ANGÈLE DE FOLIGNO
franciscaine, visionnaire, bienheureuse
(1245-1309)

4

JANVIER

Sainte Angèle de Foligno naquit en 1248, à Foligno, petite ville commerçante italienne située à 17 km d'Assise, dans la province de l'Ombrie. Sa famille, riche, la maria alors qu'elle avait vingt ans. Sa situation sociale, très aisée, lui fit connaître une vie mondaine et si frivole qu'elle abandonna toute pratique des sacrements bien qu'elle ait eu plusieurs fils à qui elle aurait dû donner l'exemple. Mais tout changea quand elle atteignit la quarantaine. Tous les membres de sa famille moururent: son père, sa mère, son mari et ses enfants. C'est alors qu'elle se convertit.

Angèle aurait d'abord voulu se confesser, mais elle avait commis tellement de péchés qu'elle n'osa pas les avouer tous à un prêtre. Elle alla ensuite communier, sachant pourtant que cette communion était sacrilège puisqu'elle avait caché certains péchés lors de sa confession. C'est alors qu'elle eut une vision de François d'Assise, mort vingt ans avant sa naissance. Très impressionnée, elle entra immédiatement dans la voie de la pénitence pour expier ses nombreuses fautes. Elle n'avait plus qu'un désir: en réponse d'amour, accorder sa vie à celle du Christ. En conséquence, elle passait chaque jour de longues heures en prière; elle multipliait les mortifications et distribua son argent aux pauvres. Tout le monde, autour d'elle, la croyait devenue folle.

Angèle convertie et enflammée par l'amour du Christ, était entrée dans la voie de la pénitence. Elle n’avait plus qu’un désir: répondre à l'Amour du Christ qui pour elle était mort sur la croix, par une vie semblable à celle du Christ. Pour cela, en 1291, Angèle entra dans le Tiers Ordre de Saint François. En effet, totalement transformée en amour elle comprenait la nécessité de partager la compagnie du Christ, c’est-à-dire sa pauvreté, sa douleur, son état méprisé et son obéissance véritable. À plusieurs reprises le Christ lui apparut, en particulier dans certaines visions dramatiques de sa Passion. Un jour, un Jeudi Saint, Angèle de Foligno entendit le Christ prononcer cette phrase qui la bouleversa: "Ce n'est pas pour rire que je t'ai aimée." Autrefois bourgeoise très frivole, Angèle de Foligno était devenue une très grande mystique.

Totalement transformée en amour, Angèle pénétra dans les abîmes de l’Amour divin et de sa propre incapacité.  Elle sentait la présence du Christ dans son âme, présence qui, écrivit-elle, “embrase l’âme d’un feu ardent... mais d’un feu de doux amour.”  Ici, une remarque s'impose: les visions du Christ crucifié qui se manifestaient parfois, pour Angèle, à travers des crises violentes, tant leur réalisme était grand, effrayaient ses amis. Même les Frères Mineurs, disciples de saint François, se méfièrent d'elle, d'autant plus qu'elle prenait part aux controverses qui opposaient, dans l'Ordre franciscain, les partisans d'une pauvreté mitigée et ceux qui étaient favorables à une application stricte de l'idéal franciscain primitif.

Quoique toujours favorisée de grâces extraordinaires, les dernières années de la vie d'Angèle seront plus paisibles, et, dira-t-on, "Elle semblait jouir du bonheur céleste."

Angèle de Foligno mourut en 1309. Elle est considérée comme l'une des grandes mystiques du 13ème siècle reconnues par l'Église. Elle fut déclarée bienheureuse par le pape Clément XI le 11 juillet 1701. Elle fut canonisée le 9 octobre 2013, par le pape François. Sa fête est le 4 janvier.

