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RÉPANDS LA FERVEUR DE TA CHARITÉ
Aujourd'hui nous voyons Jésus vers la région de Tyr et de
Sidon, c'est-à-dire au bord de la mer, comme beaucoup
d'entre nous actuellement, mais certes avec bien d'autres
intentions encore que de simplement passer des heures au
soleil. Oh, notre Seigneur n'avait pas besoin de bronzer,
car il était déjà naturellement très basané ; en plus, son
doux visage avait reçu les marques de ses longs voyages sous
le chaud soleil de ces régions dorées ; et ce visage devait
bientôt recevoir les coups, les crachats, les insultes, les
blessures… tout ce que lui ont infligé nos fautes et nos
trahisons.
Dans le récit évangélique, voici une femme "Cananéenne" qui
court après Jésus. Une Cananéenne ? Pour les Juifs d'alors,
cet adjectif est synonyme d'Etrangère, de Païenne, de
condamnée, et même de vulgaire petite chienne. Il se trouve
que Jésus venait de faire remarquer aux Juifs qui
l'entouraient leur hypocrisie, leur rappelant ce reproche du
prophète Isaïe : "Ce peuple m'honore des lèvres, mais son
cœur est loin de moi" (Is 29:13 ; Mt 15:8).
Il y a ici un net rapport entre ce reproche de Jésus et
l'extrait de la Lettre aux Romains : comme il l'avait déjà
dit dimanche dernier, s. Paul exprime ici plus complètement
son grand désir que tout le Peuple Juif (ce Peuple dont lui,
Paul, est issu), entende l'appel de Jésus, Le reconnaisse
comme le Sauveur attendu, et se convertisse comme se
convertissent tant de païens en entendant s. Paul leur
annoncer la Bonne Nouvelle : comme les Juifs n'ont pas
obtempéré à l'appel de Dieu, les païens les ont maintenant
précédés dans la conversion ; ils pourraient en être jaloux
! mais non, c'est pour qu'ils se sentent encore plus
sollicités à entrer dans la Famille des Baptisés, dans le
sillage du Christ mort et ressuscité, dans l'unique Eglise
gardienne de la Vérité.
Dans le même sens, le prophète Isaïe, au nom de Dieu, promet
le salut "aux étrangers qui se sont attachés au service du
Seigneur pour l'amour de son nom et sont devenus ses
serviteurs".
Le Peuple Juif, le Peuple élu, appelé à apporter la Lumière
aux nations environnantes, s'est finalement auto-exclu de
l'élection ; Jérusalem sera bientôt détruite de fond en
comble, en 70, et le culte du Temple disparaîtra totalement,
tandis que parallèlement l'Eglise s'étendra de plus en plus,
ensemencée par ses innomblables Martyrs.
Revenons alors à cette brave femme "cananéenne" dont la
fille est "tourmentée par un démon". Dans un premier temps,
Jésus feint l'indifférence envers elle, comme le feraient
des Juifs, le dédain même ; ce n'est pas pour donner raison
aux Juifs, mais Il sait que cela va être l'occasion de leur
donner une bonne leçon. En effet, cette femme est si
confiante, si humble aussi, qu'elle ne s'arrête pas aux
rebuffades de Jésus, pourvu qu'elle obtienne la guérison de
sa fille. Au contraire, plus Jésus lui montre de sévérité,
plus elle prend confiance : même si elle est une "petite
chienne", elle a droit aux miettes qui tombent de la table !
Oh, cette foi !
Dans notre prière, souvenons-nous de la foi de cette
"païenne" ; elle n'a pas honoré Jésus "du bout des lèvres".
Et aussi, sans le nier, acceptons humblement que nous sommes
pécheurs ; n'hésitons pas à parler à Dieu malgré nos péchés
; au contraire, montrons-Lui davantage de Foi encore. Et
s'Il semble rester silencieux, continuons de mettre en
pratique ses Commandements, dans l'esprit des Béatitudes,
pour nous accorder davantage à la Sagesse de Dieu.
Le psaume 66 se comprend très facilement, c'est une belle
prière d'adoration, qui implore la bénédiction de Dieu et
souhaite la conversion de la terre tout entière. Ce que Dieu
attend de nous, ce ne sont pas des rites extérieurs
"magiques", mais un véritable amour. Relisons la Prière du
jour :
"Répands la ferveur de ta charité, afin que t'aimant
par-dessus tout, nous obtenions l'héritage promis".
Abbé Charles Marie de Roussy |