Ermite,
cardinal-évêque d’Ostie, docteur de l’Église, orateur et écrivain
sacré de premier plan au milieu du XIe siècle
latin,
Pierre-Damien est l’un des protagonistes de la réforme de l’Église
et l’un de ceux qui dénoncèrent le plus haut l’abus de l’art
dialectique dans les questions sacrées.
Une
enfance rude, des dons de rhéteur
Né à Ravenne,
abandonné, maltraité, Pierre connaît une enfance très rude jusqu’au
moment où son frère Damien, dont il prendra le nom, l’ayant
recueilli, l’envoie faire les meilleures études libérales à Faenza,
puis à Parme. Il est ensuite maître à Ravenne, où son renom en
rhétorique et en droit lui attire de grandes foules d’élèves (Jean
de Lodi, in Patrologia latina, CXLVI), lui procurant honneurs,
richesses et tentations.
Après la
rencontre de deux ermites qui l’étonnent par leur esprit de
pauvreté, il se décide à quitter le monde, vers 1035, et se fait
ermite au prieuré camaldule de Fonte Avellana, en Ombrie. Il y
commence une vie de contemplation et de mortification dont la
ferveur s’atteste dans une œuvre de style fort soutenu, la plus
abondante que nous ait livrée son temps.
Ses premiers
écrits — une Dispute avec un juif (P.L. , CXLV) sur la Trinité et le
Messie et la Vie de Romuald (éd. Tabacco, 1957), écrite en 1042 —
donnent, l’un un exemple des méthodes d’enseignement qu’il eut à
employer, très tôt, à Pomposa, l’autre, avec un document historique
précieux sur le père des ermites latins, le programme érémitique
qu’il allait suivre, non sans subir maintes contradictions.
Un
ermite sommé de sortir de sa solitude
Contre son
gré, Pierre Damien est élu prieur en 1043 et doit fonder sept
nouveaux ermitages pour les disciples qu’attirent sa science et sa
sainteté. Les besoins du monde le contraignent à sortir de sa
solitude.
Les lettres
qu’il écrit en grand nombre (P.L., CXLIV) à des destinataires de
tout rang (papes, évêques, princes, moines et moniales, laïcs
influents ou obscurs) font allusion constamment aux désordres inouïs
du monde et de l’Église, violences, avarice, luxure, ignorance des
clercs, et appellent véhémentement une réforme qui doit commencer
par le Siège romain.
Après le cri
de joie que lui inspire l’élection de Grégoire VI, en 1045, il
trouve des satisfactions plus solides dans l’action réformatrice à
laquelle il se donne aux côtés d’Hildebrand et de Henri III, servant
d’intermédiaire entre l’empereur et les papes.
Il adresse à
Léon IX, en 1049, le premier de ses grands écrits réformateurs, le
Liber Gomorrhianus sur les désordres du clergé, et, en 1052, à
l’archevêque Henri de Ravenne, son Liber gratissimus, important
traité canonique sur la reconsécration des simoniaques, problème
majeur à la veille du conflit des Investitures, et sur lequel il
sera longtemps en divergence avec la Curie romaine.
Une
œuvre doctrinale puissante
La plupart des
traités qu’il insère en des lettres souvent très longues touchent à
des problèmes affrontés directement dans les cloîtres ou dans le
monde (les degrés de la consanguinité, l’institution monastique et
érémitique, la communauté des biens entre les chanoines) ou à des
questions qui lui sont soumises (la procession du Saint-Esprit,
contre l’erreur des Grecs ; le comput pascal; certaines difficultés
d’exégèse ; les étapes de la fin des temps, dont il voit les signes
présents).
Le plus
spéculatif de ses traités est une lettre aux moines du mont Cassin,
Sur la toute-puissance divine (éd. Cantin, coll. Sources
chrétiennes, no 191, 1972). Il y reprend une dispute engagée contre
de jeunes moines dialecticiens ; et, en même temps qu’il adopte une
position hardie sur le pouvoir de Dieu à l’égard du passé, il
profite de la nature de l’objection qu’il combat pour définir le
rôle de la dialectique dans les questions sacrées.
Cardinal-évêque et comte d’Ostie en 1057, il ne cesse plus de gémir
sous le poids des charges qui le privent de la contemplation, alors
que les missions d’Église se multiplient: en 1059, à Milan, pour
apaiser la révolte des patarins ; en 1063, à Cluny et Limoges, pour
assurer les droits des clunisiens; en 1069, à Francfort, auprès de
Henri IV...
En 1072,
essayant de réconcilier Ravenne avec l’Église, il meurt en
retournant à Rome, dans la nuit du 22 au 23 février, à Faenza.
Ses
vertus dépassaient encore sa science profonde !
Il brilla
surtout par la mortification et l'humilité. Dans sa jeunesse,
tourmenté de tentations impures, il se plongea, la nuit, dans un
étang demi-glacé, jusqu'à ce qu'il eût éteint le feu de la
concupiscence.
Cilice, jeûnes
effrayants, lit de planches nues, discipline, cercles de fer, aucune
pénitence ne lui fut étrangère.
Étant moine,
quand, au chapitre, il avait dû reprendre ses religieux de leurs
fautes, il descendait de son siège, se prosternait à terre devant
tous, s'accusait de toutes ses imperfections, se donnait la
discipline publique, et, reprenant sa place, continuait ses avis.
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