bienheureux
Nicolas ROLAND
Chanoine théologal de Notre-Dame de Reims
prêtre, fondateur
(1642-1678)

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Communauté du Saint Enfant-Jésus de Reims

Conférence
Première Conférence faite
par le sieur Théologal à la Communauté
du Saint Enfant-Jésus, sur ces paroles :
soyez parfaits, comme votre Père Céleste est parfait
[1]

 

Conférence

— Qui est celui qui dit ces paroles ?

C’est la vérité même qui ne peut se tromper en exigeant des hommes aucune chose impossible.

— À qui est-ce que Jésus-Christ parlait lorsqu’il a dit: “soyez parfaits comme votre Père Céleste est Parfait” ?

À tous les chrétiens, mais particulièrement à ceux qu’il a retiré du monde, et engagés à une vie plus parfaite. Mais nous pouvons dire que ces paroles s’adressent à vous en particulier, d’autant que vous êtes obligées de tendre à votre perfection.

1 En tant que vous êtes chrétiens, parce que Jésus-Christ n’excepte personne dans Commandement qu’il a fait.

2 Vous y êtes obligées de nouveau, parce que vous êtes appelées en Communauté, par une  grâce de préférence, et cet état de vie, est un état de perfection.

3 Vous devez tendre à la perfection pour remplir votre vocation, qui vous engage à travailler au salut du prochain, pour autant que vous devez vous rendre capables de comprendre les vérités que vous devez enseigner. Et cependant c’est ce qui ne se peut faire sans tendre à une haute perfection; et sans cette perfection vous ne pourrez vous acquitter de votre devoir envers le prochain. C’est pourquoi il vous faut convaincre de l’obligation que vous avez de travailler à acquérir la perfection. Mais d’autant que plusieurs la mettent ou elle n’est pas, il est nécessaire que vous connaissiez en quoi elle consiste, et en quoi elle ne consiste pas.

Je dis :

— Que la perfection ne consiste pas dans la bonne grâce du corps, ni les belles qualités de l’esprit, car si cela était, les personnes que Dieu n’a pas avantagées de ces dons naturels n’y pourraient arriver, et par conséquent Dieu lui-même serait injuste d’exiger des créatures des choses impossibles. Elle ne consiste pas non plus dans plusieurs exercices de pénitence, et de piété, ainsi que plusieurs l’imaginent, comme les jeûnes, les austérités et macérations, parce que les personnes de délicate complexion n’y pourraient non plus parvenir. La perfection ne consiste pas même dans les longues prières et oraisons, visites des Églises, et exactitude à vouloir gagner des indulgences, d’autant que les personnes engagées dans le monde, chargées de famille et d’emplois extérieurs n’y pourraient pas arriver; ni non plus dans les grandes aumônes, parce que les pauvres ni les Religieux ne la pouvant pas faire, ne seraient jamais parfaits. Ainsi, toutes les choses susdites, ne sont pas la perfection, bien que quelquefois elles puissent servir de moyen pour y parvenir. Ceux-là s’abusent, qui pensent la faire consister en ces choses. Et c’est un artifice du Diable qui, pour nous empêcher de tendre à la perfection, nous fait croire qu’elle consiste en des choses impossibles ou trop difficiles. Or, pour lever ces difficultés, il faut dire, et il est très vrai que la perfection consiste dans l’amour de Dieu, lequel pour être vrai, doit être :

1) Pur, et sans mélange d’aucune créature;

2) Il doit être fort, en sorte que, ni le Diable, ni le monde, ni la chair ne le puisse corrompre;

3) Qu’il soit constant, c’est-à-dire que cet amour soit pour l’amour de Dieu même.

Reste, maintenant, à savoir les moyens de devenir parfait.

Le 1er est la fuite du péché, tant mortel que véniel, et même des imperfections volontaires.

Le 2ème, est la victoire des passions déréglées, et principalement de l’amour, de la haine, de la joie, de la tristesse.

Le 3ème, est la mortification des sens et de l’esprit.

Le 4ème, est l’exercice de l’oraison avec fidélité.

Le 5ème, est la fréquentation, et le bon usage des Sacrements.

Le 6ème, le choix et la bonne conduite d’un sage et expérimenté Directeur, avec la soumission et l’obéissance à ses conseils.

Le 7ème, le courage et la générosité pour surmonter les difficultés et les tentations.

Le 8ème, l’abandon et confiance en Dieu pour porter toutes les peines et afflictions qui arrivent, tant du corps que de l’esprit.[2]


[1] Conférence tirée du Manuscrit 7-4B.
[2] Conférence tirée du Manuscrit 7-4B.

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