Marija de Jésus Crucifié Petković
Religieuse, Bienheureuse
(1892-1966)

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JUILLET

Marija Petkovic, plus connue sous son nom religieux Marija de Jésus Crucifié, naquit le 10 décembre 1892 dans la paroisse de Tous les Saints à Blato, sur l'île de Korcula, île située dans la mer Adriatique et appartenant à la Croatie. Marija était le sixième des huit enfants d'Antonio et de Maria Petkovic. Les parents de Marija, très riches,  éduquèrent cependant leurs enfants dans la foi chrétienne et une vie très pieuse. Antonio, père de Marija, employait dans son entreprise agricole, 750 journaliers. Très jeune encore, Marija, qui manifestait un penchant pour la piété et la miséricorde, et ayant constaté les souffrances et la faim de la population de l'ile, décida de protéger les pauvres, ses "frères choisis et aimés du Seigneur", comme elle les appelait. Elle voulut donc se faire religieuse, malgré l'opposition de sa famille qui voulait la marier; mais elle hésitait entre la vie apostolique et la vie contemplative.

En attendant, Marija s'occupait des enfants des journaliers qui travaillaient pour son père. Peu à peu elle décida de s'orienter vers la vie contemplative. Mais son évêque, Monseigneur Josif Marcelic, évêque de Dubrovnik, lui montra la misère qui régnait partout en cette période de crise: c'était pendant la guerre de 1914-1918, et la maladie que l'on appelait la grippe espagnole commençait ses ravages. En conséquence, afin d'aider les pauvres et les personnes dans le besoin, Marija suivit les conseils de son évêque Mgr Josip Marcelic, et le jour de l'Annonciation de l'année 1919, elle fonda une institution religieuse, les Filles de la Miséricorde "pour l'éducation et l'instruction de la jeunesse féminine du lieu".  En effet, Marija de Jésus Crucifié Petkovic aimait rencontrer les pauvres ainsi que les personnes marginalisées et méprisées. Elle reconnaissait en eux le visage de Jésus souffrant et se réjouissait de pouvoir les servir.

En 1928, Mgr Marcelic, s'inspirant de la Règle du Tiers-Ordre de saint François, fit entrer canoniquement la nouvelle Congrégation dans le droit diocésain. Trente ans plus tard, le 6 décembre 1956, la congrégation fut reconnue par Rome et ses constitutions approuvées. Marija Petkovic, du diocèse de Dubrovnik, et les sœurs de sa Congrégation, devaient unir leur vie spirituelle et leur vie apostolique, afin de répandre la foi et l'amour dans le monde des pauvres et des plus petits. Elle-même, Marija, puisant sa force spirituelle dans la prière, était capable de supporter les offenses les plus cruelles, car elle faisait "de la pauvreté et de l'humilité les plus grandes valeurs de sa vie". De plus, elle suivait exactement les conseils des pasteurs de l'Église, envers lesquels elle se montrait docile et obéissante.

Ayant une véritable estime pour les directives de son Évêque et du Souverain Pontife, elle incitait ses sœurs à faire de même. Un jour, pour expliquer à ses Sœurs la signification des constitutions, elle écrivit: "Les constitutions sont la parole et la loi de notre Seigneur... La sainte Règle est le livre de la vie, la voie de la croix, la clé et le lien de l'amitié éternelle." Beaucoup de jeunes filles, attirées par cette vie de générosité et d’oubli de soi, rejoignirent la Communauté des Filles de la Miséricorde.

Sœur Marija allait là où la nécessité l’appelait. C'est ainsi que son Institut s’étendit en Vojvodine, en Macédoine et en Serbie, malgré toutes les nombreuses difficultés qui se présentaient. Au début de l'année 1936, un Franciscain Missionnaire lui demanda d’envoyer vingt Sœurs en Amérique du sud. Faisant confiance à la Providence, et convaincue qu'elle devait s'engager dans la mission, Sœur Marija de Jésus Crucifié envoya des religieuses qui arrivèrent à Buenos Aires, en Argentine, le 31 Mars 1936.

En 1940, Sœur Marija se rendit en Amérique du sud pour une visite officielle de ses Communautés. Mais, comme elle ne pouvait pas rentrer en Croatie comme prévu, à cause de la 2ème Guerre mondiale, elle s'installa en Argentine où elle resta pendant douze ans, jusqu’en 1952, et elle s'efforça de développer son œuvre, non seulement en Argentine, mais également au Paraguay. De retour en Europe, elle se rendit à Rome pour ouvrir la maison mère. Marija après avoir gouverné sa Congrégation pendant quarante ans fut victime en 1958, d’une hémorragie cérébrale qui la paralysa partiellement. Dès lors, convaincue que sa mission de direction de la Congrégation devait cesser, elle renonça à sa charge, tout en continuant à soutenir ses Sœurs; et cela dura huit ans...

Marija mourut le 9 juillet 1966. Nous devons savoir que jusqu'à sa mort, Marija exhorta toujours ses Sœurs afin que, par leur comportement et leurs sacrifices, "elles montrent que s'étaient incarnés en elles l'amour, la bonté et la miséricorde de Dieu". Aujourd'hui, la Congrégation des Filles de la Miséricorde travaille dans plusieurs pays d'Europe et d'Amérique. Les sœurs s'occupent de l'éducation des enfants et des jeunes, de l'assistance aux personnes âgées et malades, de l'apostolat paroissial, ainsi que de la promotion de la dignité de la personne et du développement des missions.