Voyons maintenant ce que fut la sainteté d'Angèle de Foligno. L’influence d’Angèle ne s’est pas seulement exercée sur le petit groupe de ses disciples; elle a inspiré plusieurs des écrits de Sainte Thérèse d’Avila. De plus, Saint François de Sales, Saint Alphonse de Liguori, Jean-Jacques Olier font également référence à Angèle de Foligno. Ainsi, les “vingt premiers pas” d’Angèle exposent sa conversion. Le premier pas est la connaissance du péché car à cause de son péché l’âme craint d'être damnée. Puis, le repentir et la peur de l’enfer conduisent à la pénitence et au  douloureux "chemin de la croix" qui, du huitième au quinzième pas, la conduira ensuite sur le chemin de l'amour. Mais Angèle "ne sent pas l'amour"; elle affirme: "l'âme éprouve de la honte et de l'amertume et elle ne fait pas encore l'expérience de l'amour, mais de la douleur."

Viennent ensuite les extases et les révélations sur la Passion et l’amour de Dieu pour l’humanité. Un jour, Angèle entendit: “Ma fille... mon temple, mon délice, le Cœur de Dieu tout-puissant se tient maintenant sur ton cœur.”  Dieu dit encore: “Il est si grand l’Amour que j’ai pour l’âme qui m’aime sans malice!... Vois s’il est en Moi autre chose que de l’Amour.”

C'est que, "Dieu incréé aime totalement et veut être aimé totalement.
Si l’âme Lui donne tout son cœur, Il l’accepte totalement."

Un texte inspiré, écrit en latin, vibrant d'amour tout en étant à la fois humble et impétueux dans l'expression des grandes visions exprimées, nous a transmis l'enseignement d'Angèle. Connu sous le nom Le Livre d'Angèle de Foligno, il est considéré comme un chef-d'œuvre de la littérature mystique. C'est que cet ouvrage est le témoignage d'une expérience vécue: celle de l'irruption de Dieu dans l'existence d'une femme qui, ayant perdu tous ses êtres chers, se laissa perdre elle-même dans l'amour du Christ.  

Voici maintenant quelques citations des paroles de Dieu à Angèle de Foligno, paroles qui ont été consignées par un de ses disciples, et qui constituent le ”Livre d’Angèle de Foligno”.

La grande grâce d'Angèle fut l'amour de Jésus crucifié. La contemplation des souffrances du Sauveur lui devint si familière, que la vue d'un crucifix provoquait spontanément chez elle des torrents de larmes: "Quand je méditais sur la Passion, dit-elle, je souffrais le supplice de la Compassion; j'éprouvais dans les os et les jointures une douleur épouvantable et une sensation comme si j'avais été transpercée corps et âme."

Lorsque le Christ en croix lui apparaissait pour l'inviter à contempler ses plaies, elle en éprouvait une telle souffrance qu'elle désira partager la Passion de son Seigneur. Un jour, au cours d'une vision sur la Passion, le Christ la prit dans ses bras en disant: "j'ai voulu naître pour toi, et pour toi, m'abaisser à un tel degré d'indignité et d'abjection qu'en retour, tu dois naître à Dieu et mourir à tes vices." Et Jésus l'exhorta à répandre l'amour qu'elle portait en elle, en lui disant: "Je veux que tu sois utile à tous les hommes."

La contemplation de la Croix du Christ engendre l'humilité. En effet, souvenons-nous que Jésus, au cours de sa vie publique avait dit de Lui: “Apprenez de moi... que Je suis doux et humble de cœur.” Pour Jésus, l’humilité du cœur est le fondement et la racine de toutes les vertus. Jésus dit donc à Angèle: "Regarde maintenant l’humilité." Et Angèle vit la profondeur de l’humilité de Dieu à l’égard des hommes. Plus tard elle apprendra que “ni abstinence, ni austérité, ni pauvreté extérieure,... ni miracles ne sont quelque chose sans l’humilité de cœur. Mais l’abstinence sera bénie,... l’austérité,... les œuvres seront bénies et vivantes si elles sont fondées sur l’humilité.” Et Angèle dira à ses amis: “Plus la grâce divine plonge l’âme dans l’humilité, plus cet approfondissement de l’humilité fait grandir la grâce divine.”

