
Curieusement il y a
relativement peu des choses sur la vie de Jésus, et l’Eucharistie, dans
les Actes des Apôtres. On note une apparition de Jésus ressuscité, au
cours d’un repas, probablement le dernier pris en présence du
Ressuscité: “Au cours d’un repas, Jésus leur ordonna de ne pas
quitter Jérusalem mais d’y attendre l’accomplissement de la promesse du
Père...” (Actes 1, 4)
Puis, dès après
l’Ascension, la vie des premiers disciples de Jésus s’organise, tout en
continuant à respecter la Loi juive: “Après l’Ascension, ils
retournèrent à Jérusalem, au Mont dit des Oliviers, qui est près de
Jérusalem, à la distance qu’il est permis de parcourir le jour du
Sabbat.”(Actes 1, 12)
On trouve aussi quelques
références à des repas qui semblent être des repas eucharistiques, sans
toutefois le préciser: “Chaque jour, ils étaient, d’un même cœur,
assidus au Temple; ils rompaient le pain dans leurs maisons et prenaient
leur nourriture dans la joie et la simplicité de cœur, louant Dieu et
ayant la faveur de tout le peuple. Et le Seigneur augmentait chaque jour
le nombre de ceux qui étaient sauvés.” (Actes 2, 46 et 47)
Plus tard, le Repas du
Seigneur prendra des aspects plus formels sous le nom de Fraction du
pain. On peut lire, au chapître 20 des Actes des Apôtres, au cours du
récit de la guérison (ou résurrection?) d’un jeune homme tombé d’une
fenêtre d’un premier étage de la maison: “Le premier jour de la
semaine, comme nous étions réunis pour rompre le pain, Paul qui devait
partir le lendemain, s’entrenait avec eux et prolongea l’entretien
jusqu’au milieu de la nuit...” Un jeune homme, assis sur le rebord
de la fenêtre s’endormit, et tomba. “Paul descendit, prit le jeune
homme dans ses bras et dit: ‘Cessez ce tapage! Il est bien vivant.’ Puis
il remonta, rompit le pain et mangea.” (Actes 20, 7 et 10-11)
Lorsque Saint Paul écrit
ses lettres, il semble que la Fraction du Pain se soit généralisée. Paul
ne rappelle l’institution de l’Eucharistie que pour inciter les
Corinthiens à respecter le Corps du Seigneur Jésus, ressuscité, présent
dans le pain et le vin, et à inciter ces mêmes Corinthiens à plus de
retenue et de charité lorsqu’ils célèbrent la Fraction du pain. Que les
riches respectent les pauvres qui ont moins ou qui manquent même du
nécessaire. Que les repas habituels se fassent dans les maisons
particulières, et pas dans la Maison de Dieu.
On remarquera aussi
l’insistance de l’Apôtre sur le sujet de la Résurrection. Si le Christ
n’est pas ressuscité, vaine est notre foi. Si le Christ n’est pas
ressuscité, la Fraction du Pain est inutile: le pain fractionné et
offert reste du pain. Si le Christ n’est pas ressuscité, nous sommes les
plus malheureux de tous les hommes... et c’est pour rien que nous sommes
persécutés, que nous donnons notre vie pour le Christ...
La Résurrection est la
base, le fondement de toute notre foi; aussi Saint Paul insiste-t-il
beaucoup sur la
Résurrection de Jésus. On peut lire dans l’Épitre aux
Romains: “Nous savons que le Christ ressuscité des morts ne meurt
plus, et que la mort n’a plus de pouvoir sur lui. Sa mort a été une mort
au péché une fois pour toutes, et sa vie est une vie pour Dieu...”
(Romains 6, 9-10)[1]
“Vous, de même, mes
frères, vous avez été mis à mort à l’égard de la Loi par le Corps du
Christ, pour appartenir à un autre, à Celui qui est ressuscité d’entre
les morts, afin de porter des fruits pour Dieu.” (Romains 7, 4)
“Si l’Esprit de Celui
qui a ressuscité Jésus d’entre les morts habite en vous, Celui qui a
ressuscité le Christ Jésus d’entre les morts rendra la vie aussi à vos
corps mortels par l’action de son Esprit qui habite en vous.”
(Romains 8, 11)
“Si tu professes de
bouche que Jésus est Seigneur et si tu crois dans ton cœur que Dieu l’a
ressuscité des morts, tu seras sauvé.” (Romains 10, 9)
“Car le Christ est mort
et a repris vie pour être le Seigneur des morts et des vivants.”
