Laurentino
Mariano Alonso Fuente
* 21/11/1881 Castrecías (Burgos) - Diocèse de Burgos
+ 08/10/1936 (Barcelona)

Mariano (frère Laurentino) naît le 21 novembre 1881 à Castrecías (Burgos).

En 1897, il commence le noviciat, puis en 1899 son travail apostolique à Cartagena. Au début, il a de la peine à établir la discipline. Mais vite il arrive à se faire respecter : son caractère franc et stable, sa bonté et son savoir lui gagnent les cœurs au point que quarante ans après ses élèves se souviennent avec admiration de ses éminentes qualités d’éducateur.

En 1905, il est nommé directeur du collège de Cartagena. Quand le frère Bérillus, Assistant général, visite cette communauté, il y trouve une telle union et un tel dévouement auprès des élèves que, plein d’admiration, il récompense les Frères avec une sortie à Oran (Algérie).

Quand il aura 31 ans, il prend la direction du collège de Burgos, un des plus importants de l’Espagne. Sa réussite est totale. Il a l’occasion de former un grand nombre de jeunes Frères et obtient une grande stabilité de la communauté. Quand le frère Floribert, Provincial, le présente aux frères, il leur dit : “Je vous amène, comme directeur, un Frère qui est grand dévot du Sacré-Cœur”.

Le frère Eold, Visiteur, le demande comme adjoint, vu que la Province d’Espagne est très grande, avec 800 Frères et 60 maisons. Mais le frère Eold est envoyé au Mexique, et de manière inattendue, le frère Laurentino se retrouve seul dans la fonction de Visiteur.

En 1928, le frère Laurentino est appelé à diriger la Province d’Espagne. Il se rend à Canet de Mar, au sanctuaire de la Vierge et il y renouvelle la consécration qu’il avait faite 31 ans avant et il remet dans les mains de la Vierge Marie le travail qu’on lui demande.

L’Espagne entre dans une période tragique et turbulente. Les frères ont besoin d’être guidés par une personne prudente et ferme. Au milieu de la tourmente, le Fr. Laurentino sait transmettre du courage et de l’audace pour résister et même pour fonder de nouvelles écoles : Séville, Córdoba, Huelva… qui sont encore aujourd’hui des collèges florissants. Il sait aussi créer parmi les Frères un climat d’intense vie spirituelle qui dynamise l’apôtre et prépare le martyr. Pendant la période de la persécution, la vie spirituelle et apostolique des communautés atteint un niveau étonnant.

L’heure du martyre était proche. Le 18 juillet 1936, l’armée d’Afrique commence le soulèvement national. Le 19, éclate la révolution à Barcelone et le soir des centaines d’églises et de couvents sont livrés aux flammes.

Quel était l’état d’âme du Fr. Laurentino ? Le 3 octobre 1936, il envoie le Fr. Atanasio à Murcia pour porter secours aux frères qui sont en prison. Il lui conseille d’apporter avec lui le Saint Sacrement et il lui confie ce message : Dites aux Frères que depuis que la révolution sanglante a éclaté, je ne vis que pour eux, je les rappelle constamment à ma mémoire et je ne cesse de les recommander à la Très Sainte Vierge.

Il aurait été facile au frère Laurentino de se sauver en Italie. Il a toujours préféré rester avec ses Frères persécutés. Il arrive à faire passer en France 117 jeunes en formation. Mais, lui-même et 106 autres frères tombent dans le piège que leur a tendu la FAI.

Le 7 octobre 1936, dans le port de Barcelone, on les fait monter dans le bateau Cabo San Agustín qui aurait dû les amener en France, après avoir versé à la FAI la somme convenue.

La nuit suivante, 46 frères de ce même groupe, entre eux les Frères Laurentino et Virgilio, sont assassinés dans les cimetières de Barcelone.

Un regard dans son âme

Dans ces jours douloureux, pendant lesquels nous avons vécu des heures de profonde inquiétude, ma pensée a toujours été tournée vers les personnes et les belles œuvres de notre Province aimée, désireux de me mettre en fréquente communication avec les frères, surtout les plus menacés, dans le désir de les consoler et de leur exprimer la religieuse affection que mon cœur de père ressentait plus que jamais pendant ces jours de deuil.

