Hildegarde étant la dixième enfant d'une grande famille, ses
parents très croyants
la
consacrèrent au Seigneur dès son plus jeune âge, en application de la règle de
l'Ancien Testament : tu donneras à l'Éternel un
dixième de tout ce qui
t'appartiens. C'est donc dès l'âge de 8 ans que la petite Hildegarde entra au
couvent des Bénédictines de Disi Bodenberg, d'abord pour son instruction
puis pour y prendre le voile dès l'âge de quatorze ans sous la tutelle de la
Mère supérieure Jutta De Sponheim.
Elle y prononça ses vœux définitifs et à la mort Jutta De
Sponheim elle devint la Mère supérieure du couvent à l'âge de 38 ans. C'est à
l'âge de 43 ans que commencèrent « ses visions » qu'elle décrivit dans un
grand livre qui comporte l'intégralité de son oeuvre qui reste soigneusement
conservé dans la bibliothèque régionale de Hesse à Wiesbaden. Cette oeuvre
exceptionnelle écrite sur des parchemins de 50 cm de hauteur est scellé par des
ferrures d'acier et pèse plus de 50 kg.
Hildegarde recevait des visions prophétiques ainsi que
des visions concernant les grands personnages de son temps. Elle diffusa ces
messages de l'au-delà non seulement dans son entourage mais les expédia à
Bernard de Clairvaux pour lui demander son avis. Bernard lui répondit que
ses visions étaient une grâce du ciel, donc une manifestation de l'Esprit Saint
et qu'il fallait continuer à les publier.
Hildegarde soutenait en particulier que l'esprit de la
femme est en tous points comparable et égal à celui de l'homme. Ces
déclarations lui avaient attiré les bonnes grâces du peuple, mais n'avaient pas
manqué de choquer des hauts membres du clergé de Mayence et même la noblesse
masculine allemande de l'époque.
Le 13 janvier 1148 lors du grand synode allemand de
Trèves, (Trier) présidé par le pape Eugène III en personne, on demanda au
Saint Père ce qu'il pensait des visions de la mère supérieure Hildegarde... Or
devant toute l'assemblée réunie le pape prit entre ses mains un extrait des
écrits d'Hildegarde, le lut à haute voix et souhaita une continuité des œuvres
littéraires de l'abbesse. Quelques mois plus tard Hildegarde reçut une lettre du
pape qui lui écrivait notamment :
« Dieu nous accorde des grâces qui sont notre joie et notre
bonheur, mais à quoi serviraient-elles si ne nous savons pas nous en servir ?
Écrivez donc ce que l'Esprit de Dieu vous inspire ».
Sa réputation dépassa désormais les frontières de l'Europe.
Hildegarde rêvait de fonder sa propre abbaye, mais la
popularité du couvent féminin était plus haute que celle du couvent voisin
masculin, car les sœurs obtenaient plus de dons que le couvent auquel elles
étaient dépendantes. Un jour, elle se hasarda à demander à son Père supérieur
l'autorisation de quitter le couvent de son enfance avec une trentaine de ses
sœurs pour fonder un nouveau monastère féminin dans la même région. Le Père
abbé ayant refusé, elle tomba gravement malade, alors ce Père supérieur révisa
sa décision, Hildegarde guérit et put fonder sa nouvelle abbaye.: à
Ruperstberg (1147) et même une deuxième à Elbingen (1165).
Des années passèrent et Hildegarde composa plus de 77
symphonies répertoriées qu'interprètent encore de nombreuses bénédictines
aujourd'hui. En femme accomplie Hildegarde était également Maître dans la
médecine psychosomatique et l'art de guérir par les plantes, elle soignait à la
fois les corps et les âmes en initiant ses nonnes à la gravure, à l'écriture, à
la reliure, aux chants et à la science domaine généralement réservé aux hommes!.
Trois siècles avant Léonard de Vinci, Hildegarde avait déjà
dessiné une de ses visions : l'homme aux six mains au cœur du Cosmos. Elle
affirmait que toutes les créatures de Dieu sont parties intégrantes du Cosmos et
que tout péché fait du mal non seulement à Dieu mais également à tout le Cosmos.
Hildegarde approchait les 79 ans, lorsqu'en 1177 un
conflit l'opposa à l'archevêché de Mayence au sujet d'un noble excommunié mais
qui avant de mourir aurait fait pénitence et se serait confessé en demandant le
pardon de ses péchés. Les sœurs enterrèrent le repenti dans un coin secret de
leur propriété, mais conformément aux règles frappant tous les excommuniés, le
haut clergé s'éleva en exigeant son déterrement . Hildegarde refusa et le
couvent tout entier fut frappé d'excommunication et d'Interdit religieux.
Donc : plus de sacrements, ni de pèlerins, avec interdiction même d'interpréter
des chants liturgiques...
Heureusement au bout d'un an de privations, Hildegarde obtint
de l'archevêque de Mayence Christian I von Buch (1165 à 1183) la levée
de l'Interdit.
La vieille Abbesse Hildegarde pouvait désormais s'endormir
dans la paix du Seigneur, même si de nombreux dictionnaires la déclare avec le
préfixe sainte, compte tenu des très nombreux miracles qu'elle a
prodigué depuis des siècles, elle ne sera jamais canonisée par Rome mais restera
comme une véritable sainte dans l'esprit du peuple reconnaissant.
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