Frédéric Jansoone, dernier né d'une famille de huit
enfants, est né à
Ghyvelde,
village du
diocèse de Lille,
dans le
nord de la France, tout près de la frontière belge.
Mais, de
par
ses origines, il est des Flandres belges et sa langue
maternelle est le flamand. Son père, Pierre Antoine, est
un petit fermier qui travaille dur et finit par parvenir
à une certaine aisance. Sa mère, Marie-Isabelle
Bollengier est cultivée et raffinée. L’éducation donnée
à la famille est stricte, très chrétienne, tant dans le
domaine de la charité que de la foi. Toutefois, Frédéric
connaîtra vite la souffrance, car son père mourut en
1848 alors qu’il n'avait pas encore 10 ans.
Frédéric fréquenta l'école de son village natal, puis le
collège d'Hazebrouk et l'Institut Notre-Dame-des-Dunes
de Dunkerque. C'était un garçon très doué pour les
études; en
1852
il avait pu commencer ses Humanités (c'est ainsi que
l'on appelait les études secondaires) au collège d'Hazebrouck.
mais il dut les arrêter en 1855, afin d’aider sa famille
aux prises avec de graves difficultés financières. Il
s’engagea alors comme commis-voyageur dans une
entreprise de textiles, comme représentant de commerce,
domaine où il excella. Pendant sept ans, il travailla.
Après la mort
de sa mère, en 1861, il put reprendre ses études. Deux
ans après,
en juin
1864,
il entra chez les Franciscains
d’Amiens.
Il fut ordonné prêtre le 17 août
1870.
Il exerça alors différents ministères au sein de sa
congrégation et devint supérieur à
Bordeaux,
dans une maison qu'il avait fondée avec deux autres
confrères en
1871.
En 1876, il fut envoyé en Terre Sainte, où, de 1878 à
1888, il occupa le poste de Vicaire Custodial. Il fut
ensuite envoyé au Canada, dans la paroisse de Notre-Dame
du Cap, à
Trois-Rivières,
au Québec.
Frédéric était arrivé à Notre-Dame du Cap le 13 juin
1888. Le 22 juin, se produisit dans la petite église
dédiée à la Vierge du Rosaire au sanctuaire de
Notre-Dame du Cap, un miracle étonnant, appelé plus tard
"Le prodige des yeux". Vers 19 heures, trois
hommes priaient dans la petite église: le curé Désilets,
le père Frédéric et M. Pierre Lacroix. Pendant qu'ils
priaient il se produisit un évènement que le Père
Frédéric a lui-même raconté : "La statue de la
Vierge, qui a les yeux entièrement baissés, avait les
yeux grandement ouverts; le regard de la Vierge était
fixe; elle regardait devant elle, droit à sa hauteur.
L'illusion était difficile: son visage se trouvait en
pleine lumière par suite du soleil qui luisait à travers
une fenêtre et éclairait parfaitement tout le
sanctuaire. Ses yeux étaient noirs, bien formés et en
pleine harmonie avec l'ensemble du visage. Le regard de
la Vierge était celui d'une personne vivante; il avait
une expression de sévérité, mêlée de tristesse. Ce
prodige dura approximativement de cinq à dix minutes."
Que fut la vie de Frédéric au Québec?
Tout
d'abord de nombreuses prédications:
au Cap-de-la-Madeleine, au sanctuaire de la Réparation à
Pointe-aux-Trembles à Montréal,
chez les Franciscaines Missionnaires de Marie à
Québec et dans toute la province. Il écrivit aussi des
articles pour les Annales du Très Saint Rosaire et la
Revue eucharistique, revues qu'il avait fondées en 1892,
et de nombreuses autres revues populaires de piété.
Il rédigea aussi des livres d'édification comme
La vie de Notre-Seigneur et la Vie de Saint
François. Enfin,
notre bienheureux s'impliquait beaucoup dans la gestion,
la direction et le financement du Commissariat de Terre
Sainte, ainsi que dans le soutien et le développement
des pèlerinages au sanctuaire de Notre-Dame-du-Cap.
Un professeur, Hermann
Giguère, associé à la Faculté de théologie et de
sciences religieuses de l'Université Laval et supérieur
général du Séminaire de Québec écrira de lui: "Le
Père Frédéric représente bien cette spiritualité de la
renaissance catholique du milieu du XIXème siècle fondée
sur les confréries, sur la prédication visant la
conversion et sur la fidélité aux obligations de la
religion." Hermann Giguère écrivit aussi: "Son
originalité restera d'avoir donné jusqu'au bout le
témoignage de la primauté du surnaturel et du spirituel
ardemment défendu et annoncée à des milliers de gens
dans un langage populaire et avec des moyens qui les
rejoignaient et les nourrissaient."
