Lettre de
Barnabé
(suite)
XI
1. Recherchons
maintenant si le Seigneur a pris soin de manifester à l'avance l'eau
et la croix. Au sujet de l'eau, il est écrit, à l'adresse d'Israël,
qu'ils ne recevraient pas le baptême qui procure la rémission des
péchés, mais qu'ils essaieraient de se fabriquer à eux-mêmes leur
salut.
2. Le prophète dit en
effet :
" Terre frémis de stupeur, plus encore,
Car c'est un double méfait que ce peuple a commis :
Ils m'ont abandonné, moi la source d'eau vive,
Pour se creuser à eux-mêmes une citerne de mort "
(Jr 2, 12-13).
3. " Est-elle une roche
déserte,
Ma montagne sainte, Sion ?
Vous serez comme une nichée d'oiseaux,
Voletant çà et là, arrachés du nid " (Is 16, 1-2).
4. Le prophète dit
encore:
" Moi je marcherai devant toi
En nivelant les hauteurs.
Je fracasserai les battants de bronze,
Je briserai les barres de fer.
Je te livrerai les trésors secrets,
Et les richesses cachées,
Pour qu'ils sachent que je suis, moi, le Seigneur Dieu " (Is 45,
2-3).
5. Et encore :
" Tu habiteras dans une citadelle élevée,
Bâtie sur le roc,
L'eau ne te fera pas défaut.
Tes yeux contempleront le roi dans sa gloire,
Et votre âme aura souci de la crainte du Seigneur " (Is 33, 16-18).
6. Et dans un autre
prophète, il dit encore :
" Celui qui agit ainsi sera comme l'arbre,
Planté près du cours des eaux,
Qui donne son fruit en la saison,
Et jamais son feuillage ne tombera.
Tout ce qu'il fait réussit.
7. Rien de tel pour les
impies, rien de tel.
Non, ils sont comme la bale emportée par le vent
De sur la terre.
Non, au jugement les impies ne tiendront,
Les égarés à l'assemblée des justes.
Car le Seigneur connaît la voie des justes,
Mais la voie des impies va se perdre " (Ps 1, 3-6).
8. Remarquez comme il
décrit à la fois la croix et l'eau. Voici en effet ce qu'il veut
dire : Bienheureux ceux qui ayant mis leur espérance dans la croix,
sont descendus dans l'eau, car il indique la récompense par ces mots
" en la saison " ; à ce moment-là, veut-il dire, je m'acquitterai
envers toi. Et ces mots : " jamais son feuillage ne tombera " (Ps 1,
3), en voici le sens : toute parole qui sortira de votre bouche,
sous l'inspiration de la foi et de la charité, sera la conversion et
l'espérance d'un grand nombre.
9. Un autre prophète
dit encore : " Le pays de Jacob recevait des louanges, plus que tout
autre " (cf. So 3, 19). Ce qui veut dire que Dieu glorifie le vase
qui renferme son esprit.
10. Et qu'est-il dit
encore : " Il y avait un fleuve coulant sur la droite, de ses berges
s'élevaient des arbres féconds, celui qui mange de leur fruit vivra
éternellement " (Ez. 47, 2, 7, 12).
11. Comprenons : nous
descendons dans l'eau, remplis de péchés et de souillures, mais nous
en sortons, chargés de fruits, avec dans notre coeur la crainte et,
dans l'esprit, l'espérance en Jésus. " Quiconque en mange vivra
éternellement " signifie : quiconque écoute ces paroles et croit,
vivra éternellement.
XII
1. Il décrit également
la croix, par ces paroles d'un autre prophète : " Quand ces choses
seront-elles accomplies ? Lorsque le bois, dit le Seigneur, aura été
abaissé et redressé, et lorsque du bois le sang aura coulé " (cf. IV
Esdras 4, 33 ; 5, 5). Voici donc ce qui se rapporte à la croix et à
celui qui doit y être crucifié.
