Claude la Colombière
Prêtre, Saint
1641-1682

15

FÉVRIER

Claude La Colombière fut le serviteur fidèle et parfait ami de Jésus

Claude La Colombière, troisième enfant d’une famille de sept, dont cinq seulement survivront, est né le 2 février 1641, à Saint Symphorien-d’Ozon, dans le diocèse de Lyon. Son père exerçait la charge de notaire royal. Claude fit ses études  à Lyon, d’abord au collège des jésuites, de 1650 à 1653, puis, pendant les cinq années suivantes, au Collège de la Trinité. À l’âge de 17 ans il fut admis au noviciat de la Compagnie de Jésus. Le 20 octobre 1660, à Avignon, il prononçait ses vœux. En 1666, il assista à la canonisation de Saint François de Sales, puis fut envoyé à Paris poursuivre ses études de théologie. Il sera ordonné prêtre en 1669.  

L’atmosphère de la vie parisienne était alors celle du Grand Siècle et de l'École Française de Spiritualité, et Claude avait inévitablement entendu parler de Vincent de Paul, de Bérulle, de Jean-Jacques Olier, de Marie de l’Incarnation; et encore de Racine, de Molière, Descartes, Bossuet, etc... Sans oublier la querelle janséniste. Tout ce foisonnement de vie ne pouvait laisser indifférent le jeune religieux nommé précepteur des fils de Colbert. [1]  

Claude La Colombière fut ensuite nommé professeur à Lyon, au Collège de la Trinité pendant trois ans. Puis, toujours à Lyon, il accomplira son “troisième an” en 1674. C’est durant sa grande retraite qui prépare le travail de ce troisième an que Claude prendra les orientations qui animeront toute sa vie: 

        – désir de "la véritable sainteté, la sainteté sans illusion, sans mensonge; désir de répondre à l’appel d’amour dont Dieu a investi son âme.” 

        – méditations sur “les sentiments intérieurs des trois personnes divines”, sur “l’anéantissement du Verbe”  et “l’intérieur de Jésus.” 

        – découverte que la “véritable voie de sainteté” repose sur la fidélité, et que “la sainteté de l’homme passe par les voies par lesquelles a passé le Christ pour sauver le monde.” 

        – enfin Claude comprend que lui, tout seul, est impuissant: “Dieu seul peut opérer en lui les transformations.”  Rapidement il situe ses relations avec Dieu sur le plan du cœur, et c’est dans ce contexte qu’il se lie à Dieu par un vœu de “fidélité sans réserve. ” 

Désormais, méditant la Passion, Claude se plaçait au niveau des mouvements du Cœur du Christ et du Cœur de la Vierge Marie, et “voulait que son cœur ne fût désormais que dans Celui de Jésus et de Marie, ou que Celui de Jésus et de Marie soit dans le sien.” [2] Et l’amour lui apparaissait véritablement comme “la conformité à la volonté de Dieu.” [3] (Nous noterons ici que le mot Cœur, est au singulier. En effet, pour Claude La Colombière, comme pour Saint Jean Eudes, le Cœur de Jésus et le Cœur de Marie n’en font qu’un.)  Désormais, c’est dans la fidélité à toutes les règles de son Ordre que le Père Claude allait trouver la liberté et la joie de son âme. Il a maintenant conscience d’une action particulière de Dieu sur sa personne et dans sa vie. En effet, quelques jours plus tôt, durant une oraison, il avait compris que la Sainte Vierge l’avait “présenté à son Fils, lequel lui avait ouvert son sein comme s’il avait été le plus innocent des hommes.”   

Claude la Colombière avait aussi comme des prémonitions sur sa vie future. Il écrivit: “Tout à coup il s’est fait un grand jour dans mon esprit; il me semblait me voir couvert de fers et de chaînes, et traîné dans une prison, accusé, condamné, parce que j’avais prêché Jésus Crucifié, et déshonoré par les pécheurs...” [4] C’est d’ailleurs ce qui lui arrivera à Londres. 

Bien avant d’arriver à Paray-le-Monial, Claude avait bénéficié des écrits de Sainte Gertrude, de Saint Bonaventure et de Saint Bernard, et il avait déjà pénétré les trésors du Cœur de Jésus. Et, depuis longtemps il avait goûté dans l’oraison, les sentiments de ce divin Cœur, soit à l’égard du Père, soit envers sa Mère, soit envers nous. Il avait écrit: “Soyez donc, aimable Jésus, mon père, mon ami, mon maître, mon tout; puisque Vous voulez bien être content de mon cœur, ne serait-il pas déraisonnable s’il n’était pas content du Vôtre.” [5]  

On comprend maintenant comment le Seigneur préparait celui qui était prédestiné à diriger Sœur Marguerite-Marie Alacoque et à prêcher le message du Cœur de Jésus. Le 2 février 1675 il faisait sa profession solennelle et était nommé supérieur de la maison des jésuites de Paray-le-Monial. Il y demeurera dix-huit mois avant d’être nommé prédicateur de la Duchesse d’York, à la cour d’Angleterre où il arrivera en octobre 1676. 

