SYNODE DES ÉVÊQUES

INTERVENTIONS

XII ASSEMBLÉE GÉNÉRALE ORDINAIRE
DU SYNODE DES ÉVÊQUES
5-26 OCTOBRE 2008

La Parole de Dieu dans la vie et dans la mission de l'Église
 

20 - 14.10.2008

À cette Quatorzième Congrégation générale sont intervenus les Pères suivants:

- S.Em.le Card. Tarcisio BERTONE, S.D.B., Secrétaire d'État (CITÉ DU VATICAN)
- S.B.Em. Card. Emmanuel III DELLY, Patriarche de Babylone des Chaldéens, Chef du Synode de l'Église Chaldéenne (IRAQ)
- S.Exc. Mgr Marian GOŁĘBIEWSKI, Archevêque de Wrocław (POLOGNE)
- S.Exc. Mgr Petro Herkulan MALCHUK, O.F.M., Évêque titulaire de Media, Évêque auxiliaire de Odessa-Simferopol (UKRAINE)
- S.Exc. Mgr Ruy RENDÓN LEAL, Évêque Prélat d' El Salto (MÉXIQUE)
- S.Exc. Mgr Angelo AMATO, S.D.B., Archevêque titulaire de Sila, Préfet de la Congrégation pour la Cause des Saints (CITÉ DU VATICAN)
- S.Exc. Mgr Marin BARIŠIĆ, Archevêque de Split-Makarska (CROATIE)
- S.Exc. Mgr Javier ECHEVARRÍA RODRÍGUEZ, Évêque titulaire de Cilibia, Prélat de la Prélature personelle de la Sainte Croix et de l'Opus Dei
- S.Exc. Mgr Kurt KOCH, Évêque de Bâle (SUISSE)
- S.Exc. Mgr Joseph NGUYÊN CHI LINH, Évêque de Thanh Hóa (VIÊTNAM)
- S.Exc. Mgr Juan MATOGO OYANA, C.M.F., Évêque de Bata (GUINÉE ÉQUATORIALE)

Nous publions, ci-dessous, le résumé de leurs interventions:

- S. Em.le Card. Tarcisio BERTONE, S.D.B., Secrétaire d'État (CITÉ DU VATICAN)

“Chers jeunes, je vous exhorte à devenir des familiers de la Bible, à la garder à portée de la main, pour qu'elle soit pour vous comme une boussole qui indique la route à suivre”. Telle est la conclusion pratique du Message de Benoît XVI aux jeunes du Monde entier à l’occasion de la Journée Mondiale de la Jeunesse de 2006. Cette consigne confirme celle donnée à la JMJ de Cologne 2005 et est ultérieurement développée dans une autre des interventions du Saint-Père sur la Place Saint-Pierre le 6 avril 2006, en réponse à une question directe posée par un jeune sur le sens de la Bible dans la vie d’un jeune croyant.
C’est un triptyque qui manifeste une conviction précise du Pape: dans le Livre Sacré dûment rencontré, la foi juvénile trouve une orientation indispensable (la boussole), en faisant par ailleurs attention à ce que la rencontre avec la Bible devienne une rencontre avec le Christ.
Un fossé à dépasser
Prise à part, la Bible ne parvient pas à susciter, aux yeux d’un jeune, d’autant plus si adolescent, une attraction et une affection particulière. On enregistre, en effet, une indifférence substantielle envers une foi qui est communiquée par le biais des Écritures Saintes, ce qui n’est pas le cas pour une foi transmise au contraire par le témoignage d’une personne croyante, et cette indifférence s’accompagne d’un fort taux d’ignorance et surtout d’une difficulté à en percevoir la valeur vitale. Parmi ceux qui n’entrent pratiquement jamais en contact avec la Bible (et ils représentent 80% des Italiens), le nombre le plus élevé est constitué par la tranche d’âge des adolescents, entre 14 et 19 ans. 13% seulement considère que “quelqu’un qui croit en Dieu doit lire et méditer la Bible ou d’autres textes sacrés”, plaçant cette lecture à la 11e place – sur un total de 16 – ; 7% réalise “la prière en lisant, méditant la Bible ou d’autres textes religieux” (cf. AA.VV. La religiosità in Italia, Mondadori, Milano 1995).
Toutefois, on remarque chez nombre de ces jeunes une surprenante disponibilité envers la Bible, et ce, non pas tant lorsque la syntonie est atteinte, au moins au début, par l’autorité d’une page biblique dite Parole de Dieu, mais plutôt lorsqu’elle l’est par l’intermédiaire d’adultes qui les approchent comme des éducateurs patients et des témoins crédibles du personnage le plus grand, à savoir la figure de Jésus ; des personnes qui, en somme, lorsqu’elles parlent de la Parole de Dieu, la montrent avant tout dans leur vie. Si l’adulte, en tant qu’éducateur-ami, parvient à se faire ouvrir la porte du coeur du jeune, alors l’Écriture se propose comme un don qui porte en soi toutes les qualités de la Parole de Dieu selon la codification biblique, avec une caractérisation toute particulière pour l’âme juvénile. Ainsi le jeune grandira et appréciera la place centrale que les jeunes ont dans la Bible et, en particulier, dans les Évangiles ; il mettra Jésus dans son “journal de l’âme” (nous en avons de nombreux exemples dans les journaux intimes des jeunes); il appréciera également toutes les images sportives présentes dans la Bible ayant des applications originales dans la vie vertueuse (Ex. Michel Quoist).
Conclusion.
De la longue intervention susmentionnée de Benoît XVI sur la Place Saint-Pierre, qui étonna un peu tout le monde par sa clarté et sa charge de conviction, nous retenons une pédagogie de l’approche que le Saint-Père lui-même a ainsi synthétisé: “Je pense que nous devons apprendre ces trois éléments: lire dans un dialogue personnel avec le Seigneur; lire accompagnés par des maîtres qui ont l’expérience de la foi, qui sont entrés dans l’Écriture Sainte; lire au sein de la grande communauté de l’Église, dans la Liturgie de laquelle ces événements deviennent toujours à nouveau présents, dans laquelle le Seigneur parle à présent avec nous, afin que nous entrions toujours plus dans l’Écriture Sainte, dans laquelle Dieu parle réellement avec nous aujourd’hui”.

