 |
La plupart de nos contemporains sont des gens
impatients. Et nous-mêmes, nous tombons souvent dans les
manifestations de ce défaut. Il nous faut tout, tout de
suite, et attendre est vraiment une épreuve douloureuse.
Moi qui vous parle en ce moment, je connais bien ce
défaut; aussi, lorsque j'ai aperçu, au cours de mes
recherches, qu'un saint s'appelait Patient, ai-je voulu
en savoir plus. Et voici ce que j'ai trouvé.
Tout d'abord j'appris, extrait d'un texte du XIVème
siècle, de Saint Grégoire de Tours, que "l'histoire
ne nous apprenait rien de certain touchant la naissance,
l'éducation et les premiers emplois de saint Patient,
évêque de Lyon. Il fut choisi, pour gouverner l'Église
de cette ville, après la mort de saint Eucher."
On croit cependant savoir qu'il assista, avec saint
Euphrone, évêque d'Autun, à l'ordination de Jean, évêque
de Châlon-sur-Saône. Quant au reste de l'histoire de
saint Patient, nous ne le connaissons que par ce que
Sidoine Apollinaire,
un ami et contemporain de saint Patient, nous en a
raconté.
Ainsi,
Patient
fut évêque de
Lyon
au
Ve siècle,
peut-être vers 470.
Il était réputé pour sa grande charité et son dévouement
aux pauvres. Il semble que Dieu ait suscité saint
Patient pour être le soutien et la consolation de la
Gaule, au milieu des calamités dont ce pays fut affligé
pendant une grande partie du cinquième siècle. Les
Bourguignons, ou Burgondes, alors maîtres de la ville de
Lyon, étaient presque entièrement barbares, et de plus
infectés par les hérésies de l'arianisme et du
photinianisme. Le photinianisme, c'est le nom donné à
l'arianisme dont les idées
avaient été reprises
et poussées jusqu'aux
derniers excès
par Photin, évêque de
Sirmium, en Serbie, et l'une des capitale de l'empire
romain.
Le saint évêque Patient trouva d'abord le moyen de
gagner le cœur des bourguignons; il éclaira ensuite
leurs esprits, il les convainquit de la vérité, et les
retira de leurs erreurs.
Évêque de Lyon, Patient consacrait ses veilles à la
prière et employait les sommes d'argent qu'il possédait
pour soulager les pauvres et la misère de son peuple.
Lors d'une famine, (vers 480) il fit arriver du blé par
le
Rhône
et la
Saône
pour nourrir la population. Saint
Sidoine
Apollinaire
raconte:
"À Lyon, vers 480, saint Patient, évêque, poussé par la
charité, fit distribuer une grande quantité de blé aux
cités le long du Rhône et de la Saône, pour venir en
aide aux populations affamées et consacra largement son
apostolat à convertir les hérétiques et à prendre soin
des indigents."
Mais son zèle ne se concentrait pas à la seule province
dont il était chargé; il embrassa d'autres parties de la
Gaule. En effet, les Burgondes avaient ravagé le pays
non seulement le long du Rhône et de la Saône jusqu'à la
Loire, mais aussi les provinces voisines occupées par
les Burgondes.
Saint Sidoine Apollinaire, qui était l'ami de saint
Patient et qui le regardait comme son évêque avant qu'il
fût lui-même élevé à l'épiscopat, ne parlait de lui
qu'avec de grands éloges. Il affirmait qu'il ne lui
manquait aucune des vertus qui forment un saint prélat.
Il relève principalement sa charité pastorale qui
s'étendit jusqu'aux extrémités des Gaules… Patient
considérait toujours la nature des besoins sans
s'occuper de la qualité des indigents. Sidoine admirait
en saint Patient, à la fois son zèle pour la gloire de
Dieu, et sa charité pour les pauvres. Patient savait,
comme saint Ambroise, tempérer la sévérité par la
douceur, et l'activité par la prudence. Ses soins et ses
discours convertirent un grand nombre d'hérétiques, et
attiraient chaque jour à l'église de nouveaux enfants.
Voici plus étrange: les revenus dont saint Patient avait
besoin, se multipliaient en quelque sorte dans ses
mains. Il les employait à nourrir ceux qui étaient dans
l'indigence et à bâtir de nouvelles églises, à réparer
ou à embellir les anciennes. L'Auvergne et l'Aquitaine
ressentirent aussi les effets de ses libéralités et lui
en furent très reconnaissants. Tout croissait sous sa
main dans la maison du Seigneur dont Patient avait
l'intendance; seul le nombre des hérétiques diminuait de
jour en jour, grâce à l'application qu'il apportait pour
les convertir.
La grandeur et la solidité de la vertu de notre saint
prélat se manifestaient dans toutes ses autres actions.
Notre Saint construisit de nouvelles églises; d'autres
furent restaurées et embellies par ses soins: on peut
citer ici la construction de l'église primitive de
Saint-Irénée, et la transformation, en un riche
sanctuaire, de la grotte où saint Zacharie avait déposé
les corps des glorieux Martyrs.
Saint Patient fit construire 2 autres églises, celles de
Saint-Romain et de Saint-Pierre le Vieux. La première
occupait la place où, suivant la tradition, les eaux qui
tombaient de la colline, teintes du sang des confesseurs
de la Foi, après le massacre ordonné par Sévère, avaient
formé comme un lac avant de s'écouler dans la Saône. La
seconde était destinée à perpétuer la date du jour où
avait eu lieu ce massacre. On croit savoir que saint
Patient bâtit encore l'église de Saint-Pierre et
saint-Saturnin, dont les historiens rapportent la
fondation à l'an 490.
Nous ne connaissons aucun écrit de saint Patient;
cependant on lui attribue communément la 48ème
des homélies qui furent attribuées à Eusèbe d'Émèse.
C'est une réfutation des erreurs des Photiniens et des
Ariens. Par contre, ce dont on est sûr, c'est que
l'Église lui est redevable de la Vie de saint
Germain d'Auxerre, qu'il fit écrire par
Constance, prêtre de son clergé.
Saint patient mourut vers l'an 491, et peut-être le 14
septembre, jour où l'on célèbre sa fête à Lyon. Son
corps fut enterré, ou du moins transporté dans l'église
Saint-Just. Ses reliques y furent trouvées longtemps
après; on les y conserva religieusement jusqu'au XVIème
siècle, où elles furent dissipées avec beaucoup
d'autres, lors des troubles commis par des Huguenots à
l'occasion des guerres dites "de religion" qui ruinèrent
l'église de Saint-Just.
Mes chers amis auditeurs, vous avez pu remarquer toutes
les incertitudes qui entourent la vie de notre saint
Patient. C'est pourquoi je vous fais une suggestion:
pourquoi, parmi vous, quelqu'un ne prendrait-il pas son
courage à deux mains, et n'irait-il pas consulter des
archives, à Lyon notamment. Les résultats de cette étude
nous intéresseraient tous.
Voici une autre suggestion: nous pourrions aussi
demander à notre Église de faire de saint Patient le
grand Patron de tous nos contemporains qui s'agitent
trop ou qui s'impatientent…
Paulette Leblanc |