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Dieu sauve le monde par le Saint-Esprit.
Lundi de Pentecôte
Car Dieu n'a pas envoyé son Fils dans le monde pour condamner
le monde, mais pour que le monde soit sauvé par lui. (Jean : 3, 17)
Exorde :
C'est un grand stimulant pour celui qui veut entreprendre
quelque ouvrage d'en comprendre le but et d'avoir confiance d'y parvenir. Quand
nous désespérons d'atteindre quelque chose, nous n'en cherchons pas les moyens
et nous ne les mettons pas en œuvre, etc.
Je me demande parfois pourquoi si peu d'hommes cherchent le
Saint-Esprit et comment ils peuvent vivre si peu soucieux de savoir si moi je le
possède. Ils mangent, ils rient, ils font des affaires, et les charmes d'une
jolie femme les mènent à la perdition alors que la beauté du Saint-Esprit a si
peu d'amis qui perdent le sommeil pour elle...
Combien d'heures de sommeil vous a enlevées cette angoisse du
Saint-Esprit ? Il est étonnant de voir le petit nombre de ceux qui aiment et
désirent ce Seigneur. Lui qui paie de retour mieux que le monde. Il y a des
hommes qui pour un real perdent l'honneur, le sommeil, et qui feront un faux
serment, etc.; et des richesses du Saint-Esprit rien ne vous importe. Pour
quelle raison ne les poursuivons-nous pas ?
Dieu a dit par la bouche de Moïse : " Ne dis pas : Cette loi
est loin de nous, qui l'accomplira ? Qui montera au ciel pour aller la chercher
ou qui descendra en enfer pour l'en retirer ? " Tu vois comment il te l'a envoyé
dire verbalement : elle est tout près de toi, en ta présence. Saint Paul
l'explique. Ne dis pas : Qui montera au ciel pour chercher Jésus-Christ ?
Qui descendra en enfer? " Ce qui signifie faire remonter le Christ
d'entre les morts ". " Près de toi est la parole, dans ta bouche et dans
ton cœur. C'est la parole de la foi que nous prêchons "
.
Il ajoute encore : Ne sois pas soucieux en disant : Qui montera au ciel
pour nous en apporter le salut, c'est-à-dire, Jésus-Christ ? Qui
descendra en enfer pour l'en retirer ? Qui pourra être près de lui pour
jouir de lui et recevoir son salut ? Ne dis pas cela — ajoute saint Paul — parce
que dans ta bouche, dans ton cœur, tout près, contre toi c'est là qu'il
se trouve. Si tu as la foi, tu seras sauvé.
Revenons à notre sujet. Y aura-t-il quelqu'un ici désireux de
voir le Saint-Esprit ? Quelqu'un n'a-t-il pas dit : " Ne jouirais-je pas, moi,
de lui, car les apôtres étaient si désireux de voir le Saint-Esprit à cause de
ce qu'il leur avait dit de lui, qu'ils en mouraient de désir ? " Ne dites pas :
" Ne verrais-je pas un si grand bien ? Peut-être suis-je en train de soupirer
pour ce que je ne peux atteindre ! J'ai placé mon amour dans une chose si haute,
qui est plus propice au désespoir qu'à la réussite. Lui véridique, moi menteur;
lui pur, moi souillé; lui grand, moi si petit; comment m'aimerait-il ? " Ne vous
tourmentez pas, ne vous désespérez pas, attachez-y vos soins, votre désir, car
le reste lui s'en préoccupera, etc.
Daniel vit un fleuve de feu qui descendait. Comment
cela se fait-il ? Sa nature n'est-elle pas de monter ? Que dit l'Apôtre ? Qu'il
convenait que le Christ, après avoir souffert pour nous, montât aux cieux et
s'assit à la droite du Père, afin de se tenir désormais pour nous présent
devant la face de Dieu ?
,
etc. Qu'est-ce que cela, Seigneur ? Il vous restait à faire ceci pour nous :
vous mettre devant les yeux du Père et lui présenter vos plaies et vos
souffrances, et lui dire : " Père Éternel, si vous m'aimez bien, aimez bien
ceux-ci que j'ai enfantés et pour lesquels j'ai souffert ". Car c'est de cette
face et de ce visage de Jésus-Christ, de ses mérites (car il est le visage de
Dieu; et l'on dit visage, parce qu'il nous en donne la représentation et nous
met devant les yeux la divinité de Dieu, comme visage, comme image de Dieu :
Ce fils qui est le rayonnement de sa gloire, l'empreinte de sa substance
"
,
c'est de la face et des mérites de Jésus-Christ qu'il vient. Qu'est-ce que
venir, sinon couler vers le bas ? N'est-il pas venu du ciel à la terre ?