Lorsque les Oblats de Marie Immaculée le relayeront, en
1902, la vie du Père Frédéric Jansoone, fut, jusqu'à sa
mort, fortement liée à la communauté de la
Basilique Notre-Dame du Cap.
Frédéric Jansoone mourut le 4 août 1916, á Montréal,
d'un cancer à l'estomac, à l'âge de 77 ans. Son corps
fut transporté à Trois-Rivières et enseveli dans la
chapelle Saint-Antoine (crypte de la chapelle des
Franciscains).
Frédéric Jansoone fut béatifié le 25 septembre 1988 à
Rome par Jean Paul II.
Sa fête,
au Canada est le 5 août. Ailleurs, c'est le 4 août.
Quelques compléments sur les actions de Frédéric
Jansoone
Nous
savons que Frédéric Jansoone fut ordonné prêtre à
Bourges le 17 août 1870, juste avant la guerre
franco-allemande. Sa date d’ordination avait été
avancée, afin de lui permettre d’exercer des fonctions
sacerdotales comme aumônier dans un hôpital militaire.
Après quoi, il fut supérieur à Bordeaux, puis envoyé en
Palestine où de nombreux franciscains tenaient la
“Custodie de Terre Sainte”. Nommé assistant du supérieur
ou ‘gardien’ il eut à assumer de lourdes responsabilités
matérielles. Ainsi, c'est à lui que l’on doit la
construction de l’église Sainte Catherine de Bethléem
(où se célèbre chaque année, en mondovision, la messe de
minuit de Noël). Avec un sens diplomatique aigu il
s’ingénia aussi à établir des accords entre les
différentes confessions chrétiennes, notamment pour leur
présence respective dans la basilique du Saint-Sépulcre
et celle de Bethléem. Il fit de grandes recherches
d’archives et publia une synthèse qui est encore la base
de la gestion des sanctuaires de Palestine. Il animait
aussi de nombreux pèlerinages, ce qui lui donna
l’occasion de rencontrer un prêtre canadien.
Frédéric fut envoyé par ses
supérieurs au Québec, en 1881; deux mandats lui étaient
confiés: instaurer là-bas la quête du Vendredi-Saint en
faveur des Lieux-Saints et visiter les fraternités du
Tiers Ordre Franciscain afin d'évaluer les possibilités
d'une restauration de l'ordre des Frères mineurs au
Canada (le dernier Franciscain, un Récollet, était mort
en 1849). Après un nouveau séjour en Terre Sainte,
Frédéric revint au Québec, avec
la mission de mettre sur pied un Commissariat de Terre
sainte à Trois-Rivières, en attendant qu'il soit
possible d'établir une communauté régulière, ce qui fut
fait en 1903. Ce sera la première maison franciscaine
depuis 1849. Le Père Frédéric prêchait dans tous les
diocèses du Québec et jusqu'en Nouvelle-Angleterre;
sa prédication, toute franciscaine, était basée sur la
Passion et la Résurrection; elle se voulait simple mais
non dépourvue de sentiments, et qui provoquait souvent
les larmes des auditeurs.
Jean-Paul II dira de lui: "Il ne cesse d’entraîner
ceux qui l’écoutent à s’engager dans la vie évangélique
selon les voies tracées par le Tiers-Ordre franciscain
et tout autant dans l’apostolat très concret de la vie
familiale et professionnelle."
Il
célébrait l’Eucharistie avec une ferveur émouvante. Sa
vie montre bien que "l’esprit de contemplation, loin
de freiner le zèle apostolique, le fortifie."
Directeur des pèlerinages au sanctuaire de Notre Dame du
Rosaire, à Cap-de-la-Madeleine, il joua un rôle
important dans le développement du culte marial au
Québec. Malgré son activité débordante, le Père Frédéric
maintenait en lui un esprit de prière et de pénitence
hors du commun. Son austérité de vie, son extrême
pauvreté, son amour de prédilection pour les pauvres, sa
bonté toute simple, sa patience et sa sérénité dans les
épreuves, toutes ces vertus l'ont fait comparer à un
nouveau François d'Assise. Il contribua largement à
répandre l'esprit franciscain au Canada et donna une
impulsion décisive à la restauration de l'Ordre
franciscain dans ce pays.
Paulette Leblanc |