Saint Léger, ou Léodegard (du germanique Leudgari)
naquit vers 615 ou 616. Il serait issu d'une vieille et
illustre famille franque de la région de Poitiers
apparentée aux nobles burgondes. Compte tenu des
rivalités existant alors entre l'Austrasie, la Neustrie
et la Burgondie, sa vie fut particulièrement compliquée.
Ses parents le conduisirent, alors qu'il était encore
très jeune, à la cour du roi Clotaire II, prince, fils
de Frédégonde, qui régna d'abord dans la Neustrie; mais
bientôt, Clotaire II réussit à rassembler toute la
monarchie française en son unique personne. Aussi,
quelque temps après, Léger fut-il envoyé à Mgr Didon,
son oncle maternel, évêque de Poitiers. Le prélat mit
son neveu sous la conduite d'un savant et vertueux
prêtre. Puis il le fit venir dans son palais, pour
achever lui-même son éducation. Il constata avec
plaisir, que son neveu faisait encore plus de progrès
dans la science des saints que dans l'étude des lettres.

Celui qui deviendra saint Léger avait appris qu'on ne
peut être parfait sans marcher en la présence de Dieu.
Aussi s'unissait-il au Seigneur par la pratique du
renoncement et de l'humilité. Son oncle évêque, frappé
de ses dons et de son mérite, l'éleva au diaconat, bien
qu'il n'eût que vingt ans. Quelque temps après il le fit
archidiacre et le chargea du gouvernement de son
diocèse. L'abbé du monastère de Saint-Maxence du diocèse
de Poitiers, étant mort, l'oncle de Léger l'obligea à le
remplacer. Et Léger gouverna ce monastère pendant six
ans, avec autant de zèle que de prudence.
Les
événements politiques vont bientôt se compliquer. Clovis
II, roi de Neustrie et de Bourgogne, mourut en 656,
laissant trois fils en bas âge, Clotaire, Childéric et
Thierri. Clotaire devint le roi Clotaire III. Sa mère,
sainte Bathilde, déclarée régente, se fit aider dans le
gouvernement de l'État par saint Éloi de Noyon, saint
Ouen de Rouen et saint Léger qui, en 658 fut nommé
évêque d'Autun dont le siège était vacant et déchiré par
les nombreuses factions. Léger y ramena la paix. Il
soulagea les pauvres, instruisit le clergé… En 670 il
convoqua un synode à Autun, pour la "réformation des
mœurs"; de ce synode, il nous reste encore quelques
documents concernant, entre autres, les religieux à qui
il fut ordonné d'observer la Règle de Saint Benoît, et
d'exercer l'hospitalité.
Pour
comprendre la suite, il faut savoir qu'il existait des
rivalités terribles entre la Burgondie, la Neustrie et
l'Austrasie. Ainsi, après la mort de Clotaire III, le
gouvernement de Childéric II fut heureux et sage, tant
qu'il suivit les conseils de saint Léger. Mais comme il
était jeune, et d'un caractère impétueux, il s'abandonna
bientôt aux plaisirs et aux haines familiales. Saint
Léger condamna publiquement sa conduite. Mais cette
hardiesse déplut au roi, et le saint évêque fut exilé à
Luxeuil. Childéric mourut assassiné en 673.
Alors, Dagobert, fils de Sigebert II, fut rappelé
d'Irlande où il avait été exilé, et on le proclama roi;
et l'évêque Léger, libéré, retourna à Autun. Mais les
rivalités familiales et courtisanes recommencèrent et la
ville d'Autun, assiégée, ainsi que son évêque Léger
furent de nouveau menacés; mais Léger refusa de
s'enfuir, car il estimait que sa présence à Autun était
nécessaire. Il distribua tout ce qu'il possédait aux
pauvres, et fit ensuite son testament. L'ennemi exigea
qu'on lui livrât Léger pour que la ville fût épargnée.
La ville d'Autun se défendit si bien qu'elle fut sauvée,
mais des traîtres livrèrent Léger aux ennemis qui le
torturèrent. Cependant, le Seigneur chargé de surveiller
l'évêque, le comte Vaneng, le considéra comme un martyr
de Jésus-Christ, et le plaça dans le monastère de
Fécamp. Le saint évêque y passa trois ans. Ses plaies
guérirent, et il recouvra l'usage de la parole, ce qui
fut regardé comme un miracle. Il instruisait les
religieuses du monastère, offrait tous les jours le
saint sacrifice de la messe, et priait continuellement.
Mais
les persécutions contre saint Léger reprirent. Quatre
soldats le menèrent dans une forêt et s'arrêtèrent à
l'endroit où ils devaient le supplicier. Alors, trois
d'entre eux se jetèrent à ses pieds et le conjurèrent de
leur pardonner. Le saint évêque pria pour eux; puis
ayant dit qu'il était prêt à mourir, le quatrième soldat
lui coupa la tête. Son martyre eut lieu en 678, dans la
forêt d'Iveline, dite aujourd'hui de Saint-Léger,
dans le diocèse d'Arras, sur les confins de celui de
Cambrai.
L'évêque de Poitiers avait fait transférer les reliques
de l'évêque Léger dans le monastère de Saint Maixent.
Plusieurs miracles s'étant produits par l'intercession
de saint Léger, de nombreuses églises furent bâties en
France, en son honneur. Saint Léger fut canonisé en 681.
Sa fête est le 2 octobre. Une complainte, dite
"de saint Léger", écrite en 970, sera l'un des tout
premiers textes littéraires de la langue romane, qui
commençait à devenir une langue populaire.
Voici quelques petites informations. L'Austrasie était
le Royaume des Francs orientaux à l'époque
mérovingienne, du VIe au V IIIme
siècle. L'Austrasie était souvent opposée à la Neustrie,
royaume franc occidental. Les maires du palais
d'Austrasie, intendants de la maison du roi mérovingien,
puis chefs de l'administration royale, furent les
ancêtres de la dynastie carolingienne. La Burgondie est
en gros, située entre l'Austrasie et la Neustrie.
Paulette Leblanc |