Teresa Musco

La crucifiée de Caserte

Notes biographiques

introduction

Pour commencer cet humble travail — qui n’a d’autre but que celui de mieux faire connaître une âme d’exception, très peu connue en France —, rien de mieux que de laisser parler un spécialiste en la matière : le très connu et vénéré père Gabrielle Roschini, o s m.

« Pendant ma longue vie religieuse — écrit-il, dans la présentation du livre du père Stefano Manelli “Piccola storia di una vittima” (Petite histoire d’une victime) — et, plus encore, durant la longue période où j’ai été Consulteur de la Sacré Congrégation pour la Cause de Saints (27 années), j’ai eu l’occasion de lire et de passer au crible un grand nombre de biographies d’âmes saintes, de tous les temps et de tous horizons : exceptionnelles, dotées de dons extraordinaires, impressionnants. Aucune, toutefois — à mon avis — ne peut se comparer à la vie et aux phénomènes extraordinaires de Teresa Musco.

Pour moi — et, j’ose espérer, pour tous ceux qui liront cette première esquisse biographique — le nom de Teresa Musco représente le plus grand ensemble phénoménologique de tous les temps et de tous lieux : un phénomène qui nous pousse à nous exclamer avec le prophète Isaïe (59, 1) : “Non, ce n’est pas la main de Dieu qui est incapable”, ou bien, elle ne s’est pas raccourcie la puissance et la bonté de Dieu », écrit-il.

« Teresa Musco — poursuit-il encore, un peu plus loin — n’est pas pour moi une inconnue ; et je ne veux pas dire inconnue dans le sens ou j’en aurait seulement entendu parler : je l’ai connue personnellement, l’ayant rencontrée plusieurs fois et m’ayant ainsi entretenu avec elle ; puis j’ai suivi, plus attentivement, les trois dernières années de sa sainte et admirable vie. Je puis donc en parler en connaissance de cause, par connaissance directe. Certains phénomènes extraordinaires se sont déroulés devant mes yeux… »

Il convient de dire que la vie de Teresa Musco est vraiment extraordinaire, au sens plus large du terme, car elle fut dotée par Dieu d’un grand nombre de dons admirables qui feront sursauter les esprits chagrins de notre siècle incrédule et profondément cartésien et matérialiste.

Mais, il ne faut en aucun cas oublier que « l’Esprit souffle où il veut… » et que « personne, parlant avec l'Esprit de Dieu, ne dit : "Anathème à Jésus", et nul ne peut dire : "Jésus est Seigneur", s'il n'est avec l'Esprit Saint. Il y a, certes, diversité de dons spirituels, mais c'est le même Esprit ; diversité de ministères, mais c'est le même Seigneur; diversité d'opérations, mais c'est le même Dieu qui opère tout en tous. A chacun la manifestation de l'Esprit est donnée en vue du bien commun » (1 Co, 12 3-7).

Nier ces faits — vus et constatés par d’éminents spécialistes — serait faire preuve d’une incrédulité tendancieuse et obstinée, d’une mauvaise foi caractérisée et aveugle. Il est bien vrai que, l’aveugle le plus à plaindre, est celui qui ne veut point voir… et reste obstinément enfermé dans son entêtement obscur et vaniteux.

Nous allons suivre, pas à pas, tout le long de ces quelques pages, le parcours extraordinaire de cet enfant de Caserte et, pour tout vous avouer, nous trouvons dans cette vie de victime volontaire, beaucoup de similitudes et de points communs avec une autre âme-victime, presque sa contemporaine, et que nous connaissons fort bien : Alexandrina Maria da Costa, mystique portugaise, béatifiée le 25 avril 2004 par le "saint" Pape Jean-Paul II, le Grand.

Teresa Musco, c’est évident, ne laisse pas indifférent : son cas est tout à fait extraordinaire, comme l’a souligné le père Gabrielle Roschini et, il faut, pour mieux la comprendre et comprendre les dons dont elle bénéficia, faire montre d’une grande ouverture d’esprit et, surtout, d’une grande humilité.