S. B. Em. Card. Emmanuel III DELLY, Patriarche de Babylone des Chaldéens, Chef du Synode de l'Église Chaldéenne (IRAQ)

Je suis un fils de la terre d’Abraham, l’Iraq. Je suis sûr que la plus grande partie de cette assemblée bénie désire avoir quelques informations sur la situation de l’Iraq, de ce pays torturé et ensanglanté.
Ma parole ne sera pas une lecture politique, mais un bref retour en arrière d’un père qui, depuis un demi siècle, vit avec ses fils spirituels, et qui voit souffrir et mourir ses citoyens. Qui ressent le devoir sacré de défendre les droits de l’Église et de ses fidèles, et la tâche d’avertir les responsables de suivre les voies justes de la paix et de la sécurité. Disons la vérité: on a tout essayé pour obtenir la paix et la tranquillité pour le pays.
La situation dans certaines parties de l’Iraq est désastreuse et tragique. La vie est un calvaire: la paix et la sécurité manquent, tout comme les éléments basilaires viennent à manquer dans la vie de tous les jours. L’électricité, l’eau et l’essence continuent à manquer, la communication téléphonique est toujours plus difficile, des routes entières sont bloquées, les écoles fermées et toujours en danger, les hôpitaux fonctionnent avec un effectif réduit, les personnes craignent pour leur propre sécurité. Tout le monde redoute les enlèvements, les séquestrations et les intimidations. Que dire, ensuite, de tous ces enlèvements injustifiables qui se succèdent chaque jour, causant des dommages à des familles entières et les privant souvent de leurs êtres chers, bien qu’ayant déboursé des dizaines de milliers de dollars pour une libération qui n’a jamais eu lieu. Sans parler du nombre toujours croissant de morts causés par les voitures piégées et par les kamikazes qui endossent des ceintures explosives.
Vivre la parole de Dieu signifie, pour nous, la témoigner aussi au prix de notre vie, comme cela est arrivé, et arrive, jusqu’à présent avec le sacrifice des évêques, des prêtres et des fidèles. Ils continueront à être en Iraq, forts dans la foi et l’amour du Christ grâce au feu de la parole de Dieu. Pour cela, je vous supplie de prier pour nous et avec nous le Seigneur Jésus, Verbe de Dieu, et de partager notre préoccupation, nos espérances et la douleur de nos blessures, afin que la Parole de Dieu faite chair demeure dans son Église, et ensemble avec nous, comme bonne nouvelle et comme soutien. 16 de nos prêtres et deux évêques ont été enlevés et relâchés après une très forte rançon. Certains d’entre eux appartiennent à la foule des nouveaux martyrs qui, du Ciel, prient aujourd’hui pour nous: l’archevêque de Mosul, Faraj Rahho, père Raghid Ganni, deux autres prêtres et six autres jeunes.