2. Dieu parla encore à
Moise lorsque Israël était à se défendre contre les tribus
étrangères ; il lui remémora que cette guerre même était le signe de
la mort qu'ils méritaient à cause de leurs péchés. L'Esprit-Saint
inspira à Moïse une attitude figurant la croix et Celui qui devait y
souffrir, car voilà le sens du geste : à moins d'espérer en cette
croix, ils seraient livrés à une guerre éternelle. Moïse entassa
donc boucliers sur boucliers au milieu du champ de bataille, et se
plaçant sur le tas de façon à dominer les autres, il étendit les
bras ; c'est ainsi qu'Israël reprit l'avantage. Après un moment,
Moïse ayant laissé retomber ses bras, Israël succombait à nouveau
(Ex 17, 8-13).
3. Qu'est-ce à dire ?
C'était pour leur faire reconnaître qu'ils ne pouvaient être sauvés
que s'ils mettaient en lui leur espérance.
4. Le Seigneur dit
encore dans un autre prophète : " Tout le jour j'ai tendu mes mains
vers un peuple rebelle, et rétif à mes justes voies " (Is 65, 2).
5. Moïse figura d'une
autre façon encore Jésus, montrant qu'il devait souffrir et que
c'est lui qui donne la vie, lui qu'ils s'imagineront avoir fait
périr. Israël succombait. Pour leur donner un signe, le Seigneur les
fit mordre par toutes sortes de serpents et ils mouraient (cf. Nb.
21, 6-9) (car c'est par le serpent que la désobéissance est
apparue dans la personne d'Ève). Or, le Seigneur agissait ainsi pour
les convaincre que c'était à cause de leur désobéissance qu'ils
étaient livrés aux angoisses de la mort.
6. Finalement, Moïse,
qui avait publié ce précepte : " Vous n'aurez point d'image sculptée
ou fondue pour votre Dieu " (Dt 27, 15), fabriqua néanmoins une
telle image pour manifester une figure de Jésus. Il fabriqua donc un
serpent d'airain, le dressa solennellement et fit convoquer le
peuple par un héraut.
7. Le peuple réuni
priait Moise d'intercéder pour leur guérison. Alors Moïse leur dit :
" Lorsque quelqu'un d'entre vous sera mordu, qu'il vienne vers le
serpent étendu sur le bois ; qu'il espère ; qu'il croie que
celui-ci, même sans vie, peut le vivifier, et aussitôt il sera sauvé
" (cf. Nb. 21, 8-9).
Ainsi firent-ils. Voici bien la gloire de Jésus : tout a eu lieu en
lui et pour lui.
8. Et que dit Moïse à
Jésus, fils de Navé, après lui avoir imposé ce nom comme à un
prophète, dans la seule intention de faire comprendre au peuple que
le Père révèle toutes choses au sujet de son Fils Jésus ?
9. Après lui avoir
donné ce nom, en l'envoyant explorer le pays, Moïse dit à " Jésus,
fils de Navé " (Nb 13,16) : " Prends un livre dans tes mains et
écris ce que dit le Seigneur : dans les derniers jours, le Fils de
Dieu renversera de fond en comble la maison d'Amaleq " (cf. Ex 17,
14).
10. Voilà de nouveau
Jésus, figuré dans un être de chair, non pas comme fils d'homme,
mais comme fils de Dieu. Mais comme les Juifs devaient dire un jour
que le Christ est " fils de David " (Mt, 22, 42-44), David lui-même,
qui redoutait l'erreur de ces pécheurs et qui en avait la
connaissance, s'écrie prophétiquement : " Le Seigneur a dit à mon
Seigneur, siège à ma droite ; tes ennemis, j'en ferai ton marchepied
" (Ps 109, 1).
11. Et de même Isaïe :
" Le Seigneur a dit à son Oint, mon Seigneur,
Qu'il a pris par la main droite,
Pour abattre devant lui les nations
Et briser la puissance des rois " (Is 45 , 1).
Voilà comment " David l'appelle mon Seigneur ", et non pas mon fils
(Mc 12, 37 ; Mt 22, 45 ; Lc 20, 44).
XIII
1. Voyons maintenant à
qui est l'héritage : au peuple que nous sommes, ou bien au précédent
; et à qui s'adresse l'alliance, à nous ou à eux ?