Rappelons-nous ce que dit saint Paul et citant l’Ancien Testament : « C'est par des hommes d'une autre langue et par des lèvres d'étrangers que je parlerai à ce peuple, et même ainsi ils ne m'écouteront pas » (1 Co 14, 21).

Les messages pressants reçus par Teresa Musco, sont encore et toujours d’une criante actualité. Ils n’ajoute rien au message évangélique : ils en rappellent l’urgence d’exécution, l’attachement que chacun d’entre nous doit avoir vis-à-vis des paroles de Jésus en son temps. Mais, les temps de Dieu n’étant pas les nôtres, il convient de ne pas imiter les vierges folles et de nous mettre à l’écoute des prophètes qui, tels Noé, nous mettent en garde contre notre incrédulité et notre entêtement à ne rien entendre qui puisse, tant soit peu, changer nos manières de vivre dans un confort trompeur et dans une nonchalance religieuse affligeante.

De quoi nous parle Teresa Musco ?

Elle nous parle de Dieu qui est Amour ; de Marie qui est notre Mère à tous ; de l’Église du Seigneur qui telle une barque en pleine tempête, tente d’arriver à bon port, coûte que coûte.

Elle nous parle de ce Jésus qui a tant souffert pour nous et qui, dans son amour indicible est mort pour que nous ayons la vie, « et la vie en abondance ».

Teresa nous parle de l’Eucharistie, ce sacrement pour excellence qui nous permet de vivre plus intimement en Dieu, quand on le reçoit dignement.

Elle nous parle encore et encore de Marie, cette Vierge infatigable qui, aux quatre coins du monde, dans toutes les langues, sème ses messages d’amour et de réconciliation ; qui à tous ses enfants adresse un appel pressant à la conversion, par la prière, surtout celle du Rosaire.

Teresa nous parle de la Passion et de la mort du Seigneur, passion qu’elle vécut elle-même dans sa chair, à un point indicible.

La « sainte » fille nous parle encore et encore de cet Amour incomparable et infini que Dieu a pour nous ; un amour qui le pousse à vouloir nous sauver, même malgré nous, car Il ne veut perdre aucun de ses enfants.

Teresa a-t-elle reçu des prophéties ?

La réponse est, bien entendu, affirmative. Mais, est-ce cela le plus important ?

Le mystique n’est pas que cela : une boîte aux lettres de Dieu qui lève, de temps en tant, un coin du voile qui cache à nos yeux un futur que tous voudraient heureux et plein de bienfaits.

Le mystique est autre chose : il est celui qui de toute son âme, de tout son être, se met à la disposition du Seigneur pour le bien de ses frères ; il est le lien visible entre Dieu et les hommes « de bonne volonté », si je puis dire.

Le mystique vit en Dieu, de Dieu et pour Dieu, « à condition » — pardonnez l’expression — que cet état de vie profite au bien de toutes les âmes, qu’elles soient celles de croyants ou de non-croyants, car tous — même les plus méchants, les pires assassins ou violeurs — sont des enfants de Dieu et destinés à être sauvés par le Sang de Jésus, « versé pour la multitude ».

Parmi les textes choisis pour ce travail, on trouvera, probablement, quelques prophéties reçues par Teresa Musco, mais nous ne ferons pas de ces « admonestations » l’essentiel de notre travail, car pour cela, il suffirait de lire l’Apocalypse, pour être servis en « sensations fortes »…

La vie de la servante de Dieu, est une vie « cachée », une vie simple et humble. Elle n’a jamais cherché — tout comme Alexandrina de Balasar — à se mettre en avant, à attirer à elle les foules ou la gloire passagère : vivre simplement, obéissant en toute chose à Jésus, son divin Époux.

Mais, penchons-nous maintenant sur sa biographie, et disons avec David : « Les cieux racontent la gloire de Dieu, et l'œuvre de ses mains, le firmament l'annonce ; le jour au jour en publie le récit et la nuit à la nuit transmet la connaissance » Ps 19, 2-3).