En ces moments critiques, que notre attitude ne soit pas celle de ceux qui se livrent à de stériles lamentations… Soyons des religieux en paroles, actions et sentiments, surtout en ces moments où il semble que le Seigneur désire nous faire sentir un peu le poids léger de sa croix adorable… Prions donc avec ferveur… Donnons-nous totalement à Dieu et à notre travail… Nous sommes dans un moment favorable, puisque maintenant nous nous sentons vraiment disciples du Christ. Mille fois heureux si le Seigneur nous juge dignes de souffrir pour Lui.

C’est maintenant le temps !

Ce sont des souhaits bien étonnants que le frère Laurentino, Provincial, envoie à ses Frères au début de l’année 1933, l’année de la Rédemption :

Oh ! vous qui dites tous les jours à Dieu que vous l’aimez de tout votre cœur, de toute votre âme et de tout votre être, eh bien ! c’est maintenant le temps de le montrer. Oui, maintenant que ceux qui persévèrent dans son amour sont raillés, délaissés, calomniés, privés de leurs légitimes droits de citoyenneté, insultés et devenus la cible d’une persécution satanique.

C’est maintenant le moment de montrer jusqu’où va la fidélité que vous avez jurée au Seigneur. C’est maintenant le temps de prouver que vos désirs de sacrifices ne sont pas illusoires et pure fantaisie. Ceux qui aujourd’hui font preuve de lâcheté et désertent la bonne cause peut-être se croyaient-ils un jour invincibles.

Le temps vient où l’on verra les vaillants, ceux qui peuvent tout en celui qui nous fortifie et qui est notre Vie et notre Force, ceux qui pour rien au monde ne perdent la paix, mais qui abrités derrière le rempart de Dieu, donnent l’impression que leur âme devient plus forte devant les difficultés et les angoisses du moment. Ils ne reculent pas devant les plus grands sacrifices – bien qu’ils reconnaissent volontiers leur fragilité – comme ne reculait pas devant les tyrans et les persécuteurs… la pléiade des martyrs, des confesseurs et des hommes épris de Jésus-Christ.

C’est maintenant le temps de vous réjouir et de jubiler, comme nous dit Jésus et comme firent les apôtres quand arriva le moment de souffrir des épreuves et des persécutions pour le nom du divin Maître.

Par ailleurs, ce n’est pas nous qui sommes persécutés, mais c’est Jésus qui est persécuté en chacun de ses fidèles serviteurs. Chacun de nous souffre pour un seul, mais lui souffre dans tous ses membres.

Faites donc taire vos plaintes et vos lamentations vous qui suivez le Rédempteur ; vous n’êtes pas encore arrivés aux douleurs du Calvaire ni au dénuement du Sauveur. Lui se tait, prie, souffre et rachète. Priez, réparez, travaillez, coopérez avec Lui au salut des âmes. Voudriez-vous une préparation meilleure pour célébrer le 19ème centenaire du drame sanglant du Calvaire ?

C’est maintenant le temps de réparer plus efficacement pour soi-même et pour les autres les mépris faits à Dieu. C’est maintenant le temps de faire violence au ciel avec des prières ferventes et continuelles en faveur des intérêts de Dieu et de l’Église ; et en faveur des personnes et des œuvres qui nous sont si chères et qui nous sont particulièrement recommandées.

Oui, c’est maintenant le temps de prier et de bien prier comme nous le demande notre état.

Maintenant, maintenant, sans attendre après ni demain… Maintenant c’est l’heure de profiter de ce temps d’épreuve qui est un temps de grâce et de bénédictions…Que ce soit notre devise pour l’année 1933.

(Frère Laurentino – Stella Maris, janvier 1933, n° 138, p. 5.)

Béatifié à Rome le 28 octobre 2007, par S. E. le Cardinal José Saraiva Martins, Préfet de la Congrégation pour la Cause des Saints.

http://www.champagnat.org/fr/220411023.asp

 

 

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