Ammon,
appelé Amoun par les Egyptiens, naquit en Egypte d'une
famille noble et riche. Lorsqu'il eut atteint l'âge de vingt-deux
ans, c'est-à-dire en 308, ses tuteurs et curateurs l'obligèrent de
se marier. Mais le jour même de son mariage il lut à sa femme
l'éloge que fait S. Paul de la virginité, et lui persuada facilement
de s'engager avec lui à vivre dans une continence perpétuelle. Ils
passèrent dix-huit ans dans la même maison, se conduisant comme
frère et sœur, et uniquement occupés de l'exercice de la prière et
de la pratique des bonnes œuvres.
Ammon s'exerçait
à toutes les austérités propres au genre de vie qu'il se proposait
d'embrasser. Il partageait le jour entre la prière et le travail des
mains. Son travail consistait à cultiver un vaste jardin, où il
avait planté des arbrisseaux nommés sbalsamum, parce qu'ils
distillent le baume. Toute sa nourriture n'était composée que
d'herbes et de fruits. Il se retirait ensuite, et donnait à la
prière une grande partie de la nuit.
Après la mort de
ceux de ses parents et de ses amis qui jusque-là s'étaient opposés à
sa retraite, il alla fixer sa demeure sur la montagne de Nitrie. Sa
femme, qui consentait à cette séparation, rassembla dans sa maison
un grand nombre de vierges ferventes, qui, sous sa conduite,
retraçaient les austérités et les vertus des plus célèbres
anachorètes.
S. Ammon fut le
premier solitaire qui habita la montagne de Nitrie. Il y passa
vingt-deux ans, et il la rendit fort célèbre par sa sainteté, ainsi
que par les nombreux ermitages qu'il y tonna, et qu'il remplit de
disciples dignes de lui. Ils vécurent tous d'abord dans des cellules
séparées ; mais S. Antoine ayant fait une visite à Ammon, lui
conseilla de fonder un monastère, et d'y rassembler une grande
partie de ses disciples, sous la conduite d'un supérieur
expérimenté. Il désigna lui-même le lieu où devait être bâti le
monastère, en y plantant une croix. Cassien le met à cinq milles de
la ville de Nitrie. Il y avait sur la montagne de ce nom, à la fin
du quatrième siècle, cinquante monastères habités par cinq mille
moines. S. Ammon peupla aussi de ses disciples le désert des
Cellules, qui était à dix ou douze milles de la montagne de Nitrie,
mais toujours dans un seul et même désert.
Notre saint
pratiquait des austérités extraordinaires, et n'interrompait jamais
l'exercice de la prière. Au commencement de sa retraite dans le
désert, il ne mangeait qu'une-fois le jour, sur le soir. Ses jeûnes
furent plus rigoureux par la suite; et il lui arrivait quelquefois
d'être jusqu'à quatre jours sans : prendre aucune nourriture. Entre
autres miracles qu'il opéra, S. Athanase rapporte le suivant dans la
vie de S. Antoine.
Un jour qu'il
était sur le point de passer la rivière appelée Lycus, les
bords se trouvèrent inondés. Connue il était avec Théodore, un de
ses disciples, il lui dit de s'écarter, afin qu’il ne le vît pas nu
pendant qu'il nagerait. Quoiqu'il fût seul, il resta quelque temps
pensif, ne pouvant se déterminer à quitter ses vêtements, parce
qu'il ne lui était jamais arrivé de se voir nu. Sa modestie et son
amour pour la pureté furent récompensés ; il se trouva tout- à-coup
transporté de l'autre côté de la rivière. Théodore, étonné, lui
demanda ce qui s'était passé. 1I lui avoua le miracle, mais après
lui avoir fait promettre qu'il n'en dirait rien tant qu'il vivrait.
S. Ammon et S.
Antoine se faisaient de fréquentes visites, afin de s'édifier
mutuellement. Le premier mourut à l'âge de soixante-deux ans. S.
Antoine, quoique éloigné de treize jours de marche, connut sa
bienheureuse mort, Dieu lui ayant fait voir son âme monter au ciel.
S. Ammon est nommé sous le 4 d'octobre dans la plupart des Ménologes
des Grecs.
SOURCE :
Alban Butler : Vie des Pères, Martyrs et autres principaux
Saints… – Traduction : Jean-François Godescard. |