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Aimer Dieu oblige à aimer aussi le Prochain
Le chapitre 22 de l’Evangéliste Matthieu est l’un des derniers avant le récit de
la Passion. Il semble que saint Matthieu ait réuni là les discussions de Jésus
avec les Juifs, Docteurs de la Loi, Pharisiens, Sadducéens, pour montrer combien
tous ces hommes ont le cœur fermé à la Vérité, même après avoir entendu et vu
tant de belles choses de la part du Messie.
Les Sadducéens viennent ici de perdre la face après avoir soumis à Jésus un
invraisemblable “cas” : une femme a épousé successivement sept (!) frères, tous
morts les uns après les autres, sans progéniture : de qui sera-t-elle l’épouse
au Ciel ? Le cas en question est parfaitement absurde, puisque les Sadducéens ne
croient pas à la Vie éternelle.
Alors les Pharisiens veulent voir ce que Jésus pense de la Loi et lui
demandent : Quel est le plus grand Commandement ? L’Evangéliste dit qu’ils
voulaient “le mettre à l’épreuve”. Jésus ne sera certainement pas embarrassé
pour leur répondre ; mais eux, qui ne croient pas à Sa divinité, veulent voir,
par exemple, s’Il connaît bien les Écritures ; peut-être aussi s’Il préfère tel
ou tel rite, car eux sont tellement attachés aux rites extérieurs : le rite le
plus important est-il celui de la circoncision ? celui de se laver les mains
avant de manger ? ou d’observer le Sabbat ? ou d’aller sept fois par jour au
Temple pour prier ?
Jésus leur répond en citant la fameuse prière “Shema”, du Deutéronome (Dt.
6:4-9), que nous lisons au Bréviaire le samedi soir. Effectivement, cette
invitation à l’amour de Dieu, de tout notre cœur, de toute notre âme, c’est
vraiment L’aimer totalement, à chaque moment de notre journée. Et de cet amour
inconditionnel, dérive immédiatement l’amour du prochain.
Par là, Jésus montre que le réel amour de Dieu est bien au-dessus de tous les
rites, et même de tous les commandements. Ainsi les Commandements du Décalogue
ne sont pas des lois conventionnelles et fades, des sortes de règlements
administratifs, mais bien l’expression de l’amour qu’on doit à Dieu Créateur et
Père : quand on aime vraiment quelqu’un, on ne s’emporte pas contre lui, on
prononce son nom avec respect, on va lui rendre visite régulièrement et avec
plaisir ; à plus forte raison pour Dieu : on ne prononce pas son nom
vulgairement, quand on est en colère, on va Le prier en Son sanctuaire, on
honore le Jour du Seigneur.
Ainsi de suite avec les autres Commandements : aimer Dieu oblige à aimer aussi
le Prochain ; si nous aimons Dieu, nous aimons et respectons aussi nos parents,
nous ne faisons pas de mal aux autres, pas de vol, pas de mensonge, pas même de
mauvais désir.
Dans l’extrait du livre de l’Exode que nous lisions tout à l’heure, Dieu
exigeait même ce respect envers le Prochain : envers l’immigré, envers la veuve
et l’orphelin ; pas d’usure, savoir prêter sans exiger d’intérêts. On imagine
que celui qui cherche à se comporter avec cet amour fraternel ne pourra que
susciter reconnaissance et admiration, et ce surtout parce que le fidèle
disciple du Seigneur cherchera toujours à agir avec discrétion, sans se mettre
en avant.
C’est ce qui s’est passé avec les chers Chrétiens de Thessalonique., dont saint
Paul dit qu’ils sont “devenus un modèle pour tous les croyants de Macédoine et
de toute la Grèce.” Partout on dit qu’ils se sont “détournés des idoles, afin de
servir le Dieu vivant et véritable.” Nous, Chrétiens, sommes-nous des modèles
pour tous les Croyants ? Est-ce que nous nous sommes détachés des idoles, pour
ne servir que Dieu et notre Prochain ? Combien de Chrétiens lisent avidement
l’horoscope du jour, selon qu’ils sont “Verseau” ou “Balance” ! combien perdent
leur argent aux jeux ou dans les plaisirs, ou montrent de la colère envers leurs
autorités ou leurs proches… Est-ce que je donne du temps, est-ce que je prête
volontiers à mon Prochain ? Ou mon Prochain n’est-il pas plutôt celui que je
choisis pour quelque avantage personnel ?
Dieu attend notre conversion. Chantons de tout notre cœur le psaume 104 de
l’Ouverture de la Messe :
“Soyez dans la joie, vous qui cherchez Dieu.
Cherchez le Seigneur et sa force,
Sans vous lasser, recherchez son visage.”
Abbé Charles Marie de Roussy |