N'est-ce pas cela descendre ? Il coule, il descend vers la bassesse des hommes
le fleuve de feu qu'est le Saint-Esprit.
Aujourd'hui il entre dans ces cœurs et il les allume et les
enflamme. Ne crains pas, car si le Christ a accumulé les mérites, il l'a fait
pour cela, et à cause de ses mérites il te le donnera. Et de même que, quand il
vint et se fit homme et s'enferma dans les entrailles d'une femme, la Très
Sainte Vierge, elle le pria, et ainsi prié il vint; à ses supplications, il
vint et entra dans son sein et le sanctifia et le purifia, ainsi fera-t-il avec
nous, etc.
Entretien du Seigneur avec Nicodème.
Dieu donne à vos seigneuries de très bonnes fêtes et la grâce
du Saint-Esprit abondamment. Il nous appartient aujourd'hui de prêcher quelques
paroles que le Saint-Esprit a dites par la bouche de l'évangéliste saint Jean.
On les a chantées à l'évangile de la messe, etc. Ce sont des paroles douces, et
plus encore parce qu'elles sont dans la bouche du Christ. Il veut dire : Dieu
n'a pas envoyé son Fils dans le monde pour le juger et le condamner mais
pour que le monde soit sauvé par lui. Il doit en avoir bien envie, puisqu'il
envoie un tel gage; il a envie de ce joyau, puisqu'il donne un tel prix pour
lui. Je vous en conjure, vous qui savez le latin lisez ce chapitre. Il me semble
que ce sont les paroles les plus douces qu'il y ait dans l'évangile.
Voyez comment le Seigneur s'entretient avec Nicodème. C'était
un homme bon et savant, etc. Parmi tout ce que vous pouvez y lire, il lui dit :
Vois, si l'homme ne naît de nouveau, il ne peut être sauvé. Il lui
répondit : Comment un homme déjà vieux peut-il naître de nouveau? Peut-il par
hasard rentrer dans le sein de sa mère?, etc. — Toi, maître et docteur en
Israël, tu ignores ces choses? Tu es très savant peut-être, pour te sauver
tu es ignorant. Ne sais-tu pas ce que signifie naître de nouveau ? C'est qu'on
ne peut voir le royaume de Dieu. Voir et entrer vont de pair, etc. Saint
Augustin dit : Celui qui n'est pas né ne peut voir les choses d'ici-bas, les
choses du monde; et tu ne peux voir les choses de Dieu si tu ne viens à
renaître, etc. Et tu ne sais pas cela? Ne l'as-tu pas lu dans la Loi,
dans les Nombres, que les enfants d'Israël ayant murmuré contre Moïse, Dieu
envoya des serpents qui les tuaient, et comment celui même contre qui ils
murmuraient intercéda auprès de Dieu pour eux, pour qu'il leur enlevât cette
plaie, et Dieu lui ordonna d'ériger un serpent, etc. ? Voici la réalité de cette
figure et le corps de cette ombre. Il convient que je sois élevé sur la croix,
pour que tous ceux qui me regarderont et avec foi lèveront les yeux sur moi,
aient la vie. Et si tu t'étonnes de savoir pourquoi j'apporte tant de soin au
salut, ce n'est pas à cause de leurs mérites. Sais-tu d'où cela provient?
Dieu a tellement aimé le monde,
etc.
Que ressentent vos oreilles quand vous entendez dire :
Dieu a tellement aimé le monde qu'il a donné son Fils unique, et en sachant
que ce qu'il avait à faire pour le monde allait lui coûter la vie ? Que je sois
moi aimé de Dieu ! Que mon âme soit si agréable à Dieu, qu'elle lui soit si
précieuse que, pour qu'elle ne se perde pas, il envoie son Fils unique afin de
mourir pour elle !
Seigneur, qui donc s'honore de sa race, qui s'honore de ses
biens, de sa condition, de sa beauté, etc. ? Ayez honte des honneurs et
estimez-vous parce que vous êtes si aimés, si chéris de Dieu, qu'un Fils, etc.