CHAPITRE I

Naissance et jeunesse

Naissance à Caiazzo

Teresa Musco naquit le 7 juillet 1943, à Caiazzo, modeste village du sud de l’Italie, dans la province de Caserte, au sein d’une famille honnête et religieuse, mais pauvre. C’était une famille nombreuse — dix enfants virent je jour chez le « père » Musco —, comme la plupart des familles d’alors, chrétiennement respectueuse de la fécondité inhérente au sacrement du mariage.

Salvatore, le père de famille, était communément appelé du sobriquet « boche », à cause de sa rudesse habituelle, de son autorité presque despotique et de ses colères connues de tous les habitants du village.

Tout le contraire de son mari, Rosa Zullo, n’était que douceur et aménité, toujours soumise et attentive au moindre désir de son époux ; mère pleine de tendresse et d’amour envers tous ses enfants et très généreuse envers les pauvres.

Malgré la rudesse de Salvatore — qui « laissait à désirer » comme l’affirme le père Giuseppe Borra, directeur spirituel de Teresa —, la foi habitait ce foyer éminemment chrétien, où la mère était, sur tous les points de vue, l’exemple à suivre, pour ses nombreux enfants, car elle possédait une foi forte et une piété irréprochables.

Ce fut elle, bien entendu, qui inculqua dans le cœur de ses enfants les premiers rudiments de l’enseignement de l’Église, qui leur apprit à prier Jésus, la Vierge et les Saints ; qui leur apprit à fuir le mal et à pratiquer le bien ; ce fut elle aussi qui, lors des moments de « folie » de son époux, ramena la paix au sein du foyer.

Période de guerre

La période pendant laquelle naquit Teresa, était une sombre période pour toute l’Italie, mais plus particulièrement pour le sud, avec la jonction des armées d’occupation et de libération qui se battaient à coups de canon et terrorisaient les pauvres paysans, les privant le plus souvent de leurs récoltes et de leurs maigres avoirs ; occasionnant ainsi des périodes de grande disette.

On peut aisément comprendre que les premières années de Teresa aient été rythmées par les horreurs de la guerre et par la faim qui fut la cause de grandes souffrances pour le couple et pour les enfants encore bien jeunes.

Mais cette situation n’eut pas que des résultats négatifs. En effet, cela servit à forger le caractère de ces jeunes enfants, à les rendre adultes avant l’âge, comme le dit Teresa elle-même dans son Journal : « A l’âge de cinq ans le sentais être devenue une personne adulte ». C’est que pour survivre, il fallait aller dans les champs, travailler la terre, même si l’on n’était encore qu’un enfant : la survie est l’affaire de tous, et tous doivent y collaborer ardemment.

Premières visites de la Madone

Mais, déjà à cette époque la petite Teresa, avait pour la Madone une dévotion toute particulière et une dévotion filiale inconditionnelle, comme elle le dit elle-même dans son Journal (p 1846) :

« Maman, qu’est-ce qu’on est bien sous ton manteau ! Depuis ma plus tendre enfance, toi, ô Mère, tu as été la lumière de mes yeux, la voie qui m’a conduite à Jésus, le guide de mes actions, mon réconfort lors des moments de ténèbres. Depuis ma naissance, ô Mère chérie, tu m’as prise dans tes bras, me faisant goûter ton grand amour pour moi, et depuis, tu ne m’as jamais abandonnée ».

Au professeur Pontoni qui la questionnait, elle dit encore :

« Je peux dire que, dès l’âge de six ans, j’ai été entourée par une prédilection particulière de la Maman du ciel. En effet, Elle était auprès de moi quand je raccommodais, quand je priais et même quand je jouais, je me sentais appelée à m’entretenir avec Elle. Quand j’étais malade, je le sentais toujours toute proche et, pour moi, cela était d’un grand réconfort et une protection. La seule chose qu’Elle me disait était: “Offre ta souffrance pour le pécheurs” ».

L’école et la maladie

Cette période fut aussi la période pendant laquelle Teresa commença sa scolarisation ; la période où elle assistait, impuissante, aux altercations entre son père — qui profère des obscénités — et sa mère, toujours douce et soumise — qui l’émeuvent jusqu’aux larmes — ; ce fut aussi la période où elle commença les travaux ménagers, comme toutes les petites filles de la campagne, surtout au sein des familles nombreuses. Ce fut encore la période où elle fut prise de grosses fièvres, fut en proie à des coliques lancinantes qui la faisait tant souffrir.

