Romanos le Mélode, le
mélodieux, l’orateur de Dieu (theorhetôr), le plus célèbre des poètes et
hymnographes byzantins, issu d’une famille juive, naquit
à Emèse (Homs) en Syrie vers la fin du 5me siècle. D’abord diacre
de l’Eglise de
la Résurrection à Béryte (Beyrouth) il vint ensuite à Constantinople au temps de
l’empereur Anastase Ier (mort en 518). Il se retira à l’Eglise de la Très Sainte
Mère de Dieu dans le quartier de Cyr où il reçut le charisme de la poésie
sacrée. Ni lecteur ni chanteur talentueux, il lisait si mal que tous se
moquaient de lui et qu’un autre lecteur devait prendre sa place, cela le
démoralisa. Une nuit, veille de Noël alors qu’il priait devant l’icône de la
Mère de Dieu il s’endormit. Dans son sommeil il eut en vision la Très Sainte qui
lui remit un rouleau de papier en disant : « Prends-le et mange-le ». Le saint
obéit et avala le papier. Il se réveilla aussitôt et dans l’étonnement de ce qui
lui était arrivé il glorifia Dieu, monta sur l’ambon et commença son hymne : he
parthenos semeron ton hyperousion tiktei. (En ce jour, la Vierge met au monde
Celui qui est au dessus de toute essence - le Dieu transcendant-). Toute cette
nuit-là, il chanta d’une voix admirable son premier et fameux kontakion. (1)
Les biographes de l’antiquité
ont cru pouvoir affirmer qu’il aurait composé plus de mille poésies, mais nous
ne connaissons que 89 hymnes qui lui soient attribuées et qui nous sont
parvenues. Ses poèmes, écrits sur des rouleaux ou kontakia étaient conservés
dans la même église de Cyr après sa mort. Celle-ci a dû avoir lieu entre 555 et
565, après la série de séismes (de 542 à 557), évoquée dans une de ses dernières
hymnes. Il fut enseveli dans son église du quartier de Cyr, où l’on célébrait sa
fête encore au 10me siècle. Elle est fixée traditionnellement au 1er octobre,
jour probable de sa mort, en même temps que celle de la Protection de la Très
Sainte Mère De Dieu.
Nous ne pouvons pas affirmer
avec certitude que Romanos ait été le créateur du « kontakion », mais il en a
été le grand promoteur et le plus brillant représentant. Pour lui, cette forme
de poésie servait de prédication à l’occasion des fêtes de Notre Seigneur et des
saints. Théologien engagé, il sut rendre vivant grâce à son art poétique ces
différentes célébrations. Génie très prolixe, il développa une incroyable
variété de thèmes dans une même pièce : l’exhortation, la narration, le
dialogue, la description et la prière sous forme d’exultation dans la louange,
la pénitence et la supplication. En même temps il y introduisit un dialogue
pathétique et dramatique.
Il pourrait être l’auteur de
l’hymne marial Acathiste, composée peut-être entre 500 et 520, donc au cours de
sa vie.
Ce fait est admis comme probable selon un certain nombre de critiques, dont les
plus récents. En effet, tout plaide en faveur de Mélode, tant le contenu que le
style, la beauté et la variété de la forme. Il est intéressant d’en dire
quelques mots, comme l’icône ci-dessus montre Romanos en train de chanter
l’Hymne Acathiste devant le Vierge qui étend son maphorion (2) au-dessus de ceux
qui prient.
L’Acathiste à la Mère de Dieu
L’Hymne Acathiste se chante debout par respect pour le mystère de l’incarnation
que le chantre médite. Dieu se manifeste en Marie. La première réaction devant
cette révélation n’est pas le discours mais le chant. Marie chante son
Magnificat : le jaillissement de son cœur devant la merveille. Le Mélode
contemplant toute la beauté de l’incarnation entonne l’Hymne à la Mère de Dieu
en cette nuit de Noël, en glorifiant Dieu. Saint Paul aussi, dans ses épîtres,
proclame : « Béni soit le Père de Notre Seigneur Jésus Christ », de même tout
l’Acathiste commence inlassablement par « Réjouis-toi». Émerveillement de la
foi. Écoutons avec ferveur cette beauté chantée par Romanos le Mélode :
Réjouis-toi en qui resplendit la joie du salut
Réjouis-toi tu nous mènes à la confiance dans le silence
Réjouis-toi en qui nous accédons à la plénitude du Mystère de Dieu
Réjouis-toi tu conduis les croyants à l’intimité avec l’Époux.
Réjouis-toi épouse inépousée.
(1) kontakion : prédication en vers dans des strophes sans rimes mais qui
doivent répondre à des règles métriques très strictes
(2) maphorion : voile qui couvre la tête et drape le corps, porté par la Mère de
Dieu et de nombreuses saintes.
Valère De Pryck
Sources : Dictionnaire de
Spiritualité, Beauchesne, Paris, 1981
Bibliotheca Sanctorum, Instituto Giovanni XXIII della Pontificia Università
Lateranense
Kirchenlexicon, Vertrag Traugott Bautz – Herzberg
Dictionnaire de Théologie Catholique, Libr. Letouzay et Ané, 1937
CD – Hymne Acathiste à la Mère de Dieu – Foyer de Charité - Ottrott en Alsace
SOURCE :
http://orthodoxie.centerblog.net/4.html |