Cette grâce divine, le plus grand don de Dieu, c'est l'Amour. C'est ainsi qu'Angèle, à la fin de sa vie, pouvait, par expérience, parler des degrés de l’amour et des dons spéciaux de la bonté divine, dont le plus grand est l’Amour. ”Dieu incréé aime totalement et veut être aimé totalement... Si l’âme Lui donne tout son cœur, Il l’accepte totalement... Alors la vertu de l’Amour transforme l’amante en l’Aimé et l’Aimé en l’amante, c’est-à-dire que l’âme, embrasée de l’Amour divin, se transforme par la vertu de l’Amour en Dieu, son Bien-Aimé... Comme le fer embrasé prend la forme du feu... comme il se donne totalement et pas en partie, et qu’il accepte d’être  embrasé tout en demeurant substantiellement en lui-même, ainsi l’âme, unie à Dieu et avec Dieu par le feu parfait de l’Amour divin, se donne pour ainsi dire totalement et se jette en Dieu… Angèle peut alors parler du Don suprême de l’Être suprême qui est l’Amour: “Bien suprême qui a daigné nous faire le connaître et nous fait aimer un tel Amour...”

Mais de l'Amour va naître la souffrance; en effet, ”Plus nous voyons Jésus-Christ, Dieu et homme, plus nous sommes transformés par Lui en amour... et nous sommes ainsi transformés dans la douleur que l’âme voit en Jésus-Christ.”  Car, pour Angèle, l’amour de Jésus et l’amour pour Jésus, sont indissociables de la souffrance. “Ceux qui sont affligés et éprouvés intérieurement et extérieurement, c’est le signe qu’ils sont aimés de l’Aimé... il n’est pas réservé d’autre voie aux fils de Dieu, sinon la voie et la vie de ce Dieu-homme de douleur.” Mais l’âme transformée par l’Amour “est incendiée d’un feu divin... elle est transformée dans le Dieu-homme lui-même... “ Et Angèle conseille: ”Transformez-vous de tout votre être en ce Dieu-homme de douleur qui vous a tant aimés... C’est uniquement pour toi qu’Il s’est tellement abaissé Lui-même, pour t’exalter... par amour pour toi.”

Dès lors, Jésus multiplia pour Angèle, les tendres paroles d’amour: “Je suis plus intime à ton âme qu’elle ne l’est à elle-même... Qui voudrait parler avec Moi, c’est avec la plus grande joie que Je parlerai avec lui..." Et Angèle comprit que l’Amour ineffable de ce Dieu-homme, se manifeste surtout dans l’Eucharistie, Sacrement de l’Amour par lequel Il peut demeurer tout entier avec nous et pour toujours. Dans l’Eucharistie l’âme découvre Dieu incréé, “elle découvre le Christ avec son âme, sa chair et son sang, et avec tous les membres de son très saint Corps...” L’âme découvre le sommet de la bonté divine et le sommet de la charité humaine: “Elle découvre dans cet abîme humain et divin non seulement l’infinie bonté divine, mais aussi la suprême et inouïe charité humaine de la part du Christ... pour la plus grande consolation de toute âme fidèle, et pour le réconfort et l’aide, dans cette vie présente, de toute l’Église militante.” Mais, de cette merveille on ne peut approcher que si l’on est très pur, “avec grande crainte et avec grand amour... l’âme doit avancer toute lavée et parée, car elle approche de Celui et de ce qui est la béatitude parfaite, la vie éternelle, la beauté, la hauteur, la douceur, tout l’Amour et la douceur de l’Amour.”

Au sommet de son ascension, Angèle connut alors la "certitude de Dieu". Elle disait: "Mon âme ne voit rien, et elle voit absolument tout." Elle nous fait ainsi goûter à l'expérience parfaite de Dieu dans les suprêmes ténèbres. Car Dieu permet parfois aux tempêtes de venir pendant que Lui semble dormir. C’est ainsi que durant deux années, de 1294 à 1296, Angèle, qui connaîtra des périodes de grande union intime avec Dieu, ressentira aussi des moments de désespoir intense, ou des sentiments de total abandon. Dieu en effet, permet parfois qu’une personne qu’Il aime soit totalement broyée et piétinée; Il le fait surtout pour ses fils les plus aimés... Mais cette transformation n’est pas continue et l’âme, “est prise par le désir de chercher tous les modes possibles de se transformer dans la volonté de l’Aimé afin de le retrouver…" Cela, c'est l'union à Dieu.

C’est ce que fit Angèle pour conformer son cœur “au Cœur du très doux Jésus.”

Paulette Leblanc

 

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