Saint Wynnebald
était fils de Richard, prince anglo-saxon, et frère de saint
Guillebaud et de sainte Walburge. Le père, voulant faire un
pèlerinage à Rome, prit avec lui ses deux fils; mais il mourut à
Lucques vers l'an 722, et fut enterré dans l'église de Saint-Frigidien.
Wynnebald et Guillebaud continuèrent leur route. Le second, après
avoir passé quelque temps à Rome, entreprit le voyage de la
Terre-Sainte. Le premier, qui était d'une faible constitution, resta
dans cette ville, où il étudia pendant sept ans. Il reçut ensuite la
tonsure cléricale, et se consacra tout entier au service de Dieu.
Ayant repassé en Angleterre, il engagea plusieurs de ses parents et
de ses amis à l'accompagner dans un second pèlerinage qu'il fit à
Rome. Lorsqu'ils furent arrivés dans cette ville, ils y embrassèrent
l'état religieux.
Saint Boniface,
parent de saint Wynnebald, .vint à Rome en 728. Il engagea notre
Saint à le suivre en Allemagne, pour partager ses travaux
apostoliques. Ils allèrent ensemble dans la Thuringe. Wynnebald fut
ordonné prêtre, et chargé du gouvernement de sept églises dans ce
pays ; il y prêcha l'Évangile avec succès, et donna du poids à ses
leçons par la sainteté de sa conduite.
Saint Guillebaud
ayant été fait évêque d'Echstadt, attira son frère dans son diocèse.
Wynnebald se retira dans les bois de Heidenheim, et devint pour
cette contrée un flambeau bienfaisant. Il s'y choisit une retraite,
abattit les arbres, défricha la terre, et y construisit quelques
cellules pour ceux de sa suite. Peu de temps après s'éleva sous les
efforts de son zèle un monastère où se réunirent plusieurs
religieux, auxquels il s'en associa bientôt d'autres; tels furent
les commencements de la vie monastique dans cette contrée. De riches
donations firent accroître les biens temporels de cette maison ;
mais ils ne furent considérés que comme le patrimoine du pauvre et
comme un trésor pieux, et ne furent jamais détournés de cette
destination, ce qui entretint toujours l'esprit monastique dans
toute sa pureté (6). Il fonda un second monastère pour des filles
dans le voisinage, et le gouvernement en fut confié à sainte
Walburge, sa sœur.
Wynnebald
continua à travailler avec zèle à la conversion des idolâtres, qui
plus d'une fois attentèrent à sa vie. Mais il ne négligeait pas pour
cela le soi' de sa communauté : il y entretenait l'esprit de prière,
d'humilité, de mortification ; il proportionnait ses
instructions à l'état de chacun des frères ; il encourageait les
faibles et animait les parfaits ; il pratiquait le premier les
vertus qu'il recommandait aux autres.
« Le saint
homme – dit la religieuse qui a écrit la vie du Saint – ne se laissa
égarer ni détourner de la voie qu'il avait une fois embrassée ni par
les menaces des méchants ni par les discours hypocrites des
flatteurs. Toujours inébranlable et fort de sa foi dans le Seigneur,
ii ne cessa pas d'exhorter par son enseignement le peuple à renoncer
au culte absurde et abject des idoles. Répandant ainsi de tous les
côtés la semence des saintes doctrines parmi les nations, il gagna à
Dieu un nombre considérable d'idolâtres, et il était, d'après la
précieuse parole de notre Sauveur, l'image vivante de cette prudence
de serpent, avec laquelle il » censurait et châtiait les actions
perverses des séducteurs, les éclairait par les remontrances, puis
les adoucissait en les persuadant. Il s'arma, contre les furieuses
attaques de l'esprit malin, du bouclier de la foi et de la cuirasse
de la justice, de la lance de la parole divine, de l'épée de la
mortification, du casque de l'abstinence, et combattit nuit et jour
contre les ruses de Satan. Il possédait à un si haut degré la
simplicité de la colombe, qu'il savait toujours tempérer l'ardeur de
son zèle par la plus insinuante douceur et saisissant profondément
les paroles de l'Écriture qui recommandent à ceux qui enseignent
d'adapter leurs leçons à l'intelligence de leurs auditeurs, il était
l'homme de tout le monde, compatissant envers les malheureux,
bienfaisant comme un « frère envers les pauvres, ramenant dans la
voie de la vertu tous ceux que touchaient les doux accents de sa
piété et de sa charité ; car il est écrit qu'il n'y a que celui que
l'on aime qui trouve des oreilles disposées à écouter et des cœurs
dociles. »
Dieu éprouva son
serviteur par diverses maladies. Trois ans avant sa mort, on avait
renoncé à tout espoir de le voir se rétablir. Dans un voyage qu'il
fit à Fulda il tomba malade, et dut rester pendant trois semaines
dans ce couvent ; mais il guérit et continua sa route vers
Wurtzbourg, où il passa trois jours chez l'évêque Megiugoz, après
quoi il retourna auprès des siens.