Il ne suffit pas de l'entendre, etc. On vous l'aurait envoyé pour qu'il nous
perdît ? Pouviez-vous avoir un plus grand bonheur, pouvez-vous avoir une plus
grande raison de suivre celui qui vous aime tant ? etc. La plupart de ceux qui
ne servent pas Dieu c'est parce qu'ils ne savent pas combien Dieu les aime, ils
ignorent les bienfaits de celui qui a donné son Fils pour toi, etc. Qu'il
pleure, lui, pour que toi tu sois heureux et en paix! etc.
Ne te réjouis-tu pas beaucoup d'entendre ces paroles, que Dieu t'a aimé
tellement ? Et c'était lui qui les disait, etc. // ne l'a pas envoyé pour
condamner le monde, il ne l'a pas envoyé pour le juger; car s'il était
venu pour cela, qui aurait échappé ? Qui n'aurait été condamné ? Il est venu
seulement pour que le monde soit sauvé.
L'homme créé dans l'honneur, ne le comprit pas.
— Il semble, d'après cela, que le monde était perdu avant
qu'il ne vînt. — Oui, et avant qu'il ne vienne à l'âme elle est perdue. —
Comment le monde s'est-il perdu ? — Sachons-le, parce que peut-être par là
verrons-nous comment il doit être sauvé. Alors que l'homme possédait
l'honneur, il ne le comprit pas, il fut comparé aux bêtes, il leur devint
semblable
.
Dieu créa le monde, il l'orna d'arbres, d'herbes, d'animaux. Il créa l'homme et
la femme. Il les fit seigneurs de tout, il leur donna le commandement et
l'honneur. Le plus grand honneur qu'il leur donna fut de les créer à son image
et à sa ressemblance et il les mit sous son obédience.
Étant ainsi honoré, il n'en comprit pas la valeur, il
ne sut pas se maintenir tel, car il faut davantage de vertu pour ne pas tomber
quand on possède l'honneur et la prospérité qu'il n'en faut dans les épreuves;
il faut plus de lumière pour ne pas tomber quand on possède l'honneur que pour
ne pas succomber sous les épreuves. Il ne connut pas ce qu'il avait, il voulut
monter plus haut, et parce qu'il voulut ce qui était au-dessus de cet honneur,
il perdit ce qui lui était destiné, et perdit cet honneur lui-même; non
seulement il perdit Dieu en l'abandonnant, mais il perdit ce que...
Celui qui est en état de péché est moins qu'un homme. Le voici perdu, changé
en bête, dès qu'il rejette la grâce et l'obéissance à Dieu. Dès que tu
pèches, aussitôt tu suis ce que veut ton appétit et ce que ta chair te demande,
etc. N'est-ce pas un homme celui qui vit selon la raison, etc., celui qui se
gouverne par la lumière naturelle ? Qu'est-ce qu'un chevalier vêtu de brocart et
de soie si à l'intérieur il n'est qu'une bête ? etc. De quoi a l'air celui qui
semble gouverner les autres quand lui-même est guidé et gouverné par une bête ?
Il n'y a pas de plus grand déshonneur que d'être en état de péché. C'est pour un
homme être transformé en bête, etc. Il ne comprit pas, etc. et il ne
savait pas quel poids c'était d'être une bête, ni ce qu'étaient les souffrances,
ni les fatigues, etc. A cause des péchés ces espèces entrèrent dans le monde. De
là vinrent la convoitise, l'orgueil, les majorais
,
etc.
Vous souvenez-vous d'un fou qui avait édifié une grande ville
pour se fortifier dans son royaume contre Dieu, pour qu'il ne pût l'en rejeter ?
Nabuchodonosor : Qui pourra — dit-il — m'enlever mon commandement et mon pouvoir
? Il attend donc, II entend une voix du ciel : On va te jeter hors de ton
royaume et de ta maison, et pendant sept années tu iras vivre comme une bête
parmi les bêtes, passant comme elles, et sept années passeront sur toi, jusqu'à
ce que tu confesses que le pouvoir et la force sont dans le ciel et non dans les
villes, non dans les briques, ni dans les pierres, etc. Qu'un cœur de bête
lui soit donné
,
il lui semblait à lui qu'il était une bête. Il sort de son palais et s'en va
dans la campagne avec les bêtes, et il y passe sept années. Que signifie cela ?
Que sept époques passeront sur toi, jusqu'à ce que tu reconnaisses que la force
et le pouvoir appartiennent au ciel, et non aux villes, aux briques, etc.
