Pedro Armangol
Religieux mercédaire, Martyr, Bienheureux

1238-1304

Pedro était né à Tarragona, de la famille des comtes d’Urgel, et reçut une excellente éducation, mais n’en profita guère, car au moment de choisir un état de vie, il quitta les siens, tomba dans toutes sortes de désordres et d'excès. Il se fit chef d’une bande de brigands qui parcouraient les montagnes, détroussaient les voyageurs et parfois leur donnaient la mort. Au plus fort de ses égarements, il se prit un jour à réfléchir, se rendit compte de sa chute lamentable : touché de repentir, il alla se jeter aux pieds d’un religieux de Notre-Dame de la Merci, lui confessa ses crimes et lui exposa ses terreurs. Le religieux auquel il s’était adressé était le vénérable Guillaume de Bas, successeur de saint Pierre Nolasque1 et Français d’origine. Il reconnut la sincérité d’un tel repentir et consentit à admettre ce jeune homme dans son noviciat de Barcelone. Pierre n’avait que dix-neuf ans : après une année de pénitence, on lui donna l’habit de l’ordre. Alors il était devenu un homme nouveau que les austérités n’effrayaient point ; il se couvrait de cilices, châtiait son corps, s’imposait des jeûnes rigoureux.

Bientôt ses supérieurs consentirent à l’adjoindre aux religieux qui allaient traiter de la rédemption des captifs. Pedro fit ses premiers essais dans les royaumes de Grenade et de Murcie. Sa charité, sa prudence et son zèle déterminèrent le général de l’ordre à l’envoyer à Alger. Dans l’espace de deux mois, notre ardent religieux racheta trois-cent quarante-six esclaves qu’il fit partir aussitôt pour l’Espagne. A Bougie, il délivra quelques-uns de ses frères retenus comme otages et brisa les fers de cent dix-neuf chrétiens. Il se préparait à revenir en Europe quand il apprit que dix-huit enfants chrétiens étaient exposés chez leurs maîtres à perdre la foi et à tomber dans la dépravation. Il alla aussitôt les trouver, les exhorta à demeurer fermes ; puis rassuré sur leurs bonnes dispositions, il traita de leur rançon pour trente mille ducats. Mais l’argent lui manquait, il proposa alors de demeurer lui-même comme otage pendant que le religieux son compagnon irait conduire ces enfants et rapporterait la somme convenue. La proposition fut agréée, les enfants rendus à la liberté purent être embarqués pour l’Espagne avec les autres esclaves rachetés.

Durant sa captivité volontaire à Bougie, Pedro trouva de fréquentes occasions d’exercer sa charité : non seulement il exhorta les esclaves chrétiens à demeurer fidèles à Dieu, mais il instruisit, convertit et baptisa plusieurs Maures. Les sectateurs de Mahomet s’émurent de cet apostolat ; ils firent jeter Pedro dans une noire prison où il serait réduit à mourir de faim. Les Turcs qui lui avaient vendu les dix-huit enfants chrétiens, voyant que l’argent tardait à venir, s’impatientèrent ; ils l’accusèrent d’être un espion envoyé par les rois chrétiens pour connaître l’état du pays, et ils le condamnèrent à être pendu. Sans retard, ils exécutèrent cette injuste sentence sur la demande des patrons dont Pierre était le débiteur ; il devrait rester suspendu pour que son cadavre fût la pâture des oiseaux de proie. Six jours s’écoulèrent après la pendaison, Guillaume Florentin, compagnon de Pedro, arriva d’Espagne à Bougie durant ce temps et on lui apprit la triste nouvelle. Il arriva au lieu du supplice en versant des larmes, mais sa surprise fut au comble quand il entendit Pedro suspendu lui adresser ces paroles : “Frère, ne pleure pas, je vis soutenu par la très sainte Vierge qui m’a assisté durant les jours passés.” Joyeux d’entendre un pareil langage, Guillaume s’empressa de détacher le corps,. Les habitants de la ville et plusieurs matelots espagnols étaient là qui contemplaient ce spectacle. Quand il apprit ce miracle, le divan défendit de remettre l’argent aux barbares patrons ; il voulut qu’on l’employât à racheter vingt-six autres esclaves, fit remettre ceux-ci à Pedro et à son compagnon. Tous ensemble, religieux et captifs rachetés partirent aussitôt pour l’Espagne.

A partir de ce moment, Pedro conserva les traces visibles de son supplice : il avait le cou de côté et le visage d’une extrême pâleur ; Dieu le permettait ainsi pour attester la réalité du miracle; Plein de reconnaissance envers la très sainte Vierge, Pedro se retira dans un couvent solitaire dédié à Notre-Dame des Prés ; il y passa dix ans dans les exercices continuels de la prière et de la pénitence, il n’avait pour nourriture que du pain et de l’eau. La réputation de sa sainteté et le bruit du miracle accompli en sa personne attirèrent dans cette solitude de nombreux visiteurs ; il les recevait avec bonté, soulageait et guérissait ceux qui étaient malades. Rappelant son supplice, il avait coutume de dire à ses frères : “Croyez-moi, les seuls jours heureux que je pense avoir eus sont ceux que j’ai passés suspendu au gibet, car alors je me croyais bien mort au monde.” Il prédit son trépas plusieurs jours à l’avance ; une grave maladie survint ; il rendit son âme à son Créateur en prononçant cette parole du psalmiste : “Je plairai au Seigneur dans la terre des vivants”.

C’était le 27 avril 1304, jour où il est commémoré au Martyrologe Romain.

En raison de son supplice, Pedro a été considéré comme martyr par certains, mais ce titre n’a pas été repris dans le Martyrologe Romain.

Le culte a été approuvé en 1686.

 

pour toute suggestion ou demande d'informations