Bède le Vénérable
Docteur de l'Église catholique, Saint
(672-735)

25

MAI

Tout d'abord, nous devons savoir que ce qui est aujourd'hui connu de la vie de saint Bède le Vénérable vient du dernier chapitre de son Historia Ecclesiastica, qui rapporte l'histoire de l'Église en Angleterre. Ce livre de Bède fut achevé aux environs de 731. Bède, dont le nom, en vieil anglais, signifiait "prière",  devait avoir à peu près 59 ans. D'après ce document, nous apprenons que Bède serait né sur les terres du monastère de Wearmouth-Jarrow, deux monastères jumelés situés près de Sunderland (port situé sur la mer du Nord au Nord-Est de l'Angleterre) et de Newcastle upon Tyne (ville proche de Sunderland, donc elle aussi dans le Northumberland). On pense que Bède appartenait à une famille aisée compte tenu de ses liens avec des familles nobles. 

À l'âge de sept ans, Bède fut envoyé au monastère de Wearmouth par sa famille pour recevoir l'enseignement de Benoît Biscop, moine de Lérins et fondateur de l'abbaye de Wearmouth, puis de Jarrow. En effet, Benoît Biscop, avec Ceolfrith fonda aussi, en 682, l'Abbaye de Jarrow, jumelle de Wearmouth. On pense que Bède, âgé de 10 ans aurait suivi Ceolfrith à Jarrow. Quatre ans plus tard, en 686, la peste éclatait à Jarrow. Il n'y aurait eu que très peu de survivants, dont Ceolfrith et Bède. 

Vers 692, Bède fut ordonné diacre par l'évêque de Hexham, John. Bède n'avait que 19 ans. On peut expliquer cette ordination précoce de Bède en raison de la qualité remarquable de sa vie de moine et de ses performances intellectuelles exceptionnelles. Mais il semble que son ordination comme prêtre n'ait été faite qu'en 702, alors qu'il avait trente ans, par le même évêque. Cependant aucun document ne permet de connaître les dates exactes concernant la vie de Bède.  

Moine bénédictin, Bède demeura toute sa vie à Jarrow, réalisant en sa personne le modèle du moine bénédictin, partageant son temps entre le travail manuel -on dit de lui qu'il exerçait l'office de boulanger- l'étude et la prière. La bibliothèque de Jarrow était très riche et rassemblait des œuvres patristiques, exégétiques, historiques, liturgiques et même poétiques. Bède, qui connaissait tous ces livres, devint le premier historien de l'Angleterre, des origines à 731. On dit que Bède fut le premier auteur à avoir utilisé la langue anglaise. C'est lui qui fit connaître les Pères latins aux anglais. Son livre le plus connu, The ecclesiastical History of the English people lui valut le titre de Père de l'Histoire anglaise. Il convient d'ajouter ici qu'aucun historien européen ne peut se passer de l'œuvre de Bède. Son œuvre, gigantesque lui valut également le surnom de Vénérable.  

Vers 701, Bède écrivit ses deux premiers ouvrages destinés à servir de support à l'enseignement, le De Arte Metrica, et le De Schematibus et Tropis. Bède qui était un moine enseignant, continua à écrire jusqu'à sa mort; on compte environ une soixantaine de livres qui sont tous arrivés jusqu'à nous.  

Et voici une anecdote qui vous fera sourire. En 708, Bède fut accusé d'hérésie par des moines de l'abbaye de Hexham, située dans le Northumberland, à cause de son ouvrage De Temporibus. Cette accusation fut faite, au cours d'un banquet, devant Wilfrid, l'évêque de Hexham, par des moines ivres… À l'époque, au 8ème siècle, les sciences étaient encore très rudimentaires et, pour ce qui concernait la vie sur la terre, la théorie généralement adoptée par les théologiens était celle des six âges du monde qui estimait que le Christ serait né plus de 5000 ans après la Création. Bède, au contraire, qui connaissait aussi l'histoire du monde et l'astronomie de son époque, avait calculé que le Christ serait né 3952 ans après la création. L'évêque Wilfrid ne répondit rien à l'accusation portée contre Bède, mais un moine présent rapporta la chose à Bède. Bède répondit à ce moine pour se justifier et il lui demanda de transmettre sa lettre à l'évêque Wilfrid pour qui il avait peu d'estime. Nous n'insisterons pas.  

Les lettres de Bède envoyées à des correspondants de toute la Grande Bretagne, laissent entendre qu'il aurait voyagé et aurait rencontré l'évêque d'York. Il se serait rendu également au monastère de Lindisfarne et dans d'autres endroits demeurés inconnus, notamment à Rome. Bède espérait pouvoir rendre visite à Egbert, l'évêque de York, mais il tomba malade en 734, et ne put faire le voyage. Toutefois, comme à l'ordinaire, il suivait tous les offices avec ses frères moines, tout en poursuivant ses enseignements. Il continuait également, et cela jusqu'à la veille de sa mort, à dicter à un jeune scribe, la traduction anglaise de l'Évangile de saint Jean. Mais le mardi veille de l'Ascension, Bède se sentit plus mal et resta éveillé toute la nuit pour prier et être prêt à continuer à dicter le lendemain, mercredi 26 mai. Mais ce jour-là, mercredi 26 mai, à l'heure de None, il demanda qu'on lui apporte une boîte et il en distribua aux moines du monastère les "quelques trésors" qu'elle contenait: un peu de poivre, des napperons et un peu d'encens. Puis Bède dicta une dernière phrase à son jeune scribe, et mourut peu après. C'était le mercredi 26 mai 735. Bède fut enterré à Jarrow.  