Puisque tu as enlevé à Dieu l'honneur, que l'on t'enlève non seulement le
royaume, mais que l'on t'enlève le cœur; qu'on te fasse homme et qu'il semble
que tu ne l'es pas, etc. C'est ainsi que, puisque tu abandonnes Dieu, que non
seulement on t'enlève la grâce et les vertus, etc., mais qu'il te semble être
une bête, etc. Allons.
Quoi ? Ceci ne se passe-t-il pas tous les jours parmi nous ?
Parce que vous vous êtes trouvé un certain temps dévot et porté à la prière et à
la contemplation, et que toutes les tentations ne vous effleuraient pas, vous
vous êtes enorgueilli, vous avez eu confiance en vos forces. Qu'on vous enlève
le royaume, que vous ne sachiez pas ce que c'est que la dévotion ni la prière,
ni ce qu'est Dieu, mais que vous deveniez semblable à une bête, pour reconnaître
que ce qu'il vous donnait était une grande grâce et qu'il ne vous le devait pas;
que maintenant paroles de Dieu et bonnes actions n'aient plus un goût agréable
pour vous. Connaissez-vous, etc. Le lion connaît celui qui lui donne à manger.
Et n'importe quel animal aussi. Et vous, vous ne le connaissez pas ? Que l'on
vous donne un cœur de bête ; que vous perdiez la miséricorde, etc. C'est ce que
Job pleurait au nom du pécheur, en disant : Ce que mon âme autrefois
haïssait, maintenant elle le mange. Tel est le péché d'Adam et Ève et tous
leurs descendants naissent avec le péché.
Dieu dit : " Laissez ces fous, car moi je ferai passer sept
années sur eux; je leur ferai comprendre leur peu de valeur sans moi ", etc.
Saint Augustin dit : " Pour que les hommes éprouvent bien leurs forces et
connaissent leur faiblesse, etc., et appellent le secours de Dieu, etc., il fait
chercher le remède ". Vient la loi naturelle; ils font le contraire. Ils la
comprenaient; mais ils ne l'accomplissaient pas. Connaissant ce qui était le
bien, ils ne le suivaient pas; ce qui était le mal, ils ne s'en écartaient pas.
Ils avaient là une loi dans leur âme, non pour la garder, mais pour connaître
leur infirmité, etc. Ils disaient : " S'il y avait une loi et quelqu'un qui
ordonne, il n'y aurait personne qui ne l'accomplirait ". Dieu leur donna sept
cent soixante-dix commandements, pour qu'ils ne se plaignissent pas qu'il ne les
commandait pas, et eux non seulement ne furent pas bons, mais furent pires
qu'avant sous la loi. La loi est intervenue pour faire abonder la faute
.
Non parce qu'elle était mauvaise, mais à cause de la méchanceté et de la
faiblesse humaines, etc. Soyez dès lors libérés de cette opinion, tenez-vous
pour faibles et méchants, etc.
Oh ! combien de fois disons-nous : " Je suis absorbé
maintenant par une affaire, il n'est pas question que j'aille me confesser ni
m'occuper de ma conscience; demain, cette affaire terminée, je le ferai ." Et
après, non seulement vous ne vous débarrassez pas de ces mauvaises actions que
vous avez entre les mains, mais vous en ajoutez tout autant, etc.
Cette folie et cette présomption, cette confiance en nos
forces nous perd. Finalement l'homme s'est perdu par désir d'honneur, et il est
tombé plus bas que la bête. Et dans le septième âge, depuis que les hommes
étaient traités comme des bêtes à cause des péchés, Dieu envoie le Sauveur de
ceux qui sont perdus, non pour qu'il les juge et les châtie — car Dieu ri a
pas envoyé son Fils, etc. — mais pour que le monde soit sauvé par lui, pour
qu'il lui porte remède.
Aujourd'hui Dieu sauve le monde par le Saint-Esprit.
Nous voici maintenant le jour de la fête. Comment le
sauvera-t-il ? L'homme était au-dessous de la condition de bête et encore plus
bas que la bête. Comment peut-on y remédier ? Qu'on lui enlève le cœur de bête
et qu'on lui donne un cœur. De qui ? D'homme non, mais de Dieu. Par le péché il
a perdu son cœur d'homme. Qu'on lui enlève maintenant le cœur de bête, et qu'on
lui donne celui d'un homme. Ôte de notre chair le cœur de pierre
C'est aujourd'hui ce jour de la création nouvelle de l'homme, de sa rénovation,
quand on enlève au monde un cœur de bête et qu'on lui donne celui de Dieu, etc.