Nous savons comment, à Paray-le-Monial, au monastère de la Visitation, Marguerite-Marie Alacoque, était persécutée, et même abandonnée par ses confesseurs qui ne comprenaient rien à ce qui se passait en elle. Seul  un homme ayant une expérience spirituelle exceptionnelle des conduites de Dieu sur les âmes pouvait comprendre Marguerite-Marie. Claude La Colombière était celui que Jésus avait promis à Marguerite-Marie, “le serviteur fidèle et parfait ami qui lui apprendrait à Le connaître et à s’abandonner à Lui.”  

Dès le premier contact avec la Sœur Alacoque, l’avis du Père Claude fut formel: ce qui se passait en elle venait de Dieu. De plus, Jésus voulait associer son fidèle serviteur à la mission qu’Il confiait à sa servante car, pendant le temps pascal qui suivit leurs premières rencontres, eut lieu, pendant la messe célébrée par le Père Claude, la vision des trois cœurs: le Sacré Cœur de Jésus, ardente fournaise dans laquelle les deux autres cœurs allaient s’unir et s’abîmer.  

Un peu plus tard, Marguerite-Marie ne sachant pas comment réaliser une demande de Notre Seigneur, ce dernier lui dit: “Adresse-toi à mon serviteur, le Père La Colombière et dis-lui de ma part, de faire son possible pour établir cette dévotion et donner ce plaisir à mon divin Cœur; qu’il ne se décourage point pour les difficultés qu’il y rencontrera, car il n’en manquera pas; mais il doit savoir que celui-là est tout-puissant qui se défie entièrement de soi-même pour se confier uniquement à Moi.”  [6]  

Le Père la Colombière, comme Marguerite-Marie, mais chacun à sa place, devaient révéler au monde les richesses infinies du Cœur de Jésus. 

Après un an et demi de séjour à Paray, en 1676, le Père La Colombière dut partir pour Londres, où il avait été nommé aumônier et de prédicateur de Marie-Béatrice de Modène, Duchesse d'York, catholique et future reine d'Angleterre, car épouse de Jacques II. Il s'agissait d'un ministère très délicat; en effet, des événements religieux graves, et particulièrement des persécutions contre les catholiques, agitaient l'Angleterre profondément antipapiste. Le Père La Colombière fut logé dans un appartement du Palais saint James, et commença sa mission. En plus des sermons qu'il prononçait dans la chapelle du palais de la Duchesse d'York, missionnaire actif, il dirigeait spirituellement de nombreuses personnes, et consacrait du temps à instruire solidement dans la vraie foi plusieurs personnes qui avaient abandonné l'Église romaine; il eut la consolation de voir plusieurs conversions.

En août 1678 éclatait ce qu’on appellera la "terreur papiste", où conspirations et calomnies entraînèrent, rien que dans les rangs des Jésuites, vingt-trois prêtres au supplice et cent quarante-sept autres à la mort en prison. Le Père Claude resta quelque temps à l’écart de la tourmente, mais trahi par un jeune homme qu’il croyait avoir converti mais qui l'accusait de complot papiste, il fut arrêté le 14 novembre, et transféré le 17 à la prison de King’s Bech. Il y resta trois semaines en proie à de graves privations, jusqu'à ce qu'un décret royal lui signifiât son expulsion de l'Angleterre. L’état des geôles était tel que son état physique empira, et il subit une violente crise de phtisie. Banni du royaume d'Angleterre par Charles II, il quitta Londres le 28 décembre 1678,  dans un état de faiblesse extrême. Toutes ces souffrances avait rendu encore plus précaire son état de santé déjà bien compromis. De retour en France, il fut nommé, à Lyon, directeur spirituel de jeunes jésuites. . En chemin, il s’arrêta à Paray-le-Monial, où il séjourna une dizaine de jours: il s’entretint longuement avec Marguerite-Marie et avec la Mère Greyfié, sa Supérieure. Il arriva enfin à Lyon le 11 mars.