- S. Exc. Mgr Marian GOŁĘBIEWSKI, Archevêque de Wrocław (POLOGNE)

Depuis quelques décennies, la méthode historico-critique reste une approche à la Bible dominante dans l’exégèse. Cette méthode a été positivement très fructueuse pour l’étude de la Bible. Cependant, l’on sait aujourd’hui qu’elle est insuffisante. C’est pourquoi, au cours de ces dernières années, d’autres méthodes de recherche sur le texte inspiré se sont développées. Parmi celles-ci, les méthodes linguistiques – la narrative et la structurelle – ainsi que la lecture de la Bible dans l’esprit de la psychologie la plus profonde, deviennent plus importantes. La demande de traiter toutes les méthodes comme complémentaires, et ne pas en traiter quelqu’une comme dominante, semble juste. Ainsi, les résultats de la recherche exégétique révèlent aux yeux du lecteur le sens pluridimensionnel du fragment analysé. Ils permettront de découvrir un grand nombre de significations et ne se limiteront pas à une seulement. Il en résulte, cependant, que la tâche de l’exégète ne finit pas avec la découverte du sens pluridimensionnel du fragment analysé (littéral, historique, symbolique, allégorique ou spirituel). Il reste une demande très pratique: comment relier avec la vie de chaque fidèle et d’entières communautés ecclésiales ce texte dont la signification a désormais été découverte? Comment passer du texte à la vie, et de la vie au texte? Le lecteur contemporain de la Bible requiert, de la part des exégètes et des théologiens, qu’ils sachent tirer des principes et des critères de l’Écriture, ces derniers devant être normatifs dans chacun des domaines de la vie personnelle et communautaire. À ce propos, les plus importants concerneraient les principes et les critères d’ordre général; de ceux-ci, il faudrait en tirer les principes plus détaillés, capables de répondre aux questions morales posées par les bioéthiciens, les écologistes, les médecins, les psychologues, les sociologues et également les politiciens. Le mouvement en direction inverse est également important: de la vie à la Bible. La demande devient toujours plus évidente pour que non seulement l’homme croyant lise la Bible, mais aussi pour que la Bible devienne le facteur interprétatif de sa vie, c’est-à-dire que la Bible “lise” la personne humaine. L’homme croyant non seulement devrait savoir tirer de la lecture de la Sainte Écriture les principes de son agir, mais il devrait savoir aussi se regarder dans la Bible comme dans un miroir.

S. Exc. Mgr Petro Herkulan MALCHUK, O.F.M., Évêque titulaire de Media, Évêque auxiliaire de Odessa-Simferopol (UKRAINE)

Dans mon intervention, je me référerai au point n° 21 dans lequel il est dit qu’à la lumière du Concile Vatican II et du Magistère successif, il faut prêter une nécessaire attention et une réflexion spécifique aux sens bibliques, c’est-à-dire aux sens historico-littéral et théologico-spirituel.
Une réalité dans laquelle se trouvent les destinataires de la Parole nous montre que les uns découvrent le sens historico-littéral et s’y arrêtent, les autres, en revanche, parviennent à découvrir le sens théologico-spirituel. Le point central de mon intervention est donc le sens théologico-spirituel.
Déjà saint Jérôme a déclaré et Vatican II a répété : “Les divines écritures doivent être lues et interprétées avec l’aide du même Esprit Saint par l’intermédiaire duquel elles furent écrites”.
Même si cela semble ridicule, il arrive parfois que les personnes appelées au service de la Parole puissent lui faire obstacle. Le Rosaire tous les jours avant la Messe? Non! Il y a le mois d’octobre. C’est à ce moment-là qu’on prie le rosaire. Qui donc a vu prier le Chemin de Croix tous les jours de Carême? Le vendredi suffit. Se confesser chaque mois? Non, une fois par an suffit! Ainsi viennent à manquer la Parole priée et la Parole qui vivifie, c’est-à-dire le sacrement de la Confession.
Voici combien se révèle actuelle l’admonition de saint François à ses frères: “La lettre tue, mais l’esprit fait vivre. La lettre tue ceux dont la curiosité s’arrête aux mots du texte; ce qu’ils veulent, c’est paraître plus savants que les autres. L’esprit de la sainte Écriture fait vivre ceux qui n’attribuent pas à leur valeur personnelle la science qu’ils possèdent ou désirent posséder, mais qui, par la parole et par l’exemple, en font hommage au Très haut Seigneur Dieu à qui appartient tout bien”.
Ma proposition vise donc à prêter une plus grande attention non seulement aux documents officiels de l’Église, mais surtout à donner au sacrement de la Réconciliation la place qui lui revient dans la pastorale. En faire usage et le mettre au service spécialement dans les séminaires et dans l’activité pastorale. L’analyse met en évidence le fait que dans les communautés, et spécialement dans les paroisses dans lesquelles la Confession manque, la fréquence diminue et la spiritualité devient moins profonde.

