Luigi Monza naquit à Cislago (Varese, Lombardie) le 22
juin 1898 et fut baptisé le jour même. Les seules
richesses de sa famille étaient le travail, le courage
et la foi. La souffrance éprouva vite sa famille car
deux de ses
frères Pedro et Antonio Giuseppe moururent
l'un à l'âge de 5 ans et l'autre de 2 ans. Luigi était
lui-même si fragile qu'il fut confirmé à l’âge de un an
et demi, par le cardinal Andrea Carlo Ferrari en visite
pastorale dans la région.
Encore très jeune, Luigi fréquentait un patronage et
servait la messe. Les études étant alors considérées
comme un luxe, Luigi n'alla à l'école primaire que
pendant trois ans, et il dut travailler chez un
fabricant de chaussures. Il aidait son père pendant ses
temps libres. Heureusement, aidé par son curé, il put,
malgré tous les obstacles rencontrés, continuer à
étudier. Au début du mois de janvier 1913, sa sœur
Cristina entrait dans un couvent. À l'automne 1913 Luigi
pensait entrer dans un collège tenu par des salésiens,
près d'Asti. Mais l'horizon de Luigi se faisait de plus
en plus sombre: son père, pendant son travail, tomba
d'un arbre, se cassa la colonne vertébrale.
Bientôt Pietro, un des frères de Luigi, fut appelé sous
les drapeaux durant la première Guerre mondiale; la
maman restait seule, avec Mario âgé seulement de sept
ans. Normalement, comme soutien de famille, Luigi aurait
dû renoncer au séminaire, où son curé lui avait obtenu
une entrée gratuite. Que devait-il faire? Heureusement,
la maman de Luigi, femme exceptionnellement généreuse
lui dit: "Ne te fais pas de souci pour nous; toi, vas,
c’est pour le Seigneur." Hélas! peu après il fut enrôlé
à son tour pendant les derniers mois de la guerre.
Enfin, après sa libération, il put reprend ses études,
à
Varese de 1919 à 1924. Il suivit ensuite des cours de
théologie à Venise. Enfin, le 19 septembre 1925, il
était ordonné prêtre. Luigi, devenu don Monza, avait 27
ans.
Don Monza fut d’abord nommé vicaire de paroisse à Vedano
Olona (Varese). Ses dons pour l'éducation des jeunes se
révélèrent rapidement: il créa une chorale de jeunes,
donnait des cours de français pour ceux qui émigraient
en Suisse romande ou en France, enfin il monta une
équipe de sport intitulée “Viribus unitis” (union des
forces). Mais ce qui était au cœur des activités de don
Monza, c'était la prière. Les initiatives de Luigi
rencontrèrent un tel succès, surtout son équipe
sportive, que le parti fasciste naissant, essaya de
créer des groupes concurrents. Certains des jeunes de
don Monza furent agressés. On alla jusqu’à imaginer un
complot visant le maire: le vicaire et son curé furent
naturellement accusés d’en être les inspirateurs.
Les deux prêtres furent emprisonnés ainsi que quelques
jeunes. Reconnus innocents, ils furent libérés, mais la
situation de don Monza étant devenue invivable, il dut
être nommé ailleurs, à la paroisse sainte Marie du
Rosaire à Milan. Là, il chercha à évangéliser les jeunes
hommes, mais fut de nouveau incompris. On le transféra,
en novembre 1928, au sanctuaire de la Vierge des
miracles à Saronna.
Don Luigi avait beaucoup souffert moralement et
spirituellement. Il ne comprenait pas le pourquoi de
toutes ces incompréhensions, mais sa maturité
s'approfondissait. Pendant quelques mois, il s'absorba
dans une vie contemplative profonde. Enfin, à son
activité de chapelain et de confesseur, il ajouta
l’action auprès des jeunes: comme il l'avait fait à
Vedano Olona, il fonda une chorale de jeunes qu'il
s'efforçait de former en profondeur. Mais bientôt don
Monza fut rempli d'une impression étrange. Nous sommes
en 1932;
Luigi avait le sentiment qu'une foule de travailleurs
s'activait autour de lui. Il aur ait voulu
participer à leur travail, mais une mystérieuse force
l'arrêtait et il était triste. Il lui semblait qu'on
l'appelait pour assister, animer et guider ce travail,
et cependant il ne pouvait pas y prendre part
directement. Cette idée le torturait mais il ne pouvait
pas l'exprimer.
Ce
travail auquel don Luigi se croyait appelé, devait avoir
pour unique but: la charité, considérée "comme la
célébration du mariage de Dieu avec l'humanité."
C'était comme si on l'invitait à proposer à quelques
âmes, à pratiquer la charité pour former une famille.
Cette idée s'approfondit en lui, puis s'éclaira; ainsi
le travail de quelques personnes témoignerait de l'amour
qui deviendrait famille: La "Nostra Famiglia" était en
train de naître. Bientôt don Luigi, confesseur,
rencontra
deux jeunes chrétiennes, d’abord Clara Cucchi, puis
Teresa Pitteri, et il créa avec elles une association
dénommée “Nouvelles familles”, communauté de femmes
vivant dans le monde la consécration totale à l’amour du
Christ, et imitant la ferveur apostolique et caritative
des premiers chrétiens. Comme les premiers chrétiens les
associées ne se distingueraient ni par le costume, ni
par les coutumes. Leur seul témoignage serait celui de
leur vie chrétienne.
Nous
sommes en 1933; don Luigi propose à Clara puis à Teresa,
qui n'avaient pu rester dans une congrégation
religieuse, si elles accepteraient ce genre de vie dans
le monde. En 1934, elles acceptèrent. De nouveau don
Luigi dut affronter un retard, car, en 1936, le Cardinal
Schuster le nomma curé de St. John in Lecco, le
présentant comme "un prêtre selon le cœur de Dieu."