2. Écoutez donc ce que
dit l'Écriture au sujet du peuple : " Isaac implora le Seigneur pour
sa femme, car elle était stérile " (Gn, 25, 21). Ensuite : " Rébecca
alla consulter le Seigneur, et le Seigneur lui dit : Deux nations
sont dans ton sein, deux peuples dans tes entrailles, un peuple
dominera l'autre, l'aîné servira le cadet " (Gn 25, 22-23 ; cf. Rm
9, 10-12).
3. Vous devez saisir
qui est Isaac, qui est Rébecca, et de quel peuple il est déclaré
qu'il est plus grand que l'autre.
4. Dans une autre
prophétie, Jacob éclaire encore ce point, lorsqu'il dit à Joseph :
" Voici que le Seigneur ne m'a pas privé de ta présence, conduis-moi
tes fils, que je les bénisse (Gn 48, 11,9).
5. Et Joseph lui
conduisit Éphraïm et Manassé, pour qu'il bénisse Manassé qui était
l'aîné. Joseph le conduisit donc à la droite de son père.. Mais
Jacob vit là, en esprit, la figure du peuple à venir. Qu'est-il
écrit ? " Jacob croisa ses mains et posa sa droite sur la tête
d'Éphraïm, le puîné et le plus jeune, et il le bénit. Joseph dit
alors à Jacob : Remets donc ta main droite sur la tête de Manassé,
car c'est lui mon fils premier-né. Et Jacob dit à Joseph : Je sais,
mon fils, je sais. Mais le plus grand servira le plus petit, et
c'est le plus petit qui sera béni " (Gn. 48, 14, 18, 19).
6. Voyez à qui Jacob a
décidé que serait la prédominance, et l'héritage de l'alliance.
7. Si Abraham lui-même
a fait mention de ce fait, notre connaissance en sera parfaite. Or,
qu'est-ce que Dieu dit à Abraham, lorsqu'il fut le seul à croire, et
que sa foi lui fut imputée à justice ? " Voici, je t'ai appelé
Abraham, et t'ai établi père des peuples incirconcis qui croient à
Dieu " (Gn 17, 5 ; cf. Rm 4, 11s).
XIV
1. Bien, voyons
maintenant si l'alliance qu'il avait juré à leurs pères de donner à
ce peuple, lui fut vraiment donnée. Elle leur fut donnée. Mais ils
n'en ont pas été dignes à cause de leurs péchés.
2. Le prophète dit, en
effet : " Moïse sur le mont Sinaï jeûna quarante jours et quarante
nuits afin de recevoir l'alliance du Seigneur avec son peuple, et
Moïse reçut du Seigneur deux tables écrites en esprit, du doigt de
la main du Seigneur (cf. Ex 24, 18 ; 31, 18). Les ayant donc en main
il les portait au peuple pour les leur remettre.
3. Lorsque le Seigneur
lui dit : " Moïse, Moïse, descends au plus vite, car ton peuple, que
tu as ramené d'Égypte, a péché. " Moïse comprit qu'ils s'étaient
encore fabriqué des idoles et il jeta les Tables de ses mains ;
c'est ainsi que furent brisées les Tables de l'alliance du Seigneur
(cf. Ex 32, 7-19 ; Dt 9, 12-17).
4. Moïse avait donc
reçu l'alliance, mais eux, les Juifs, n'en étaient pas dignes.
Apprenez comment c'est nous qui avons reçu l'alliance. Moïse l'avait
reçue comme un serviteur, mais le Seigneur lui-même nous l'a donnée
comme à un peuple d'héritiers, après avoir souffert pour nous.
5. Il est apparu à la
fois pour permettre aux Juifs de pousser jusqu'au bout leurs péchés,
et à nous-mêmes de recevoir l'alliance par l'intermédiaire de
l'héritier, le Seigneur Jésus.
Son avènement avait été préparé, afin que par lui nos âmes, déjà
atteintes par la mort et livrées aux égarements du péché fussent
délivrées de leurs ténèbres et que l'alliance fût établie avec nous
par sa parole.
