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La Trinité et le Cœur de Jésus
"C'est par le Cœur
de Jésus, dans la Sainte Trinité, que nos âmes se retrouvent et ne
sont qu'une..."
Extrait d'un texte du
Père Vallée rédigé lors de la béatification d'Élisabeth de la
Trinité: "Il est des êtres qui meurent inconscients de l'humain ;
aussi sont-ils comme un magnifique cristal au travers duquel la
lumière passe sans se briser ; l'impression divine reçue, la frappe
demeure. Élisabeth était éminemment de ceux-là ; elle avait de
l'enfance les naïvetés et les profondeurs instinctives. Toute faite
de candeur, de franchise, de simplicité, elle était tout entière en
les choses de Dieu, n'ayant rien d'autre dans l'âme et dans son
regard si pur...
Son oraison fut
longtemps occupée du Crucifié ; puis ce fut l'attrait de la Trinité
sainte, le besoin de se sentir de la société du Père, du Verbe et de
l'Esprit. Tout s'éclaira et se précisa en elle par l'étude de saint
Paul."
Dans le traité, Le
Ciel dans la foi, Élisabeth résume en quelque sorte la raison de
sa dévotion à la Très Sainte Trinité, but ultime à atteindre. La
voie à suivre, c'est l'union à Dieu; le but, se rendre conforme au
Maître adoré pour atteindre la demeure de la Trinité. Dieu est notre
Père et la Trinité notre demeure.
Elle écrit une
dernière fois au chanoine Anglès:
"Le 18,
j'aurai 26 ans : je ne sais si cette année s'achèvera dans le temps
ou dans l'éternité, et je vous demande encore, comme une enfant à
son Père, de vouloir bien, à la sainte Messe, me consacrer pour être
hostie de louange à la gloire de Dieu. Oh ! consacrez-moi si bien
que je ne sois plus moi, mais Lui, Jésus ! et que le Père, en me
regardant, puisse le reconnaître. Que je sois 'conforme à sa mort',
que je souffre en moi ce qui manque à sa Passion, et puis,
baignez-moi dans le sang du Christ, pour que je sois forte de sa
force à Lui ; je me sens si petite, si faible !
À Dieu, cher Monsieur
le Chanoine, je vous demande de me bénir au nom de cette Trinité
sainte à laquelle je suis spécialement dédiée. Voulez-vous aussi me
consacrer à la Sainte Vierge ; c'est elle, l'Immaculée, qui m'a
donné l'habit du Carmel, et je lui demande de me revêtir de cette
robe de fin lin
dont l'épouse se pare pour se rendre au souper des noces de
l'Agneau.
Dans, La dernière
retraite, écrite vers la fin du mois d'août 1906, Élisabeth de
la Trinité explique les raisons de la recrudescence de sa souffrance
physique; bientôt elle pourra écrire, parlant de Jésus : "Il m'a
substituée à sa place sur la croix... Que faire avec sa souffrance?
Voilà que je vais me faire enseigner la conformité, l'identité avec
mon Maître adoré, le Crucifié par amour... Avant d'être transformée
de clarté en clarté en l'image de l'Être divin", elle devra
devenir conforme en l'image du Verbe incarné, Crucifié par amour.
Pour cela, elle contemplera Marie, la Mère pleine de grâces, qui va
former l'âme d'Élisabeth à l'image de son premier-né, le Fils de
l'Éternel; assistée par l'Esprit Saint, Élisabeth s'imprègnera
aussi, et de plus en plus, de l'Écriture.
Sa prieure Mère
Germaine à raconté dans ses Souvenirs qu'Élisabeth écrivit à
un jeune séminariste:
— N'avez-vous pas la
passion de L'écouter ?
Il y a deux mots
qui, pour moi, résument toute sainteté, tout apostolat: 'Union,
amour', demandez que j'en vive pleinement, et pour cela que je
demeure tout ensevelie en la Sainte Trinité...
Et encore: Lorsque
je songe à mon nom, écrit-elle au même séminariste auquel des liens
de grâce l'unissaient plus intimement que les liens de famille, mon
âme est emportée sous la grande vision du mystère des mystères, en
cette Trinité, qui, dès ici-bas, est notre cloître, notre demeure,
l'infini en lequel nous pouvons nous mouvoir à travers tout. Je lis
en ce moment les belles pages de notre Père saint Jean de la Croix
sur la transformation de l'âme en les trois Personnes divines.
Monsieur l'abbé, à quel abîme de gloire nous sommes appelés ! Oh !
je comprends les silences, les recueillements des saints qui ne
pouvaient plus sortir de leur contemplation : aussi Dieu pouvait-Il
les emmener sur les sommets divins où l'union se consomme entre Lui
et l'âme devenue épouse dans le sens mystique du mot... Je voudrais
y répondre en passant sur la terre comme la Sainte Vierge, gardant
toutes ces choses en mon cœur, m'ensevelissent pour ainsi dire dans
le fond de mon âme afin de me perdre, de me transformer en la
Trinité qui y demeure ; alors ma devise, 'mon idéal lumineux', comme
vous me le dites, se trouverait réalisé, je serais bien : Elisabeth
de la Trinité.
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