Jules-César Rossi, ou Césaire Rossi, plus connu sous le
nom de Saint Laurent de Brindisi, naquit à Brindisi le
22 juillet 1559. Brindisi est une ville portuaire, très
connue depuis l'antiquité et située dans les Pouilles,
en Italie, sur la mer Adriatique. Ses parents, Guillaume
de Rossi et Élisabeth Masalla appartenaient à la famille
noble des Rossi. Curieusement, leur enfant fut baptisé
Jules-César. Or, nous sommes en 1559… et Jules César
avait vécu de 100 à 44 avant Jésus-Christ. Et Jules
César n'était pas un saint… Mais revenons à notre
Laurent de Brindisi. Très jeune encore, à 6 ou 10 ans,
on ne sait pas très bien, Césaire perdit son père, et sa
mère le confia à des religieux de Brindisi. Après la
mort de sa mère, pour échapper aux Turcs qui menaçaient
Brindisi, Césaire se rendit à Venise, chez son oncle
prêtre, Pierre Rossi, où il connut les capucins.
Quand
il eut 16 ans, le 18 février 1573, Césaire entra chez
les capucins de Vérone, et il commença des études très
brillantes. Le 24 mars 1576, il prononça ses vœux de
religieux capucin et devint Frère Laurent. Il partit
alors à Padoue
étudier les sciences sacrées: exégèse, patrologie,
théologie. Sa mémoire étant prodigieuse, il devint aussi
polyglotte, en utilisant ses temps libres, et il parla
couramment sept langues: latin, grec, syriaque, hébreu,
italien, allemand et français. Laurent fut ordonné
prêtre le 18 décembre 1582, et il commença à prêcher
dans de nombreuses villes d'Italie. Grâce
à sa
connaissance de l’hébreu, son succès était considérable
auprès des Juifs; en effet, il connaissait si bien la
Bible qu'il pouvait en discuter en hébreu avec des
Juifs.
Frère Laurent était à peine âgé de vingt-huit ans
lorsque ses supérieurs lui confièrent d’importantes
charges, y compris des charges diplomatiques. Ainsi, au
mois de mai 1589, alors que son activité s’exerçait en
Allemagne, son influence s’étendit à tout l’Empire
germanique. Sa connaissance approfondie de la langue
allemande lui donnait une audience très spéciale, même
chez les protestants. Beaucoup de luthériens venaient
discuter avec lui et se convertissaient. Son action et
son influence furent considérables dans l’œuvre de la
Contre-réforme.
Compte tenu de ses compétences diplomatiques, une autre
mission lui fut demandée, en Allemagne, à la fois par
l’empereur Rodolphe II et par le pape Paul V. Voici le
résumé de ces actions compliquées. En 1599, Laurent fut
envoyé en Autriche pour travailler à la Réforme
catholique; il en profita pour implanter son Ordre à
Vienne et à Prague. Puis ce furent des missions, comme
commissaire général, en Autriche et en Bohême où il
fonda les couvents de Prague, de Vienne et de Gratz. Les
Capucins travaillèrent à convertir les âmes dans
l'Europe centrale ravagée par le protestantisme. Et
Frère Laurent assistait ses frères capucins…
En
1601 et 1602, la pape Clément VIII l'envoya auprès de
Rodolphe II qui commandait les forces catholiques contre
les Turcs. Les forces catholiques, menées par
Philippe-Emmanuel de Lorraine, le duc de Mercœur, et
galvanisées par Laurent de Brindisi, aumônier des forces
impériales, remportèrent une grande victoire en Hongrie.
Remarquons que le pape disait de lui: "Ce capucin,
animateur spirituel, vaut une armée entière."
En
1606, le pape Paul V l'envoya comme diplomate en
Allemagne afin de participer aux affaires
politico-religieuses de l'Empire; en juillet 1609,
malgré d'énormes difficultés, il créa et anima la
"Ligue des princes catholiques" contre "l'Union
Évangélique protestante". Pourtant, toutes ces
activités diplomatiques ne dispensèrent pas Laurent de
Brindisi d'assumer les charges confiées par sa
Congrégation. Ainsi, de 1583 à 1586, il fut Lecteur en
Théologie et Écriture Sainte à Venise. De 1586 à 1588,
il fut nommé Supérieur et maître des novices à Bassano
del Grappa; de 1590 à 1592 il fut Ministre provincial en
Toscane, c'est-à-dire le supérieur de la province. De
1596 à 1602, il devint membre du Conseil Supérieur et,
enfin, de 1602 à 1605, il assuma la charge de Ministre
ou Supérieur général, de son Ordre, et entreprit de
nombreuses visites canoniques: en effet, il exigeait le
retour de ses capucins à une observance régulière de
leur règle.