Marija, Sœur Marie de Jésus Crucifié, fut béatifiée le 6 juin 2003, par le pape Jean-Paul II, en Croatie, au cours de son voyage dans ce pays. Dans son homélie au cours de la cérémonie de béatification, le pape Jean-Paul II fit remarquer que Sœur Marija, avait été "conquise par l’amour de Dieu, ce qui l’avait décidée à se donner à lui pour toujours en se consacrant totalement au bien spirituel et matériel des plus pauvres ". Pour eux, poursuivit le pape, "elle fonda la Congrégation des Filles de la Miséricorde, du tiers-ordre régulier franciscain, avec pour tâche précise de diffuser et de propager la connaissance de l’amour divin par la pratique de la miséricorde spirituelle et matérielle."

En même temps, toujours dans son homélie, Jean-Paul II mettait en garde ses auditeurs contre les leurres de "la frénésie de la vie moderne qui peut conduire à l’oubli voire à la perte de notre humanité. Peut-être plus qu’à d’autres périodes de l’histoire, disait-il, avons-nous besoin du génie de la femme, capable de rendre l’homme plus sensible, quelles que soient les circonstances."

Jean-Paul II encouragea aussi les femmes consacrées à Dieu en disant: "Je pense aussi aux femmes consacrées comme Marija Petkovic, qui ont répondu à l’invitation à suivre sans réserve le Christ chaste, pauvre et obéissant. Ne cessez pas de répondre fidèlement à l’unique amour de votre existence, car la vie consacrée n’est pas seulement un engagement généreux envers l’homme, mais avant tout une réponse au don venu d’En-Haut qui doit être accueilli avec une disponibilité complète. Que l’expérience quotidienne de l’amour gratuit de Dieu vous pousse à offrir votre vie sans réserve au service de l’Église et de vos frères, en lui confiant le présent et l’avenir".

Et le pape fit l'éloge de Marija, "fille du diocèse de Dubrovnik qui réussit dans sa vie spirituelle, à unir l'œuvre apostolique de la diffusion de la foi au soin et à l'amour pour les petits. Elle était capable de supporter les offenses et elle fit de la pauvreté et de l'humilité les plus grandes valeurs de sa vie".

Voici maintenant quelques détails chronologiques concernant la vie de Sœur Marija de Jésus Crucifié. Après son passage à l'école municipale, elle entra à l'école ménagère de Blato, fondée par des religieuses arrivées d'Italie, les Servantes de la Charité. En 1906, elle devint Enfants de Marie, et rencontra l'évêque de Dubrovnik, Mgr Josif Marčelić, auquel elle fit part de son désir d'être religieuse; et elle fit le vœu privé de chasteté. À partir de 1909 Marija fut la présidente des Filles de Marie. De plus, elle aidait ses parents à la maison, et s'occupait de la catéchèse dans sa paroisse. En 1911, après la mort de son père elle se donna encore plus au service de sa mère et de ses frères et sœurs. Pendant la Première Guerre mondiale, en 1915, toujours sous le regard bienveillant de son évêque, elle créa une première association: la Société des Mères Catholiques, et, en 1917 elle prit la tête du Tiers-Ordre franciscain. Elle participait également à la soupe populaire organisée par les Servantes de la Charité.

En 1919, Marija entra chez les Servantes de la Charité. Mais la supérieure mourut deux mois plus tard, et les religieuses retournèrent en Italie, à l'exception de quatre, dont notre Marija. Avec l'accord de l'évêque, ces quatre religieuses décidèrent de suivre la règle du Tiers-Ordre franciscain, et, en hiver de la même année 1919, elles ouvrirent à Blato un centre d'hébergement, une crèche et un orphelinat. L'été suivant, toujours sur l'île de Korčula, mais à Pricba, Marija rédigea les premières Constitutions de l'Ordre des Filles de la Miséricorde. Cet Institut serait un Tiers-ordre franciscain indépendant, avec pour mission de faire connaître l'Amour divin et la Miséricorde, par des actes de charité. L'évêque présidera la présentation de cette nouvelle institution le jour de la fête de saint François d'Assise, le 4 octobre 1920. Ce jour-là, Marija prendra le nom de Marija od Propetoga Isusa, en français Marija de Jésus Crucifié, et sera choisie comme mère supérieure. Elle le restera jusqu'en 1952.

Les Filles de la Miséricorde, pour assurer les moyens matériels et financiers dont elles avaient besoin pour aider les enfants pauvres et affamés, n'hésitèrent pas à se rendre dans les plaines fertiles de Slavonie, notamment à Backa. C'est là, qu'elles reçurent une aide toute particulière du pape Pie XI. En 1923, Marija fonda en Serbie, à Subotica d'abord, puis dans plusieurs villes de Croatie, de Serbie et de Macédoine, des œuvres pour les enfants. Par ailleurs, nous ne devons pas oublier que pendant les trente-deux années de son supériorat, Marija voyagea beaucoup, en Croatie, en Italie, et en Amérique Latine et ouvrit des orphelinats, des hôpitaux, des écoles. Enfin, en 1952, Marija vint à Rome pour établir la maison-mère de la Congrégation. Elle s'éteignit à Rome à soixante-quatorze ans, le 9 juillet 1966.

Paulette Leblanc

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