Remarques préliminaires
concernant Anne-Catherine Emmerich
Anne-Catherine Emmerich naquit en
Westphalie le 8 septembre 1774. Elle fut favorisée dès son plus jeune âge
de
visions extraordinaires, et ce furent Jésus lui-même, la Sainte Vierge, son ange
gardien ou les saints qui l’instruisirent et la formèrent. Selon Clément
Brentano qui recueillit les paroles d’Anne-Catherine et rédigea les textes que
l’on possède, les tableaux des évènements racontés se réfléchissaient dans
l’esprit de la voyante, comme une image dans un miroir.
Il faut ajouter que certaines de
ses visions ne sont que des symboles destinés à éclairer le sens profond des
faits rapportés. C’est la raison pour laquelle, selon l’explication donnée par
Anne-Catherine, divers récits des mêmes scènes peuvent varier, voire se
contredire suivant les circonstances. “Le privilège d’Anne-Catherine a été de
savoir distinguer l’histoire, du symbole, -car elle voyait toujours les tableaux
symboliques planer entre le ciel et la terre et n’affecter nullement les acteurs
de la scène historique qui se déroulait sur le sol même de l’Orient-, avec les
mille détails de la vivante réalité.”
[1]
La publication des visions
d’Anne-Catherine Emmerich, coordonnées en un seul tout, selon l’ordre des faits,
par le Frère Joseph-Alvare DULEY, de l’Ordre des Frères Prêcheurs, a été
approuvée le 2 février 1864, par les Frères Prêcheurs Jacques-Marie-Louis
MONTSABRÉ et Thomas BOURARD.
On peut porter le jugement que l’on
veut sur les visions des mystiques. Il est cependant impossible de ne pas
remarquer les accents de vérité qui imprègnent les récits d‘Anne-Catherine
Emmerich. Il est également extrêmement instructif de contempler la délicatesse
et la charité des membres de la Sainte Famille, envers Dieu, Premier servi, et
envers toutes les personnes de leur entourage.
Selon Anne-Catherine Emmerich,
Marie, Joseph et l’Enfant Jésus qui constituent la Sainte Famille, sont des
gens ordinaires, des gens simples, des gens de tous les jours, qui vivent comme
tout le monde, au milieu du monde, mais ce sont des gens qui aiment et dont
l’amour qu’ils vouent à Dieu et aux autres transforme et illumine la vie. Si on
ne retirait que ce seul enseignement de la fréquentation de la Sainte Famille à
travers Anne-Catherine Emmerich, ce travail n’aurait pas été inutile.
Selon Anne-Catherine Emmerich,
Saint Joseph aurait appartenu à l’organisation des Esséniens. Aussi est-il
intéressant de donner un certain nombre de détails sur le mode de vie de ces
juifs particulièrement pieux.
Cent cinquante ans avant la
découverte des Manuscrits de la Mer Morte qui donnent des renseignements
importants sur les Esséniens, Anne-Catherine Emmerich décrit leur organisation
et leur mode de vie. Ils vivaient selon une règle très stricte et leurs
communautés s’étaient concentrées autour du Mont Horeb et du Mont Carmel où
avait vécu le prophète Éli. “Leurs constitutions se rapprochaient beaucoup de
celles d’un ordre religieux. Les aspirants devaient subir une épreuve d’un an,
après quoi ils étaient admis pour un temps plus ou moins long, selon les
aspirations prophétiques que recevaient les chefs.
Les membres de l’ordre vivaient
en commun et gardaient une continence absolue. Les personnes simplement
affiliées ou déjà sorties de leurs maisons, se mariaient et suivaient dans leurs
familles, eux, leurs enfants et leurs domestiques, une règle qui différait peu
des Esséniens cénobites. Les rapports entre ces derniers et les autres étaient
les mêmes que ceux qui existent aujourd’hui entre les laïcs du tiers-Ordre et
les Ordres religieux chrétiens. Ainsi, les Esséniens mariés, dans toutes les
affaires importantes, surtout lors du mariage de leurs proches, demandaient des
instructions et des conseils au chef de tout l’ordre, le prophète du Mont Horeb.
