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L’unité de
cette Église naissante…
Ce sixième dimanche de
Pâques est le dernier avant l’Ascension. Le texte de l’évangile est
pris de l’entretien de Jésus avec ses Apôtres au soir de la dernière
Cène. Dernier entretien, dernière prière avec eux ; à cette pensée,
Jésus ne pouvait pas ne pas ressentir un grand bouleversement : Il
vient d’instituer l’Eucharistie, d’ordonner les premiers prêtres et
diacres, et Il va consommer son Sacrifice demain, après cette si
douloureuse agonie à Gethsémani, et tous les mauvais traitements
qu’Il subira jusqu’à demain après-midi.
Les paroles de Christ
sont malgré tout pleines d’espérance : “Mon
Père vous donnera un autre Défenseur qui sera pour toujours avec
vous – Je ne vous laisserai pas orphelins ― Je reviens vers
vous ― Vous me verrez vivant ― Celui qui m’aime sera aimé de mon
Père ― Moi aussi, je l’aimerai…”
Jésus sait que Judas
est en train de le trahir, mais Il n’en parle pas (pas directement);
Il y fait très délicatement allusion, sans condamner son traître, en
disant aux autres :“Si vous m’aimez, vous resterez
fidèles. ― Celui qui a reçu mes commandements et y reste fidèle,
c’est celui-là qui m’aime”. Celui donc qui n’est pas fidèle, se
met en-dehors de l’amour.
L’Esprit d’amour,
l’Esprit de vérité, c’est Celui qui viendra au jour de la Pentecôte,
car Jésus a accompli sa mission ; maintenant Il envoie Son Esprit
pour “inspirer” les Apôtres et l’Église “dans
la Vérité tout entière” (Jn
16:13).
Ceux qui vivront selon
cet Esprit, n’auront pas peur de témoigner de leur foi, en toute
sincérité et toute honnêteté, même s’ils doivent supporter des
vexations de la part des ennemis de l’Église. Saint Pierre
recommande aux chrétiens “douceur et respect”, cette attitude digne
des amis de Jésus-Christ, lesquels, à l’instar du Maître, n’ont
jamais de paroles dures pour le prochain : “Aimez
vos ennemis, faites du bien à ceux qui vous haïssent, priez pour
ceux qui vous persécutent” (Mt
5:44).
Un accent tout spécial
est à remarquer dans l’extrait des Actes des Apôtres que nous lisons
aujourd’hui : “Les
foules, d’un seul cœur, s’attachaient à ce que disait Philippe”.
Ce “d’un seul cœur” veut dire beaucoup de choses : on imagine l’élan
des premiers chrétiens, leur unité dans la foi, leur joie commune,
leur conviction profonde. Au passage, Philippe est ici un des sept
diacres institués récemment, dont il a été question dimanche
dernier, ce n’est pas le même que l’Apôtre Philippe.
L’unité de cette
Église naissante apparaît aussi à un détail qui pourra nous échapper
à une première lecture : il est dit que “les
Apôtres apprirent que les gens de Samarie avaient accueilli la
parole de Dieu” et
qu’alors “ils leur
envoyèrent Pierre et Jean”… Voyez l’humilité du Chef des
Apôtres ! Pierre ne décide pas d’emblée d’aller, seul, confirmer
dans leur foi les Samaritains. Apparemment, ce sont tous les Apôtres
qui en ont parlé, ensemble, et qui ont suggéré à Pierre qu’il ferait
bien d’y aller ; et Pierre se fait accompagner de Jean, pour ne pas
rester seul en vue devant ces néophytes.
Et encore une fois,
les Samaritains sont à l’honneur ; ces voisins souvent mal vus des
Juifs de Jérusalem, souvent considérés comme faux frères, ils ont
reçu un baptême “au
nom de Jésus”. Quelqu’un, on ne dit pas qui, leur a donné ce
baptême, mais pas “au
nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit”, comme l’avait
commandé Jésus. Vice de forme ? Invalidité ? Pour Pierre, baptiser
au nom de Jésus est synonyme de baptiser au nom de la Trinité : avec
Jean, il prie “pour
qu’ils reçoivent l’Esprit Saint”, c’est-à-dire pour qu’ils
reçoivent la même grâce que les Apôtres au jour de la Pentecôte,
pour que l’unité soit parfaite. Pour qu’“Ils soient Un”, disait
Jésus dans sa Prière Sacerdotale (Jn 17:21).
Toutes ces merveilles,
toutes ces grâces, toutes ces conversions, sont vraiment des signes
de la puissance du Christ ressuscité, des manifestations de la
volonté de Dieu d’accorder le Salut à toutes les nations. Le psaume
65 ― ici quelque peu écourté ― est une liturgie de louange,
d’adoration et d’action de grâces, qui invite “toute la terre” à
chanter les dons de Dieu :
“Acclamez Dieu,
toute la terre ; fêtez la gloire de son nom.”
Abbé
Charles Marie de Roussy |