Alix LE CLERC
Religieuse, Fondatrice de la Congrégation Notre-Dame, Bienheureuse
1576-1622

9

JANVIER

Tout d'abord il est important de signaler qu'on ne peut pas séparer la vie d'Alix Le Clerc de celle de saint Pierre Fourier, car c'est ensemble qu'ils fondèrent la Congrégation des Sœurs de Notre-Dame consacrée à l'éducation des jeunes filles pauvres. Nous avons parlé de Saint Pierre Fourier récemment car sa fête est le 9 décembre. Aujourd'hui nous nous consacrons à Alix le Clerc.

Alix Le clerc naquit le 2 février 1576, à Remiremont dans les Vosges, dans le duché de Lorraine, alors indépendant de la France. Son père, Jean Le Clerc, Seigneur de Roville-aux-Chênes dont la famille avait été anoblie en 1512 par le duc de Lorraine Antoine de Lorraine avait épousé Anne Sagay, descendante d'une ancienne famille d'Épinal. Unique enfant de cette famille riche, et bien qu'elle ait été élevée dans la piété et la civilité, selon l'usage de son milieu, Alix vécut d'abord une vie très insouciante. Belle jeune fille,  elle aimait la vie, la danse et les danseurs. Pourtant, un historien disait d'elle: "D'un naturel doux et accommodant, d’un abord agréable, avec une modestie qui donnait de l’admiration, accompagnée d’une certaine gravité, grâce et douceur, qui la faisait craindre et aimer. Sa présence donnait du respect et de la retenue à ceux qui conversaient avec elle." Alix le Clerc plaisait au monde et elle avait senti naître en elle le désir de plaire, mais elle savait se faire respecter.  

Après une maladie grave, de pieuses lectures l'amenèrent à réfléchir sur la futilité de sa vie et son inutilité. C'est alors que, son père ayant dû, pour des raisons de santé, quitter Remiremont, Alix accompagna ses parents jusqu'à un petit village dépendant de la cure de Mattaincourt. Elle avait 18 ans. Là, elle rencontra le jeune curé récemment arrivé à Mattaincourt, Pierre Fourier qui devint son confesseur et son directeur spirituel.

Curieusement, vers la même époque, Alix pensait beaucoup à l'éducation qu'il faudrait donner aux petites filles pauvres dont personne ne s'occupait. Elle a écrit: "Quand je priais Dieu, il me tombait toujours en l’esprit qu’il me faudrait faire une nouvelle maison de filles pour y pratiquer tout le bien qu’on pourrait." Plus tard, elle eut une vision dans laquelle il lui sembla qu'elle ramassait des petites pailles abandonnées que d'autres regardaient avec mépris, et elle entendit intelligiblement une voix qui lui disait: "Je veux que ces petites âmes, qui sont comme des enfants bâtards, délaissées de leur mère, en aient une désormais en toi." 

Alix confia toutes ses pensées à son confesseur, le curé de Mattaincourt qui, prudemment, lui demanda de trouver d'abord quelques aides. C'est alors qu'une jeune fille, Gante André, qui n'avait que dix sept ans, vint lui confier le désir qu'elle avait de se consacrer à Dieu avec elle, car lui dit-elle, "depuis sa tendre enfance elle n'avait vécu que pour Dieu et pour les pauvres, et son rêve était de se livrer tout entière à l'action, pour étendre sur la terre le règne de Jésus-Christ." Nous sommes en octobre 1597. Nos deux jeunes filles vont se présenter ensemble à leur curé qui leur demande d'attendre encore un peu. Bientôt trois autres jeunes filles, apprenant leur démarche, vinrent trouver Alix et s'ouvrirent à elle du dessein qu'elles nourrissaient en silence. Cette fois leur curé accepta leur démarche et le 20 janvier 1598, suite à une nuit d'oraison et d'extase, le jeune curé prit sa résolution. En effet, il était lui-même profondément ému à la vue des dangers que faisait courir la réunion dans les mêmes classes des garçons et des filles. Il jugea qu'il était nécessaire d'avoir une Congrégation d'hommes pour instruire des garçons et une Congrégation de femmes pour instruire les filles. Et il décida l'institution simultanée de deux Ordres, l'un de Religieux et l'autre de Religieuses, qui seraient voués à l'enseignement gratuit des enfants du peuple. 