Les Esséniens proprement dits prophétisaient, et leur chef du Mont Horeb
recevait souvent des révélations divines concernant la venue du Messie...”
[2]
“Les aïeux de Sainte Anne
appartenaient à la branche des Esséniens mariés... A partir de David, la souche
du Messie se divisait en deux branches. La première commençait à Salomon et
finissait à Jacob, père de Saint Joseph, époux de Marie. La deuxième branche
allait de Nathan fils de David à Héli qui est le véritable nom de Joachim, père
de la Sainte Vierge. Trois ou quatre générations avant Joachim, les deux lignes
se croisaient et aboutissaient l’une et l’autre à la Sainte Vierge dont la mère,
Sainte Anne, descendait par son père de la tribu de Lévi et de celle de Benjamin
par sa mère.”
[3]
La grand’mère de Sainte Anne dont
la famille faisait partie du groupe des Esséniens mariés, épousa un Essénien. Le
père de Joachim, Matthat, était le second frère de Jacob, père de Saint Joseph.
“Joachim était parent de Joseph, et voici comment: le grand-père de Saint
Joseph, Mathan, descendait de David par Salomon. Il avait eu deux fils, Joses et
Jacob, père de Joseph. Lorsqu’il mourut, sa veuve fit un second mariage avec
Lévi, autre descendant de David par Nathan. Elle eut de lui Mathat, père d’Héli,
appelé aussi Joachim.”
[4]
Selon A.C. Emmerich, Joseph, fils
de Jacob était le troisième de six frères. Il était doux, simple, pieux, et bien
que d’une intelligence vive il semblait sans ambition. Son caractère avait
quelque chose de fort grave, et il avait un goût marqué pour la solitude: il
n’aimait que la prière et le travail des mains. Incompris dans sa famille, il
s’enfuit une nuit et fit son apprentissage de charpentier à Libonah.
Joseph “demandait à Dieu, de
toute l’ardeur de son âme, de hâter l’avènement du Messie. “ Un jour, tandis
qu’il priait, un ange lui demanda de cesser son travail, “car, comme le
patriarche Joseph avait eu autrefois entre les mains, par la volonté de Dieu,
tous les grains de l’Égypte, ainsi le grenier du salut allait bientôt être
confié à sa garde.” Joseph ne comprit pas ces paroles...
“Bientôt, mandé par le
grand-prêtre, Joseph se rendit à Jérusalem et vint se présenter au Temple...
Destiné par Dieu à devenir l’époux de la Sainte Vierge, il lui fut présenté...
Marie se soumit avec humilité et accepta celui qu’on lui donnait, sachant bien
que tout était possible à Dieu...”
[5]
Curieusement, pour Anne-Catherine,
Sainte Anne vivait toujours au moment du mariage de Marie et de Joseph. Aussi
est-ce tout naturellement, les deux époux Marie et Joseph vivant à Nazareth, que
Marie se retira chez sa mère lors d’un voyage de Saint Joseph. Et c’est dans la
chambre de Marie, chez sa mère, qu’eut lieu l’Annonciation.
Quelques jours après, les deux
époux se rendirent à Jutta, près de Jérusalem, chez Zacharie et Élisabeth.
“Joseph et Zacharie parlaient ensemble de l’accomplissement des promesses et de
l’approche du Messie... une sympathie surnaturelle établissait une entente
mystérieuse et profonde entre les âmes de Marie et d’Élisabeth... Joseph demeura
huit jours à Jutta avant de rentrer à Nazareth. Il ignorait l’état de grossesse
de la Sainte Vierge.” [6]
Marie resta trois mois chez
Élisabeth, puis rentra à Nazareth. Joseph s’aperçut que Marie était enceinte,
“et comme il ignorait l’Annonciation de l’Ange, il fut assailli de doutes et
d’appréhensions des plus cruelles. “ Comme Marie, grave et pensive,
se taisait toujours, “les tourments de Joseph furent tels qu’il résolut de la
quitter et de s’enfuir secrètement. pendant qu’il était occupé de cette pensée,
un ange lui apparut en songe pour le consoler.”
