Charles Gaëtan Calosinto naquit dans l'île d'Ischia,
près de Naples, le jour de l'Assomption, donc le 15 août
de l'année 1654. Son père, Giuseppe Calosinto, et son
épouse Laura Gargiulo appartenaient à la noblesse. Ils
étaient très pieux, et leur foi était grande: cinq de
leurs enfants se consacreront à Dieu. Encore tout
enfant, Charles Gaëtan aimait le silence et la prière;
il fuyait souvent les jeux de son âge, préférant
consacrer le temps de ses récréations à prier ou à se
rendre à l'église pour y adorer le Sauveur. Dans sa
chambre, il avait dressé un petit autel devant lequel il
aimait venir se recueillir et prier la Vierge Marie
qu'il aimait particulièrement. Tous les jours, il
récitait l’office de la Vierge, et tous les samedis il
jeûnait en son honneur. Par ailleurs, enfant très
charitable, il donnait aux pauvres son argent de poche.
Sur l'île d'Ischia, il alla à l'école des Pères
Augustins. Quand il eut dix sept ans, il entra au
couvent Santa Lucia Vergine al Monte de Naples, fondé
par les Frères mineurs de la réforme de Saint Pierre
d'Alcantara.
Entré
chez les Franciscains, Charles Gaëtan devint Frère
"Jean-Joseph de la Croix". Il fit son noviciat sous
la direction du Père Joseph Roblès, puis il fut envoyé
avec onze autres frères au sanctuaire de Santa Maria
Occorrevole à Piedimonte d'Alife, en Campanie, à 82 km
au nord de Naples. Le 18 septembre 1677, Frère
Jean-Joseph de la Croix fut ordonné prêtre, dans
l'église Santa Maria Maggiore. Pendant son séjour à
Piedimonte, pour pouvoir prier en silence, et cacher ses
mortifications très austères, il fit bâtir "La
Solitude", un petit ermitage caché dans les bois. La
"Solitude" est aujourd'hui un lieu de pèlerinage.
Bientôt, âgé de 24 ans, Frère Jean-Joseph de la Croix
devint maître des novices, puis gardien, c'est-à-dire
supérieur du couvent. Enfin, il prit part à la
construction du couvent du Granatello dans le quartier
des Portici à Naples.
Bientôt Frère Jean-Joseph eut à affronter une rude
tempête. En effet, au début du XVIIIe siècle,
des dissensions apparurent chez les alcantarains, les
franciscains espagnols s'opposant aux franciscains
italiens. Cela provoqua, avec l'approbation du pape, la
séparation de ces franciscains en deux groupes de
nationalités différentes. Les Espagnols obtinrent les
couvents de Santa Lucia al Monte, et celui du Granatello,
le Petit Grenat. Le Père Jean-Joseph, fut nommé à la
tête des franciscains italiens, et dut résoudre les
multiples difficultés posées par ses confrères
espagnols. De plus, Jean-Joseph fut chargé par le
cardinal Pignatelli de faire appliquer à ses deux cents
frères, la règle franciscaine, et de réorganiser les
études. Puis, le cardinal Pignatelli le chargea de faire
appliquer la règle à une soixantaine de monastères et
maisons de l'archidiocèse de Naples.
Enfin, le 22 juin 1722, les deux branches alcantaraines
furent de nouveau réunies par décret pontifical et le
couvent Santa Lucia al Monte retourna aux frères
italiens. Et c'est là que le Père Jean-Joseph passa les
douze dernières années de sa vie, jusqu'à sa mort, le 5
mars 1734: il avait 80 ans. Il fut béatifié le 24 mai
1789 par le pape Pie VI et canonisé le 26 mai 1839, par
le pape Grégoire XVI, avec quatre autres saints de la
région de Naples: Saint François de Geronimo, saint
Alphonse de Liguori, saint Pacifique de San Severino et
sainte Véronique Giuliani.