En
1609, Laurent fut nommé ambassadeur auprès du roi
d'Espagne, Philippe III. Sa mission remplie, et après un
passage à Rome, il rentra à Prague le 24 juillet 1610 et
il fut nommé nonce apostolique auprès de Maximilien de
Bavière et aumônier des armées catholiques. Son activité
diplomatique était lourde car il eut à réconcilier le
duc de Bavière avec le prince archevêque de Salzbourg.
Il obtint de Maximilien de Bavière la protection des
capucins de Prague menacés par les protestants.
En
1613, Laurent dut rejoindre, en Italie, le chapitre
général des Capucins et, tout en accomplissant des
travaux importants pour son Ordre, il dut poursuivre ses
actions diplomatiques. Ainsi, en 1614, il assuma la
charge de médiateur entre le duc de Parme et les ducs de
Mantoue et de Toscane. En 1615, il rétablit la paix
entre le duc de Savoie et l’administrateur de Milan.
Enfin, le 5 avril 1619, il partait pour Madrid où il
arriva le 22 mai et de là gagna Lisbonne pour rencontrer
Philippe III. Mais Laurent mourut à Lisbonne le 22
juillet suivant 1619. Laurent de Brindisi avait soixante
ans.
Laurent de Brindisi fut béatifié le 1er juin
1783 par le pape Pie VI et canonisé le 8 décembre 1881
par le pape Léon XIII. Il fut proclamé Docteur de
l'Église par le pape Jean XXIII le 19 mars 1959. Laurent
de Brindisi est le saint patron de la ville de Brindisi.
Sa fête est le 21 juillet.
Voyons maintenant ce qui constitua la sainteté de
Laurent de Brindisi. Il jeûnait souvent et se levait la
nuit pour prier méditer, notamment les psaumes. Son
oraison pouvait aller jusqu'à l'extase. Il fut également
un
des grands penseurs de l'Église, et il laissa de
nombreux écrits, dont une Dissertation dogmatique
sur Martin Luther, et plus de 800 homélies. Dans ses
œuvres, Laurent aborda des thèmes concernant la grandeur
de l'homme et l'infini de Dieu. Il étudia aussi le
problème de la justification qui conduit au Christ,
à la
fois cause exemplaire et cause efficiente de la
prédestination des hommes. Ainsi, le Verbe incarné peut
se dire "Fils de l’Homme", assumant le rôle que
devait jouer dans le monde la créature humaine, rôle
perdu par le péché originel. Le Christ est donc
considéré par Laurent de Brindisi comme la cause
exemplaire à trois titres: in natura, in gratia, in
gloria. Le Christ est au centre de toute la
création, et c’est par lui que les anges comme les
hommes méritent de participer à la sublime adoration du
Créateur.
Enfin, toujours selon saint Laurent de Brindisi,
l’action du Christ fut toujours assurée à travers
l’Église dont l'origine remonterait aux origines de
l’humanité, l’Ancien Testament étant essentiellement la
préparation du Nouveau, la multitude des rachetés
formant, depuis les origines, la plénitude du Christ.
Ainsi, pour Laurent de Brindisi, la matière de
L'Église est constituée par l’ensemble des fidèles; sa
cause finale est la glorification des élus. Laurent de
Brindisi estime que la cause efficiente de l'Église est
réalisée par le Christ et, en union avec lui, par les
apôtres et leurs successeurs, sa cause formelle est la
vraie foi, enseignée par les vrais chefs. (d'après
une traduction de L’apologie de l’Église par Saint
Laurent de Brindes, ou de Brindisi) En
conséquence, la première propriété de l’Église ainsi
comprise est la sainteté, selon une doctrine
capable de rendre justes ceux qui la professent.
Nous
devons ajouter que saint Laurent de Brindisi développa
la doctrine du corps mystique. Il se fit aussi le
champion de l’Immaculée Conception et de la Médiation
universelle. Il écrivit, entre autres:
"d'autre part, Marie
est notre espérance, puisque notre Mère très tendre est
notre Médiatrice et notre Avocate auprès de son Fils, de
qui il n'est rien qu'elle ne puisse obtenir."
Et
Laurent ajoute: "C'est pourquoi saint Bemard, dans
son Sermon sur la Nativité de la Vierge, l'appelle
"échelle des pécheurs" et la proclame: 'Parfaite
Médiatrice auprès du Médiateur'. Voilà pourquoi, Frères,
c'est en Marie, Mère de Dieu, qu'après le Christ, son
Fils, nous devons placer toute l'espérance de notre
salut." Dans les sermons de Laurent de Brindisi,
prêchés à la fin du 16ème siècle, on trouve
l’enseignement essentiel des traités actuels de
mariologie. C’est là un titre qui permet de placer Saint
Laurent de Brindes parmi les théologiens qui ont le
mieux parlé de la Vierge Marie.
Paulette Leblanc |