[7]
Le temps passait. Marie était
occupée par les préparatifs de la naissance. Anne pourvoyait sa fille de tout ce
qui était nécessaire à son état de grossesse fort avancée. Un Ange apparut à
Joseph et lui ordonna de conduire Marie à Bethléem, “car c’était là qu’elle
devait donner naissance à l’enfant. Il lui indiqua les objets qu’il devait
emporter avec lui; ils étaient en très petit nombre... Marie et Joseph se
disposèrent pour partir sans retard” malgré les difficultés de ce voyage qui
devait être très pénible dans cette saison: le froid était très vif dans les
vallées qui coupaient les chaînes de montagnes. “Anne était tout attristée.
Marie se conforma avec joie à la volonté divine: elle savait que Jésus devait
naître à Bethléem, mais son humilité lui avait imposé silence.”[8]
Le voyage de Marie et de Joseph
fut en effet long et difficile. Il ne paraît pas utile d’en rapporter les
détails. Pourtant, Anne-Catherine note tant de délicatesse et de prévenance de
la part de Joseph envers la Sainte Vierge que certains traits méritent d’être
cités“Joseph cherchait à consoler Marie. Il était si bon! Il souffrait tant de
ce que ce voyage était si pénible... Joseph prenait grande attention à ce que
Marie fît halte souvent.” Et pendant les interminables recherches d’un logement
à Bethléem: ”Joseph arrangea à la Sainte Vierge un siège où elle pût se reposer
pendant qu’il chercherait à se faire accueillir dans l’une des maisons
d’alentour.”
[9]
Il faisait presque nuit quand
Joseph et Marie arrivèrent enfin dans la grotte. “Joseph se hâta de préparer
en dehors un siège pour la Sainte Vierge, afin qu’elle pût se reposer pendant
qu’il pénètrerait dans la grotte et la déblaierait... Après avoir allumé une
lampe, il y introduisit Marie qui s’assit sur la couche qu’il avait
soigneusement disposée au moyen de couvertures. Joseph lui témoigna encore son
profond regret de n’avoir qu’un si pauvre gîte à lui offrir; mais Marie, au fond
de son âme, était satisfaite et joyeuse.
Après avoir amené l’âne et
l’avoir attaché assez loin d’eux pour qu’il ne causât aucune gêne, Joseph
étendit, devant les ouvertures de la voûte, des couvertures qui les garantirent
de l’air extérieur; puis il s’arrangea une couche près de la porte de la
grotte.”
Le sabbat commençait. Durant
l’après-midi du sabbat, Joseph et Marie allèrent jusqu’à une autre grotte pas
très éloignée de la leur et prièrent longuement. “Marie avait prévenu Joseph que
la naissance de l’enfant aurait lieu à minuit... Elle l’avait prié de ne rien
épargner pour recevoir et honorer dignement à son entrée dans le monde, l’enfant
promis par le Seigneur et surnaturellement conçu. Elle voulait aussi qu’il priât
avec elle pour tous ceux qui avaient si durement refusé de la recevoir...”
Quand l’heure de la délivrance
fut imminente, Marie demanda à Joseph d’aller prier après avoir suspendu
plusieurs lampes à la voûte de la grotte. Joseph sortit quelques instants puis
rentra dans la grotte et jeta les yeux sur la Sainte Vierge. “Il la vit qui
priait, agenouillée sur sa couche; elle lui tournait le dos et avait le regard
fixé sur l’Orient. Elle était tout entourée d’une lumière surnaturelle qui
remplissait la grotte entière. Il regarda ces flammes, comme autrefois Moïse le
buisson ardent. Puis, saisi d’une sainte frayeur, il se retira dans son réduit,
et s’y prosterna la face contre terre.”
[10]
Une heure s’était écoulée depuis la
naissance de Jésus. Marie appela Joseph. “Il vint et se prosterna plein de
joie, de ferveur et de crainte. Ce ne fut que lorsque Marie l’eut invité à
presser contre son coeur le don sacré de Dieu, qu’il se leva, prit l’Enfant dans
ses bras et rendit grâces au ciel, les yeux baignés de larmes...”