Notons ici que l'évêque d'Ischia, Monseigneur Filippo
Strofaldi, obtint que les restes de notre saint
Jean-Joseph de la Croix fussent transférés du couvent
Santa Lucia al Monte au couvent franciscain de l'île
d'Ischia. Et sa tombe devint rapidement un lieu de
dévotion des Napolitains. Il faut dire que de nombreuses
merveilles avaient été opérées par ce saint franciscain:
visions, prophéties, bilocations, extases et de nombreux
miracles. De plus, il lisait dans les cœurs. Après la
mort du Père Jean-Joseph, les miracles continuèrent,
mais sur sa tombe.
Parlons maintenant de la vie mystique de saint
Jean-Joseph de la Croix. Directeur de conscience très
apprécié, notamment par des ecclésiastiques célèbres:
Alphonse de Liguori fondateur des Rédemptoristes et de
François de Geronimo, jésuite, Jean-Joseph possédait de
nombreux charismes; il bénéficiait aussi d'apparitions
de la Vierge Marie et de l'Enfant Jésus. Son amour pour
Dieu était tel qu'il répétait souvent: "Quand
il n’y aurait ni Ciel ni enfer, je voudrais néanmoins
aimer Dieu toujours."
Son humilité était grande, et sa charité envers les
pauvres fut l'occasion, pour lui, et à plusieurs
reprises, de multiplier des pains; son dévouement pour
les malades le portait à demander à Dieu de faire
retomber sur lui leurs souffrances; et il fut
quelquefois exaucé.
Pourtant, le Père Jean-Joseph s'efforçait de cacher ses
charismes le plus possible. Ainsi, il attribuait les
miracles qu'il opérait à l'intercession des saints
auxquels il s'adressait. Souvent, il ordonnait à ceux
auxquels il rendait la santé de prendre quelque
médecine, afin que la guérison pût être attribuée à un
remède purement naturel.
Voici quelques-uns de ses conseils:
– "Espérons en Dieu, et nous serons certainement
consolés. Dieu est un tendre père qui aime et secourt
tous ses enfants. N'en doutez point, espérez en Dieu, il
pourvoira à vos besoins."
Ou
encore:
– "Qu'est-ce que cette terre, sinon de la boue, un
morceau de poussière, un pur néant. Le paradis, le ciel,
Dieu est tout. Ne vous attachez point aux biens de ce
monde, fixez vos affections en haut; pensez à ce bonheur
qui durera éternellement, tandis que l'ombre de ce monde
s'évanouira."
Notre saint travaillait
constamment au bien des pauvres, des malades et de ses
frères. Il se dépensait sans compter, et quand, un jour,
durant sa vieillesse, on lui conseillait de se ménager
un peu, il répondit:
"Je n'ai point d'infirmité
qui m'empêche de travailler; mais quand même, ne
devrais-je pas sacrifier ma vie pour la même fin pour
laquelle Notre Seigneur Jésus-Christ a été crucifié?"
Le Père Jean-Joseph avait
passé sa vie à glorifier le Seigneur et à faire du bien
à tous ceux qui le sollicitaient, jusqu'au jour où il
plut à Notre Seigneur de lui faire connaître à l'avance
les circonstances et le temps de sa mort. Une semaine
avant sa mort, s'entretenant avec François, l'un de ses
frères, il lui dit:
"Jusqu'ici, je ne vous ai
encore rien demandé; faites moi la charité de prier le
Tout-Puissant pour moi vendredi prochain, vous entendez…
Vendredi prochain, souvenez-vous-en, n'oubliez pas."
Ce
vendredi fut le jour de sa mort…
Tout
de suite après sa mort, Jean-Joseph se manifesta à
plusieurs personnes dans un état glorieux. Ainsi, le duc
de Monte-Lione, qui avait rencontré le Père quelques
jours plus tôt et l'avait quitté très malade, le duc se
promenait chez lui, dans son appartement. Soudain il
aperçut le Père Jean-Joseph dans son salon, en parfaite
santé, environné de lumière. Le duc s'écria:
– Quoi!
Père Jean-Joseph, êtes-vous donc déjà rétabli?
Le Père Jean-Joseph
répondit avant de disparaître:
– Je suis bien et heureux.
Et
quand le Père fut inhumé, les nombreux miracles qui
eurent lieu sur sa tombe attestèrent ses vertus et sa
présence au Ciel.
Paulette Leblanc |