Raymond Nonnat naquit en 1200 (ou 1204), dans une petite
ville de Catalogne en Espagne, à Portell (aujourd'hui
Sant Ramon). Son père appartenait à une noble famille
des Sarrois, famille alliée aux maisons de Foix et de
Cardone. Raymond fut immédiatement après sa naissance
surnommé Nonnat, c'est-à-dire "non-né". En effet, sa
mère mourut avant la naissance de Raymond.
Voici
ce qu'un document raconte: sa mère aurait attrapé, vers
le septième mois de sa grossesse une grave maladie. Elle
mourut peu de temps avant d'accoucher. Les médecins
d'alors étaient certains que l'enfant qu'elle portait
était également mort, et que c'était la mort de l'enfant
qui avait provoqué celle de sa mère. Cependant, le père
de Raymond, ne pouvant accepter de perdre à la fois son
épouse et son enfant, demanda à l'un de ses parents,
d'ouvrir, avec son poignard, le ventre de sa femme
morte. Ce parent fendit le côté gauche de la défunte, et
tout le monde vit apparaître un bel enfant plein de vie,
contre toute espérance humaine. Ce fut probablement la
première césarienne…
Le
petit Raymond fut confié à une nourrice, et grandit
normalement. Dès qu'il eut atteint l'âge de raison,
triste de n'avoir pas de maman, il se choisit Marie pour
Mère. Dès lors, la Sainte Vierge et son petit serviteur
vécurent ensemble. Partout où il se trouvait, l'enfant
saluait l'image de sa Mère céleste; de plus, il trouvait
chaque jour mille moyens de l'honorer. Évidemment, cela
ne pouvait pas plaire au démon qui lui apparut un jour
sous la forme d'un berger, pour le tenter. Mais Raymond
le reconnut, appela Marie à son aide, et le tentateur
disparut avec un cri horrible.
Quelques années passèrent, et voici notre Raymond,
encore très jeune, devenu berger. Curieusement, un jour,
quelqu'un vint dire au père de Raymond que son fils ne
faisait pas correctement son travail. Son goût pour la
prière lui faisait négliger la garde de son troupeau.
Surpris, le père de Raymond vint un jour le surprendre,
pour voir si ce qu'on lui avait dit était vrai. Et il
vit… Très surpris, il aperçut, au milieu du troupeau, un
magnifique jeune homme éclatant de lumière, qui gardait
les bêtes, comme un bon pasteur. Mais où était Raymond?
Tout simplement dans une chapelle voisine, priant au
pied d'une statue de la Sainte Vierge…
Maintenant Raymond devait réfléchir afin de préparer son
avenir. Que devait-il faire? Bientôt, sa maman, Marie,
vint calmer ses inquiétudes: elle lui fit comprendre
qu'il devait aller à Barcelone et se faire recevoir dans
l'Ordre de Notre-Dame-de-la-Merci, ou ordre des
Mercédaires. C'est ce qu'il fit, et il entra au
noviciat. Notons ici que les mercédaires se consacraient
à la libération des prisonniers réduits en esclavage par
les pirates musulmans qui infestaient alors la mer
Méditerranée.
Son
noviciat achevé, Raymond, toujours plein de ferveur, fut
ordonné prêtre en 1222, puis envoyé en Afrique pour
racheter des prisonniers retenus aux mains des Ottomans
et des pirates musulmans. Cela se passa d'abord très
bien, mais bientôt, il n'eut plus d'argent. Conformément
au vœu spécifique des religieux de Notre-Dame de la
Merci, il se livra lui-même comme otage, afin que tous
les prisonniers fussent libérés. Quant à lui, Raymond
Nonnat, il dut attendre que la rançon correspondant aux
sommes attachées à la libération des prisonniers, fût
intégralement payée.