(Romains 14, 9)
Oui, le Christ est vraiment
ressuscité: c’est la foi de Paul. La Résurrection du christ est le gage
de notre propre résurrection. Certes, notre corps mourra, mais il
ressuscitera; c’est pourquoi nous devons respecter notre corps et
l’alimenter correctement. Écoutons les conseils de Saint Paul aux
Corinthiens: “Les aliments sont pour le ventre, et le ventre pour les
aliments, et Dieu détruira l’un comme les autres. Mais le corps n’est
pas fait pour la fornication; il est pour le Seigneur, et le Seigneur
est pour le corps. Et Dieu qui a ressuscité le Seigneur nous
ressuscitera nous aussi, par sa puissance.” (I Cor 6, 13 et 14)[2]
Saint Paul n’invente pas
une doctrine nouvelle; il transmet ce qu’il a lui-même reçu: “ Je
vous ai, en effet, transmis en premier lieu ce que j’ai moi-même reçu:
le Christ est mort pour nos péchés conformément aux Écritures; il a été
enseveli et il est ressuscité le troisième jour conformément aux
Écritures... Ensuite il est apparu à Jacques puis à tous les apôtres. En
tout dernier lieu, il m’est apparu à moi aussi, comme à l’avorton.”
(I Cor 15, 3-8)
“Si le Christ n’est pas
ressuscité, notre prédication est sans objet, sans objet aussi votre
foi. Bien plus, nous sommes de faux témoins de Dieu, car nous avons
attesté contre Dieu qu’il a ressuscité le Christ... Car enfin, si les
morts ne ressuscitent pas, le Christ non plus n’est pas ressuscité. Et
si le Christ n’est pas ressuscité, votre foi est vaine, vous êtes encore
dans vos péchés. Alors aussi ceux qui sont morts dans le Christ ont
péri. Si c’est pour cette vie seulement que nous avons mis notre espoir
dans le Christ, nous sommes les plus malheureux de tous les hommes. En
fait, le Christ est bien ressuscité des morts, prémices de ceux qui sont
morts.” (I Cor 15, 14-20)
De toutes ces affirmations,
Saint Paul a des preuves: ”Et nous, nous avons vu et nous attestons
que le Père a envoyé son Fils comme Sauveur du monde. Quiconque confesse
que Jésus est le Fils de Dieu, Dieu demeure en lui, et Lui en Dieu. Et
nous, nous avons reconnu l’amour de Dieu pour nous, et nous y avons cru.
Dieu est amour, et celui qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et
Dieu demeure en lui. (1 Jean 4, 14-16)
Dans l’Apocalypse, c’est
Jésus Lui-même qui se présente comme le Vivant, éternellement vivant:
“À cette vue je tombai comme mort à ses pieds. Mais il posa sur moi sa
droite en disant: ‘Ne crains rien; je suis le Premier et le Dernier, et
le Vivant; j’étais mort et me voici vivant pour les siècles des siècles,
et je détiens les clefs de la mort et de l’abîme.’” (Apocalypse 1,
17-18)
Jean conclut: “Ainsi
parle le Premier et le Dernier, Celui qui était mort et qui a repris
vie”.(Apocalypse 2, 8)
“Sois fidèle jusqu’à la
mort et je te donnerai la couronne de vie.” ajoute le
Vivant.(Apocalypse 2, 10) Les persécutions ne manquèrent pas, en effet,
pour les chrétiens, dès la primitive Église. Lorsqu’il vivait encore au
milieu de ses disciples, Jésus les avait prévenus: “On vous
livrera à la souffrance, on vous fera mourir, vous serez haïs de tous
les peuples, à cause de mon nom.” (Mat 24, 9-13)
Très vite les disciples ont
expérimenté ces paroles de Jésus, et Paul n’hésite pas à écrire aux
Romains: “Qui condamnera? Le Christ Jésus qui est mort! Que dis-je,
qui est ressuscité, qui est à la droite de Dieu, qui intercède pour
nous? Qui nous séparera de l’amour du Christ? la tribulation?
l’angoisse? la persécution? la faim? la nudité? le péril, le glaive?
Comme il est écrit: À cause de toi nous sommes mis à mort tout le long
du jour; on nous regarde comme des brebis destinées à l’abattoir. Mais
en tout cela nous sommes plus que vainqueurs, grâce à celui qui nous a
aimés.” (Romains 8, 34-37)
“Je vous exhorte donc,
frères, par la miséricorde de Dieu, à offrir vos personnes en victimes
vivantes, saintes, agréables à Dieu; tel est le culte que la raison vous
demande.” (Romains 12, 1)
Pour Saint Paul, il ne faut
pas séparer les persécutions de la Résurrection du Seigneur qui est la
garantie de notre propre résurrection: “Si c’est dans des vues
humaines que j’ai combattu contre les bêtes à Éphèse, quel avantage m’en
revient-il? Si les morts ne ressuscitent pas, mangeons, buvons, car
demain nous mourrons.” (I Cor 15, 32)
“Nous portons
constamment dans notre corps les souffrances de la mort de Jésus, afin
que la vie de Jésus soit, elle aussi, manifestée dans notre corps.”