Autrefois on ne baptisait qu'à Pâques et à la Pentecôte, pour donner à entendre
que le baptême est une nouvelle résurrection de l'âme, et aujourd'hui aussi,
parce que c'est aujourd'hui le jour où les hommes reçoivent des cœurs nouveaux
de Dieu, etc. Ceux qui sont déjà enfants des hommes, aujourd'hui sont des
enfants adoptifs de Dieu. C'est aujourd'hui ce jour.
Écoutez-moi attentivement. Comment Jésus-Christ les a-t-il
sauvés ? Voyez-vous ce combat qu'il soutint durant toute sa vie, luttant avec le
Père, le priant pour nous, s'offrant pour nous, etc. ? Il lutta avec nous pour
que nous le connaissions et que nous croyions en lui et lui obéissions, etc., et
il se battit et négocia mieux avec le Père notre pardon qu'avec nous notre foi,
etc. Pendant tout ce temps il réunit douze apôtres, choisis parmi tous les
hommes qu'il y avait dans le monde.
Eh bien ! comment le sauva-t-il ? Comment obtint-il son
rachat ? Aujourd'hui c'est le jour du Seigneur, qui vient aux hommes. Semblable
à l'autre jour est celui-ci. Autrefois Dieu est venu par union, maintenant Dieu
vient par union non hypostatique, mais d'opération et de régénération.
Bienheureux jour ! Qui ne s'émerveille ? Aujourd'hui la lumière descend parmi
les hommes, aujourd'hui descend la personne même de Dieu, le Saint-Esprit, et il
entre dans le cœur des hommes.
Quel beau jour et quel mariage harmonieux ! Aujourd'hui Dieu
sauve le monde par le Saint-Esprit. Eh bien! pourquoi dit-on Jésus-Christ
Sauveur ? C'est ainsi, parce qu'il l'est, parce que par ses prières le
Saint-Esprit est venu aux hommes, etc., guérir les cœurs abominables des hommes,
si mal enclins, etc. Dieu se plaint par la bouche de Jérémie : Israël est-il
un esclave, est-il né d'un esclave dans la maison? Pourquoi donc est-il traité
comme un butin? Pourquoi les lions rugissent-ils contre lui ?
Par hasard es-tu esclave? Pourquoi t'es-tu laissé prendre par le
péché ? Pourquoi es-tu devenu la proie et la victime des péchés ? Pourquoi
a-t-il été fait captif du démon ? Pourquoi es-tu esclave, chrétien ? Pourquoi
consens-tu à ce que les lions rugissent contre lui, à ce qu'ils se
réjouissent sur lui, comme des vautours sur les cadavres ? Pourquoi consens-tu à
ce qu'on l'amène au moulin pour l'écraser ? Dis : Pourquoi suis-je pécheur,
esclave du démon ? Lève les yeux vers le ciel, comme Nabuchodonosor, au bout des
sept années, et dis : Seigneur, à toi est le royaume et tu le donneras à qui
tu voudras. C'est ainsi, ainsi que je vous assagirai.
En toi est la force; dans ta main est le salut, et si j'ai
été fou et mauvais, et si le cœur se brise, s'il sent sa faiblesse, sa dureté,
et se rompt et que vous lui faites de nombreuses incisions, le salut est proche.
Vous n'êtes pas éloignés de quitter votre cœur de bête, dit Dieu. Que le
Saint-Esprit vienne et vous enlève ce cœur cruel, dur, etc., et qu'on vous en
donne un autre qui soit bon
.
De même qu'il guérit ce qui est à l'intérieur, il guérit ce qui est à
l'extérieur, et aussitôt à l'intérieur il guérit l'extérieur.