Mais, cette période de souffrances fut aussi le commencement des visites de Jésus, de Marie, des Anges et des Saints, qui n’eurent cesse de l’encourager à tout offrir « pour les pécheurs ».

Ce fut dès lors que Teresa devint « très attachée à Jésus » et que le désir d’être « crucifiée avec Jésus et lui ramener beaucoup d’âmes » germa en son cœur innocent et, cela devint par la suite, le but même de toute sa vie.

Cette enfance, toutefois, ne fut pas uniquement peuplée de bienfaits divins ; elle eut aussi les mauvais côtés, les penchants, les tracasseries qui sont le lot de tous les enfants, prédestinés ou non.

Espiègle

Comme tous les enfants de son âge, Teresa avait aussi des moments moins « divins », des moments où elle devenait quelque peu rebelle. Elle le raconte elle-même :

« Tous, dans la famille, m’ont dit que dans mon enfance j’étais très tourbillonnante et espiègle ».

Voyons plutôt :

Un jour son père l’envoya à la fontaine pour y faire boire l’âne. Teresa l’y conduisit, mais pendant que l’âne s’abreuve, elle grimpa, toute seule, sur le muret de la fontaine pour s’asseoir… sur la tête de l’âne. Instinctivement l’animal secoua la tête et la fillette tomba dans l’eau, d’où elle ressortit comme une grenouille, mouillée de la tête aux pieds. Elle retourna à la maison, raconta sa mésaventure et reçut, de ses parents une sévère réprimande, qui la mit en pleurs.

Il lui arrivait aussi d’organiser des jeux, avec ses petites amies… Savez-vous à quel endroit ? Dans l’église même, car elle ne pouvait pas les organiser chez elle, craignant la sévérité paternelle.

Elle se souvient aussi d’un fait particulier qui eut lieu alors qu’elle n’avait que cinq ans, mais qui resta à jamais gravé dans sa mémoire.

Un jour où il tombait de la grêle — c’était la première fois qu’elle voyait ce phénomène atmosphérique —, Teresa, poussée par la curiosité, et ignorant les dangers, sortit dans la cour, à moitié nue et chercha à ramasser quelques grêlons qui tombaient dans ses mains tournées vers le ciel. Mais son père, l’austère Salvatore, ne l’entendit pas ainsi et, sortant à son tour, il la tira vers l’intérieur et lui asséna une forte gifle.

La « belle Dame »

Peu après l’enfant vit une « Dame très belle », auprès de laquelle Teresa se lamenta. Mais la « Dame » lui dit avec douceur : « Tu vois, ma fille, [ton père] il a bien fait » (Journal, pp 657-658).

C’était là, vraisemblablement — malgré les espiègleries dont elle s’accuse et qui sont la tare commune de tous les enfants des hommes —, la première intervention de la Madone dans la vie de Teresa. Par la suite, la présence de Marie sera toujours aussi vive et opérante, ce qui nous fait dire que sa vie fut profondément mariale.

« Dans l’après-midi du lendemain (9 janvier 1948) — raconte le père Stefano Manelli —, une journée froide et pluvieuse, alors que la fillette, qui n’a pas encore cinq ans, souffre d’un fort mal de tête, et qu’avec toute la famille réunie autour du feu, elle prie le saint Rosaire, le souffle lui manque tout d’un coup et elle tombe à terre, évanouie : l’un de ses pieds tombe sur le brasier. Le père s’en rend compte et immédiatement la prends dans ses bras. Revenue à elle, Teresa commence à pousser des cris à cause de la douleur causée par la brûlure. La nuit se passe, entrecoupée de souffrances et de longs gémissements. Le matin suivant, elle ne réussit pas à mettre son pied par terre. Quelques jours après, le pied brûlé commence à exhaler une odeur fétide. Elle ne pouvait plus se lever, car l’état de son pied ne lui permettait pas non plus de marcher, ce qui donna lieu à quelques crises de pleurs.