6. L'Écriture explique,
en effet, comment le Père lui commande de nous délivrer des
ténèbres, et de se préparer un peuple saint.
7. Or, le prophète dit
: " Moi, le Seigneur ton Dieu, je t'ai appelé dans la justice. Je te
prendrai par la main et je te fortifierai. Je t'ai désigné comme
alliance du peuple, lumière des nations, pour ouvrir les yeux des
aveugles, faire sortir de prison les captifs, et de leur cachot ceux
qui demeurent dans les ténèbres " (Is 42, 6-7). Connaissons donc de
quel état nous avons été délivrés.
8. Le prophète dit
encore : " Voici, j'ai fait de toi la lumière des nations, pour que,
par toi, mon salut atteigne aux extrémités de la terre. Ainsi parle
le Seigneur, le Dieu qui t'a racheté " (Is 49, 6-7).
9. Et aussi :
" L'Esprit du Seigneur est sur moi
Car il m'a oint
Pour porter la bonne nouvelle de la grâce aux pauvres ;
Il m'a envoyé panser les coeurs meurtris,
Annoncer aux prisonniers la liberté,
Le retour de la vue aux aveugles.
Pour annoncer une année agréable au Seigneur,
Et le jour de la rétribution,
Pour consoler tous les affligés " (Is 61, 1-2 ; cf. Lc 4, 18-19).
XV
1. L'Écriture mentionne
également le sabbat dans les dix paroles que Dieu dit à Moïse, sur
le Mont Sinaï, lui parlant face à face. " Sanctifiez le sabbat du
Seigneur avec des mains pures et un coeur pur " (Ex 20, 8 ; Dt 5,
12 ; Ps 23, 4).
2. Dans un autre
endroit : " Si mes fils observent le sabbat, c'est alors que je
répandrai sur eux ma miséricorde " (cf. Jr 17, 24-25 ; Ex 31,
13-17).
3. Du sabbat, il est
fait mention dès le commencement, à la création : " Dieu fit en six
jours les oeuvres de ses mains ; le septième jour elles étaient
achevées ; et il chôma le septième jour et le bénit " (Gn. 2, 2-3).
4. Faites attention,
mes enfants, à ce que signifient ces mots : " Il acheva son œuvre en
six jours. " Cela veut dire qu'en six mille ans, le Seigneur
achèvera toutes choses, car pour lui un jour signifie mille années.
C'est lui-même qui l'atteste par ces mots : " Voici, un jour du
Seigneur sera comme mille années " (Ps 89, 4 ; 2 P. 3, 8). Donc, mes
enfants, en six jours, c'est-à-dire en six mille ans, toutes choses
auront achevé leur cours.
5. " Il chôma le
septième " (Gn. 2, 2) veut dire : lorsque son Fils sera venu mettre
une fin au temps de l'injustice, juger les impies, métamorphoser le
soleil, la lune et les étoiles, alors il chômera pleinement le
septième jour.
6. Mais il est encore
dit : " Vous le sanctifierez avec des mains pures et un cœur pur "
(Ex 20, 8 ; Ps 23, 4).
S'il y avait aujourd'hui un homme capable de sanctifier, par la
pureté de son cœur, le jour que Dieu a rendu saint, notre erreur
serait totale.
7. Mais remarquez-le
bien, nous n'entrerons pleinement dans le repos pour le sanctifier,
que lorsque nous serons nous-mêmes justifiés ; nous serons en
possession de la promesse, lorsqu'il n'y aura plus d'injustice et
que le Seigneur aura renouvelé toutes choses. Alors nous pourrons
sanctifier le septième jour, ayant été nous-mêmes d'abord
sanctifiés.
8. Le Seigneur dit
enfin aux Juifs : " Je ne supporte pas vos néoménies ni vos sabbats
" (Is 1, 13). Voyez bien ce qu'il veut dire : ce ne sont pas vos
sabbats actuels qui me sont agréables, mais celui que j'ai fait
moi-même et dans lequel, mettant toutes choses au repos,
j'inaugurerai le huitième jour, c'est-à-dire un univers nouveau.
