Stanislawa Rodzinska
(Marie-Julie)
Dominicaine, Martyre, Bienheureuse
1899-1945

20

FEVRIER

Deuxième enfant d'une famille de cinq, Stanislawa Rodzinska, qui deviendra, en religion, Sœur Maria-Julia, naquit le 16 mars 1899, à Nawojowa en Pologne dans le diocèse de Tarnowo, au sud de la Pologne. Ses parents étaient très pieux; son père Michel Rodzinski, était l'organiste de l'église du village. Il travaillait dans une caisse d'épargne. La famille était très proche des religieuses du Tiers-Ordre dominicain de Wielowski, religieuses qui tenaient une école et une infirmerie. De plus, elles catéchisaient les enfants de la région. Elles donnaient aussi une éducation musicale de qualité ce qui plaisait beaucoup, on le comprend, à la famille Rodzinski.

Malheureusement, Stanislawa perdit sa mère alors qu'elle n'avait que huit ans, puis son père deux ans plus tard. Stanislawa et sa petite sœur Janine, furent recueillies par les sœurs du couvent dominicain. Là, stanislawa  termina ses études primaires. Elle commença ensuite des études supérieures à Nowy Sącz pour devenir enseignante, mais elle ne termina pas ces études parce qu'elle commença sa formation religieuse au couvent de Wielowieś, comme postulante. Enfin, le 3 août 1917, elle reçut l'habit des religieuses dominicaines, et prit le nom de Sœur Maria-Julia, à Cracovie. C'était alors la période de l'occupation austro-allemande; Stanislawa avait dix huit ans. Le 4 septembre 1918, elle reprit ses études au Séminaire des Professeurs de la Sainte Famille à Cracovie, ville de l'ancienne Pologne autrichienne qui venait de rejoindre la nouvelle république polonaise. La Pologne renaissait de ses cendres, et les religieuses fondaient ou renforçaient les communautés dominicaines du pays réunifié. Stanislawa obtint son diplôme en mai 1919.

La Pologne renaissait de ses cendres, certes, mais le pays était encore en guerre; à l'ouest la Pologne était en conflit avec les Soviétiques, et à l'est, avec les Lituaniens. Dans ces conditions, beaucoup d'enfants étaient orphelins ou dans des situations de grande détresse. Les sœurs fondèrent un orphelinat à Wilno qui avait été au centre de la guerre polono-lituanienne, ainsi qu'à Rava Ruska près de Lvov où les Polonais luttaient contre les nationalistes ukrainiens communistes. C'est alors que Stanislawa, surnommée "la mère des orphelins", prononça ses vœux perpétuels en 1924. Sœur Maria-Julia, Stanislawa, qui organisait des écoles et des colonies de vacances pour les enfants défavorisés fut nommée dans différentes écoles de la Congrégation.

Religieuse dominicaine, Sœur Maria-Julia avait une dévotion particulière pour le Rosaire. Âgée de 27 ans, elle fut déléguée au chapitre capitulaire général. En 1934, elle était supérieure de la maison de Wilno. Comme elle recueillait des enfants de toutes origines, les autorités de la ville lui étaient très reconnaissantes.

Nous sommes en septembre 1939, au moment où la seconde guerre mondiale allait éclater. Wilno, devint désormais Vilnius, et passa sous le contrôle des Soviétiques qui l'agrégèrent à la République Socialiste Soviétique de Lituanie. Sœur Maria-Julia dut fermer son école; mais  elle continua, en secret, à donner des cours de religion et de polonais, langue désormais interdite. En effet, après que l'armée soviétique eut occupé Vilnius, la situation des Sœurs Dominicaines se détériora rapidement. En septembre 1940, les sœurs qui travaillaient comme enseignantes furent licenciées. Au début, elles essayèrent de travailler comme personnel technique mais en 1941 la maison pour les orphelins fut placée sous le contrôle des autorités lituaniennes et sœur Maria-Julia dut quitter son couvent pour toujours. Le travail des Sœurs dominicaines qui durait depuis 1922 prenait fin. En mars 1942, la plupart des prêtres et des religieux furent arrêtés. Sœur Maria-Julia ne fut pas arrêtée et put aider à faire passer de la nourriture en cachette aux prêtres emprisonnés. On disait aussi que les sœurs dominicaines travaillant dans la clandestinité organisaient des secours pour les Juifs qui se cachaient.

Ainsi, les Dominicains ne quittèrent pas Vilnius. Avec Sœur Maria-Julia, ils continuèrent à enseigner en secret, pendant l'occupation allemande, jusqu'à ce que Sœur Maria-Julia fût arrêtée par la Gestapo, en août 1943, avec trois autres sœurs, pour "activités nationalistes" et collaboration avec les partisans polonais. Sœur Maria-Julia et ses trois sœurs furent torturées et emprisonnées non loin de Lukiszki, près de Vilnius.  Sœur Maria-Julia fut détenue pendant un an dans une cellule de strict isolement, dans un petit bloc de ciment où elle ne pouvait pas bouger. Les sœurs emprisonnées furent torturées physiquement et psychologiquement, tandis qu'un grand nombre de prisonniers étaient exécutés. Lorsque le front biélorusse se rapprocha de Vilnius au cours de l'été 1944, Stanislawa fut déportée avec d'autres prisonniers politiques au camp de concentration de Stutthof près de Dantzig, ou Gdansk, où elle arriva le 9 juillet 1944 et reçut le numéro 40992, tatoué sur son bras.