Anne-Catherine ajoute: “Je vis ensuite Joseph et Marie s’asseoir par terre
l’un à côté de l’autre. Ils gardaient le silence et semblaient absorbés dans la
contemplation... Ils déposèrent ensuite l’Enfant dans la crèche... puis Joseph
transporta auprès de la crèche le siège et la couche de Marie.”
[11]
C’est Joseph, chef de famille qui
accueillit, avec beaucoup de bonté, les bergers quand ils arrivèrent à la
crèche. Il les conduisit auprès de la Sainte Vierge, assise près de Jésus, après
avoir accepté leurs dons. Les jours suivants, trois bergers aidèrent Joseph
“à arranger plus commodément la grotte de la crèche et les grottes latérales...
Plusieurs femmes pieuses offrirent leurs services à la Sainte Vierge. C’étaient
des Ésséniennes qui habitaient la vallée. Elles avaient été appelées par Joseph
qui les avaient connues dans sa jeunesse, lorsqu’il fuyait ses frères.”
Un peu plus tard, vinrent des
émissaires d’Hérode. “Ils adressèrent quelques paroles à Joseph, puis se
retirèrent en se riant de la simplicité et de la pauvreté de ce saint homme.”
[12]
L’Évangile est totalement muet sur
la présence et les activités de Saint Joseph pendant l’enfance de Jésus.
Pourtant, et cela, tous les documents officiels l’affirment, Joseph étant
l’époux de Marie et le père légal de Jésus, il est absolument certain qu’il eut
des démarches à effectuer et des formalités à accomplir. C’est pourquoi il a
semblé intéressant de contempler un peu Saint Joseph dans ses activités
quotidiennes ou exceptionnelles. Ainsi on comprend mieux, non seulement la
sainteté de ce juste, mais également l’affection et l’amour qu’il portait à
Marie et à Jésus. Ce qu’Anne-Catherine relate, et dont on peut accepter ou
refuser l’authenticité, a au moins le mérite de rendre vivante et vraie, dans
toute sa simplicité, la vie de celui qui fut choisi par Dieu pour être le
gardien de son Fils.
“Joseph était allé à Bethléem
d’où il avait ramené trois prêtres et une des femmes qu’on employait en cette
circonstance... Un grand nombre de pauvres qui avaient suivi les prêtres comme
c’était la coutume dans ces occasions, entourèrent la table et reçurent des
présents de Joseph et des prêtres...
[13] L’Ange
avait dit à Joseph que l’Enfant devait s’appeler Jésus... Après la
circoncision, Saint Joseph remit l’Enfant dans les bras de la très Sainte Vierge
qui était restée dans le fond de la grotte avec deux femmes... Avant de partir,
les prêtres prirent une petite collation avec Joseph et quelques bergers... La
nuit suivante les souffrances de l’Enfant se firent vivement sentir. Il pleura
presque sans cesse. Cependant Marie et Joseph cherchèrent à l’apaiser en le
portant tour à tour dans leurs bras.”
[14]
Marie avait eu la révélation que
les mages approchaient. Aussi demanda-t-elle à Joseph de préparer la grotte.
Quand les rois arrivèrent, Joseph sortit de la grotte pour les recevoir, puis
“il les conduisit sous l’auvent placé devant la grotte... Jamais, dit
Anne-Catherine, je n’avais vu Marie et Joseph si heureux et si émus. Souvent
des larmes de joie coulaient le long de leurs joues. Tant d’honneurs,
solennellement rendus à l’Enfant Jésus qu’ils étaient obligés de loger si
pauvrement et dont il fallait cacher la dignité suprême dans l’humilité de leurs
coeurs, leur étaient une ineffable consolation... Ils joignirent leur adoration
à celle des rois. La gloire de Jésus était leur bonheur...