9. Voilà pourquoi nous
célébrons dans l'allégresse le huitième jour celui où Jésus est
ressuscité des morts et où, après s'être manifesté, il est monté aux
cieux.
XVI
1. Je veux vous
entretenir encore du Temple, de l'erreur de ces malheureux qui
mettaient leur espérance dans un édifice, au lieu de la mettre en
Dieu leur créateur, sous prétexte que cet édifice était la maison de
Dieu.
2. Le culte qu'ils
rendaient dans le Temple ne différait pas beaucoup des cultes
païens. Mais apprenez en quel terme Dieu récuse ce Temple :
" Qui a mesuré le ciel à l'empan,
Et la terre dans le creux de sa main ?
N'est-ce pas moi, dit le Seigneur ?
Le ciel est mon trône
Et la terre l'escabeau de mes pieds.
Quelle maison pourriez-vous me bâtir,
Et quel lieu assigner à mon repos ? " (Is 40, 12 ; 66, 1).
Vous avez reconnu que leur espérance est vaine.
3. Enfin il dit encore
: " Voici que ceux-là mêmes qui ont détruit ce Temple, le
rebâtiront " (cf. Is 49, 17).
4. En effet, par suite
de la guerre, le Temple fut détruit par leurs ennemis, et maintenant
les serviteurs de ces ennemis le rebâtiront.
5. Il avait été dévoilé
aussi que la cité, le Temple et le peuple seraient livrés. " Il
arrivera dans les derniers jours, dit l'Écriture, que le Seigneur
livrera les brebis de son pâturage, avec leur bercail et leur tour,
à la destruction. " Et tout s'est passé comme le Seigneur l'avait
prédit.
6. Mais recherchons
s'il existe encore un temple de Dieu. Il en existe un, oui, mais là
où lui-même déclare le bâtir et le restaurer. Il est écrit en effet
: " Il arrivera qu'après une semaine un temple de Dieu sera bâti,
magnifiquement, au nom du Seigneur " (cf. Dn. 9, 24-27).
7. Je vois donc que ce
temple existe. Mais comment sera-t-il bâti au nom du Seigneur ? Vous
allez l'apprendre. Avant que nous eussions la foi en Dieu,
l'intérieur de nos cœurs était corruptible et fragile, vraiment
comme une demeure faite te main d'homme ; il était rempli
d'idolâtrie, habité par les démons, puisque nous faisions tout ce
qui est contraire à la volonté de Dieu.
8. " Mais il sera bâti
au nom du Seigneur " (cf. Dn 9, 24-27). Faîtes bien attention, que
le temple du Seigneur soit magnifiquement rebâti ! Comment ? Vous
allez l'apprendre. C'est en recevant la rémission des péchés et en
mettant notre espérance en son nom, que nous sommes renouvelés, que
nous devenons de nouvelles créatures ; et c'est pourquoi Dieu habite
réellement en notre intérieur, en nous.
9. Comment cela ? C'est
par la parole de foi, qu'il habite en nous, par la vocation de la
promesse, par la sagesse de ses volontés, les préceptes de sa
doctrine. C'est lui qui prophétise en nous, lui, l'hôte de nos
cœurs. C'est lui qui nous ouvre la porte du Temple, à nous qui
étions les esclaves de la mort ; et cette porte, c'est notre bouche,
qu'il ouvre en nous donnant le repentir. C'est ainsi qu'il nous
introduit dans le Temple impérissable.
10. Oui, celui qui
désire son salut ne regarde pas à l'homme, mais à celui qui habite
dans le cœur du prédicateur, qui parle par sa bouche, et il est tout
frappé de n'avoir encore jamais entendu les paroles de celui qui
parle par la bouche de son apôtre, et de n'avoir jamais même désiré
les entendre. Voilà ce que signifie le Temple spirituel bâti pour le
Seigneur.
XVII
1. Je vous ai donné
toutes ces explications de mon mieux, aussi simplement que possible,
et mon âme espère n'avoir rien omis, dans son zèle, des
enseignements qui concernent le salut.