- S. Exc. Mgr Ruy RENDÓN LEAL, Évêque Prélat d' El Salto (MÉXIQUE)

La Parole de Dieu, nous la trouvons, en premier lieu, dans la Sainte Écriture, lorsqu’elle est accueillie et présentée dans la prière. Dieu nous parle aussi à travers les oeuvres créées, ainsi qu’à travers la Liturgie, surtout la Célébration eucharistique. D’autres présences de cette Parole salvifique, nous les trouvons dans les événements, dans le Magistère de l’Église et dans notre prochain, surtout dans le plus pauvre, dans celui qui souffre.
1. Trouver et écouter la Parole. L’Église doit favoriser, dans sa Pastorale, la lecture et la connaissance de la Bible. Nous tous, les baptisés, nous devons nous engager à susciter, en nous et dans les autres, une rencontre profonde avec Jésus Christ, Parole éternelle du Père, afin de réaliser une forte expérience de Dieu et une conversion authentique. Cette rencontre avec la Parole exige une écoute attentive, avec le coeur.
2. Prier et célébrer la Parole. À travers différentes méthodes, en particulier la Lectio divina, la Parole, présentée dans la prière, se transforme pour nous en source d’eau vive. De même, dans la Liturgie de la Parole, bien préparée et bien célébrée, de chacune des Célébrations sacramentelles, la Parole proclamée est, avec sa force salvifique, capable de transformer la vie des croyants.
3. Vivre et transmettre la Parole. La société contemporaine exige, de la part des chrétiens, un témoignage de ce que nous sommes et de ce que nous faisons. Il ne suffit pas de nous appeler chrétiens catholiques, bien plus, il ne suffit pas de prier et de participer aux Sacrements. Le témoignage d’unité et de vie cohérente avec l’Évangile devraient être le signe distinctif de tous les baptisés. L’engagement à partager notre expérience de foi, nous conduira, sans aucun doute, à transmettre aux autres, avec nos paroles, nos oeuvres et nos attitudes, la Parole de Dieu.

S. Exc. Mgr Angelo AMATO, S.D.B., Archevêque titulaire de Sila, Préfet de la Congrégation pour la Cause des Saints (CITÉ DU VATICAN)

Jésus dit: “je suis doux et humble de cœur, et vous trouverez soulagement pour vos âmes” (Mt 11, 29). Pendant deux millénaires, des hommes et des femmes, grands et petits, savants et innocents, en Orient comme en Occident, se sont mis à l’école du Seigneur Jésus, qui a fait résonner dans leur esprit et dans leur coeur un commandement sublime : “soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait” (Mt 5, 48). Le but à atteindre n’est pas une perfection à mesure d’homme, mais la hauteur de la perfection divine. Avec simplicité et humilité, même des jeunes – comme Saint Domenico Savio, quatorze ans, ou comme Laura Vicuña, treize ans – ont pris au sérieux l’invitation du Seigneur et se sont faits saints.
Leur bibliothèque était composée essentiellement par la vie et par la Parole de Jésus : heureux les pauvres, heureux les affligés, heureux les doux, heureux les affamés et assoiffés de la justice, heureux les miséricordieux, heureux les coeurs purs, heureux les artisans de paix, heureux les persécutés. Les saints, comprenant que les béatitudes sont l’essence de l’Évangile et le portrait même de Jésus, l’ont imité.
Quatre nouveaux saints ont été canonisés hier appartenant à trois continents différents. Parmi eux, une jeune religieuse, Soeur Alfonsa Muttathypadathu, la première sainte indienne, une figure noble de femme joyeuse et forte. Même la perfection de sa sainteté a été mesurée à la Parole de Jésus: “Si quelqu’un veut venir à ma suite, qu’il se renie lui-même, qu’il se charge de sa croix, et qu’il me suive” (Mc 8, 34). Soeur Alfonsa a accepté ses infirmités physiques et ses tourments moraux – comme l’incompréhension et le mépris – en vivant sine glossa sa via crucis personnelle à la suite du Seigneur Jésus. Au terme de sa brève existence, Soeur Alfonsa pouvait répéter avec saint Paul : “En ce moment je trouve ma joie dans les souffrances que j’endure pour vous, et je complète en ma chair ce qui manque aux épreuves du Christ pour son Corps, qui est l’Église” (Col 1, 24). Comme hier, les fidèles qui, quotidiennement, font des paroles de Jésus chair et sang, sont encore aujourd’hui innombrables. Et ils se sanctifient.