Ce prêtre devrait construire le "pont de charité",
c'est-à-dire réaliser la catéchèse, prêcher, assurer
l'adoration eucharistique, mettre en place une action
Catholique et des activités de charité et de détente.
Don Luigi priait beaucoup devant l'Eucharistie pour
laquelle il avait une très grande dévotion. Il priait
pour son peuple et son âme était constamment orientée
vers la Gloire de Dieu.
La
première réunion officielle
de l’association put cependant se tenir le 30 novembre
1936. Ainsi naissait l’un des premiers ‘Instituts
séculiers’ de l’Italie. Ses membres auraient à vivre les
trois vœux religieux de chasteté, pauvreté et
obéissance, tout en restant dans le monde. Leur nom
serait “Petites Apôtres de la charité”. Leur programme
comporterait trois points:
– faire bien le bien,
– contempler le Christ et se nourrir chaque jour de sa
parole,
– enfin, sortir de sa maison et aller au monde qui se
perd, pour sauver les individus.
Malgré de grandes difficultés, notamment financières, et
grâce à l'appui de Frère Trezzi, prêtre à Vedano Olona,
don Monza put acheter un terrain à Vedano Olona, son
ancienne paroisse; la première pierre de la future
maison fut posée le 29 août 1937. Quand tout fut prêt,
en 1939, des retraites purent y être prêchées. Puis, le
cardinal Ildefonso Schuster, son évêque, (lui aussi
futur bienheureux) le nomma curé de saint Jean alla
Castagne di Lecco, paroisse d’un faubourg de Milan. Don
Monza réussit très bien auprès de ses paroissiens. Au
centre de son activité, il avait mis l’adoration
eucharistique.
Mais, la deuxième Guerre mondiale éclata. Les retraites
à Vedano Olona durent cesser. Don Luigi multiplia ses
actes charitables, allant même jusqu'à cacher des
résistants au régime fasciste et de nombreux juifs de
plus en plus menacés. Cependant il
n’abandonnait pas son Institut, et parfois, il
organisait des ‘Exercices spirituels’. En janvier 1946,
le directeur de l'Institut neurologique de Milan, le
Professeur Giuseppe Vercelli, demanda aux associées de
s’occuper de la rééducation des enfants handicapés
psychiques. Elles n’avaient pas de
formation pour cela, mais elles y virent un appel du
Seigneur et elles acceptèrent. Et, avec elles, don Luigi
Monza fonda l'Oeuvre appelée "La Nostra Famiglia",
“Notre Famille”, dédiée aux enfants handicapés
psychiques. Il y a encore actuellement de nombreuses
maisons de "Nostra Familia", en Italie et dans le monde.
Quand la guerre eut pris fin, les hommes qui avaient été
mobilisés revinrent. Mais la moralité se détériorait
dans tous les milieux. Et les tensions sociales se
faisaient de plus en plus dures. Don Luigi multiplia ses
actions, y compris des pèlerinages. Sa paroisse de saint
Jean était vivante car il s'efforçait, malgré les
difficultés, de toujours faire la volonté de Dieu sur
lui. L'institut se développait lentement car son genre
de vie: des laïques consacrées vivant dans le monde,
était mal perçu et don Luigi était très critiqué. Or,
contre toute attente, le 2 février 1947, Pie XII, dans
la constitution "Provida Mater", reconnaissait les
Instituts séculiers. Le 18 janvier 1950, l’institut des
“Petites Apôtres de la charité” était officiellement
approuvé. Dorénavant les Petites apôtres de la charité
pourraient mettre en application ce qui avait été l'idée
originale de leur fondateur: vivre la charité et le
célibat, comme les premières chrétiennes appelées à ce
témoignage avaient su le faire dans les villes païennes
d'Antioche, de Rome, d'Alexandrie, et d'autres. Selon le
Père fondateur, don Luigi Monza, quitter le monde et
s'enfermer dans des couvents n'était plus suffisant. Les
hommes d'aujourd'hui avaient un grand besoin du
témoignage de personnes répondant à l'appel de Dieu pour
aller chercher les brebis perdues. Don Luigi disait
qu'il voulait sauver le monde, et faire connaître Jésus
par la charité.
Don
Luigi Monza avait vécu de front ses engagements de curé
et de fondateur. Grâce à lui, l’œuvre des Petites
Apôtres de la charité s’était affermie; elle se
préparait à affronter un avenir qu'elles n'auraient pu
imaginer. L’œuvre avait encore besoin de son fondateur
pour s’affermir, mais Dieu en décida autrement. La santé
de don Luigi avait toujours été fragile, et les
accidents cardiaques dont il souffrait depuis longtemps
s'accentuaient, sûrement aggravés par la douleur de la
perte de sa mère, survenue le 17 avril 1953. Certains
considéraient les engagements de don Monza comme
excessifs. Et même, le saint cardinal Schuster
l'exhortait catégoriquement à choisir entre la paroisse
et la direction de ses religieuses.
Don
Monza souffrit beaucoup de ces critiques, en particulier
de celles de son archevêque. Il lui expliqua la
situation dans une lettre, tout en se déclarant prêt à
obéir inconditionnellement. Mais le cardinal, tout comme
don Luigi Monza, était proche de sa fin. Usé par son
apostolat et ses épreuves, Don Monza subit un grave
infarctus le 25 août 1954. Il comprit qu’il ne guérirait
pas. En toute sérénité il mourut le 29 septembre
suivant, en murmurant: "Mon Jésus, miséricorde". Il
avait 56 ans et trois mois.
Paulette Leblanc |