2. Car si je vous
écrivais sur des choses présentes ou à venir, vous ne les
comprendriez pas, elles qui sont encore à l'état de paraboles.
Restons-en donc là pour ce que nous venons de dire.
XVIII
1. Passons encore à une
autre sorte de connaissance et de doctrine. Il y a deux voies,
répondant à deux sortes de doctrine et d'autorité : la voie de la
lumière et celle des ténèbres. Elles sont bien éloignées l'une de
l'autre ! A l'une sont préposés les anges de Dieu, qui conduisent
vers la lumière ; à l'autre, les anges de Satan.
2. Or, Dieu est le
Seigneur depuis l'origine et pour les siècles, et Satan est le
prince du temps présent, le temps de l'iniquité.
XIX
1. Or, voici quel est
le chemin de la lumière : si quelqu'un veut, en la suivant, parvenir
au but qu'il se propose, il lui faut s'appliquer avec zèle à ses
œuvres. Et nous avons reçu la connaissance de la bonne manière
d'emprunter cette route.
2. Aime celui qui t'a
fait, crains celui qui t'a formé, honore celui qui t'a racheté de la
mort. Sois simple de cœur, riche du Saint-Esprit. Ne t'attache pas a
ceux qui suivent la voie de la mort. Sache haïr tout ce qui déplaît
à Dieu, sache haïr toute hypocrisie. N'abandonne pas les
commandements du Seigneur.
3. Ne t'élève pas, mais
sois humble en toutes choses. Ne t'attribue pas la gloire ; ne forme
pas de mauvais desseins contre ton prochain, ne laisse pas ton âme
s'enfler d'audace.
4. Ne commets ni
fornication, ni adultère ; ne corromps pas les enfants. Ne te sers
pas de la parole, ce don de Dieu, pour dépraver quelqu'un. Ne fais
point acception de personnes lorsqu'il s'agit de reprendre les
fautes d'autrui. Sois doux, sois paisible, tremble aux paroles que
tu entends. Ne garde pas rancune à ton frère.
5. Ne te demande pas
avec inquiétude si la parole va s'accomplir ou non. " Tu ne prendras
pas en vain le nom du Seigneur " (Dt 5, 11). Tu aimeras ton prochain
plus que ton âme. Tu ne feras pas mourir l'enfant dans le sein de sa
mère, tu ne le feras pas mourir à sa naissance. Tu ne lèveras pas ta
main de dessus la tête de ton fils ou de ta fille, mais dès leur
enfance, tu leur enseigneras la crainte de Dieu.
6. Ne sois pas envieux
des biens de ton prochain ; ne sois pas cupide. N'attache pas ton
cœur aux orgueilleux, mais fréquente les humbles et les justes.
Accueille comme un bien tout ce qui t'arrive, sachant que rien ne se
fait sans Dieu.
7. N'aie pas deux
pensées, ni deux langages. Car c'est un piège de mort que la
duplicité dans le langage. Obéis à tes maîtres comme à l'image de
Dieu, dans le respect et la crainte. Ne commande pas ton serviteur
ou ta servante avec amertume, car ils espèrent dans le même Dieu que
toi, de peur qu'ils n'en viennent à perdre la crainte de Dieu, votre
commun maître : car Dieu ne fait pas acception de personnes,
lorsqu'il nous appelle ; mais il choisit ceux que l'Esprit a
disposés.
8. Tu partageras tous
tes biens avec ton prochain, et tu ne diras pas que quelque chose
t'appartient en propre, car si vous possédez en commun les biens
impérissables, combien plus les biens qui doivent périr ! Ne sois
pas bavard, la langue étant un piège de mort. Autant qu'il te sera
possible, pour le bien de ton âme, sois chaste.
9. N'aie pas la main
tendue pour recevoir, fermée pour donner. Tu aimeras " comme la
prunelle de ton oeil " (Dt 32, 10 ; Ps 16, 8 ; cf. Ps 7, 2), ceux
qui te prêcheront la parole du Seigneur.
10. Souviens-toi du
jour du jugement, penses-y jour et nuit, recherche constamment la
compagnie des saints. Tiens-toi toujours sur la brèche, soir en
annonçant la parole et en allant porter au loin tes exhortations
dans ton souci de sauver les âmes, soit en travaillant de tes mains
pour racheter tes péchés.