Sa dévotion étant
plus grande que ce que ses faibles forces corporelles comportaient,
il voulut faire un pèlerinage au tombeau de saint Benoît, le
fondateur de son ordre, et terminer ses jours à Mont-Cassin. Mais il
demanda auparavant à l'abbé de cette maison la permission d'y venir
et l'assurance d'être reçu parmi les frères de sa communauté. Notre
Saint ne tarda pas à recevoir la plus cordiale invitation à cet
égard, et il était sur le point de partir, lorsque ses moines, à qui
il fit part de son projet, s'opposèrent à son exécution, et le
retinrent par leurs prières et leurs larmes.
Depuis cette
époque, sa faiblesse ne lui permit plus d'aller à l'église , et se
vit donc forcé de dire la messe dans une chapelle particulière
attenante à sa cellule , ou même dans celle-ci, témoigna le désir de
revoir une fois encore avant sa mort son frère Guillebaud, qui vint
en effet le voir dans sa dernière maladie. Sentant approcher sa
dernière heure, il adressa à ses disciples ces paroles : « Mes fils
et mes frères, veillez sans cesse à ce qui vous est utile, et
agissez toujours avec la même prudence. Que votre conduite et toutes
vos actions soient conformes à la volonté de Dieu ; soyez toujours
fidèles à la charité et à la foi catholique. Observez inviolablement
en toute circonstance la discipline monastique, telle que nous vous
l'avons prescrite et enseignée, et que vous avez promis à Dieu de
l'observer Je vous remets toutes les fautes humaines que vous pouvez
avoir commises sous ma direction soit par négligence soit par oubli ;
pardonnez-moi de même les offenses que je vous ai faites en
paroles, en actions ou autrement. Ainsi adieu ! vivez en paix et
laissez-moi sortir de cette vie avec les hommes, » car
l'heure approche où mon âme, quittant la prison » de ce corps, va
aller recevoir le prix de ses combats et se reposer de ses fatigues,
par la bienveillante coopération du Père, et d'après les paroles de
ses promesses. » Après cela il leva les yeux au ciel et s'écria :
Seigneur, je remets mon âme entre tes mains, et mourut de la
mort des justes, le 18 Décembre 760, à l'âge de 60 ans, après avoir
été environ dix ans abbé. Ses disciples portèrent ses restes à
l'église, passèrent toute la nuit en prières et en cantiques, et les
placèrent ensuite dans un tombeau qu'il s'était déjà fait préparer
depuis quelques années.
La religieuse qui
a écrit la vie du Saint, assure qu'il s'opéra plusieurs guérisons
miraculeuses à son tombeau.
Environ seize ans
après la mort de Wynnebald saint Guillebaud leva de terre le corps
de son frère, qui était demeuré intact, et le mit dans une châsse,
enrichie d'or et d'argent. Lorsqu'au douzième siècle l'église de
Heidenheim fut consumée par les flammes avec la châsse, on sauva
pourtant les reliques du Saint ; et lorsque l'église fut rétablie,
on les enterra de nouveau, en 1358, dans le nouveau chœur. On dit
qu'au seizième siècle elles furent transférées à Scher, en
Franconie, dans les terres du seigneur de Truchses, pour les
préserver de la profanation à laquelle elles étaient exposées dans
ces temps de troubles.
On assure en outre, que déjà en 1109 il en vint une partie, avec
celles de saint Guillebaud et de sainte Walburge, à Fumes, en
Flandre, où cette translation se célèbre tous les ans le 1er
Mai.
SOURCE :
Alban Butler : Vie des Pères, Martyrs et autres principaux
Saints… – Traduction : Jean-François Godescard. |