La spiritualité de sainte Mechtilde
d’après le Livre de la Grâce spéciale

 

2-Le Cœur de Jésus et sainte Mechtilde

        2-1-La vocation de Mechtilde

Mechtilde, sachant que ses péchés avaient été remis, se reposait sur le Cœur de Jésus:

Alors, elle vit sortir du Cœur du Seigneur un instrument de musique dont elle se servit pour célébrer les louanges de Dieu... 

Puis, le Seigneur l’appela et posa ses mains sur les mains de Mechtilde afin de lui donner tout le travail et toutes les œuvres de sa sainte humanité. Il mit ensuite ses yeux si doux sur les yeux de sa bien-aimée, et lui communiqua ainsi le mérite de ses saints regards et des abondantes larmes qu’il a versées. Par le contact de ses oreilles, il lui donna toutes les opérations de son ouïe divine, et par celui de ses lèvres vermeilles, toutes ses paroles de louange, d’action de grâce, de prière; et même celles de ses discours publics, pour suppléer aux négligences qu’elle avait commises.

Enfin il unit son très doux cœur à celui de sa bien-aimée; il lui appliqua le fruit de tout son travail de méditation, de dévotion, d’amour, et l’enrichit de tous ses biens. Alors cette âme tout entière, incorporée au Christ Jésus, fondue par l’amour, comme la cire par le feu, reçut le sceau de la ressemblance divine. C’est ainsi que cette bienheureuse devint une même chose avec son Bien-Aimé... (Voir Annexe 1) (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre 1)

        2-2-Les images et les symboles représentant le Cœur de Jésus

            2-2-1-Le Cœur de Jésus est une lampe

Pendant une messe, au moment de l’élévation de l’hostie consacrée, Mechtilde crut voir le Seigneur élever de ses propres mains son Cœur très doux semblable à une lampe translucide, remplie et débordante... Ceci donnait à entendre que les hommes peuvent tous recevoir, de la plénitude du Cœur de Jésus, la grâce plus que suffisante à chacun, selon sa capacité, sans que ce Cœur cesse de surabonder en lui-même de béatitude, car, en se déversant, il ne souffre pas de détriment.

Et Mechtilde vit alors les cœurs de toutes les personnes présentes sous forme de lampes attachées par des liens au Cœur du Seigneur. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XXI, 19)

Une autre fois, pendant la messe, la servante de Dieu vit le Cœur de Jésus-Christ symbolisé par une lampe transparente comme le plus pur cristal et ardente comme la flamme. Cette lampe laissait déborder de tous côtés son incomparable douceur, qui, plus suave que le miel, pénétrait les cœurs de tous les dévots assistants. Le feu signifiait l’ardeur de ce divin amour qui porta le Christ à s’offrir pour nous à Dieu le Père sur l’autel de la croix. La douceur répandue signifiait la surabondance des biens et de la félicité qu’il nous a donnés dans son propre Cœur.

Oui, nous avons vraiment en lui tout ce qui peut nous être salutaire et utile, c’est-à-dire la louange et l’action de grâces, la prière, l’amour, le désir, la satisfaction, enfin tout ce qui peut compenser toutes nos négligences. (Le Livre de la Grâce spéciale, troisième partie, chapitre XVII, 17)

            2-2-2-La maison

Mechtilde venait de voir le Cœur de Jésus sous la forme d’une lampe quand, soudain, le divin Cœur se changea en une grande maison d’or, et le Seigneur se promenant au milieu de son propre Cœur comme dans un splendide et agréable jardin.

Comme Mechtilde s’étonnait, elle entendit le Seigneur:

— As-tu donc oublié ce mot du psaume 2: “J’allai et je venais dans l’innocence de mon cœur, au milieu de ma maison”? Et qui peut réaliser cela sinon  moi? Personne n’est innocent par soi-même, sinon moi seul. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XIX, 17)

Quand Jésus donne son Cœur à une âme

Pendant une messe après le 4ème dimanche après Pâques, le Seigneur dit à Mechtilde:

— Je te donne mon Cœur comme maison de refuge, afin qu’à l’heure de ta mort il ne s’ouvre devant toi d’autre chemin que celui de mon Cœur, où Tu viendras te reposer à jamais.

Mechtilde conçut alors une grande dévotion pour le divin Cœur de Jésus-Christ, et, ensuite, presque chaque fois que le Seigneur lui apparaissait, elle recevait de ce Cœur quelque faveur spéciale, comme celle de causer familièrement avec lui. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XIX, 17)

La familiarité du Cœur de Jésus

Mechtilde souhaitait vivement la présence de son Bien-Aimé lorsqu’il lui apparut. Son Cœur était ouvert comme la porte d’une grande maison, pour lui donner entrée: le pavé était d’or dans cette maison, dont la forme ronde signifiait l’éternité de Dieu. Le Seigneur se tenait au milieu, l’âme auprès de lui. Ils causaient ensemble... (Le Livre de la Grâce spéciale, Troisième partie, chapitre I, 1)

Pendant les fêtes de Pâques, le Seigneur lui révéla encore la maison de son Cœur:

Le Seigneur lui montra une superbe maison, vaste et élevée. Dans cette maison, elle en vit une petite, faite de bois de cèdre, revêtue à l’intérieur de lames d’argent; au milieu résidait le Seigneur. Elle reconnut sans peine que cette maison était le Cœur divin, car elle l’avait vu plus d’une fois sous ce symbole; la petite maison située dans la grande figurait l’âme qui est immortelle à l’instar du bois incorruptible des cèdres. La petite maison avait sa porte à l’orient, fermée d’un verrou d’or d’où pendait une chaîne d’or qui allait s’attacher au Cœur même du Seigneur, de telle sorte que la chaîne paraissait l’ébranler lorsque la porte s’ouvrait. Mechtilde comprit que la porte désignait le désir de l’âme, le verrou sa volonté; mais la chaîne figurait le désir de Dieu, qui, toujours, prévient et excite le désir de l’âme, et l’attire à lui.