(2 Cor 4, 10)[3] Mais
tout de suite Saint Paul ajoute: ”Nous savons que Celui qui a
ressuscité le Seigneur Jésus nous ressuscitera nous aussi avec Jésus et
nous placera avec vous près de lui.” (2 Cor 4, 14)
Saint Paul va encore plus
loin et déclare que nous devons nous réjouir d’être associés aux
souffrances du Christ, car, grâce à elles, nous serons également
associés à sa Résurrection: “Je me réjouis maintenant des souffrances
que j’endure pour vous, et ce qui manque aux épreuves du Christ, je le
complète dans ma chair, pour son corps qui est l’Église.” (Col 1,
24)[4]
Nous devons même en rendre
grâce: “Rendez grâce en toutes circonstances, car telle est à votre
égard la volonté de Dieu dans le Christ Jésus. (1 Thes 5, 38)[5]
De son côté, Jean nous
assure: “Ne vous étonnez pas mes frères si le monde vous hait. Nous,
nous savons que nous sommes passés de la mort à la vie, parce que nous
aimons nos frères; celui qui n’aime pas demeure dans la mort.” (1
Jean 3, 13-14) ”Et voici à quoi nous avons connu l’amour: Jésus a
livré sa vie pour nous, et nous devons, nous aussi, livrer notre vie
pour nos frères.” (1 Jean 3, 16)
I-4-1-Le
sacerdoce du Christ
Le Christ est le Prêtre
suprême, le grand Prêtre selon l’ordre de Melchisédech. Curieusement,
c’est avec du pain et du vin offerts à Dieu que Melchisédech se
manifesta à Abraham. C’est d’abord sa personne humaine tout entière que
Jésus offre en sacrifice au Père, en rémission de nos péchés, avant de
se donner à ses disciples sous les apparences du pain et du vin.
Melchisédech est mort,
comme tous les hommes, mais le Christ ressuscité demeure vivant et
prêtre pour l’éternité. “Mais, Lui, le Christ, qui demeure pour
l’éternité, possède un sacerdoce qui ne passe pas. D’où il résulte qu’il
peut sauver d’une façon définitive ceux qui vont à Dieu par lui, car il
est toujours vivant... C’est bien là le Grand-Prêtre qu’il nous
fallait... élevé au-dessus des cieux. Il n’a pas besoin, comme les
autres grands-prêtres, d’offrir chaque jour des sacrifices, d’abord pour
ses propres péchés, et ensuite pour ceux du peuple; car cela, il l’a
fait une fois pour toutes en s’offrant lui-même.” (Heb 7, 24-27)[6]
“Jésus, renonçant au
bonheur qui lui était offert, a enduré la croix sans en regarder
l’ignominie, et s’est assis à la droite du trône de Dieu.” (Heb 12,
2) Oui, “Nous avons un Grand-Prêtre qui est allé s’asseoir dans les
cieux à la droite du trône de la Majesté, en qualité de ministre du
sanctuaire et du tabernacle véritable, dressé par le Seigneur et non par
un homme.” (Heb 8, 1 et 2)
I-4-2-Le
sacerdoce des prêtres
Avant d’aller librement
vers sa Passion, Jésus crée l’Eucharistie, et c’est sous les apparences
du pain et du vin, devenus sa chair et son sang, qu’Il restera avec nous
jusqu’à la fin du monde. Cependant Jésus ne sera réellement présent que
dans le pain et le vin spécialement consacrés, au cours d’une cérémonie
eucharistique, par les prêtres, successeurs des apôtres et spécialement
ordonnés pour accomplir cette mission, ce sacerdoce.
La mission sacerdotale des
prêtres du Christ est très grande, aussi ont-ils droit à la fois à tout
notre respect et à notre assistance. Saint Paul le demande expressément:
”Nous vous demandons, frères, d’avoir des égards pour ceux qui
travaillent parmi vous, qui vous dirigent dans le Seigneur et qui vous
reprennent. Témoignez-leur une charité toute spéciale en raison de leur
labeur...” (1 Thes 5, 32)
I-4-3-Le
sacerdoce de tous les chrétiens
Les prêtres du Christ ont
une mission sacerdotale spéciale: rendre le Christ réellement présent
sous les apparences du pain et du vin. Tous les membres du peuple de
Dieu, pierres vivantes destinées à entrer dans la construction de
l’Église, Corps mystique du Christ, participent également du sacerdoce
du Christ. Dans sa première lettre aux communautés chrétiennes, Saint
Pierre révèle que nous sommes tous les pierres vivantes du Corps
mystique du Christ, sacerdoce royal:
“Comme des enfants
nouveaux-nés, soyez avides du pur lait spirituel, afin qu’il vous fasse
grandir pour le salut, si toutefois vous avez goûté combien le Seigneur
est bon. Allez à lui, il est la pierre vivante, rejetée par les hommes,
mais choisie et précieuse aux yeux de Dieu. Vous aussi... devenez les
matériaux de l’édifice spirituel, pour former un sacerdoce saint et
offrir des sacrifices spirituels agréables à Dieu par Jésus-Christ...
Vous, vous êtes la race élue, le sacerdoce royal.” (1 Pierre 2, 2-5)
[1] La
Lettre aux Romains a probablement été écrite vers 56 ou 57
[2] La
première épître aux Corinthiens a été écrite vers 55 ou 56
[3] La
2ème lettre aux Corinthiens a été écrite vers la fin de 56 ou en
57
[4] La
Lettre aux Colossiens a été écrite vers 61 ou 62
[5] La
1ère lettre aux Thessaloniciens a été écrite vers 50 ou début de
51
[6] La
Lettre aux Hébreux a été écrite vers 68


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