- S. Exc. Mgr Marin BARIŠIĆ, Archevêque de Split-Makarska (CROATIE)

Dans l’Église qui est en Croatie, depuis le IXe siècle, c’est la langue populaire qui est utilisée dans la liturgie. La rencontre entre la Parole de Dieu et la langue populaire se reflète dans la parole croate “pošteno” – qui signifie honnête, humain, sincère et juste – et provient étymologiquement de “po-štenju” qui signifie “selon-la-lecture”. La norme de la vie humaine provenait justement de la lecture et de l’écoute attentive de la Parole de Dieu (Document de travail, n°27).
Ce style de vie humaine et chrétienne provient de la Parole de Dieu, dont l’identité se reflète et s’exprime dans l’Église à l’écoute, l’Église en prière et l’Église en service.
– À la Parole de Dieu correspond et répond l’Église à l’écoute, qui est capable d’entendre les problèmes spécifiques de notre époque (cf. GS 1), comme d’adresser la parole adéquate et nécessaire au monde et à la culture d’aujourd’hui (cf. GS 40-45).
– La puissance créatrice et rénovatrice de la Parole doit être découverte de manière particulière dans la célébration liturgique. Partant de cette source, la Parole se diffuse dans la quotidienneté de la vie.
– Ce que l’Église écoute et célèbre se traduit dans sa mission évangélisatrice. La plénitude de la joie qui vient de l’écoute obéissante et de la célébration de la Parole de Dieu ne peut pas nous rendre muets, mais nous transforme en protagonistes confiants dans la crédibilité de l’Évangile, pour vivre “pošteno” – selon la lecture.

S. Exc. Mgr Javier ECHEVARRÍA RODRÍGUEZ, Évêque titulaire de Cilibia, Prélat de la Prélature personnelle de la Sainte Croix et de l'Opus Dei

Dans la vie des saints, la rencontre avec la Parole de Dieu à travers la lecture de la Sainte Écriture a produit un changement radical dans l’existence. Nous tous, mais aussi nos prêtres et nos laïcs, devons chercher à avoir une soif profonde de Jésus Christ, et vivre chaque scène de l’Évangile comme si nous étions un personnage parmi d’autres. À son interlocuteur croyant, la Bible demande une réponse précise: la réponse de la prière. Dans le sacrement de la Confession, nous devrions, nous les pasteurs, recommander souvent aux fidèles la lecture de l’Évangile, leur enseigner à participer – étant donné que c’est dans la lecture que l’Évangile nous est raconté – et inviter les pénitents à offrir, eux aussi, ce même conseil à leurs collègues, aux membres de leurs familles et à leurs amis. Il ne suffit pas de méditer des idées ou des scènes qui puissent susciter notre admiration pour la vérité, la bonté ou la beauté qu’elles reflètent ; il faut plutôt que nous tous, les chrétiens, en tant que saints, nous essayions de porter ces textes dans notre vie personnelle de tous les jours pour la transformer. Les femmes et les hommes ont de plus en plus besoin, non pas de simples paroles éphémères et vaines, mais de la Parole de Dieu, la seule capable de donner une signification authentique à la vie. Il faudrait promouvoir des initiatives qui diffuseraient parmi les fidèles cette attitude de prière et de recueillement intérieur face à l’Évangile, pour faire en sorte qu’elle ait une retombée véritable dans notre vie quotidienne. Je pense, par ailleurs, qu’il faudrait soigner la lecture bien faite, c’est-à-dire véritablement vécue, des textes de la Messe, non pas en les déclamant, mais avec la certitude que c’est Dieu qui parle aux fidèles et à la communauté.

