pourraient-ils connaître le bonheur, le bonheur que Toi seul peut donner, puisqu’ils ne Te connaissent pas. Et s’ils ne Te connaissent pas, ce n’est pas de leur faute: eux, ils ne savent pas...

—Jésus! La vision de notre monde est insupportable. Est-ce à cause d’elle que le grand Cri qui accompagna ta mort sur la Croix, le Cri qui traversa les âges, est-ce à cause d’elle que ce Cri retentit sans cesse dans nos cœurs désolés? Jésus! quand Tu crias vers le Père: “Pourquoi m’as-Tu abandonné?” y avait-il aussi, dans ce cri, le cri qui devait nous délivrer de l’abandon: “Père, ne les abandonne pas! Eux, ils ne savent pas! Ils ne savent vraiment pas ce qu’ils font...”

Annexe

L’homme si faible, et si utile... Une toute petite vis

Souvent nous nous heurtons à notre totale impuissance, et inconsciemment nous pensons à Jésus sur la Croix, abandonné du Père... Et nous nous disons: “Jésus, comment peux-Tu nous aimer, comment peux-Tu nous connaître, nous qui sommes si petits, tellement petits à côté de Toi, à côté de Dieu...” Qui sommes-nous, que sommes-nous, à quoi servons-nous dans l’univers? Vertige insensé. C’est alors que le Seigneur met en nous des idées étonnantes qui nous sortent de nos impasses. Ces pensées sont souvent très matérielles, très proches de nos préoccupations quotidiennes, sans ambition spirituelle. Pourtant étant à notre échelle, à notre taille, ces comparaisons nous aident. Il en est ainsi de la mécanique fine, la mécanique de précision.

Petit acarien, petite fourmi perdue dans le monde, ne comprenant pas comment Dieu peut le voir et l’aimer, l’Homme, soudain, se vit comme une minuscule vis destinée à fixer une pièce tout aussi minuscule que lui, dans une mécanique horlogère de précision. Cette minuscule vis était indispensable au bon fonctionnement de la machine. Oui, mais  comment mettre à sa place cette petite vis? À chaque instant, sous l’action de forces extérieures insignifiantes elles aussi, mais réelles, la petite vis quittait son petit trou, déviait de son axe et tombait. L’Homme se ramassait, essayait de se remettre en place, sans grand succès... et il lui fallait toujours recommencer. Ses gros doigts chargés du travail étaient bien impuissants et maladroits quand il s’agissait de manipuler un si petit objet. Et pourtant ce petit objet était indispensable...  

Enfin, au bout d’un certain temps, quelqu’un vint et plaça la petite vis dans son minuscule écrou; puis Il la maintint dans son axe jusqu’à ce que l’extrémité d’un tourne-vis adapté à l’échelle de la minuscule mécanique ait réussi à tout maintenir en place: maintenant la petite horloge fonctionnait admirablement, sous l’œil plein d’amour de l’Ouvrier divin, et à la grande joie de l’Homme... Quelle leçon pour nous! Dans le Corps mystique du Christ, toutes les pièces, même les plus infimes, sont indispensables. Et le corps ne pourra fonctionner que lorsque toutes les pièces, même les vis les plus minuscules seront bien fixées à leur place...

Amusons-nous un peu... Pensons aux toutes petites pièces qui constituent les machines d’extrême précision dont certaines tiennent dans nos mains. Ces machines fonctionnent, et c’est fabuleux! Regardons le petit moteur dont les éléments sont si peu visibles: voici le petit stator, et le petit rotor, et les bobinages. Dès que le courant passe, le rotor tourne; mais pour transmettre et transformer le mouvement, il faut des tiges et des systèmes bielle-manivelle qui dans un premier temps encaisseront les efforts (petits, certes, mais importants vue la taille des pièces), et, grâce à tout un système d’engrenages et de réducteurs, mettront les mécanismes en marche selon les vitesses prévues. Plus  une machine est petite, plus c’est un vrai “miracle”.