Joseph, assisté par deux vieux
bergers, avait préparé un repas frugal dans la tente des trois rois... Joseph
se plaça au milieu d’eux, auprès de la table et mangea avec eux sans montrer
aucune timidité: il pleurait de joie et de bonheur... Les présents des rois
furent acceptés avec humilité et distribués avec charité.”[15]
La présence des mages avait fait
grand bruit à Bethléem. Aussi, après leur départ qui s’effectua discrètement,
des fonctionnaires d’Hérode vinrent-ils de nouveau s’informer. La Sainte Famille
et Sainte Anne (oui, chez A.C. Emmerich la maman de Marie est toujours vivante,
et, bonne grand’mère, elle rend des services à ses enfants) se réfugièrent dans
une autre grotte. Mais “les fonctionnaires d’Hérode ne se rendirent plus à la
grotte de la crèche où ils n’avaient trouvé précédemment qu’une famille pauvre:
de telles gens n’étaient pas l’objet de leurs recherches.”
[16]
Le jour approchait où Marie devait,
selon la loi de Moïse, présenter son premier-né au Temple et le racheter. Aussi
toutes les mesures furent-elles prises pour le voyage de la Sainte Famille,
d’abord à Jérusalem, puis pour son retour à Nazareth. La scène qui suit n’a pas
d’intérêt particulier, mais elle révèle, dans sa simplicité, tout le coeur de
Joseph, bon époux et bon père. “Au moment de partir, à l’aube, Joseph prit
l’Enfant, le tint jusqu’à ce que Marie fût commodément placée (sur l’âne) et le
remit ensuite entre ses bras... Marie tenait, pressé contre son coeur, Jésus,
enveloppé dans son grand voile et le regardait avec bonheur.”
[17]
Quand, le lendemain matin, ils
arrivèrent au Temple, Marie fut conduite jusqu’au parvis où devait avoir lieu la
présentation. Pendant ce temps Joseph s’occupait des questions matérielles et
rejoignait sa place auprès des hommes. “Après la présentation Joseph était
venu rejoindre Marie. Comme elle, il écouta avec un profond respect les paroles
inspirées de Siméon qui les bénit tous deux... Après Siméon la prophétesse Anne
parla longtemps de l’Enfant Jésus.”
[18]
Curieusement, Anne-Catherine
Emmerich fait mention d’un bref séjour de la Sainte Famille dans la maison de
Joseph à Nazareth avant la fuite en Égypte. Sainte Anne participe à la vie de la
Sainte Famille, et c’est pendant le séjour d’Anne à Nazareth que l’Ange avertit
Saint Joseph.
“Joseph dormait la tête appuyée
sur son bras. Tout à coup je vis, dit A.C. Emmerich, un jeune homme
resplendissant s’approcher de sa couche et lui parler. Joseph se souleva, mais,
accablé qu’il était par le sommeil, il retomba aussitôt. L’Ange alors, le
saisissant par la main le réveilla tout à fait. Joseph se leva et l’Ange
disparut. Joseph alla d’abord allumer sa lampe à celle qui brûlait devant le
foyer; puis il frappa à la porte de la Sainte Vierge, et demanda si elle pouvait
le recevoir. Je le vis entrer et parler avec Marie qui n’ouvrit pas le rideau
placé devant sa couche; puis il alla dans l’écurie où était placé son âne et
arrangea tout pour le départ. La Sainte Vierge se leva aussitôt et
s’habilla...”
Marie alla ensuite chercher son
enfant en toute hâte. Bientôt Joseph arriva avec l’âne. Marie monta sur l’âne,
et ils partirent. A.C. Emmerich signale que Joseph avait averti Zacharie et
Élisabeth du danger qui les menaçait : elle vit Élisabeth emporter le petit Jean
dans une retraite du désert située à deux lieues d’Hébron. Elle mentionne
ensuite les privations subies par la Sainte Famille, leur séjour chez des
voleurs qui firent preuve de beaucoup de bonté envers elle.
[19]
Remarque importante
Dans les visions d’Anne-Catherine
Emmerich il y a un certain nombre de faits étonnants dont certains, notamment la
présence de Sainte Anne auprès de la Sainte Famille, paraissent surprenants ou
sont même en contradiction avec les récits d’autres mystiques. Ces faits ont
peut-être été mal interprétés par A.C. ou même ne sont-ils que symboliques. Pour
nous, il est impossible de les comprendre vraiment, et ils n’ont été ici que
rapidement suggérés ou résumés, afin de conserver la cohérence du récit. Leur
seul intérêt est de rendre particulièrement réelle l’existence de la Sainte
Famille en la resituant dans son contexte contemporain et en la faisant vivre
devant nous.
