« Dieu ne refuse sa grâce à
personne ! »
Que ce soit au temps des Rois ou
pendant la vie publique de Jésus Christ, ou dans la vie de l'Eglise, la grâce de
Dieu, comme son nom l'indique, est donnée “gratuitement” à chacun. Dieu ne
refuse sa grâce à personne.
Mais personne ne reçoit la grâce de
la même façon.
Naaman, le Syrien, s'est d'abord
rebellé à l'invitation du prophète : Pourquoi me baigner dans le fleuve de ce
pays étranger, il y a bien d'autres fleuves dans mon beau paysq! Puis, acceptant
humblement d'exécuter ce geste purificateur, il obtient la guérison. Et retourne
voir le prophète pour lui manifester sa reconnaissance envers Dieu (le texte
d'aujourd'hui).
Des dix lépreux guéris, un seul
manifeste sa reconnaissance ; il reçoit pleinement la grâce en lui et y
correspond de tout son cœur, il obéit selon l'esprit, non selon la lettre.
Et les neuf autres ? demande
Jésus : pourrait-on leur reprocher d'avoir obéi à Jésus en allant “se montrer
aux prêtres” ? Non, mais étant guéri avant même de se montrer à eux, un seul
comprit par là que Jésus était “le” prêtre qui guérissait vraiment le péché, le
prêtre de la Nouvelle Alliance, le Sauveur tant attendu.
Les Samaritains aussi attendaient
le Sauveur : qu'on se souvienne de l'entretien de Jésus avec la Samaritaine.
On pourrait aussi faire remarquer
que le Sauveur ne remet ses péchés qu'à celui qui cherche à Le rencontrer
personnellement ; qu'Il ne donne pas ce qu'on appellerait aujourd'hui une
“absolution collective”.
Le lépreux guéri reçoit pleinement
la grâce parce qu'il exprime son action de grâces, sa profession de foi : comme
Naaman le Syrien, il adhère pleinement à la manière dont se manifeste la bonté
de Dieu.
C'est cette correspondance qui
caractérise la sainteté. Etre un saint n'est pas synonyme de faire des miracles,
d'écrire de gros livres. Etre un(e) saint(e) est essentiellement correspondre
parfaitement à l'appel de Dieu, sans retenue, sans retard.
Un grand Saint qui correspondit
très vite et très profondément à l'appel, est l'apôtre Jean ; tellement que
Jésus avait pour lui une amitié toute spéciale. Non pas que Jésus n'aimât point
les autres, mais comme celui-ci correspondait plus parfaitement à la Doctrine,
l'harmonie entre Jésus et lui était plus grande. C'est Jean qui était présent
avec Marie au pied de la croix ; c'est lui qui reçut mission de protéger Marie ;
c'est effectivement à Ephèse que Marie le suivit après la Pentecôte.
Vivre dans l'action de grâces, à
chaque instant, quoi qu'il arrive, n'est pas chose facile ; certes, qui le
nierait ? Mais là est la sainteté. Là est la joie profonde, celle de Paul :
prisonnier, enchaîné, bientôt condamné à la décapitation, il reste heureux car,
dit-il, “On n'enchaîne pas la parole de Dieu”.
Rien, rien ne nous empêche de dire
à tout moment notre adhésion à l'appel divin. Dans la joie ou dans l'angoisse,
en voyage ou dans une chambre d'hôpital, un regard vers Dieu ou une parole
intérieure ou un mouvement invisible de notre cœur — peut changer toute notre
vie et nous aider “à faire le bien sans relâche” (prière du jour).
“Chantez au Seigneur un chant
nouveau”, dit le psaume 97 aujourd'hui.
Abbé Charles Marie de Roussy |