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João Cidade, que l'on
appellera plus tard Saint Jean de Dieu, naquit le 8 mars
1495 à Montemor-o-Novo, dans le diocèse d'Evora, au
Portugal, au sein d’une famille d'artisans pauvres mais
chrétiens. Sa jeunesse, à la différence de celle de la
plupart des Saints, fut très orageuse. Âgé de huit ans,
il suivit, à l'insu de ses parents, les traces d'un
prêtre voyageur qui se rendait à Madrid; mais, arrivé à
Oropeza en Nouvelle-Castille, il fut incapable d’aller
plus loin; le prêtre le confia au mayoral du
comte d'Oropeza, dont il devint l’un des bergers. Dix
ans plus tard, Jean qui avait appris à lire, à écrire et
à calculer se vit confier l’administration de la ferme
du mayoral qui prospéra au delà de toute attente.
Cependant, pour échapper à des pressions du mayoral,
Jean s'enfuit en
1523 et
s'engagea dans l'armée. Jean participa à de nombreuses
guerres dont celle de 1532 avec Charles Quint, contre
les Turcs. Sa vie de militaire fut pour lui une dure
expérience. En 1535, il travailla comme tailleur de
pierre pour la forti-fication de la ville de Ceuta,
ville espagnole, située sur la côte nord du Maroc.
Le 20 janvier 1537, Jean Cidade, alors âgé d'environ 42
ans, se rendit à un sermon de Jean d'Avila,
surnommé l’apôtre de l’Andalousie. Ce
fut le point de départ de la conversion. En effet, les
propos de Jean d'Avila provoquèrent en Jean Cidade un si
grand choc qu’il se mit à détruire les livres qu’il
vendait, et s'imposa une si dure pénitence publique que
son comportement fut considéré comme celui d'un aliéné;
et il fut incarcéré dans l’hôpital psychiatrique de
l’Hôpital Royal de Grenade, avec les fous et les
mendiants. Il
connut le sort des malades mentaux de l’époque: jeûne,
coups fouets, jets d’eau glacée… pour chasser le mal.
Heureusement, sur les instances de Jean d'Avila, il fut
libéré; il prit alors la résolution de s’occuper et de
servir les malades. Jean d'Avila qui était devenu son
directeur spirituel, le poussa à faire un pèlerinage au
sanctu-aire de la Vierge de Guadalupe, en Estramadure,
province située à l'extrémité sud-ouest de l'Espagne,
proche de la frontière avec le Portugal.
C’est à ce mo-ment que naquit sa vocation. Il décida de
passer le reste de sa vie à secourir ceux qu’il avait
côtoyés à l’hôpital Royal: paralytiques, vagabonds,
prostituées, et surtout malades mentaux.
Nous sommes en 1538. Jean, qui était devenu vendeur
ambulant de livres et de timbres s'installa à Gibraltar
où il ouvrit une petite librairie. C’est là qu’il eut
ses premiers contacts avec des livres religieux. Il
avait quarante cinq ans.
De
retour à Grenade, il se fit marchand de bois pour
entretenir une maison qu’il avait louée pour la
transformer en hôpital. Pour cela,
Jean employa ses
économies, et l'hôpital prit bientôt rapidement un
accroissement inattendu. De nombreux dons arrivèrent
ainsi que des disciples, avec lesquels il fonda une
congrégation d’hospitaliers, Les Frères de la
charité. Jean qui avait d'abord été considéré et
traité comme un fou, était devenu le saint dont Dieu
voulait avoir besoin. Plus tard, en 1572, Pie V
placera Les Frères de la Charité sous la règle de
saint Augustin et lui donnera le nom d'Ordre
hospitalier de Saint Jean-de-Dieu.
Jean
de Dieu mourut à Grenade, le 8 mars 1550, laissant
derrière lui une renommée de sainteté qui traversa les
frontières; il fut béatifié par Urbain VIII, en 1630, et
canonisé par Alexandre VIII, en 1690; il a été proclamé
patron des hôpitaux par Léon XIII, à quoi Pie XI ajouta
le 28 août 1930, les infirmiers et les malades, les
imprimeurs, les relieurs et les libraires. Les personnes
alcooliques sollicitent son aide pour guérir de leur
dépendance.
Voici maintenant quelques
exemples de son dévouement et de sa sainteté. Celui que
la voix populaire appelait Jean de Dieu montrait un
dévouement exceptionnel. Ainsi, pour procurer des
aliments à ses nombreux malades, Jean, une hotte sur le
dos et une marmite à chaque bras, parcourait les rues de
Grenade en criant: "Mes frères, pour l'amour de Dieu,
faites-vous du bien à vous-mêmes." Sa sollicitude
s'étendait à tous les malheureux qu'il rencontrait; il
se dépouillait de tout pour les couvrir et leur
abandonnait tout ce qu'il avait, confiant en la
Providence, qui ne lui manqua jamais. Nous devons ici
ajouter que peu de saints ont atteint un pareil esprit
de mortification, d'humilité et de mépris de soi-même.
Les
documents qui ont été consultés pour réaliser cet
enregistrement nous ont signalé quelques fioretti; nous
vous les partageons.
Un
jour, la Mère de Dieu, apparut à Jean tenant en mains
une couronne d'épines; elle lui dit:
– Jean, c'est par les épines que tu dois mériter la
couronne du Ciel.
– Je
ne veux, répondit Jean, cueillir d'autres fleurs que les
épines de la Croix; ces épines sont mes roses.
Une
autre fois, un pauvre qu'il soignait disparut en lui
disant:
– Tout ce que tu fais aux pauvres, c'est à Moi que tu le
fais.
Oui,
vraiment, Dieu est admirable dans Ses Saints!
L'écrivain allemand Rainer
Maria Rilke (1875-1926) raconte aussi, que Jean de Dieu,
en train d'agoniser, se leva soudain pour aller détacher
dans un jardin proche un homme qui venait de se pendre.
Au moment de mourir, Jean dira: "Il reste en moi
trois sujets d'affliction: mon ingratitude envers Dieu,
le dénuement où je laisse les pauvres, les dettes que
j'ai contractées pour les soutenir." Six lettres
manuscrites de saint Jean de Dieu ont été conservées
précieusement. Parmi les nombreuses citations, on peut y
lire notamment: "Dieu avant tout et par-dessus tout
ce qui est au monde!" Et aussi: "Je suis endetté
et captif pour Jésus-Christ seul!" ou encore: "Mettez
votre confiance en Jésus-Christ seul!"
Paulette Leblanc |