Sacré Cœur

Solennité

 

Lecture du livre d'Osée (XI 1-19)[1]

Parole du Seigneur. J'ai aimé Israël dès son enfance, et, pour le faire sortir d'Egypte, j'ai appelé mon fils. C'est moi qui lui apprenais à marcher, en le soutenant de mes bras, et il n'a pas compris que je venais à son secours. Je le guidais avec humanité, par des liens de tendresse ; je le traitais comme un nourrisson qu'on soulève tout contre sa joue ; je me penchais vers lui pour le faire manger. Mais ils ont refusé de revenir à moi : vais-je les livrer au châtiment ? Non ! Mon cœur se retourne contre moi, et le regret me consume. Je n'agirai pas selon l'ardeur de ma colère, je ne détruirai plus Israël, car je suis Dieu, et non pas homme : au milieu de vous je suis le Dieu saint, et je ne viens pas pour exterminer.

 

Psaume 52

Voici le Dieu de mon salut : j'ai confiance ;
plus de crainte pour moi !
Car le Seigneur est ma force et mon chant,
je lui dois le salut.

Rendez grâce au Seigneur, criez son nom,
annoncez parmi les peuples ses hauts faits !
Rappelez que sublime est son nom ;
jouez pour le Seigneur !

Car il a fait la merveille
connue de toute la terre.
Jubilez, criez de joie :
Dieu est au milieu de vous !

 

Lecture de la première lettre de saint Paul apôtre
aux Ephésiens (III 8-19).

Frères, moi qui suis le dernier de tous les fidèles, j'ai reçu la grâce d'annoncer aux nations païennes la richesse insondable du Christ, et de mettre en lumière le contenu du mystère tenu caché depuis toujours en Dieu, le créateur de toutes choses ; ainsi, désormais, les forces invisibles elles-mêmes connaîtront, grâce à l'Eglise, les multiples aspects de la Sagesse de Dieu. C'est le projet éternel que Dieu a réalisé dans le Christ Jésus notre Seigneur. Et c'est notre foi au Christ qui nous donne l'audace d’accéder auprès de Dieu en toute confiance. C'est pourquoi je tombe à genoux devant le Père, qui est la source de toute paternité au ciel et sur la terre ; Lui qui est si riche en gloire, qu'il vous donne la puissance par son Esprit, pour rendre fort l'homme intérieur. Que le Christ habite en vos cœurs par la foi ; restez enracinés dans l'amour, établis dans l'amour. Ainsi vous serez capables de comprendre avec tous les fidèles quelle est la largeur, la longueur, la hauteur, la profondeur... Vous connaîtrez l'amour du Christ qui surpasse tout ce qu'on peut connaître. Alors vous serez comblés jusqu'à entrer dans la plénitude de Dieu.

 

Évangile de notre Seigneur Jésus-Christ
selon Saint Jean (XIX 31-37).

[Jésus venait de mourir.] Les Juifs donc, comme c'était la Préparation, pour que les corps ne restassent pas sur la croix pendant le sabbat (car c’était un grand jour que ce sabbat), les Juifs demandèrent à Pilate qu’on leur rompît les jambes et qu'on enlevât les corps.

Les soldats vinrent et rompirent les jambes du premier, puis de l’autre qui avaient été crucifiés avec lui. Arrivés à Jésus, voyant qu'il était déjà mort, ils ne lui rompirent pas les jambes, mais l’un des soldats, de sa lance lui ouvrit le côté, et il en sortit aussitôt du sang et de l'eau.

Et celui qui a vu rend a témoigné, et véridique est son témoignage, et le Seigneur sait qu'il dit vrai, pour que vous aussi vous croyiez. Cela est arrivé afin que cette parole de l'Ecriture s'accomplît : « Aucun de ses os ne sera brisé. » Et un autre passage dit encore : « Ils regarderont vers celui qu'ils ont transpercé. »

 

Un Cœur qui ne sait qu’aimer !

La théologie et l’histoire de la fête du Sacré-Cœur ont jalonné la pensée de l’Église depuis les premiers siècles. Les considérations sur la Plaie du côté du Christ, puis sur son Cœur, ont commencé déjà chez les Pères de l’Église, ont été développées par saint Bernard de Clairvaux au XIIe siècle, puis reprises par tant et tant d’auteurs, hommes et femmes mystiques. On trouvera une très bonne exposition de tous ces auteurs sur notre site de “Nouvelle Évangélisation”, dans la section Histoire : Théologie du Sacré Cœur. Finalement, la fête fut étendue à l’Église universelle en 1856, par le bienheureux Pie IX et renouvelée en 1928 par Pie XI.

Quand nous sommes invités à nous tourner vers le Cœur de Jésus, à Le prier, l’Église veut en réalité nous attirer plus près de Celui que représente ce Cœur blessé ; non pas pour nous orienter vers une dévotion larmoyante, mais bien au contraire pour nous faire contempler en ce Cœur tout le message christologique de Jésus.