Lorsque les prêtres entrent dans l'eau avec l'arche
,
elle cesse de couler. Lorsque entrent dans l'âme les bonnes pensées, qui sont
représentées par les prêtres, parce qu'ils nous portent Dieu, lorsqu'ils entrent
dans l'âme, lorsque y entre la grâce, l'arche, aussitôt s'arrêtent les vices et
les mauvaises coutumes, aussitôt les hommes sont changés, etc. L'Esprit-Saint
commence à agir. On dit : " Cela suffit; c'est assez car j'ai offensé Dieu
jusqu'à présent ". Suffit-il pour ne pas être mauvais de ne pas pécher? Cela les
philosophes l'ont senti. Socrate, Platon, Pythagore. Vous savez qui ? Si vous
voyez un homme vertueux, qui vit selon la raison, s'il n'y a que cela, il
n'entrera pas dans le royaume des cieux, parce que nous n'y entrerons pas à
cause de notre naissance, mais parce que nous sommes nés de nouveau; ce ne sont
pas des hommes qui entreront, mais des enfants de Dieu : foi, grâce, espérance,
obéissance. Si tu te gouvernes seulement par la raison, tu n'entreras pas
là-haut, non, homme, car du ciel doit venir ton salut, etc. Tu ne nais pas de
nouveau, même si on te donne de la force pour bien agir, ce chemin n'est pas
encore bon pour le salut; il n'est pas tout à fait bon tant qu'il n'y a pas
toutes les habitudes
des vertus.
Tu dois avoir un amour infus, qui t'inspire. La foi et la
charité sont communiquées à l'âme, et cela ne suffit pas. Bien que tu sois sain,
etc., sans la main de Dieu il n'y a pas de véritable salut. Que Dieu vous
communique ces vertus que les théologiens appellent habitudes. Il y en a de
certains, etc. Il en est de même lorsqu'on habille une belle mariée, bien
qu'elle soit belle, on lui met de nombreux bracelets et bijoux. Et ainsi saint
Jérôme dit que ces richesses de la Loi antique figuraient les grandeurs qui
allaient être données dans la Loi de grâce. Et ainsi Dieu donne des dons, des
dons grâce auxquels vous agissez mieux, etc. L'Esprit-Saint ne se contente pas
de ce que tu sois beau de l'extérieur, mais il veut que tu sois beau
intérieurement; non seulement dans ton œuvre, mais dans ce qui te fait agir. Et
si tu voyais la beauté que le Saint-Esprit met dans l'âme où il demeure, tu la
poursuivrais de toutes tes forces; toutes les richesses d'ici-bas te seraient
indifférentes. Celui qui a créé le soleil, étant dans l'âme, comment sera-t-elle
? Ainsi doit être l'épouse du Saint-Esprit; ainsi dit l'Époux dans les Cantiques
: Oui, tu es belle, mon amie; oui tu es belle!...
Soyez attentifs. Oh ! si je pouvais être assez puissant pour
mettre dans vos entrailles un amour qui vous fit aimer éperdument le
Saint-Esprit ! Puisque vous dites, quand ces dons sont dans l'âme, que là est le
Saint-Esprit, comment saint Jean peut-il dire que l'Esprit- Saint
n'était pas encore donné, parce que Jésus-Christ n'était pas glorifié?
— Voici : avez-vous vu quand un maître forme un élève
qui en sait autant que lui? Il lui dit: "Va et agis selon ta science; te
voilà un bon médecin; observe et guéris". Il quitte son maître et il agit par
lui-même. C'est là ce que j'ai dit jusqu'à maintenant. Le Saint-Esprit met en
toi foi et charité, etc., et mille vertus, et il te laisse agir, comme lorsqu'un
médecin guérit, et que le malade une fois guéri il lui dit : " Allez, mangez de
tout, parce que maintenant vous êtes guéri; gouvernez-vous comme quelqu'un de
bien portant ". " Puisque vous êtes savant, vivez comme un savant" II en est de
même lorsque le Seigneur vient dans l'âme et te donne des dispositions pour bien
agir, éclaire ton entendement, guérit ta volonté, l'enflamme de l'amour de Dieu
et te donne la force de l'aimer.
— Eh bien, pourquoi faut-il plus ? — C'est là justement la
question. Saint Thomas a dit ceci mieux que tous, et il l'a tiré de saint
Augustin, ou pour mieux dire, de Jésus-Christ. Il dit que toutes les vertus et
les grâces qui te sont données ne suffisent pas pour te sauver et te faire agir,
il faut encore que la main du Seigneur soit sur toi; non que tu ne puisses, toi,
aimer Dieu et croire avec ces dons, mais pour que tu en uses bien, il faut que
la main de Dieu soit toujours sur toi car sans elle tu ne peux bien en user.
Celui qui est de Dieu ne pèche point...
