– À
la suite du Christ, nous avons le devoir de tourner notre
regard vers tous les hommes
Huit siècles avant
Jésus-Christ, Isaïe annonçait que Dieu viendrait lui-même apporter
un changement profond en Israël.
L’expression lui-même a
son importance : le Messie est un être divin, Jésus sera
bien Dieu incarné. Le texte est clair sur la divinité de
Jésus-Christ.
Cette divinité se
manifestera par des miracles, par la guérison des aveugles,
des sourds, des muets, des boiteux.
Outre les guérisons
physiques, on peut très bien comprendre que ces guérisons
seront spirituelles : les hommes verront et entendront la
Vérité, ils la proclameront ; ceux qui hésitent encore
entre diverses doctrines, seront raffermis et ne «boiteront»
plus.
La vengeance et
la revanche de
Dieu n’ont ici rien de ces sentiments humains agressifs :
Dieu intervient sur le péché, pour reconduire l’homme à la
Vérité, à l’Innocence.
Ainsi se manifeste la gloire
de Dieu : par la conversion de l’homme. Tel est le règne de
Dieu dont nous répétons sans cesse dans la prière : Que
ton règne vienne !
Les gens connaissaient la
prédiction d’Isaïe. Quand Jean-Baptiste fit interroger le
Christ : Es-tu
celui qui doit venir ?, Jésus lui fit répondre
précisément par les mots du prophète Isaïe : Dites
à Jean : les aveugles voient, les boiteux marchent, les
lépreux sont guéris et les sourds entendent… (Mt
11:3-4). Jean-Baptiste et ses disciples devaient comprendre
par là que l’Écriture était en train de s’accomplir.
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Le psaume 145 est le premier
d’une série de cinq psaumes que les Juifs chantaient le
matin. Ils commencent par le verbe louer, ce
qui a donné nos laudes matinales.
En reprenant certains termes
d’Isaïe, le psalmiste chante le Dieu plein de bonté, qui fait
justice, délie les enchaînés, protège l’étranger… Dans
sa bonté et sa miséricorde, Dieu veut aider tous les hommes
à se transformer.
Dieu s’occupe de tous les
hommes, mais aussi de
ceux qu’on oublie ou qu’on méprise parce qu’ils sont
«petits». Et cela nous introduit directement à la lettre de
l’apôtre Jacques.
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À la suite du Christ, nous
avons le devoir de tourner notre regard vers tous les
hommes, vers les justes et aussi vers les pécheurs, vers les
gens aisés mais aussi vers les pauvres.
Aucun de nous ne peut penser
qu’il soit «plus» qu’un autre : devant Dieu, il n’y a aucune considération
de personnes. Souvenons-nous en : le général est comme
un agent de surface, l’avocat est comme un artisan,
professeurs et élèves sont sur le même banc…
Si nous prétendons marcher
selon l’Évangile, si nous avons accepté de changer notre
homme intérieur, nous ne pourrons pas permettre une
situation semblable à celle à laquelle fait allusion
l’apôtre Jacques.
Les situations sociales les
plus difficiles ne sont pas insolvables dès lors que nous y
cherchons une solution en harmonie avec l’appel de Dieu. Le
plus important, souvent, est de mettre la main à la pâte ;
quand l’ouvrage est commencé, les choses s’enchaînent et
Dieu nous aide souvent à trouver des pistes auxquelles nous
n’avions pas songé au préalable.
Jamais Abraham ou Moïse
n’auraient songé à devenir les chefs d’une multitude ;
jamais David avec sa petite fronde de berger, n’aurait songé
à être roi ; Salomon encore moins. Dieu s’est servi de leur
fidélité pour montrer qu’avec Lui, les petits et les faibles
peuvent faire de grandes choses. Comme l’écrira saint Paul : Ce
qu’il y a de fou dans le monde, voilà ce que Dieu a choisi
pour confondre les sages ; ce qu’il y a de faible dans le
monde, voilà ce que Dieu a choisi pour confondre la force ;
ce qui dans le monde est sans naissance et ce que l’on
méprise, voilà ce que Dieu a choisi (1Co
1:27-28).
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Tous ceux qui connaissent un
peu la solitude où se trouvent les malentendants pourront
éprouver une joie intense en lisant le récit de la guérison
du sourd-muet. On reproche souvent aux malentendants de
s’isoler des autres, mais c’est leur infirmité, même légère,
qui les isole contre leur gré.
Jésus emmène donc cet homme à
l’écart, loin de la foule, car la foule est bruyante,
agitée, et ne permet pas le recueillement ; mais Jésus dut
garder près de lui quelque Apôtre, qui observerait les
gestes de Jésus et être plus tard témoin de la scène, sans
doute Pierre, de qui Marc aura appris ces détails que ne
racontent pas les autres évangélistes.
Jésus fait des gestes très
particuliers, qui furent repris pendant longtemps dans la
liturgie du baptême chrétien. De ses doigts, il touche les
oreilles, comme pour faire passer vers le malade un
“courant” mystérieux émanant du Fils de Dieu pour guérir
l’homme malade.
Plus étonnant encore, ce
signe de la salive pour toucher la langue de cet homme :
certainement, le Verbe incarné veut guérir le verbe humain
malade. On pourra rapprocher ce geste de celui que fit Jésus
pour guérir l’aveugle (Jn 9:6) : si le Verbe de Dieu a créé
toutes choses, ce même Verbe incarné vient re-créer les
membres malades de la création pécheresse. Ainsi “touché”
par le Verbe, l’homme peut s’ouvrir à la Vérité : Jésus lui
dit en effet : Effata
! Ouvre-toi
! Ouvre ton cœur à la Bonne Nouvelle ! Crois, et tu seras
sauvé !
On se permettra de noter que
ce geste de la salive n’a rien à voir avec un geste sensuel,
avec un baiser érotique par exemple. Le geste de Jésus est
plein de discrétion, de pureté. L’ancien rite du baptême a
maintenant été supprimé parce qu’il n’était malheureusement
plus compris de notre époque.
Encore une fois, nous lisons
que Jésus recommande la discrétion à l’homme guéri ; on
dirait aujourd’hui qu’Il lui demande d’éviter les
journalistes et le tapage médiatique, car Jésus travaille
dans le fond des cœurs et attend la conversion profonde, pas
le bruit du monde.
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La Prière du jour, utilise
une belle expression : les enfants
d’adoption de
Dieu. C’est vrai : en apportant aux hommes sa Vie divine,
Jésus Christ fait de nous ses frères et donc les fils
d’adoption de Dieu.
Nous sommes des sourds-muets
invités à entendre l’appel de Dieu et à proclamer notre foi
au Christ. Si nous recevons pleinement ce Verbe en nous,
nous serons de ceux dont saint Jean parle : qui
ne sont pas nés du sang ni de la volonté de la chair, ni de
la volonté de l’homme, mais de Dieu (Jn
1:13).
Dépassant l’humain, nous
ferons naître en nous le Christ et dirons avec saint Paul : Ce
n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi (Ga
2:20).
Quelle joie immense que
d’être appelés à la vie divine, que d’être unis à la vie du
Christ ! Être fils de Dieu, comme Jésus, c’est se libérer du
monde, c’est entrer dès maintenant dans l’éternité !
La prière du jour réunit
tous ces mots merveilleux : nous, les enfants
d’adoption, Dieu
nous aime comme
un père ; dans
Son fils, le Christ, Il nous donne la vraie
liberté et
la vie
éternelle.
Quelle joie profonde et
inaltérable ! Efforçons-nous de la communiquer !
Abbé Charles
Marie de Roussy |