La céleste « guérisseuse »

Le 12 janvier [1948], pour la seconde fois, elle voit la « belle Dame » qui semble cueillir des feuilles de fève et les déposer sur la brûlure, et lui dire : “Ne le dis à personne : ta Mère te guérira ! Reste calme…” Ceci dit, Elle disparut. La fillette demande alors à sa mère quelques feuilles de fève, les met sur le pied brûlé et, huit jours après, le pied commence à guérir.

Le 17 janvier elle sort de son lit et s’en va jouer avec les autres enfants. Aussitôt après, entendant sonner la cloche de l’église voisine, la fillette abandonne ses petits amis et coure prier à l’église. Là, elle voit de nouveau la « belle Dame », laquelle lui met de nouveau des feuilles de fève sur la brûlure.

Le 21 janvier elle était guérie et il ne restait plus aucune trace de la brûlure. Pour remercier la céleste Madone, Teresa commence à faire des petits sacrifices : elle se prive de caramels et de chocolat… La Madone lui apparaît alors et lui dit : « Ma fille, je suis ta Maman céleste qui te guide le long de la route qui plaît à mon Fils bien-aimé. Je suis contente des sacrifices que tu m’offres, mais je désire que cela continue, c’est-à-dire que tu continues” » (Journal, pp. 658-661).

« Tu iras vivre à Caserte… »

Malgré le bas âge de Teresa, la Vierge semble vouloir « brûler les étapes », car la Maman céleste ne vas plus attendre pour annoncer à l’enfant son futur départ pour Caserte. Écoutons-la :

« Ma fille, le sais-tu ? Je suis ta Maman et je suis venue te dire… » “Quo donc ?” questionna la gamine. “Ceci — reprit Marie : Un jour viendra où tu devras quitter la maison paternelle pour aller vivre à Caserte, où tu rencontreras une petite dame, cheveux grisonnants, yeux noirs…, laquelle t’aidera dans tes difficultés… ».

Marie lui apprit même le nom et le prénom de cette dame et ajouta :

« Elle sera ta Maman spirituelle ». Le message étant délivré, la « belle Dame » disparaît et Teresa retourne jouer avec son frère (Journal, p. 662).

Comme pour confirmer son précédant message, la Vierge revint le premier mars 1948. Elle était accompagnée de la future « Mère spirituelle » de Teresa. Celle-ci dit à l’enfant : « Courage ! Je t’attends à Caserte… » L’annonce faite, celle-ci embrassa l’enfant sur le front et disparut en même temps que la Madone.

« M’aimes-tu ? »

Alors qu’elle n’avait toujours que cinq ans, une autre rencontre va décider de son avenir, va marquer une étape décisive dans la courte vie (33 ans) de Teresa. Ce sera le moment de dire “oui”, pour toujours, à Jésus.

En effet, un certain jour l’Enfant Jésus lui apparut et lui demanda d’emblée : « Teresa, m’aimes-tu ? » La petite, avec sa naïveté enfantine répondit aussitôt : « Oui ! » Puis, enchaîna immédiatement : « Et toi, m’aimes-tu ? » Alors, la fixant avec amour, Il lui répondit, plein de tendresse : « Oui ! Et s’il en était besoin, Je serais prêt à être de nouveau crucifié pour toi ».

Cet échange entre Jésus et la fillette, sera une constante dans le cours des temps : Teresa ne dira plus jamais « non » aux demandes du Seigneur, mêmes celles qui seront cause de souffrances, physiques ou morales. Le « oui » sera comme scellé dans cet échange d’amour entre les époux, des époux qui s’aiment d’un amour vrai et indéfectible.

Marie ou Jésus ont-Ils « forcé la main » à Teresa ?

En aucun cas, car le Seigneur laisse toujours à chacun de ses enfants la possibilité de refuser une proposition. Nul n’est forcé au salut, même si celui-ci est indispensable pour acquérir la vie éternelle bienheureuse. Celui qui dit non, le fait en connaissance de cause et librement.

