Anne Schaeffer
Laïque, Bienheureuse
1882-1925

5

OCTOBRE

Anna Schäffer naquit le 18 février 1882, à Mindelstetten, petite commune de la Haute Bavière, en Allemagne. Sa famille, nombreuse, était très modeste; le père d'Anna, menuisier du village, mourut à l'âge de 40 ans, laissant la famille, dans une grande pauvreté. Cependant, la maman éduquait ses enfants très chrétiennement. Elle était fidèle aux prières du matin, de midi et du soir, et la famille assistait à la Messe chaque dimanche et fête, et parfois aussi en semaine lorsque c'était possible.  

Anna était une enfant discrète, douce et timide, douée pour l'étude et habile aux besognes manuelles. Encore très jeune, Anna rêvait d'être religieuse, et, dès sa première communion, elle offrit sa vie "au Sauveur". Mais, en 1896, après la mort de son père, comme elle devait payer son trousseau pour entrer dans un ordre missionnaire, elle dut se mettre à travailler. Anna fut embauchée comme servante d'abord, à Ratisbonne chez une pharmacienne, puis à Landshut, chez un conseiller auprès du tribunal d'instance.  

En  juin 1898, Anna reçut, via un saint, un appel de Jésus: elle devait avant d'avoir ses vingt ans, et pour longtemps, beaucoup souffrir. Comme elle venait de se consacrer à Marie, elle s'engagea dans une maison forestière à Stammham. C’est là, le 4 février 1901, dans la buanderie de la maison, que son martyre commença. Tandis qu'elle faisait la lessive avec sa compagne Wally Kreuzer, le tuyau de poêle qui passait au-dessus de la lessiveuse, se détacha du mur. Anna monta sur un muret tout proche, pour raccrocher le tuyau. Soudain, elle perdit l'équilibre et tomba dans l'eau bouillante de la lessiveuse. Gravement brûlée aux jambes, elle dut subir plus de 30 opérations et passera le reste de sa vie, soit environ 20 ans, avec des pansements que l'on renouvelait chaque semaine. Dès le mois de mai 1902 elle sut qu'elle serait invalide à vie; en effet, malgré de nombreuses interventions chirurgicales, aucune greffe de peau ne put réussir. Anna dut renoncer à la vie religieuse.  

Anna ne se résigna pas facilement à son sort. Elle criait sa souffrance et s'accrochait à l'espoir de guérir. Cependant, l'école de la Croix la faisait grandir spirituellement. Son directeur spirituel, le Curé de Mindelstetten, l'abbé Rieger, témoignera: il ne l'avait jamais entendu se plaindre. Malgré ses douleurs incessantes, Anna était fortifiée par Dieu et spécialement par la Sainte Eucharistie. Parlant de la souffrance, dans sa Lettre Apostolique  SALVIFICI DOLORIS, paragraphe 26, le pape Jean-Paul II écrivit:

"C'est avec des dispositions différentes que les hommes abordent leur souffrance. On peut cependant affirmer d'emblée que chaque personne entre presque toujours dans la souffrance avec une protestation tout à fait humaine et en se posant la question: 'Pourquoi?' Chacun se demande quel est le sens de la souffrance et cherche une réponse à cette question au plan humain. Il adresse certainement maintes fois cette interrogation à Dieu et il l'adresse aussi au Christ. En outre, la personne qui souffre ne peut pas ne point remarquer que celui auquel elle demande une explication souffre lui-même et qu'il veut lui répondre de la Croix, du plus profond de sa propre souffrance. Pourtant, il faut parfois du temps, et même beaucoup de temps, pour que cette réponse commence à être perçue intérieurement... Le Christ n'explique pas abstraitement les raisons de la souffrance, mais avant tout il dit:

-Suis-moi! Viens! Prends part avec ta souffrance à cette œuvre de salut du monde qui s'accomplit par ma propre souffrance! Par ma Croix!

Au fur et à mesure que l'homme prend sa croix, en s'unissant spirituellement à la Croix du Christ, le sens salvifique de la souffrance se manifeste davantage à lui?"  

Ceci s'applique exactement à ce que vécut Anna Schäffer. Mais revenons à elle. La pauvreté d'Anna et de sa mère était très grande, mais Anna qui, après plusieurs révoltes, avait reconnu la volonté de Dieu s'abandonna et offrit ses souffrances à Dieu, comme un sacrifice destiné à partager celles de Jésus, crucifié par amour pour tous les hommes. Et la vie d'Anna devint une vie de prière, de pénitence et d'expiation. Le curé du village, le Père Karl Rieger, son directeur spirituel, lui apportait l'Eucharistie chaque jour, et comme plusieurs personnes du village, il l'aidait matériellement. Anna était très aimée par les gens de son village qu'elle réconfortait et pour qui elle priait. Elle accueillait aussi les enfants qu'elle catéchisait; elle leur parlait de la Vierge Marie et des saints.  

Les journées d'Anna s'écoulaient dans la prière, la couture et l'écriture. Parlant de sa vie de grande handicapée, elle disait souvent: "J'ai trois clefs du paradis: la plus grande est de fer brut et pèse lourd: c'est ma souffrance. La seconde est l'aiguille à coudre, et la troisième est le porte-plume." En effet Anna faisait des travaux de couture, et elle aimait particulièrement broder des représentations du Sacré-Cœur. Elle disait: "Dans les heures de souffrance et dans les nombreuses nuits sans sommeil, je me place en esprit devant le tabernacle et je m'offre au Sacré-Cœur de Jésus, en expiation et en réparation. Oh! Comme le temps alors passe alors vite pour moi! Cœur-Sacré de Jésus, caché au Saint-Sacrement, je vous remercie pour ma croix et mes souffrances, en union avec les actions de grâces de Marie, la Mère des Douleurs." 

