Agnès, était la fille du roi de Bohême
Ottocar 1er,
de
la dynastie des Premysl. Elle
naquit à Prague en 1211 dans une famille
qui
comptait déjà de nombreux saints. Quand elle eut atteint
l'âge de trois ans, Agnès fut confiée au monastère
cistercien de Trebnica près de Breslau où vivait sa
tante sainte Edwige qui lui enseigna ses premières
prières, lesquelles s'imprimèrent profondément dans son
cœur. À huit ans on l'envoya chez les religieuses
prémontrées de Doxane. Tout aurait pu bien se passer
pour elle… Hélas! L'Empereur Frédéric II, devenu veuf
avait décidé d'épouser cette fillette de neuf ans qui
avait déjà été fiancée deux fois… Agnès fut donc amenée
à la cour de Vienne.
L'Empereur Frédéric Il voulait hâter le temps des
fiançailles et du mariage. La petite Agnès, qui avait
voué depuis longtemps sa virginité entre les mains de la
Vierge Marie, alerta le Pape Grégoire IX, lequel fit
intervenir son légat, et le projet tourna court. Agnès,
qui avait déjà refusé trois mariages, avait entendu
parler de Claire et de François d'Assise et elle voulait
suivre leur exemple.
Petites précisions:
À l'âge de huit ans, Agnès avait d'abord été fiancée à
Henri, fils de l'empereur du saint empire romain,
Frédéric II. Henry n'avait que dix ans et il venait
d'être couronné roi des romains.… Selon la coutume Agnès
devait passer la suite de son enfance à la cour de son
futur mari afin qu'elle puisse apprendre la langue et la
culture de son nouveau pays, et pour qu'une amitié
puisse naître entre eux. Mais l'Empereur Frederick,
également roi de Sicile avait sa court à
Palerme, tandis que son fils Henry, roi de Germanie,
devait rester dans le palais de l'Archevêque Engelbert
de Cologne.
On
décida donc d'envoyer Agnès à la cour du duc Leopold VI
de Babenberg, d'Autriche. Mais Leopold, désirait marier
le jeune Henry à sa propre fille Margaret. Ces manœuvres
politiques durèrent six ans. Le père d'Agnès, Otakar
chercha à marier Agnès à Henry III d'Angleterre, mais
l'Empereur mit son veto car il désirait épouser Agnès.
C'est alors que le pape intervint.
Revenons à Agnès. Elle avait eu l'occasion de connaître,
grâce aux Frères mineurs qui étaient arrivés à Prague,
l'expérience spirituelle de Claire d'Assise. Après
l'intervention de Grégoire IX, Agnès renonça à ses
richesses et aux honneurs de son rang et voulut suivre
l'exemple de la pauvreté franciscaine: avec ses biens
personnels, suivant l'exemple de sa cousine, Sainte
Élizabeth de Thuringe, “consolatrice des indigents”,
elle fonda à Prague l'hôpital de Saint François et un
monastère pour les “Soeurs pauvres” ou “Damianites” où
elle entra elle-même le jour de la Pentecôte 1234. Elle
fut rapidement en relation avec sainte Claire d'Assise
qui lui envoya cinq religieuses pour que la vie
religieuse de ce couvent soit selon l'esprit des Pauvres
Dames d'Assise. En effet, Agnès désirait aussi vivre la
totale pauvreté suivant l'exemple du Christ pauvre.
Sainte Claire envoya à Agnès une lettre chaleureuse dans
laquelle elle la louait d'avoir préféré les épousailles
avec le Christ à tous les honneurs du monde. “C'est
ainsi que naquit entre les deux femmes l'une des plus
belles amitiés qui fût jamais.” Agnès devint abbesse
de son monastère vers 1237 ou 1238; elle le restera
jusqu'à sa mort. Grâce à l'exemple d'Agnès, d'autres
couvents de clarisses furent fondés dans son pays natal.
De plus, Agnès fonda également à Prague un hôpital et
une confraternité annexe pour le soin des malades, les
“Porte-Croix de l'Étoile rouge".
Claire d'Assise écrivit plusieurs autres lettres à Agnès
de Prague, pour l'exhorter à poursuivre l'itinéraire
entrepris. Ces lettres reflètent l'affection et la
sollicitude de la pauvre dame d'Assise pour Agnès, en
même temps qu'elles sont un trésor de la spiritualité
franciscaine. En voici un exemple:
Lettre de Sainte Claire d'Assise à sainte Agnès de
Prague
... Ô bienheureuse pauvreté, qui prodigue des richesses
éternelles à ceux qui l'aiment et la pratiquent! Ô
sainte pauvreté, en échange de laquelle Dieu offre et
promet formellement le royaume des cieux, la gloire
éternelle et la vie bienheureuse! Ô chère pauvreté, que
le Seigneur Jésus-Christ a daigné préférer à toute autre
chose, lui qui, de toute éternité, régnait sur le ciel
et sur la terre, lui qui a parlé et tout a été fait! Les
renards, disait-il, ont une tanière, et les oiseaux du
ciel leur nid, mais le Fils de l'Homme, c'est-à-dire le
Christ, n'a pas trouvé où reposer sa tête; et quand il a
laissé reposer sa tête, ce fut pour jamais, et il rendit
l'esprit.
Puisqu'un si grand et si glorieux Seigneur a voulu
descendre dans le sein de la Vierge, puisqu'il a voulu
apparaître au monde méprisé, nécessiteux et pauvre, afin
que les hommes, indigents, nécessiteux et affamés de
nourriture céleste, devinssent riches grâce à lui en
prenant possession du royaume des cieux, exultez donc de
joie, soyez épanouie d'un intense bonheur et
d'allégresse spirituelle: en préférant le mépris aux
honneurs de monde, et la pauvreté aux richesses
matérielles, en ne confiant pas vos trésors à la terre
mais au ciel, où ni la rouille ne les ronge, ni la
moisissure ne les attaque, ni les voleurs ne s'en
emparent, vous avez une ample récompense assurée dans le
ciel, et vous avez bien mérité d'être appelée sœur,
épouse et mère du Fils du Père très haut et de la Vierge
glorieuse...
Sainte Agnès mourut à Prague, le 2 (ou 6) mars 1282
après 40 années de vie religieuse. Elle fut béatifiée en
1874 et canonisée à Rome, le 12 novembre 1989. Le jour
de cette canonisation, le pape Jean-Paul II déclara:
"La Bienheureuse Agnès de Bohême, même si elle a vécu à
une époque très éloignée de la nôtre, reste aujourd'hui
encore un exemple très lumineux de foi chrétienne et de
charité héroïque, qui invite à la réflexion et à
l'imitation."
Le
pape dit encore: "Agnès de Bohême, que nous avons la
joie d'invoquer comme sainte aujourd'hui, même si elle a
vécu plusieurs siècles avant nous, a joué un rôle
notoire dans le développement civil et culturel de son
pays et demeure notre contemporaine par sa foi
chrétienne et sa charité: elle est un exemple de courage
et d'aide spirituelle pour les jeunes qui se consacrent
généreusement à la vie religieuse; elle est un idéal de
sainteté pour tous ceux qui suivent le Christ; elle est
une incitation à la charité, pratiquée dans un
dévouement total envers tous, dépassant toute barrière
de race, de peuple et de mentalité; elle est la
protectrice céleste de notre difficile itinéraire
quotidien. Nous pouvons donc nous adresser à elle avec
confiance et espérance."
Paulette
Leblanc |