Ce qui est vrai, par contre, c’est que le Seigneur ou Marie en son Nom, insistent toujours et agissent sur les âmes, afin de pouvoir les sauver, même malgré elles. Le Christ n’est pas mort pour un ou pour un million d’âmes :Il est mort pour nous tous, tous, autant que nous sommes, que nous avons été et que nous seront encore, tant que durera ce monde.

Dans la vie de Teresa, dès son plus jeune âge et jusqu’à sa mort, le mot « oui » sera toujours d’actualité, sera toujours le maître mot que la mènera jusqu’à la donation totale de tout son être, sans aucune réserve, même lors des plus tragiques et douloureux moments, moments ceux-là qui étaient autant d’actes d’amour offerts pour le salut de ses frères pécheurs. Le « oui » ferme à la demande « M’aimes-tu ? » se transforma bientôt en : « faites de moi un chiffon »…

Première Communion

« L’exceptionnel cadeau — raconte le père Stefano Manelli — d’être admise à la Première Communion par le curé de son village remplit Teresa de joie, mais il n’en va pas de même pour son père qui s’y opposa obstinément et fermement. Il s’entêtât à dire qu’elle la ferait à douze ans, voir après, mais sûrement pas avant.

Teresa était triste et ne s’expliquait pas le refus paternel. Seule la pensée de pouvoir faire la sainte Communion lui procurait bonheur et joie. Qu’est-ce que cela serait bien si elle pouvait la faire ! Il est vrai que la « belle Dame » l’invita plusieurs fois à dire à ses parents de la préparer pour la Première Communion, mais le père s’obstina toujours dans son refus. La mère, par contre, l’envoya souvent aux réunions de l’Action  Catholique et Teresa s’y appliqua à l’étude du catéchisme et, sa sœur aînée qui deviendra religieuse, l’aida aussi dans cette préparation. La fillette écrira plus tard dans son Journal : “Le désir de recevoir Jésus me dévore” ».

Jésus Lui-même l’incitera à demander la permission à son père : « Demande à ton père qu’il te permette de faire ta Première Communion ».

Teresa insista, souvent, encore et encore, auprès de son père qui, toujours d’une humeur exécrable, finit par se servir de sa ceinture pour corriger sévèrement et sans pitié, l’impertinence de sa fille. La punition fut si sévère que Teresa dut rester au lit, prise d’une forte fièvre qui la fît délirer : « Je veux recevoir Jésus ! », balbutiait-elle alors.

Cette situation semblait sans issu : d’un côte l’enfant qui désirait ardemment faire sa Première Communion et de l’autre le père qui restait inébranlable dans sa décision négative. Que faire ? Le ciel viendra-t-il à son secours ?

Le 10 janvier 1950 Teresa était au lit : elle était prise de douleurs lancinantes. Ce fut alors que Jésus lui apparut, et lui tendant les bras, lui dit : « Courage, ma fille, prend de Ma force pour sortir de ta faiblesse ! Prépare-toi à Me recevoir dans la sainte Communion, car Je désire venir à toi, afin que tous les deux nous ne fassions plus qu’un ».

Ce même jour, vers dix heures trente, Salvatore, son père lui ordonna de se lever et d’aller faucher de l’herbe pour l’âne. Teresa obéit promptement. Elle se leva, s’habilla et partit dans les champs, aux alentours de Caiazzo, pour y faucher l’herbe, comme convenu, mettant tout son cœur et toute son énergie à la tâche.

A un certain moment, elle entendit une voix qui lui disait : « Il y a ici l’une de mes maisons ». En effet, Teresa, se relevant et regardant autour d’elle, vit, non loin de là une église. Elle arrêta son travail et s’y rendit promptement. Elle entra et se rendit compte que l’on y célébrait une messe de mariage. Un prêtre occupait le confessionnal. La fillette s’approcha et se confessa. Lors de la Communion, elle s’approcha craintive de la balustrade, comme le firent les autres, et reçut Jésus Eucharistique. Ce fut là sa Première Communion !

« Ce fut le jour le plus beau de ma vie ! », écrira-t-elle plus tard dans son Journal spirituel. Elle vît sur l’autel comme une immense flamme, flamme qui brûle maintenant dans son cœur.