D’abord, ce Cœur nous rappelle que Jésus a pris un corps humain semblable au nôtre, qu’il a vécu avec un cœur de chair et que ce cœur de chair a battu dans sa poitrine pendant trente-trois années, au rythme de ses allées et venues, de ses miracles, de sa Passion et de sa Mort. Le Cœur de Jésus contient d’abord tout le mystère de l’Incarnation.

Ce Cœur blessé, comme cela arrive à tout être humain, est l’organe qui particulièrement reçoit les émotions joyeuses ou tristes de la vie. Chez tout être, les battements du cœur augmentent ou ralentissent en fonction de l’émotivité, de la sensibilité, des réactions internes de la personne. Et l’on imagine combien le Cœur de Jésus a battu très fort, pour l’amour avec lequel Il accomplissait chaque geste, chaque bénédiction, chaque miracle ; et aussi pour l’amour compatissant avec lequel Il recevait les critiques, les abandons, les insultes, durant toute sa vie publique et particulièrement durant sa Passion douloureuse. Le Cœur de Jésus exprime tout son amour pour les hommes, cet amour qui L’a poussé à se livrer totalement pour nous racheter : il contient donc aussi tout le mystère de la Rédemption.

Jésus nous a rappelé que son amour était l’amour du Père : “Comme le Père m’a aimé, je vous ai aussi aimés” (Je 15:9). C’est dire que l’amour exprimé par le Cœur du Christ est aussi l’amour du Père pour nous, comme l’explique l’apôtre Jean dans sa première Lettre ; Jean a si bien chanté cet amour de Dieu qu’il a été appelé le premier théologien du Sacré-Cœur : “L’amour de Dieu a été manifesté envers nous en ce que Dieu a envoyé son Fils unique dans le monde, afin que nous vivions par lui” (1Jn 4:9). Le Cœur de Jésus manifeste l’amour de Dieu-Père, et donc cette communauté d’amour qu’est la Sainte Trinité : il contient tout le mystère de Dieu-Amour, Un et Trine.

On a rappelé, à l’occasion de la récente Fête-Dieu, combien le sacrement de l’Eucharistie était essentiellement la manifestation actuelle de l’amour de Jésus, qui nous laisse la présence quotidienne de Son Corps et de Son Sang : le Cœur de Jésus nous rappelle enfin l’Eucharistie, Sacrement d’amour, Sacrement central de la vie divine en nous.

On l’aura ainsi compris : de l’Incarnation à la Nativité de Jésus, de l’amour de Dieu à celui de Jésus-Christ qui nous donnent l’Amour, la Vie, et l’Éternité, le Cœur de Jésus est la récapitulation de toute l’histoire du salut, de toute l’Œuvre rédemptrice et sacramentelle de Jésus-Christ et de l’Église. En un mot, cette solennité reprend et conclut simultanément toutes les étapes fondamentales de notre salut, que nous célébrons l’une après l’autre durant l’année liturgique.

Pourquoi donc Jésus nous invite-t-il, dans l’évangile d’aujourd’hui, à “aller vers lui”, et à “prendre son joug” alors que nous ployons déjà sous le fardeau (de la vie quotidienne) ? C’est que, tout d’abord, Il a porté pour nous la Croix, Il s’y est fait clouer, Il s’y est immolé : Il y a accompli le Sacrifice ; Il s’est réservé le plus douloureux, le plus important, nous invitant “seulement” à Le suivre. Suivre Jésus, c’est s’unir à Lui : l’image du joug prise par Jésus exprime tout-à-fait cette union avec Lui.

Comment Jésus nous aide à porter Son joug ? – Cette très belle poésie nous l'explique.

LES TRACES DANS LE SABLE

« Une nuit, un homme fit un rêve.
Il rêva qu'il marchait au bord de la mer en compagnie du Seigneur.
Sur le fond du ciel, il voyait se dérouler les scènes de sa vie.
Il remarquait, dans chaque scène,
deux traces parallèles de pas dans le sable.
L'une était la sienne; l'autre celle du Seigneur.

À la dernière scène, il se retourna pour voir ces empreintes sur la grève.
Il s'aperçut alors qu'à divers moments de sa vie, il n'y avait qu'une trace de pas.
Et que ces moments de marche solitaire
correspondaient aux heures les plus tristes et les plus sombres de sa vie.

Intrigué, il dit à son compagnon;
“Seigneur, tu m'as assuré de toujours marcher à mes côtés
si j'acceptais de me joindre à Toi.
Mais je m'aperçois qu'aux périodes les plus dures de ma vie,
il n'y a plus qu'une empreinte dans le sable.
Pourquoi m'as-tu abandonné
au moment où j'avais le plus besoin de Toi ?”.

Le Seigneur se tourne alors vers lui et lui répond:
“Mon enfant, mon très cher enfant,
tu sais que Je t'aime et que je ne saurais t'abandonner.
Il faut que tu comprennes ceci :
si tu ne vois qu'une trace de pas
aux moments les plus difficiles de ton existence,
c'est qu'alors, tout simplement, Je te portais dans mes bras...” »
(Adémar de Barros)

Jésus, doux et humble de cœur, rends nos cœurs semblables au Tien.

Abbé Charles Marie de Roussy

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