Antoine-Marie Chevrier naît le 16
avril 1826
au cœur de la ville de Lyon, près de la place Bellecour. Ordonné prêtre en 1850,
le P. Chevrier a vécu tout son ministère
sacerdotal au service des pauvres dans la banlieue de Lyon.
C’est là qu’il
découvre la grande misère du monde ouvrier. En mai 1856, de terribles
inondations ravagent le quartier ouvrier de La Guillotière où il œuvre comme
vicaire à la paroisse Saint-André. On reloge les gens sinistrés dans une sorte
de quartier d’urgence et le vicaire va à leur rencontre. La même année, l’abbé
Chevrier médite devant la crèche et il a l’intuition qu’il doit se convertir à
une existence évangélique et vivre le mystère de la pauvreté à la suite de Jésus
afin de “travailler plus efficacement au salut des âmes”. Il se consacre à
catéchiser les enfants qui sont trop pauvres pour aller au catéchisme avec les
autres. Au moment où naît la grande industrie, particulièrement active à Lyon (soieries),
l’abbé Chevrier est choqué devant le tableau des injustices sociales. Dans l’un
de ses sermons, il dit : “A mesure que les grands de la terre s'enrichissent, à
mesure que les richesses s'enferment dans quelques mains avides qui les
recherchent, on dirait que la pauvreté croît, que le travail diminue et que les
salaires ne sont pas payés. On voit de pauvres ouvriers travailler depuis l'aube
du jour jusqu'à la profonde nuit et gagner à peine leur pain et celui de leurs
enfants.” Quant aux jeunes qu’il cherche à atteindre, ils sont exploités comme
“des machines de travail faites pour enrichir leur maître”. Il sent qu’il faut
“des prêtres pauvres pour rejoindre les pauvres” et il s’offre au Seigneur pour
cette mission : « Seigneur, dit-il, si vous avez besoin d’un pauvre…d’un fou, me
voici…pour faire votre volonté. Je suis à vous. Tuus sum ego. » Il est vrai
qu’il a peut-être tout pour rester un homme ordinaire… mais c’est un saint. Il
se rend à Ars où saint Jean-Marie Vianney l’encourage.
Encouragé également par
son évêque, il acquiert en 1860 ‘Le Prado’, une ancienne salle de bal, mal famée
et délabrée. La salle principale mesure soixante mètres de long sur vingt de
large et pouvait accueillir près de mille danseurs se contentant d’un sol en
terre battue. Deux pièces attenantes servaient de buvette. Le local est
immédiatement transformé en petit pensionnat. Dans des conditions extrêmement
précaires, il recueille des enfants et des adolescents, garçons d’un côté,
filles de l’autre. Les conditions pour être admis ? « Ne rien avoir, ne rien
savoir, ne rien valoir ». Et les demandes commencent à affluer. Il veut les
garder six mois en les prenant totalement à charge, le temps de leur enseigner
les rudiments de la lecture, de l’écriture et de les préparer à la première
communion. Pas question de les faire travailler un peu, comme dans d’autres
associations charitables afin de réduire les frais d’entretien. Le Père Chevrier
se confie totalement à la Providence. Il cherche à s'associer des prêtres qui
acceptent de vivre pauvrement au milieu des pauvres, pour leur faire connaître
l'évangile dans des mots accessibles, des attitudes vraies. Les difficultés sont
nombreuses : certains prêtres n'obtiennent pas l'autorisation de venir, d'autres
ne s'adaptent pas. Il demande l'autorisation de former lui-même des jeunes en
vue du sacerdoce. Présenté au pape, le bienheureux Pie IX, en 1864, le projet
prend forme lentement. Parmi les jeunes dont il s’occupe, il en choisit qui
paraissent aptes et, en 1866, il forme une ‘école cléricale’ destinée aux
enfants du peuple qui veulent devenir prêtres. C’est ainsi que naît la ‘Société
du Prado’ composée de prêtres voués à l’apostolat paroissial et missionnaire en
milieu ouvrier. Il associe à ce travail de jeunes ouvrières. Il leur propose une
formation selon l'évangile, une vie consacrée au Christ et aux pauvres. L'une
d'entre elles, Marie Boisson devient la première Sœur du Prado. Les premiers
prêtres du Prado sont ordonnés à Rome en 1877.
Méditant sans cesse l’Évangile, le
Père Chevrier écrit des milliers de pages pour aider ses amis et élèves. Il leur
propose de devenir de “véritables disciples” du Christ : le Christ sans cesse
contemplé et imité grâce à une fréquentation permanente et intime de l’Évangile
— en contemplant spécialement le Christ “pauvre dans la crèche, souffrant dans
sa Passion, et se laissant manger dans la sainte Eucharistie”. Dans une lettre à
ses séminaristes, il écrit : « La connaissance de Jésus-Christ est la clé de
tout. Connaître Dieu et son Christ, c’est là tout l’homme, tout le prêtre, tout
le saint. » « O Verbe ! ô Christ ! que vous êtes beau ! » s’écrie-t-il en
conclusion. Ailleurs, il dit : « Savoir parler de Dieu, que c’est beau ! » Son
ouvrage le plus connu, d’ailleurs inachevé, s’intitule : « Le Prêtre selon
l’Évangile, ou le véritable disciple de Notre-Seigneur ». Fervent admirateur du
Pauvre d’Assise, le Père Chevrier appartient au tiers ordre franciscain. Notons
que ce grand spirituel fut le directeur d’Émilie Tamisier, laquelle fut à
l’origine des congrès eucharistiques. (Elle fut encouragée aussi par le célèbre
cardinal Mermillod, lequel donna ce nom de ‘congrès eucharistiques’ souhaitant
qu’ils prennent un caractère international).
Prématurément usé par sa vie de
travail et de pénitence, le Père Chevrier meurt à l’âge de cinquante-trois ans,
le 2 octobre 1879.
Antoine Chevrier fut béatifié à Lyon
par le Pape saint Jean-Paul
II, lors
de son troisième voyage en France, en présence d'une foule de 350 000 personnes,
le 4 octobre 1986.
http://www.abbaye-saint-benoit.ch/hagiographie/hagiographie/listes/listeprenom.htm
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