Mais il ne lui restait pas de temps pour l’action de grâces, car le travail que lui avait confié son père n’est pas terminé. Elle courut vers le champ, ramassa l’herbe coupée dans des sacs et retourna à la maison. Depuis ce jour, et à chaque fois qu’elle le put, elle alla dans les villages voisins pour y communier en toute tranquillité, sans se faire remarquer.

Première Communion « officielle »

Plus d’un an plus tard, le 1er mai 1951 — Teresa avait alors huit ans —, son père l’autorisa enfin à faire sa Première Communion « officielle ». Quand Teresa annonça à son père qu’elle avait déjà fait sa Première Communion, celui-ci ne voulut pas la croire et, pensant qu’elle mentait, la corrigea sévèrement, lui assénant un gros coup de poing sur la tête. « Ce n’est pas vrai, tu es une menteuse ! », cria-t-il en même temps, hors de lui.

Ce fut aussi ce même jour — « qui restera le plus beau jour de ma vie », écrira-t-elle — que Marie lui annonça qu’elle rencontrerait deux prêtres : le père Giuseppe Borra (salésien), qui sera son directeur spirituel et le père Franco Amico, qui l’assistera fidèlement jusqu’à sa mort.

Dans son Journal, elle continue : « Je me suis approché du banquet eucharistique, avec mon céleste Époux. Combien il a été émouvant de voir Jésus sur l’autel ! Quand le prêtre qui célébrait éleva l’hostie, j’ai vu couler le sang ».

Teresa remarqua que la « belle Dame » se trouvait à côté de Jésus. Elle s’enhardi et posa la question : « Qui êtes vous ? » La réponse fut claire et précise : « Je suis la Vierge Immaculée ta Mère. Conserve tout ce que je te fais écrire. Puis le temps viendra où tu devras confier ces écrits. Ne perds pas ce Journal que tu devras faire lire à Dom Borra et au père Franco Amico ».

Comme Teresa semblait quelque peu étonné, la Vierge Marie la rassura en lui disant qu’en son temps, elle lui expliquera qui sont ces deux prêtres, que la fillette ne connaît pas encore.

Après ces explications, la « belle Dame » l’embrassa sur le front et « disparut, enveloppée dans un nuage blanc ».

A cette date, également, prirent fin les Communions « en cachette » : elle pouvait maintenant, en toute tranquillité, recevoir « l’Époux céleste » chaque fois qu’elle le désirerait ; et elle ne s’en privera pas !

« Pensons à tout ce qu’elle a dû souffrir — commente le père Stefano Manelli — pour recevoir le Seigneur, alors que tant de chrétiens négligent de le, se refusant de se soumettre au moindre sacrifice pour s’alimenter du Pain de Dieu ».

Des cadeaux « surprise »

Comme nous l’avons dit au début de ces notes biographiques, la famille Musco était vraiment pauvre et, certaines fois c’était la disette totale. Salvatore, dépité, ne pouvait pas s’empêcher de blasphémer, pensant ainsi se donner un certain courage ou une certaine contenance, voir même résoudre ses délicats problèmes.

Cela ne servait à rien, bien au contraire : ses crises de « folie » devenaient plutôt des freins aux possibles actes de charité de ses voisins et amis.

Un paratonnerre existait, heureusement, contre ces blasphèmes répétés : il était composé des prières de la mère et des souffrances innocents des enfants, surtout celles de Teresa qui s’offrait spontanément comme victime d’expiation pour toutes ces horreurs qu’elle entendait, proférées par son père, qu’elle aimait tant, pourtant.

Cette situation atteignait son paroxysme quand Salvatore tombait malade, quand les dettes s’accumulaient ou quand la faim persistait. Alors, la petite Teresa n’avait d’autre recours que la prière d’intercession, une prière du cœur qu’elle adressait à la Madone : « Je t’en prie, aide ma famille ! »

Marie ne pouvait pas rester insensible à une si humble prière et, l’enfant voit, dans « une très grande lumière… un Ange très, mais vraiment très lumineux », si lumineux qu’elle ne peut même pas le regarder directement. Celui-ci, arrivé à son hauteur, lui dit, tout simplement : « Chère Teresa, la Maman céleste me demande de te donner cette somme (50 000 lires de l’époque). Ainsi, vous pourrez faire les achats de la semaine. Mais tu ne diras à personne comment tu l’as eue : cela devra rester un secret entre nous. Je reviendrai. Je te recommande de prier et d’offrir tout cela, pour qui te plaira. Je te salue. Je suis l’Ange Gabriel ».