Le séjour de la Sainte Famille en
Égypte raconté par Anne-Catherine est proche des récits des autres mystiques et
rejoint les études faites par les historiens, études qui font l’objet du
Chapitre: “Contexte contemporain”.
Arrivée en Égypte, la Sainte
Famille s’avança “vers une grande ville en partie dévastée et d’une
architecture singulière. C’était Héliopolis, appelée aussi On... Elle venait
d’être dépeuplée par la guerre, et des gens de tout espèce s’y étaient établis,
dans les maisons en ruines.”
[20]
Anne-Catherine signale que Denys l’Aéropagite
y demeurait, au temps de la mort de Jésus.
Anne-Catherine Emmerich fait
ensuite une description étonnante des ruines d’Héliopolis, très proche de ce que
nous connaissons maintenant des constructions de l’Égypte antique.
“Héliopolis était bâtie sur des hauteurs, des deux côtés du fleuve (le Nil), à
l’endroit où il se divise en plusieurs bras... J’aperçus là, avec étonnement,
les ruines d’immenses édifices, des monuments à demi écroulés et des temples
presque entiers en ruines. Je vis des colonnes semblables à des tours sur
lesquelles on pouvait monter par l’extérieur. Je remarquai aussi d’autres
colonnes très élevées, pointues à leur sommet, couvertes de caractères étranges,
ainsi que beaucoup de grandes figures semblables à des chiens accroupis avec une
tête humaine.
La Sainte Famille demeurait dans
les salles d’un vaste bâtiment qui reposait sur des colonnes massives et peu
élevées, les unes carrées, les autres rondes. Beaucoup de gens s’étaient établis
autour de ces colonnes... C’est là que Joseph se fit un logement, fermé d’un
côté par un mur, et de l’autre par une rangée de grosses colonnes peu élevées;
il le distribua en plusieurs pièces au moyen de minces cloisons...” Joseph
installa un petit autel où la Sainte Famille pouvait prier: table couverte d’une
nappe rouge puis d’une nappe blanche sur laquelle une lampe brillait.
Anne-Catherine vit plus tard la
Famille enfin installée. Joseph travaillait au-dehors: “Il faisait de longs
bâtons avec des pommeaux ronds, de petits escabeaux à trois pieds, des
corbeilles, de minces cloisons en branches entrecroisées. Les gens du pays
couvraient ces cloisons d’un enduit, et s’en servaient pour diviser leurs
cabanes, adossées aux grands bâtiments, ou même pratiquées dans l’épaisseur des
murs...”
Au nord d‘Héliopolis se trouvait un
faubourg coupé par des canaux, et où demeuraient beaucoup de juifs. La Sainte
Famille en connaissait plusieurs. “Marie faisait pour eux divers ouvrages de
femme, et elle recevait, en échange, du pain et d’autres aliments... Joseph
avait construit, tout près d’un temple païen une synagogue où les vrais juifs
des environs se réunissaient avec la Sainte Famille...
Jésus me fut montré, dit
Anne-Catherine, lorsque, devenu assez fort pour marcher et courir, il
recevait la visite d’autres enfants. Je le vis souvent près de Joseph qui
l’emmenait avec lui lorsqu’il travaillait au dehors. Il était presque toujours
vêtu d’une petite robe tricotée et d’un seul morceau.”
[21]
Anne-Catherine Emmerich raconte
que, après dix-huit mois, la Sainte Famille fut obligée de quitter Héliopolis
parce qu’elle était persécutée et manquait d’ouvrage. Jésus avait alors deux
ans.
Après quelques mésaventures, la
Sainte Famille s’installa à Mataréa, petite ville située sur une langue de terre
que l’eau entourait des deux côtés. “On y comptait peu d’habitants, et
ceux-ci demeuraient dans des cabanes très dispersées faites de bois de dattier,
de limon desséché, et couvertes de roseaux. Joseph y trouva de l’ouvrage: il
bâtit des maisons plus solides au-dessus desquelles il construisit des galeries.