Son état de santé s'étant aggravé, il fut renvoyé à Paray-le-Monial. Tout-à-fait à la fin de sa vie, le Père La Colombière rassurait encore une fois Marguerite-Marie de nouveau sujette au doute. Il lui dit: “... Non! encore une fois, vous n’êtes nullement trompée; il n’y a point d’illusion dans les faveurs que vous recevez de la Miséricorde du Seigneur; je n’ai nul sujet de vous soupçonner de dissimulation, ni d’hypocrisie. Et quoi qu’il ait lieu de s’étonner que le souverain Maître s’abaisse jusqu’à des créatures si viles et si imparfaites, ce serait un blasphème de penser que sa bonté ne puisse aller jusque là et qu’elle soit capable d’être surmontée par nos infidélités.”  [7] 

Trois mois plus tard, le 15 février 1675, le Père Claude La Colombière fut pris d'un crachement de sang qui mit fin à ses jours. Il sera inhumé à Paray-le-Monial, dans la petite chapelle du collège où il s’était consacré au Sacré-Cœur. 

Nous devons maintenant vous dire quelques mots de la spiritualité de saint Claude La Colombière. Vous comprendrez mieux pourquoi il fut si proche de Marguerite-Marie Alacoque et qu'il reconnut instantanément la vérité des révélations qu'elle recevait de Jésus. 

Le message nouveau qu'avait reçu Marguerite-Marie Alacoque  concernait la nécessité d’orienter les âmes vers le Cœur de chair de Jésus, “Cœur couronné d’épines et surmonté de la Croix.” [8] et de “manifester, avec insistance, son amour passionné payé d’ingratitude, méconnu et outragé... “ Les deux thèmes principaux de cette révélation étaient nettement orientés vers la réparation à cause de nos péchés, et vers la miséricorde infinie du Cœur de Jésus, thèmes qui seront longuement repris plus tard dans l’encyclique  Miserentissimus Redemptor de Pie XI. 

C’est dans cette perspective que s’inscrivit ”L’Offrande au Cœur Sacré de Jésus” du Père Claude en 1677, alors qu'il était encore à Londres. Cette offrande avait deux buts: honorer et réparer. Claude écrivit: 

        – “Cette offrande se fait pour honorer ce divin Cœur, le siège de toutes les vertus, la source de toutes les bénédictions, et la retraite de toutes les âmes saintes.” 

        – Elle se fait aussi “en réparation de tant d’outrages... Pour cela, ô très adorable Cœur de mon aimable Jésus, je vous offre mon cœur, avec tous les mouvements dont il est capable; je proteste que je désire m’oublier moi-même et tout ce qui peut avoir du rapport avec moi. J’offre à ce Cœur tout le mérite, toute la satisfaction de toutes les messes, de toutes les prières, de toutes les actions de mortification, de toutes les pratiques religieuses, de toutes les actions de zèle, d’humilité, d’obéissance, et de toutes les autres œuvres que je pratiquerai jusqu’au dernier moment de ma vie. Non seulement cela sera pour honorer le Cœur de Jésus, mais encore je Le prie d’accepter la donation entière que je lui en fais, d’en disposer de la manière qu’Il lui plaira.” 

L’offrande se termine par une prière d’une rare élévation dont voici l’essentiel: “Sacré Cœur de Jésus, apprenez-moi le parfait oubli de moi-même, puisque c’est la seule voie par où l’on peut entrer en Vous... Enseignez-moi ce que je dois faire pour parvenir à la pureté de votre Amour, duquel vous m’avez inspiré le désir... Faites en moi votre volonté, Seigneur; je m’y oppose, je le sens bien, mais je voudrais bien, ce me semble, ne pas m’y opposer. C’est à Vous à tout faire, divin Cœur de Jésus-Christ; Vous seul aurez toute la gloire de ma sanctification si je me fais saint... Amen!”  [9]  

Chaque fois que ce sera possible, le Père Claude fera connaître le Sacré-Cœur de Jésus. Et il ne cachera pas non plus, son “cœur à Cœur” permanent avec le Christ.

Paulette Leblanc


[1] Toutes les informations rapportées dans ce petit texte ont été extraites des “Écrits spirituels” de Claude La Colombière,  édités par Desclée de Brouwer Bellarmin et de “Saint Claude LA COLOMBIERE”  de Georges GUITTON.
[2] “Écrits spirituels”  édités par Desclée de Brouwer Bellarmin.
[3] “Écrits spirituels”  édités par Desclée de Brouwer Bellarmin page 25.
[4] “Écrits spirituels”  édités par Desclée de Brouwer Bellarmin , introduction page 41.
[5] “Saint Claude LA COLOMBIERE”  de Georges GUITTON, page 87.
[6] “Écrits spirituels”  édités par Desclée de Brouwer Bellarmin page 169.
[7] “Saint Claude LA COLOMBIERE”  de Georges GUITTON, page  229.
[8] “Saint Claude LA COLOMBIERE”  de Georges GUITTON, pages 90 et 91.
[9] “Saint Claude LA COLOMBIERE”  de Georges GUITTON, page 85.

 

 

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