11. N'hésite pas à
donner et donne sans murmure, et tu connaîtras un jour celui qui
sait payer largement de retour. Garde ce que tu as reçu, " sans rien
ajouter, ni rien retrancher " (Dt 12, 32). Persévère dans la
haine du mal. " Sois équitable quand tu as à juger " (Dt 1, 16 ; Pr
31, 9).
12. Ne fais pas de
schismes, mais fais la paix en réconciliant les adversaires. Fais la
confession publique de tes péchés. Ne va pas à la prière avec une
conscience mauvaise. Telle est la voie de la lumière.
XX
1. La voie du
" ténébreux " est au contraire tortueuse, et pleine de malédictions.
C'est le chemin de la mort éternelle et du châtiment. On y rencontre
tout ce qui perd les âmes : l'idolâtrie, l'impudence, l'orgueil de
la puissance, l'adultère, le meurtre, la rapine, la vanterie, la
désobéissance, la ruse, la malice, l'arrogance, les drogues, la
magie, la cupidité, le mépris de Dieu.
2. Les persécuteurs des
justes, les ennemis de la vérité, les amis du mensonge ; car tous
ces gens ne connaissent pas la récompense te la justice, ils " ne
s'attachent pas au bien " (Rm. 12, 9), ils ne secourent pas la veuve
ni l'orphelin ; ils sont toujours en éveil non pour craindre Dieu,
mais pour faire le mal. Bien loin de la douceur et de la patience,
" ils aiment les vanités " (cf. Ps 4, 3), " poursuivent le gain "
(Is 1, 23) ; sans pitié pour le pauvre, sans compassion pour
l'affligé, ils sont prompts à la médisance, et, ne reconnaissant pas
leur Créateur, " ils tuent les enfants " (Sg 12, 5), font périr par
avortement des créatures de Dieu. Ils repoussent le nécessiteux,
accablent l'opprimé, se font les avocats des riches, les juges
iniques des pauvres. Bref, ils pèchent de toutes les manières.
XXI
1. Il est donc juste de
s'instruire de toutes les volontés de Dieu consignées dans les
Écritures, et de se diriger d'après elles. Car celui qui les
accomplit sera glorifié dans le royaume de Dieu, mais celui qui
choisit l'autre voie périra avec ses œuvres. C'est pour cela qu'il
existe une résurrection et une rétribution.
2. J'ai quelque chose à
vous demander, à vous qui êtes des privilégiés, si vous me permettez
un conseil que m'inspire ma bienveillance. Vous avez parmi vous des
gens à qui faire du bien ; n'y manquez pas.
3. Il est tout proche
le jour où tout périra aux yeux du méchant : " Le Seigneur est
proche ainsi que sa rétribution " (Is 60, 10).
4. Je vous en prie
encore et encore : soyez à vous-mêmes vos bons législateurs, vos
conseillers fidèles ; éloignez-vous de toute hypocrisie.
5. Veuille le Seigneur,
le Maître de l'univers, vous donner la sagesse, l'intelligence, la
science, la connaissance de ses volontés avec la patience.
6. Faites-vous dociles
à Dieu, recherchant ce que le Seigneur attend de vous, afin d'être
trouvés fidèles au jour du jugement.
7. S'il demeure quelque
mémoire du bien, souvenez-vous de moi en méditant ces enseignements,
afin que mon zèle et mes veilles aient porté quelque fruit ; je vous
en prie, c'est une grâce que je vous demande.
8. Tant que vous serez
dans le précieux vase de votre corps, ne négligez aucun de ces
enseignements, mais appliquez-y continuellement votre esprit et
accomplissez tout ce qui est commandé ; la chose en vaut la peine.
9. C'est pour cela
surtout que je me suis empressé de vous écrire, sur les sujets à ma
portée, voulant vous donner de la joie.
Salut à vous, enfants
de dilection et de paix. Que le Seigneur de gloire et de toute grâce
soit avec votre esprit. |