La Sainte Famille s’installa
sous une voûte sombre, dans un lieu solitaire... Joseph fit une construction
légère en avant de la voûte... Joseph fit une synagogue. Il devint le chef de la
communauté des juifs, et lui apprit à chanter les psaumes, car tous avaient
oublié, en grande partie, le culte de leurs pères.
Les juifs, tous pauvres, étaient
là en petit nombre; ils demeuraient dans des fosses et de misérables caves.
Arrivés à Mataréa, la Sainte
Vierge et Joseph se trouvèrent d’abord dans une situation pénible. L’eau potable
et le bois y manquaient. Les habitants brûlaient de l’herbe desséchée ou des
roseaux. La Sainte Famille fut contrainte le plus souvent de manger des aliments
froids. Bientôt Joseph trouva du travail... Il s’arrangea une habitation assez
commode divisée en plusieurs pièces. Il fabriqua, pour son usage, des escabeaux
et de petites tables. On prenait les repas par terre, en ce pays.”
[22]
La Sainte Famille passa quelques
années dans ce lieu. Elle y priait souvent.
Le séjour en Égypte devenait de
plus en plus pénible pour Saint Joseph. “Les habitants de ce pays étaient
adonnés à une idolâtrie horrible. Ils sacrifiaient les enfants difformes, et
ceux qui en immolaient de bien conformés se croyaient très pieux. Ils
pratiquaient en outre un culte secret plein d’impuretés. Les juifs mêmes étaient
infectés de ces abominations... Une nuit un ange apparut à Saint Joseph pendant
son sommeil. Il lui dit que ceux qui en voulaient à la vie de l’Enfant étaient
morts, qu’il devait se lever et retourner dans la terre d’Israël... et qu’il
n’avait rien à craindre...
Saint Joseph fit aussitôt
connaître cet ordre de Dieu à la Sainte Vierge et à l’Enfant Jésus. Ils obéirent
à l’instant et firent leurs préparatifs de voyage avec la même promptitude que
lorsqu’ils avaient reçu l’ordre de s’enfuir en Égypte...
Joseph avait le désir, non de
retourner à Nazareth, mais de s’établir à Bethléem. Il était néanmoins indécis
parce qu’il avait appris, en rentrant dans la terre promise, qu’Archélaüs
régnait en Judée: or il redoutait la cruauté de ce prince... Un ange lui apparut
de nouveau pendant son sommeil, et lui ordonna de retourner à Nazareth, Ce qu’il
fit aussitôt.”
[23]
Anne-Catherine Emmerich ne dit que
peu de choses sur l’enfance et l’adolescence de Jésus. Par contre elle donne de
nombreux détails sur l’épisode de Jésus au milieu des docteurs. “Joseph et
Marie avaient coutume, en allant à Jérusalem, de se réunir avec leurs parents et
leurs amis, et Jésus se joignait toujours aux enfants de Nazareth. Cette fois,
cependant, au retour, il s’en était séparé près du mont des Oliviers, prenant le
côté de Jérusalem qui regarde Bethléem, et s’était reposé dans l’auberge de la
porte de Bethléem... Il y était bien connu et il y passa la nuit. Joseph et
Marie le croyaient en avant avec les autres personnes de Nazareth, et celles-ci
pensaient qu’il avait rejoint ses parents. “
Lorsqu’ils furent tous réunis,
l’absence de Jésus jeta Marie et Joseph dans une vive inquiétude...
Le troisième jour, Jésus était
au milieu des docteurs, maîtres dans toutes les connaissances humaines, bien
décidés à le confondre, tant ils étaient irrités contre lui à cause de la
sagesse et de la rectitude de ses réponses... Dès que les prêtres eurent ouvert
la discussion, Jésus leur fit remarquer qu’elle était déplacée et peu
convenable dans le Temple, mais que, même dans le lieu saint il répondait à
leurs questions, puisque telle était la volonté de son Père.” Ses auditeurs
crurent que Joseph lui avait ordonné de faire parade de son savoir!
