ÉMILIE TAVERNIER
Religieuse, Fondatrice, Bienheureuse
1800-1851

23

SEPTEMBRE

Émilie Tavernier naquit à Montréal, au Canada, le 19 février 1800. Elle était la quinzième, et dernière enfant de la famille Tavernier. Incontestablement, compte tenu de sa vie dès son plus jeune âge, Dieu la préparait à une grande mission; en effet, dès son enfance, elle fut frappée par de nombreuses épreuves. Ainsi, sa mère  mourut en 1804, alors qu'Émilie n'avait que quatre ans. Puis ce furent son père, son unique sœur et deux de ses frères. Heureusement, sa mère lui avait appris que, Dieu étant Providence, nous devions, nous aussi, nous faire providence pour ceux qui avaient besoin de nous.

Après la mort de sa mère, Émilie fut recueillie par une tante maternelle qui l'éduqua avec ses propres enfants, puis la confia aux religieuses de la Congrégation Notre-Dame. Émilie fut ainsi bien initiée à la vie chrétienne, sociale et culturelle. Les deuils qui se multipliaient autour d'elle, éprouvèrent beaucoup son adolescence tout en fortifiant sa volonté et lui montrant le chemin que Dieu préparait pour elle. Lorsqu'elle eut dix-huit ans, Emilie dut venir en aide à son frère devenu veuf. Cependant elle continuait à accueillir les pauvres qui venaient frapper à sa porte. Puis quand elle eut vingt ans, elle dut, pendant près de deux ans,  soigner et aider une parente de Québec. Le Seigneur la préparait…

Quand Émilie eut 23 ans, un célibataire âgé de 50 ans, Jean-Baptiste Gamelin, la demanda en mariage. D'abord cordonnier, il était devenu pomiculteur, c'est-à-dire producteur de fruits à pépins: pommes et poires notamment. Son amour des pauvres était bien connu et il avait une très bonne réputation. Émilie accepta l'offre de Jean-Baptiste et devint Madame Gamelin. Elle fut d'abord très heureuse, mais les épreuves revinrent vite: ses deux premiers enfants moururent en bas âge, puis son époux décéda; et enfin, ce fut le tour de son troisième et dernier enfant. Seul un jeune garçon handicapé mental, qu'elle et son mari avaient recueilli, restait avec elle.

Il convient de savoir ici, que cet adolescent, handicapé intellectuel, avait, un jour, sauvé la vie de Mr Gamelin. Émilie garda donc près d'elle cet adolescent ainsi que sa vieille maman, car, avant de mourir, Mr Gamelin lui avait demandé de continuer à s’occuper d’eux.

Émilie avait 27 ans. Dans sa douleur, elle se tourna vers la Vierge des Douleurs et poursuivit sa vie charitable. Sur les conseils de son confesseur, le Père Jean-Baptiste Bréguier-Saint-Pierre, et de Mgr Jean-Jacques Lartigue, auxiliaire de l’archevêque du Québec à Montréal, elle ouvrit sa porte aux vieillards, aux orphelins, aux malades, et même aux anciens prisonniers; car, ces prisonniers, non coupables, étaient en réalité des patriotes  emprisonnés, voire condamnés à mort, au cours des luttes religieuses et politiques, qui, pendant plusieurs années avaient ravagé le pays. C'est à l’époque de cette rébellion, que Mme Gamelin obtint des autorités la permission de visiter ces patriotes emprisonnés et condamnés à mort. Peu à peu Émilie se créait une nouvelle famille. Sa maison fut rapidement appelée "Maison de la Providence". Des parentes et des amies vinrent la seconder. Il faut savoir aussi qu'Émilie avait décidé de consacrer les fonds dont elle avait hérité de son mari, pour ouvrir des asiles destinés aux vieillards et aux infirmes.

Mais inévitablement, des critiques commencèrent; en effet, certaines personnes ne comprenaient pas le dévouement d'Émilie et de ses amies. Heureusement, en 1843, l'évêque du lieu, Mgr Ignace Bourget, demanda à Émilie de l'aider à fonder la congrégation des "Sœurs de la Providence". En effet, dans cette société du Québec en plein développement, les besoins des pauvres, des malades, des immigrés, grandissaient sans cesse. La première profession religieuse de la jeune congrégation eut lieu le 29 mars 1844. Tout semblait bien aller, mais, bientôt, de nombreux décès dus à des épidémies, diminuèrent les effectifs. De plus, Mgr Bourget, influencé par une religieuse jalouse, mit en doute, pendant quelques mois, la bonne volonté d'Émilie. Mais Émile restait solide, à l'exemple de la Vierge des Douleurs, son modèle. Et rapidement Mgr Bourget reconnut ses erreurs et la générosité d'Émilie. Et les vocations affluèrent: les Sœurs de la Providence étaient déjà 51, au moment de la mort d'Émilie, victime du choléra, le 23 septembre 1851.