Imaginons une autre étape du montage de la petite machine précédente qui a besoin d’une toute petite vis: les gros doigts de l’ouvrier qui la manipulent n’arrivent pas à la mettre en place... Il faut utiliser une pince spéciale, fine et adaptée, mais là encore, les difficultés sont nombreuses, la petite vis n’atteint pas l’écrou, elle glisse et tombe. Parfois même elle tombe si loin qu’il faut que l’ouvrier se baisse et prenne du temps pour la retrouver. Et quand il l’a trouvée, il est bien content... Alors, avec une infinie délicatesse, il la saisit avec sa pince, et calmement, doucement, j’allais dire amoureusement, il la dépose sur son petit trou, la redresse, la maintient droite dans son axe, et peut enfin la visser et la fixer fortement. C’est alors qu’un autre miracle se produit.

La petite machine disposait déjà de toutes ses pièces essentielles, toutes parfaites et toutes à leur place. Par rapport à la petite vis, ces pièces semblaient des monstres, des géantes par rapport à la taille ridicule de la petite vis. D’ailleurs, à quoi aurait bien pu bien servir une petite vis fixée dans une sorte de puits qui traverse plusieurs constituants de la machine? La petite machine était très fière d’elle et de tous ses éléments constitutifs, elle était complète, du moins le croyait-elle, mais elle ne marchait pas encore: pourtant rien ne lui manquait. Que se passait-il?.. À quoi pensait son créateur? Mais à la petite vis, bien sûr! C’est elle, et elle seule qui pouvait maintenir à leur place tous les constituants. Tant que la petite vis n’était pas fixée à sa place, le moteur pouvait tourner, la mécanique se mettre en marche, au bout d’à peine une seconde, de violentes vibrations s’installeraient, les pièces casseraient puis seraient éjectées un peu partout: le désastre serait total.

Étrange méditation! C’est la pièce la plus humble, apparemment la plus inutile qui maintient tout en place et assure la sécurité du fonctionnement. La petite pièce est difficile à fabriquer; elle a l’art de s’échapper des doigts ouvriers, elle tombe souvent, et il faut des prodiges de patience et d’habilité pour réussir à la mettre là où elle doit être et l’y fixer solidement. Mais sans elle, rien n’est possible.

Pauvre petite vis, es-tu l’image d’une âme bien-aimée de Dieu, une petite âme  qui a beaucoup de mal à se laisser mettre à sa place, une petite brebis qui s’égare souvent et que le Bon Pasteur doit sans cesse aller rechercher, soigner et remettre amoureusement sur ses épaules bienveillantes? Pauvre petite vis... es-tu aussi l’image de la moins visible des vertus, la moins connue, la plus difficile à mettre en place, mais la seule indispensable? Es-tu aussi l’image de l’humilité? 

Dans une machine, toutes les pièces sont utiles, même les plus cachées, les plus méprisables apparemment. Toutes les pièces ont une fonction. Si l’on supprime une pièce, quelle qu’elle soit, tôt ou tard une panne ou au minimum un disfonctionnement se manifestera. Toutes les pièces sont utiles, toutes ont leur fonction propre, irremplaçable, et toutes doivent être soigneusement entretenues et toujours surveillées. C’est comme ça. Il en est ainsi pour tous les composants du Corps mystique du Christ.

Dans le Corps mystique du Christ, il y a une multitude d’âmes: toutes sont utiles, indispensables. Toutes ont été pensées individuellement par leur Dieu-Créateur qui les aime, qui les a conçues avec amour, et leur a donné, à chacune, leur vocation propre. C’est la prédestination. Chaque homme peut se dire: “Dieu m’a conçu avec amour et m’a prédestiné pour occuper telle place dans le Corps mystique du Christ. Dans ce Corps mystique du Christ, je suis unique, irremplaçable, et je suis fait pour accomplir une tâche importante, essentielle. Je suis prédestiné à cette place, à cette tâche que moi seul je peux remplir. C’est ma vocation: sans moi, le Corps serait incomplet, et la ‘machine’ ne pourrait pas fonctionner normalement. Tout est important pour Dieu: je suis important pour Dieu. J’ai du prix aux yeux de Dieu”.
 

   

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