Raymond Nonnat fit, du temps de son emprisonnement un
temps fructueux d'évangélisation. Il souffrit
courageusement tous les outrages de sa captivité, en
union avec le Rédempteur, offrant toutes ses douleurs
pour le salut des âmes, et pour la conversion de ses
persécuteurs. Un jour, il faillit même être empalé pour
avoir instruit, encouragé, évangélisé et converti
plusieurs de ses compagnons d'infortune; il baptisa
aussi quelques musulmans. Devant ces actes, ses geôliers
le fouettèrent au sang, lui percèrent les lèvres au fer
rouge et y mirent un cadenas qui n'était ôté de ses
lèvres que quand on voulait bien lui donner à manger.
Pourtant, malgré sa bouche cadenassée, Raymond chantait
encore les louanges divines: ce miracle, qui fut
attribué à de la sorcellerie, donna lieu à de nouvelles
persécutions.
Enfin vint la délivrance! En effet, Saint Pierre
Nolasque, fondateur de l'Ordre des Mercédaires avait
réussi à réunir la rançon exigée, et Raymond put alors
rentrer en Espagne.
Mais
ce retour
devint vite une épreuve, car le pape Grégoire IX le
créa cardinal et l'appela auprès de lui. Mais Raymond,
épuisé par tant de peines et d'épreuves, mourut avant
d'avoir pu arriver à Rome. Cela se passa à Barcelone, en
1240. Raymond Nonnat avait 36 ans. Mais que se
passa-t-il exactement à Barcelone?
Voici un résumé de ce que nous savons de la mort de
Raymond Nonnat. Parmi les étapes du voyage qui devaient
le conduire à Rome, Raymond Nonnat s'arrêta chez le
comte de Cardone, non loin de Barcelone. Dès que Raymond
fut entré dans la maison du comte, il fut saisi d'une
très grosse fièvre accompagnée de convulsions et de tous
les symptômes qui pouvaient laisser craindre une mort
prochaine. Raymond voulut s'y préparer par les moyens
ordinaires que l'Église présente à tous les fidèles;
mais comme les religieux de la Merci dépendaient du curé
de la paroisse où ils se trouvaient, et comme le curé du
lieu était absent, Raymond dut attendre avant de
recevoir les derniers Sacrements. Alors Raymond éleva
les yeux au ciel et un phénomène étrange se passa.
Soudain, dans la chambre où Raymond était couché, et en
présence du comte, des religieux et de plusieurs autres
personnes qui l'assistaient, une procession entra:
c'étaient des hommes inconnus, revêtus d'habits blancs,
comme les religieux de la Merci; chaque personne tenait
à la main, un flambeau allumé. Notre-Seigneur les
suivait ayant un cierge entre ses mains; mais la lumière
qu'il répandait était si grande, que tous ceux de
l'assemblée en furent éblouis. Puis un phénomène étrange
se produisit qui dura environ une demi-heure; mais seul
Raymond put le voir.
Après la demi-heure, la procession s'en alla, suivie par
le comte et les assistants qui étaient présents. À leur
retour ils trouvèrent le saint cardinal agenouillé, les
yeux baignés de larmes, le visage et les mains levés
vers le ciel, comme sortant d'un profond ravissement. On
lui demanda ce qui s'était passé, mais il répondit par
ce mot de David: "Que le Dieu d'Israël est bon pour
ceux qui ont le cœur droit et innocent."
Enfin, il avoua qu'il avait reçu le très-auguste
Sacrement. Ainsi, tous ses désirs étaient accomplis; peu
de temps après il rendit l'esprit, en disant: "Mon
Dieu, je remets mon âme entre vos mains." C'était le
31 août, dernier Dimanche d'août de l'année 1240.
Après sa mort il y eut de nombreux miracles, mais aussi
des contestations sur le lieu de sa sépulture.
Finalement Raymond Nonnat fut enseveli dans la chapelle
Saint-Nicolas, là où la Vierge lui était apparu pour lui
indiquer sa vocation.
Saint Raymond Nonnat a été canonisé par le pape
Alexandre VII en 1657. Sa fête a été fixée au 31 août.
Il est le saint patron des femmes enceintes et des
sages-femmes.
Paulette Lebanc |