Si on te demandait : Pourquoi quelqu'un qui est en état de grâce pèche-t-il,
puisqu'il a cette force et ce secours ? — Parce que nous avons le libre-arbitre,
pour autant de dons que nous ayons reçus, tu peux cesser d'agir selon ces vertus
et pécher parce que tu n'agis pas conformément à elles; et pour cette raison,
pour te servir toujours d'elles, la main du Saint-Esprit vient sur l'âme, non
sur le don, cela n'est pas nécessaire, mais sur le libre-arbitre pour que tu ne
t'éloignes pas de la grâce, etc., bien que tu puisses t'en éloigner, mais pour
que tu sois toujours ferme. Eh bien! tel est le rôle du Saint-Esprit, que, bien
que vous puissiez pécher parce que vous êtes libres, vous ne péchiez pas; pour
cela il faut le Saint-Esprit, et sans Lui personne, quels que soient ses dons,
ne peut se sauver. C'est ce que dit David : Apprends-moi à faire ton bon
plaisir
.
Aussi bien pourvu que soit un navire de voiles et de tous instruments, s'il n'a
pas de pilote qui le gouverne, il se perdra; ainsi si tu n'as pas ce
Saint-Esprit, même si tu as beaucoup de dons, tu te perdras, etc. Soyez béni
Seigneur, qui ne vous êtes pas contenté de nous donner votre Fils pour qu'il
mourût, etc., mais votre Saint-Esprit pour qu'il fût notre guide!
— Où est la différence ? — Les saints de l'Ancien Testament,
n'avaient-ils pas le Saint-Esprit ? — Si. La différence la voici : En ces
temps-là il se donnait peu et ainsi agissait peu; maintenant, depuis que le
Saint-Esprit est venu, il est à chaque pas et presque dans toutes les œuvres des
saints apôtres.
Voici la fête d'aujourd'hui. Considérez, c'est une chose
d'agir comme un homme bon, même favorisé de Dieu; c'en est une autre que le
Saint-Esprit soit l'auteur et le promoteur, et que l'homme ne soit presque rien
de plus qu'un instrument. C'est beaucoup que vous fassiez une bonne œuvre et
que, avec la vertu et les habitudes, vous vous efforciez et pensiez à ce que
vous avez choisi, etc.; c'en est une autre que vous fassiez une grande œuvre,
que vous n'avez ni pensée ni choisie, pour laquelle vous n'aviez ni force ni
vertu, pour laquelle ni la foi ordinaire ni la charité ne suffisaient, mais
comme l'enfant, dont vous estimez que ce qu'il dit n'est pas de lui. C'est comme
si un grand peintre tenait la main de quelqu'un qui ne sait pas peindre et
faisait avec celle-ci un très beau tableau; celui qui le fait nous disons que
c'est le peintre, mais l'instrument c'est la main de l'autre. Il en est de même
ici-bas. Dans les œuvres excellentes que l'homme fait avec l'aide des vertus et
de Dieu, l'homme agit aidé de Dieu, Dieu agit en le guidant, l'homme est
l'instrument du Saint-Esprit; mais si vous lui dites : " Qui t'a dit cela ?
Quand l'as-tu pensé ? Pourquoi l'as-tu fait ?", il n'en saura pas la cause, mais
saura qu'il l'a trouvé fait. C'est comme le vent dont vous ne savez d'où il est
venu ni où il va; et le Saint-Esprit vous meut. L'œuvre est tellement au-dessus
de votre propre force que vous vous étonnez de la voir faite.
Je vais l'expliquer. Combien de fois vous acharnez-vous pour
avoir de la dévotion, et vous l'avez très faible; parce que celle-ci est
conforme à la sainteté qui est en vous, et ne vous est-il pas arrivé d'autres
fois, sans y penser, etc., d'avoir un feu si grand, qui vous embrase les
entrailles, que vous dites : " Je n'ai jamais pensé de la sorte " ? Ceci ne
vient pas de vous ni de la grâce ni des vertus. Qu'est-ce donc ? C'est l'œuvre
du Saint-Esprit. Comme Dieu, il vous a poussé à faire une chose pour laquelle
votre force ne suffisait pas. Quand tu verras en toi quelque chose de pareil,
dis : " Je ne l'ai pas imaginé moi-même "; c'est le Saint-Esprit qui demeure en
vous. Quand tu as une grande contrition, il fait appeler Père! Père! Il
fait en sorte que tu ne te négliges pas, mais que tu sois toujours au côté de
Dieu. Ce Seigneur est celui qui se donne à nous pour cela et pour d'autres
choses, etc.
* * * * *
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