Sœur Maria-Julia fut affectée au bloc N° 27 dans le "camp juif". Il avait été prévu d’exterminer rapidement les déportés de cette section. Mais cela prit du temps parce que de nouveaux trains de juifs arrivaient sans cesse. Les conditions de survie dans ces camps de concentration sont très difficiles à décrire. La saleté, la vermine, la surpopulation régnaient dans ces camps. Les rations alimentaires étaient très faibles tandis que le travail, épuisant et réalisé dans des conditions extrêmes était insupportable. Par ailleurs, l'accès à l'eau était limité et les conditions de vie étaient surtout des conditions d'extermination. À cela s'ajoutaient des supplices supplémentaires effectués par les prisonniers de droit commun qui étaient toujours là, des criminels allemands et des SS.

Pourtant, même obligée de vivre dans de telles conditions, sœur Maria-Julia partageait son espoir et sa force spirituelle avec les autres prisonniers. Cela était très important compte tenu des traitements inhumains qu'ils subissaient. Ainsi, là où se trouvaient surtout des juifs, Sœur Maria-Julia institua des réunions de prière, chose strictement prohibée dans le camp où toutes les observances religieuses étaient interdites. Sœur Julia aidait toujours les autres, quel que fut leur nationalité. Elle était aimable avec tous ceux qui étaient dans une trop grande détresse; elle les consolait et les encourageait. Elle savait aussi leur donner la force de surmonter leurs peurs et leurs découragements.

En novembre 1944, une épidémie de typhus se déclara dans le camp dit "juif". En novembre 1944, on clôtura un secteur du camp pour les malades atteints de typhoïde, et les autorités du camp de concentration de Stutthof laissèrent les femmes sans aucune aide. Sœur Maria-Julia se porta volontaire pour les rejoindre. N'hésitant pas à risquer sa vie, Sœur Maria-Julia Rodzińska se mit comme au service des Juives du bloc 30, qui mouraient seules. Dans ce "bloc de la mort" totalement isolé afin d'éviter que la contagion se propage dans d'autres parties du camp, Sœur Maria-Julia organisa le partage de l'eau à boire, ainsi que la distribution des très rares pansements et des médicaments qui leur étaient parfois accordés. Elle poursuivit ce service même quand elle-même fut infectée par le typhus.

Sœur Maria-Julia Rodzińska, décéda du typhus le 20 février 1945, dans le bloc N° 27. Elle avait fait sacrifice de sa vie. Elle fut béatifiée le 13 juin 1999, avec 108 autres martyrs de la Seconde guerre mondiale, au cours du pèlerinage du pape Jean-Paul II en Pologne. Le 12 juin 2006, l'école primaire de Nawojowa prit le nom de la bienheureuse sœur Maria-Julia Rodzińska.

Quelle fut la sainteté de la Bienheureuse Stanislawa? Voici les qualités de Sœur Maria-Julia dont se souvinrent ses élèves et ses sœurs. Nous savons déjà que, concernant ses préoccupations pour tout ce qui concernait les pauvres et des abandonnés, Stanislawa avait reçu de nombreuses récompenses des autorités municipales. Dans sa fonction de supérieure, elle insistait beaucoup sur l’importance de la vie spirituelle de ses sœurs. Elle œuvra aussi comme assistante d’une fraternité laïque dominicaine.

Voici maintenant quelques précisions sur ce qu'elle vécut dans le camp de concentration de Stutthof. La vie des prisonnières dans ce camp était terrible. Les femmes les plus faibles étaient sélectionnées chaque jour pour mourir gazées. Quoique la plupart des détenues de son bloc fussent juives, issues de toute l’Europe, sœur Maria-Julia organisa avec elles une prière commune quotidienne. Après leur libération, les survivantes évoquèrent son courage, sa prière, son espérance et sa générosité. Elle partageait même ses si maigres repas avec les prisonnières. Et ces dernières lui demandaient d’intervenir lorsque des conflits surgissaient entre elles.

Une des prisonnières qui survécut à son emprisonnement dans le camp de Stutthof, Ewa Hoff, a écrit de Maria-Julia: "Elle était noble, désireuse d’aider, bonne. Dans le camp, où toute pitié était totalement oubliée, elle servait avec miséricorde". Au milieu des corps putrides et affamés, elle apportait espoir et charité. Elle réussit à tirer d’un amas de corps destinés à la crémation une femme qui était encore en vie. Cette femme qui survécut a, plus tard, rendu hommage à Sœur Maria-Julia.

Paulette Leblanc

 

 

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