Revenons un peu en arrière. Vers la fin de 1827, Émilie collabora avec des associations de secours ouvertes par les Sulpiciens: d'abord la Confrérie du Bien public, afin de procurer du travail aux nombreux chômeurs, puis l’Association des Dames de la charité, qui venaient en aide aux victimes de la misère alors très répandue à Montréal à cette époque. En 1828, Mme Gamelin entra dans la Confrérie de la Sainte-Famille pour avancer spirituellement.

Émilie fonda le premier refuge pour les pauvres en 1830. En quelques années, tout le monde connut Émilie, femme active et à forte personnalité. Émilie n’hésitait pas à solliciter les autorités pour obtenir de l’aide pour les pauvres et les plus démunis, ainsi que pour protéger les malades. On l’appelait "Dame providence des pauvres".

Émilie, ou Madame Gamelin, découvrit aussi la détresse physique et morale des femmes âgées, malades ou infirmes, dépourvues de toutes ressources. Pour les secourir, elle ouvrit le 4 mars 1830 un premier refuge, dans un immeuble mis à sa disposition par le curé de la paroisse Notre-Dame de Montréal. Le refuge devint vite trop petit: aussi, en 1831, loua-t-elle un nouveau refuge, dont elle prit la direction: il y eut rapidement 15 pensionnaires. En 1832 et 1834, pendant de graves épidémies de choléra Émilie Gamelin se dévoua corps et âme, pour soigner les cholériques, malgré les risques de contagion.

En 1840, Mgr Ignace Bourget devint évêque de Montréal. Les Filles de la charité de Saint-Vincent-de-Paul ne pouvant venir à Montréal, c'est alors que Mgr Bourget décida de fonder une nouvelle congrégation religieuse qu'il confia à Émilie. Le 29 mars 1844, la congrégation des Sœurs de la charité de la Providence, était créée. Et Mère Gamelin était élue supérieure de l’institut des Sœurs de la charité de la Providence.

En 1845, les Sœurs de la charité de la Providence ouvrirent l’hospice Saint-Joseph, destiné à loger des prêtres âgés ou infirmes, et elles commencèrent aussi à s’occuper des malades mentaux. En 1847, mère Gamelin se porta au secours des victimes de l’épidémie de typhus. Puis, en  1850, Mère Gamelin fit un second voyage aux États-Unis où elle visita les établissements des Sisters of Charity et en particulier leurs asiles d’aliénés. En 1851, une nouvelle épidémie de choléra sévit à Montréal. Contaminée par ce choléra, Mère Gamelin décéda le 23 septembre 1851. À sa mort, l’institut des Sœurs de la charité de la Providence comptait 51 sœurs professes, 19 novices, 5 postulantes et 7 maisons où étaient hébergés 110 femmes pauvres et âgées, certaines mentalement atteintes, 95 orphelins, 6 prêtres infirmes, 16 dames pensionnaires et 700 jeunes élèves.

Aujourd'hui, les Sœurs de la Providence continuent leurs œuvres de bienfaisance dans plus de 120 établissements au Québec et dans tout le Canada. De plus, elles sont présentes aux États-Unis, au Chili, en Argentine, en Haïti, au Cameroun, en Égypte, aux Philippines et au Salvador.

Émilie Tavernier fut béatifiée le 7 octobre 2001 par le pape Jean Paul II. Sa fête est le 23 septembre.

Contemplons maintenant la bienheureuse Émilie Tavernier, la Providence des pauvres ou l’Ange des Prisonniers. Elle est la première Montréalaise d’origine à avoir été déclarée Bienheureuse par l’Église. Sa vie, sa prière  et sa contemplation de la Vierge Marie au pied de la croix rendirent son cœur compatissant envers tous ceux qui souffraient, quels qu'ils fussent. Sa Congrégation grandira sans cesse malgré les persécutions.

Le Pape Jean-Paul II la proposa au peuple de Dieu comme un modèle de sainteté, en raison de sa vie vouée au service des plus démunis. Dans son homélie prononcée au cours de la cérémonie de béatification, le pape Jean-Paul II déclara: "Ce sont les justes qui, en raison de leur Foi, vivent aux côtés de Dieu pour l'éternité." Notons aussi que, depuis le mois de mai 2000, une statue la représentant se trouve à la station de métro Berri-UQAM, située sur la place qui porte son nom, en hommage à ses grandes œuvres de charité à Montréal.

Paulette Leblanc

 

 

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