“Il y avait déjà deux heures que
Jésus enseignait lorsque Joseph et Marie vinrent dans le Temple pour s’enquérir
de lui... Comme il ne leur était pas permis d’y entrer, ils prièrent les lévites
d’avertir Jésus qu’ils l’attendaient. Mais Jésus leur fit dire qu’il voulait
d’abord terminer ce qu’il avait à faire. Marie fut affligée de cette réponse.
C’était la première fois qu’il faisait sentir à ses parents qu’il avait à obéir
à d’autres ordres qu’aux leurs. Il continua à enseigner pendant une heure, et,
après avoir réfuté tous les docteurs, il les quitta, et vint auprès de Joseph et
de Marie dans le parvis du Temple. Le trouble et l’étonnement empêchaient Joseph
de parler, mais Marie s’approcha de Jésus et lui dit: “Mon Fils, pourquoi avoir
agi ainsi envers nous?”
La suite est celle rapportée dans
l’Évangile.
Anne-Catherine donne une autre
information sur la vie de Jésus à Nazareth: “Jésus était âgé de dix-huit ans
quand il commença à aider assidûment Joseph dans ses travaux.”
[24]
Les Évangiles sont muets sur la vie
et la mort de Saint Joseph à Nazareth. Il n’est donc pas inutile de voir comment
est mort le juste entre les justes. Écoutons Anne-Catherine Emmerich.
“... Je voyais Joseph polir des
morceaux de bois, et, quand il transportait des poutres, le divin Enfant
l’aidait; cependant Marie cousait ou tricotait...
Je vis Joseph décliner
rapidement vers la trentième année de la vie du Seigneur. Jésus et Marie
restèrent alors plus souvent avec lui...
Lorsque Joseph mourut, Marie,
assise près de son chevet, le tenait dans ses bras, et Jésus était debout à
côté...
Joseph devait mourir avant
Jésus, car il n’aurait pu supporter son crucifiement: il était trop faible et
trop affectueux. Il avait tant souffert déjà, en voyant les persécutions et les
méchancetés que le Sauveur avait endurées de la part des juifs, depuis sa
vingtième à sa trentième année. En effet, ceux-ci l’avaient en aversion parce
qu’il contredisait souvent la doctrine des pharisiens, et que toujours, une
foule de jeunes gens dévoués l’entouraient. Ce fils du charpentier,
disaient-ils, veut savoir toute chose mieux que personne.”
[25]
[1] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich” Éditions Téqui - Tome 1 page XVII
[2] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 - Chapitre II
page 4
[3]”Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 - Chapitre
III pages 6 et 7
[4] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 - Chapitre
V page 13
[5] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 - Chapitre
XXI pages 62 et 63
[6] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre III page 77
[7] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre IV page 83
[8] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre V page 85
[9] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre IX page 96
[10] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre XI page 102
[11] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre XII page 104
[12] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre XV page 112
[13] Marie
et Joseph distribuaient aux pauvres presque tout ce qu’ils recevaient
des bergers et qui ne leur était pas indispensable.
[14] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich” - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre XVI - pages 113 à 115
[15] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “- Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre XXV - pages 138 à 147
[16] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich” - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre XXVIII - pages 153 à 155
[17] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich” - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre XXX - page 157
[18] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich” - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre XXX1 - pages 162 et 163
[19] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich” - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitres XXXIII à XXXVI
[20] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre XXXVII - page 180
[21]
“Visions d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 -
Deuxième partie - Chapitre XXXVIII
[22]
“Visions d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 -
Deuxième partie - Chapitre XLI - pages 188 à 191
[23] “Visions
d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 - Deuxième
partie - Chapitre XLIV - pages 199 à 202
[24]
“Visions d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 -
Deuxième partie - Chapitre XLV - pages 202 à 208
[25]
“Visions d’Anne-Catherine Emmerich “ - Éditions Téqui - Tome 1 -
Deuxième partie - Chapitre XLVI - pages 208 et 209
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