- S. Exc. Mgr Kurt KOCH, Évêque de Bâle (SUISSE)

“L'Église a toujours témoigné son respect à l’égard des Écritures, tout comme à l’égard du Corps du Seigneur lui-même” (DV21). En général, cette orientation n’a été encore que trop peu reçue par la conscience religieuse, comme il en ressort surtout de quatre points centraux actuels.
1. En Suisse et en Europe, en général, une grande partie des membres de l’Église ont, de fait, le statut de catéchumènes baptisés, à qui non seulement le langage de la foi de l’Église est étranger, mais aussi le monde biblique. Aussi, aujourd’hui, non seulement de nouvelles voies pour accéder à la Parole de Dieu ne suffisent pas, mais c’est la pastorale tout entière qui doit être, d’une manière plus décisive, une pastorale de l’évangélisation car elle ne peut pas continuer à être seulement une pastorale de la “sacramentalisation”.
2. On ne peut parler de la Sainte Écriture que si l’on parle aussi de l’Église comme son propre sujet. Ici, l’on touche au point central du problème oecuménique. Dans ce domaine, ce n’est qu’en superficie que la discussion concerne les institutions ecclésiastiques, telles que le magistère et le ministère lui-même. La question controverse est celle du rapport entre la Parole de Dieu et les témoins officiellement chargés de cette Parole.
3. Non seulement dans la conscience générale de la foi, mais aussi dans les réflexions, on perçoit de plus en plus des tendances marcionistes, du fait que l’unité de l’Ancien et du Nouveau Testament semble s’être fragilisée. Le christianisme pourrait, cependant, apprendre beaucoup du judaïsme, comme par exemple une approche moins forcée à l’Écriture et à la tradition, car, pour les juifs, la Bible juive n’est pas seulement un livre imprimé, mais bien une réalité vivante.
4. Dans le dialogue interreligieux, on parle aujourd’hui très ouvertement des Saintes Écritures des hommes. On oublie, de cette façon, que le christianisme n’est pas, avant tout, une religion du Livre, comme le judaïsme et l’islam. En effet, la Parole de Dieu est une Personne, le Fils de Dieu fait chair, et précède donc la Sainte Écriture. Sans un rapport intime d’amitié avec cette Personne, même la lettre de la Sainte Écriture reste muette. La représentation de la Parole de Dieu, dans la vie de l’Église, se fonde donc, et se manifeste, avec le renouvellement de la foi dans le Christ aujourd’hui.

- S. Exc. Mgr Joseph NGUYÊN CHI LINH, Évêque de Thanh Hóa (VIÊTNAM)