Anna bénéficia de visions célestes. Ainsi, nous savons que depuis 1901, elle voyait son ange gardien. Elle le voyait d'une beauté indescriptible; il se tenait à sa droite, et elle l'appelait "mon plus fidèle Ami". Tertiaire de Saint François, elle reçut, le 4 octobre 1910, les stigmates de la Passion de Jésus, mais elle obtint plus tard la grâce qu'ils deviennent invisibles. Parlant de ses grandes souffrances qui allaient jusqu'à l'empêcher de parler, elle écrivit dans ses notes: "Oh! Quel bonheur et quel amour sont cachés dans la croix et la souffrance!... Je ne suis pas un quart d'heure sans souffrir, et depuis longtemps je ne sais plus ce que c'est que d'être sans douleur... Souvent, je souffre tant, que je peux à peine dire un mot; à ces moments, je pense que mon Père des Cieux doit m'aimer particulièrement." Les habitants du village, qui l'aimaient beaucoup, se relayaient parfois pour la transporter aux Offices de la paroisse.   

Trois ans avant sa mort, Anna dut interrompre ses travaux de couture. En effet, en 1923, elle eut une extase et vécut les événements du Vendredi Saint. Son état se détériora encore plus: paralysie complète des jambes, crampes atroces et cancer du rectum. Cinq semaines avant sa mort, elle chuta de son lit et se fractura le crâne; elle perdit l'usage de la parole et devint presque aveugle. Ses souffrances, durant les trois dernières années de sa vie étaient telles que tout le monde se demandait comment un être humain pouvait supporter une telle torture physique. De plus, comme on ne pouvait plus la transporter, elle ne pouvait plus assister à la messe. Le 16 mars 1922, elle avait écrit: "Ma vie s'éteint peu à peu dans la souffrance... L'Éternité se rapproche sans cesse; bientôt, je vivrai de Dieu, qui est la Vie même. Le Ciel n'a pas de prix, et je me réjouis chaque minute de l'appel du Seigneur vers la patrie infiniment belle." Après avoir communié une dernière fois, elle mourut le 5 octobre 1925 en murmurant: "Seigneur Jésus, je vous aime." Elle avait 43 ans. 

Anna Schäffer fut béatifiée le 7 mars 1999 par le pape Jean-Paul II. Elle  fut canonisée le 21 octobre 2012, par le pape Benoît XVI. Sa fête est le 5 octobre. 

Immédiatement après sa mort, beaucoup de personnes vinrent sur son tombeau pour l'implorer et demander son aide. Avant même le jugement officiel de l'Église, on venait de partout jusqu'à son tombeau, de Bavière puis de toute l'Europe pour implorer son aide. Depuis 1929, on estime que plus de 15 000 grâces auraient été obtenues grâce à son intercession. En 1998, 551 grâces obtenues par son intercession furent recensées dans la paroisse de Mindelstetten. Au cours de l'homélie qu'il prononça lors de sa béatification, le pape Jean-Paul II déclara que "son lit de malade était devenu le berceau d'un apostolat étendu au monde entier." Certes, elle avait dû lutter pour comprendre que la faiblesse et la souffrance sont les pages sur lesquelles Dieu écrit son Évangile. Anna, qui ne pouvait pas quitter son lit, était devenue "le berceau d'un apostolat étendu au monde entier." 

Mes chers amis, je dois ajouter ici que, de 1910 à 1925, Anna Schäffer écrivit ses pensées sur douze carnets; de plus, 183 lettres d'elle ont été conservées. Son langage, très simple, permet de découvrir une âme pleine de foi en Jésus crucifié, mort et ressuscité. De plus, Anna Schäffer se savait en Communion avec tous les élus de Dieu. La confiance qu'elle avait en Dieu rayonnait d'elle et incitait les visiteurs qui venaient à elle, à lui confier leurs peines et leurs détresses, et à demander ses conseils. Sa charité envers le prochain faisait sortir Anna de son silence habituel, et elle trouvait toujours les paroles capables de réconforter. Ensuite, elle priait inlassablement à toutes les intentions de ceux qui étaient venus la rencontrer. 

Pour conclure, rappelons ce que déclara le pape Jean-Paul II le 7 mars 1999, lors de la béatification d'Anna Schäffer: "Si nous tournons notre regard vers la bienheureuse Anna Schäffer, nous lisons dans sa vie un vivant commentaire de ce qu'a écrit saint Paul aux Romains (Rm 5, 5) Je cite: 'L'espérance ne déçoit point, parce que l'amour de Dieu est répandu dans nos cœurs par l'Esprit-Saint qui nous a été donné.' Et Jean-Paul II poursuit: Certes, la lutte pour s'abandonner à la volonté de Dieu n'a pas été épargnée à Anna. Mais il lui a été donné de comprendre toujours mieux que, justement, la faiblesse et la souffrance sont les pages sur lesquelles Dieu écrit son Évangile... Son lit de malade était devenu le berceau d'un apostolat étendu au monde entier." 

Il faut ajouter qu'Anna, contrairement à la médiocrité ambiante, suivait vraiment le Christ souffrant. Elle est un exemple vivant, afin que les hommes pensent davantage à leur salut éternel qu'à leur confort et aux plaisirs terrestres.

Paulette Leblanc

 

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