La mort de Bède, serviteur de Dieu doit aussi être un enseignement pour nous. Le mardi avant l'Ascension du Seigneur, il redisait avec des larmes de joie l'Antienne de la fête: "Ô Roi de gloire qui êtes monté triomphant par delà tous les cieux, ne nous laissez pas orphelins, mais envoyez-nous l'Esprit de vérité selon la promesse du Père." Et, revenant à sa traduction de l'Évangile de saint Jean et à un travail qu'il avait entrepris sur saint Isidore il affirmait: "Je ne veux pas que mes disciples après ma mort s'attardent à des faussetés et que leurs études soient sans fruit." 

À son jeune secrétaire, qui lui disait peu de temps avant sa mort: "Bien-aimé Maître, il n'y a plus à dicter qu'un chapitre; en aurez-vous la force?" il répondit en souriant: "C'est facile: prends ta plume, taille-la, et puis écris; mais hâte-toi." Et la traduction fut achevée le soir même, juste avant que Bède s'en aille vers le Seigneur.  

Saint Bède le Vénérable est vénéré par les Églises catholique, orthodoxe, anglicane  et luthérienne. Il fut nommé Docteur de l'Église en 1899, par le pape Léon XIII. Saint Bède est considéré comme un des principaux érudits du haut Moyen-Âge. Son œuvre, considérable, concerne tout d'abord l'histoire de l'Église de Grande Bretagne. Outre les livres de son monastère dans lesquels il puisait sa science, il avait des correspondants, surtout les abbés des autres monastères qui lui procurèrent des informations sur l'Église du Kent, du Wessex, de l'est de l'Angleterre. Bède était aussi considéré comme le meilleur latiniste  des Îles anglo-Saxonnes. 

Outre ses travaux historiques, Bède le Vénérable rédigea de nombreux commentaires bibliques et théologiques. Il se référait aux saints Jérôme, Augustin, au pape Grégoire 1er le Grand et à saint Ambroise. Enfin nous devons signaler que Bède, ayant des connaissances astronomiques, voulut inclure une chronologie du monde dans ses travaux, pour mieux expliquer les connaissances du Moyen-Âge concernant le cosmos, dont la sphéricité de la terre, les raisons des changements de saisons, de la longueur des jours, ainsi que les phases de la lune et le mouvement du soleil dans le zodiaque. Il travailla aussi sur l'âge du monde depuis la création. Enfin nous ne devons pas oublier tous ses travaux d'ordre pédagogique, car, enseignant dans son monastère, il fit de nombreux travaux concernant l'enseignement du latin, de la grammaire et de l'orthographe.  

Bède le Vénérable mourut le jour de la fête de saint Augustin de Cantorbéry, un 26 mai. Aussi fut-il fêté en Angleterre soit le 25 mai, soit le 27. Cependant son culte ne fut pas célébré sur le continent malgré les efforts de ses compatriotes, notamment ses anciens élèves: Boniface et Alcuin qui le présentaient comme un exemple pour tous les moines.  

Maintenant quelques commentaires s'imposent tant Bède le Vénérable est un saint d'une actualité étonnante. Des documents anciens rapportent que Bède fut un modèle du moine bénédictin sachant associer le travail, la connaissance et la prière. Et Saint Bède le Vénérable laissa de nombreux écrits fort intéressants bien que très peu connus du grand public. 

On a écrit de lui que, sa réputation de piété et de science était telle "que le Pape saint Serge 1er (pape de 687 à 701) l'appela à Rome pour y travailler à la solution d'épineuses difficultés qui s'étaient élevées dans l'Église. Bède aussi écrivit beaucoup d'ouvrages pour réformer les mœurs des fidèles et pour soutenir et défendre la foi. Grande fut l'estime universelle qu'il s'acquit ainsi: saint Boniface, évêque et martyr, le proclamait la lumière de l'Église; Lanfranc, (Archevêque de Cantorbéry et réformateur de l'Église d'angleterre de 1070 à 1089) lui donna le titre de docteur des Anglais et le Concile d'Aix-la-Chapelle celui de docteur admirable. Il arriva que, même de son vivant, on lut publiquement ses écrits dans les églises, et comme alors on ne pouvait lui attribuer le titre de saint, on lui donna celui de vénérable qui lui resta toujours attaché…"  

Et voici qui est très important: les homélies de Bède habituèrent les fidèles à célébrer dans la joie les mystères de la foi et de la vivre de manière cohérente en attendant le retour du Seigneur... Selon l'enseignement de Bède, les pasteurs "devaient se consacrer avant tout à la prédication, qui ne doit pas se limiter aux sermons mais recourir à la vie des saints et aux images religieuses, aux processions et aux pèlerinages". Les personnes consacrées doivent s'occuper de l'apostolat, "en collaborant à l'action pastorale des évêques en faveur des jeunes communautés et en s'engageant dans l'évangélisation". Selon Bède le Vénérable, "le Christ attend une Église active... qui défriche de nouveaux terrains de culture..., qui insère l'Evangile dans le tissu social et dans les institutions culturelles". Il encourageait aussi "les laïcs à l'assiduité dans la formation religieuse... et leur expliquait comment prier de manière constante... en faisant de leurs actions une offrande spirituelle en union avec le Christ". 

Incontestablement, tout cela se passe de commentaires…

Paulette Leblanc

 

 

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