Mais dans un premier temps Pierre Fourier échoua dans son désir d'instituer une congrégation masculine. Il se tourna donc vers les cinq jeunes filles, qui attendaient sa décision pour elles. Avec l'approbation de l'évêque de Toul, elles allèrent au village de Poussay près de Mattaincourt; là elles bénéficièrent de la protection de Madame d'Apremont, et elles purent établir les premières bases de la future Congrégation de Notre-Dame, tout en commençant à instruire les jeunes filles du village.  

En 1600, Alix et ses compagnes revinrent à Mattaincourt, grâce à la générosité de Madame d’Apremont, qui leur acheta un local. Alix reçut du Père Fourier la direction de la maison, et là, comme à Poussay, les élèves affluèrent dans leur école…  Le Père Fourier les assistait autant qu'il le pouvait et insistait pour que le catéchisme fût enseigné chaque jour. Lui-même, tous les dimanches soir, il interrogeait les petites filles et leur faisait dire des dialogues établis à partir du catéchisme, avec les questions et les réponses utiles pour instruire également le peuple qui venait de partout.  

Malgré le succès de cette première école, la foi et l'enthousiasme de la communauté réunie autour d'Alix, les difficultés ne manquèrent pas. Durant vingt-cinq ans, avec Pierre Fourier, Alix connut de grandes difficultés: nécessité de conserver l'esprit d'origine de la Congrégation, élaboration des constitutions, visite des maisons de plus en plus nombreuses en vue de maintenir la vie spirituelle obligatoire à leur apostolat et à l'éducation des jeunes filles. Enfin, le 21 novembre 1617, eut lieu la première émission officielle des vœux et Alix Le Clerc prit le nom de Mère Thérèse de Jésus.  

Alix fit de nombreux voyages entre les différentes communautés qu'elle avait fondées; elle demandait également des conseils auprès d'autres congrégations afin d'améliorer sans cesse la vie spirituelle de ses sœurs et l'enseignement à dispenser aux élèves. En septembre 1621, Alix tomba gravement malade, et ne quitta plus sa chambre, mais elle recevait de nombreuses visites dont celles d'éminents personnages venus lui demander son aide spirituelle. Le jour de l'Épiphanie 1622, trois jours avant sa mort, elle réunit sa communauté et dit: "Je me souviendrai de vous toutes devant Dieu. Pour votre compte, conservez-vous toujours dans la plus entière union, usant de charité les uns envers les autres, car la charité et l'union sont les seuls moyens de maintenir votre Ordre." Alix avait 46 ans. 

Alix Le Clerc s'éteignit le 9 janvier 1622, à Nancy. Pendant trois jours, une foule nombreuse envahit le monastère afin de prier devant la dépouille de celle que l'on considérait déjà comme une sainte. Des miracles furent attestés sur sa tombe, des guérisons qui déroutaient les praticiens. Ces miracles furent consignés et publiés en 1666 dans un livre intitulé Vie de la Mère Alix Le Clerc. Le décret de béatification d'Alix Le clerc fut promulgué le 4 mai 1947  par le Pape Pie XII. 

Voici un petit fait divers intéressant: Nous savons tous que Jules Ferry qui fut plusieurs fois ministre au début de la 3ème république, attacha son nom aux Lois Scolaires et travailla également à la laïcité dans les écoles de la République. Curieusement il pensait probablement à Alix Le Clerc et à la fondation de ses écoles lorsqu'il évoqua "la naissance de l'instruction primaire en Lorraine, qui constitua l'acte de naissance de l'enseignement des filles en France."

Paulette Leblanc

 

 

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