La petite alla vers sa mère et lui dit : « Maman, une Dame que je ne connais pas m’a donné cette somme... » Rosa, toute heureuse, s’en alla immédiatement faire ses provisions : elle acheta du lait pour le petit frère « qui en avait tant besoin » et, tout ce qu’il fallait pour toute la famille.

Avec la mère tout se déroula sans le moindre problème, mais avec le père, ce ne fut pas aussi simple, car, quand il apprit la nouvelle, il voulut tout savoir : « Qui a donné à Teresa cette somme ? » A qui la petite répondait invariablement : « Une Dame que je ne connais pas ». Alors, le père, pris d’une colère presque diabolique, attrapa sa fille et en lui répétant : « Pourquoi ne veux-tu pas me dire qui t’a donné cette somme ? », la frappa sauvagement. Quant à Teresa, elle offrait, silencieusement, toutes ses souffrances « au doux Jésus », tout en pleurant en silence.

Les brutalités de Salvatore sur sa fille ne s’arrêtèrent pas là. Chaque fois qu’avec ladite somme on faisait quelque achat, lui, malade pourtant, appelait la gamine auprès de lui et lui répétait : « Tâche de te souvenir qui est cette Dame, afin que nous puissions lui demander un prêt qui nous permette d’aller de l’avant. Penses-tu qu’elle y consentirait ? »

Mais l’enfant, embarrassée, ne savant « quoi répondre », finit par dire à son père : « Je ne la connais pas, mais je suis sûre, que si je lui demande, elle me la donnera ». Ceci dit, Teresa retourna dans sa chambre et se mit à prier.

Tout d’un coup, vers douze heures trente, l’Ange Gabriel se présenta à elle — Il était beaucoup plus beau que la fois d’avant — et lui remit une autre somme, lui disant : « Teresa, à partir de maintenant ton Calvaire, semblable à celui de Jésus, commence. Soit contente et heureuse ! Accepte tout avec amour ! Je te salue, et nous nous reverrons quand le Père le voudra... »

A ce stade, Teresa elle-même nous décrit — dans son Journal — son embarras :

« J’avais la somme entre les mains, mais je ne savais pas quoi faire : mon cœur battait. Je me suis approchée de mes parents et leur dit : “Voilà, la somme… La Dame est passée et m’a donné cet argent”. Mon père, au lieu d’être content, commença à dire que j’étais une voleuse, et à me demander à qui j’avais pris cet argent ; il voulait savoir à tout prix où je l’avais récupéré. Je persistais à dire que c’était la Dame qui était passée et qui me l’avait donné. Mais lui, n’arrêtait de crier : « voleuse ! », « Tu l’as volé ! ». Il me frappa si fort que le soir je fut prise d’une forte fièvre ».

Se souvenant alors des paroles de l’Ange Gabriel, Teresa adressa à Jésus cette prière :

« O Jésus, tu sais tout ! Je t’offre tout, avec tout mon amour. Je ne veux que ton aide ! »

Le père, toujours aussi irrité, lui disait, chaque fois qu’ils se croisaient, et la menaçant d’un couteau : « Je ne veux pas de voleuses chez moi… », Puis il déchargeait sur elle toute sa litanie de gros mots et de blasphèmes.

Quant à la pauvre petite, elle « pleurait, soupirait », sans oublier d’offrir à Jésus toutes ces vexations qu’elle ne méritait certes pas. Mais, cela la rendait heureuse ; c’était en quelque sorte son bonheur à elle, comme elle l’explique : « Je le sentais (le bonheur) à l’intérieur de moi, spécialement quand je priais ».

C’était la préparation à son calvaire qui allait bientôt commencer

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