Vendredi dernier, mon cher confrère vietnamien, son excellence Joseph Vo duc Minh, vous a présenté sommairement l’histoire de l’évangélisation de notre peuple. Je me permets de continuer son rapport en me référant au numéro 28 de l’Instrumentum Laboris parlant du rôle de soutien de la Parole de Dieu dans l’histoire de l’Église, afin de vous illustrer comment ce rôle s’est réalisé dans la vie de l’Église au Vietnam.
L’Évangile a été pour la première fois proclamé sur notre terre au début du 16e siècle dans le contexte douloureux d’une guerre interne entre deux royaumes de frères ennemis. Merveilleusement grâce à cette coïncidence, elle est devenue une grande consolation pour les premiers baptisés et depuis, ne cesse jamais d’être le soutien moral et spirituel, le principe d’enrichissement pour l’Église au Vietnam, une des Églises les plus éprouvées par des persécutions sanglantes et consécutives. Embarqués dans une telle histoire tissée de haine, de guerres idéologiques et de restrictions discriminatoires, nos chrétiens sont de plus en plus convaincus que seule la Parole de Dieu peut les garder dans l’amour, la joie, la paix, la communion et la tolérance.
Il m’est douloureux de vous dire que le Vietnam, jusqu’ici, occupe le premier rang des avortements. Cette catastrophe pourtant, paradoxalement, a suscité le mouvement “pro vita” chez les catholiques, consistant surtout à aller chercher des bébés avortés dans les hôpitaux, les baptiser s’il y a encore un petit signe de vie, de créer des cimetières pour les enterrer. Au début, cet acte a été accusé par les autorités civiles et les responsables hospitaliers comme des crimes demandant que les catholiques devaient agir clandestinement. Maintenant, on n’autorise pas encore, mais on le tolère. Quelques cinéastes en font même des films documentaires et des reporters en font éloge sur les médias. Pourquoi ce progrès ? Réponse : on reconnaît mieux le témoignage des chrétiens, ceux qui vivent de la Parole et sous la lumière de cette Parole, on respecte la vie. Je voudrais répéter cette conviction dont parle Gaudium et Spes, au numéro 44 “l’Église reconnaît que, de l’opposition même de ses adversaires et de ses persécuteurs, elle a tiré de grands avantages et qu’elle peut continuer à le faire”.
Un autre signe mérite d’être mentionné pour montrer que la Parole de Dieu continue à soutenir l’Église au Vietnam. Il s’agit de la conversion en masse des milliers de personnes des minorités ethniques peu de temps après la canonisation des 117 Martyrs du Vietnam en 1988. Ce qui est curieux c’est que plusieurs ont avoué qu’ils ont écouté la Radio Protestante à Manille, aux Philippines, mais se convertissent au catholicisme au Vietnam. Ainsi, les Protestants sèment et les catholiques moissonnent. La Parole de Dieu résonnant de très loin, en atteignant leurs oreilles, est devenu source de l’espérance pour ces gens perdus dans les montagnes, privés de tout et sans avenir.
En conclusion, je voudrais, en tant que chrétien vietnamien, répéter cette conviction que dans les persécutions, notre plus grande grâce est la fidélité à la Parole de Dieu.

- S. Exc. Mgr Juan MATOGO OYANA, C.M.F., Évêque de Bata (GUINÉE ÉQUATORIALE)

Géographiquement, la Guinée Équatoriale occupe une position privilégiée qui, déjà au XVe siècle, facilita l’arrivée de quelques missionnaires. Seulement quatre siècles plus tard, les évangélisateurs purent s’établir d’une manière stable dans le pays, dont les petites dimensions leur permirent d’apporter facilement la Parole à tous ses habitants.
Une fois passée la période de la première évangélisation, nous avons, comme les autres populations, affronté le défi d’approfondir la Bonne Nouvelle que nous avions reçue. Et plus concrètement: comment faire pour que la lumière de l’Évangile éclaire nos racines culturelles, notre tradition, pour parvenir à l’“homme nouveau” auquel le Christ nous appelle. Et comment faire pour sortir, avec tous nos frères, de la pauvreté et aller vers de meilleures conditions de vie, sans pessimismes fatalistes ni matérialismes égoïstes, et vivre avec la dignité des fils de Dieu. Dans ce double engagement, les voix et les réalités ne manquent pas qui, s’érigeant comme guides, offrent divers attraits, avec la prétention d’être la solution appropriée à chaque moment. Mais leurs propositions se succèdent les unes après les autres, car aussitôt elles se révèlent aussi incomplètes qu’éphémères.
La Parole autorisée. Être chrétien en fonction de ses racines et de ses traditions culturelles, requiert de les éclairer avec l’Évangile. Et cela est possible seulement lorsque l’on suit d’une manière décisive les pas de celui qui enseigna à évaluer d’une manière adéquate ces deux réalités. C’est pourquoi, il est affirmé, d’un côté: “N’allez pas croire que je sois venu abolir la Loi ou les Prophètes...” (Mt 5,17), et de l’autre, “Vous avez entendu qu’il a été dit..., Eh bien ! moi je vous dis...” (Mt 5,21 ss).
De la même manière, sortir de la pauvreté, en solidarité avec nos frères, en nous éloignant tant du pessimisme fataliste que du matérialisme égoïste, suppose un fondement consistant en Celui qui enseigna: “Car où est votre trésor, là aussi sera votre cœur” (Lc 12,34).
La tâche permanente des évangélisateurs. Nous devons, donc, imiter le Semeur qui sème avec abondance les grains de la Parole (cf. Mt 13,1 ss). De plus, nous devrions faire nôtre la requête du vigneron qui demande de nouvelles opportunités et qui s’offre pour développer de nouvelles stratégies, pour favoriser plus intensément la croissance de la graine semée et, par conséquent, pour pouvoir attendre avec une foi active le fruit correspondant (cf. Lc 13,8-9).

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