Le Seigneur lui dit:

— C’est ainsi que ton âme est toujours enfermée dans mon Cœur, et moi dans le tien. Mais quoique tu me contiennes au-dedans de toi, si bien que je te suis plus intime que tu ne l’es à toi-même, cependant mon divin Cœur dépasse et surpasse tellement ton âme qu’elle semble ne pouvoir atteindre jusqu’à lui: c’est ce que signifie l’élévation et les vastes dimensions de la grande maison que tu as vue. (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre XIX, 33)

Huit jours après Pâques Mechtilde vit de nouveau la maison. Elle entra et arriva “jusqu’à la plaie du Cœur. Elle le vit grand ouvert et laissant échapper des vapeurs aussi embrasées que celles d’un ardent foyer.

— Entre, dit Jésus, parcours mon divin Cœur en long et en large: sa longueur représente l’éternité de ma bonté; sa largeur l’amour et le désir que j’eus toujours de ton salut. Parcours cette longueur et cette largeur, c’est-à-dire revendique comme ta propriété, parce qu’il est vraiment à toi, tout le bien que tu trouveras dans mon Cœur. Et le Seigneur souffla sur elle en disant:

— Reçois mon Saint-Esprit.

Alors cette bienheureuse, remplie de l’Esprit-Saint, vit sortir de tous ses membres des rayons de feu dont chacun allait toucher une des personnes pour qui elle avait prié. après la communion, son cœur lui sembla fondu en un seul lingot d’or avec celui du Seigneur qui lui disait:

— Ainsi ton cœur adhérera toujours au mien selon ton désir et en proportion des délices que tu trouveras dans cette union. (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre XIX, 36)

Jésus vient dans les âmes avec un si grand amour que le cœur le plus froid et le plus obstiné peut s’y embraser et se fondre d’amour, s’il consent à ne pas résister. (Le Livre de la Grâce spéciale, troisième partie, chapitre XVIII, 18)

            2-2-3-Le Cœur de Jésus est comme une vigne

Un dimanche, le Seigneur lui dit:

— C’est dans l’amour de mon Cœur que je te laverai!

Aussitôt il ouvrit la porte de ce Cœur, trésor où sont enfermées les douceurs infinies de la Divinité. Elle y entra comme dans une vigne. Elle y vit un fleuve d’eau vive qui coulait de l’orient à l’occident; et sur les bords du fleuve, douze arbres pourtant douze fruits qui sont les vertus énumérées par saint Paul dans son épître, c’est-à-dire: la charité, la pais, la joie. (Gal V, 22) Ce cours d’eau avait nom: fleuve de l’amour. L’âme y entra, et fut lavée de toutes ses taches... Il y avait aussi dans cette vigne, une plantation de palmiers... Le Seigneur, sous la figure d’un jardinier béchait la terre. L’âme dit:

— Ô Seigneur, quelle est votre bêche?

— Ma crainte, répondit le Seigneur.

En certains endroits la terre était dure, meuble en d’autres. La terre dure signifiait les cœurs endurcis dans le péchés, que ni avis, ni reproches, ne peuvent corriger; la terre meuble désignait les cœurs qui se sont attendris par les larmes et la contrition sincère. Le Seigneur dit:

— Ma vigne c’est l’Église catholique. Pendant trente trois ans je lui ai donné mon travail et mes sueurs. Viens travailler avec moi dans cette vigne... (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre II, 2)

Mechtilde demanda à Jésus que son cœur à elle soit toujours une vigne selon son Cœur. Aussitôt elle se vit comme une vigne se promenant dedans son propre cœur et il lui fut révélé que l’homme juste est la vigne de Dieu, car le Seigneur prend ses délices en celui qui, de l’enfance à la mort, vit saintement pour lui. Cependant elle avait aussi aperçu au milieu de la vigne une fontaine auprès de laquelle le Seigneur était assis. De son Cœur Sacré, comme d’une source, l’eau coulait rapide vers cette fontaine où il semblait la puiser pour la répandre sur les hommes désireux de leur régénération spirituelle. Dans la construction élevée au-dessus de la fontaine, on pouvait admirer sept écussons sculptés représentant les sept dons du Saint-Esprit; ils sont en effet, bien représentés sous la forme d’écussons ou de boucliers, car nul ne peut, sans avoir vaillamment combattu, les posséder toujours pleinement.

Plus tard le Seigneur lui dit que lorsqu’une âme est admise dans son intimité, il lui donne le mets le plus exquis, c’est-à-dire le sacrement de son Corps et de son Sang. (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre XXII, 41)

            2-2-4-Le fleuve d’eau vive

Au cours d’une vision, Mechtilde vit un fleuve sortir du Cœur divin pour se répandre sur elle, la pénétrer tout entière et chasser sa tristesse au point de n’en laisser aucune trace. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XXII, 20)

            2-2-5-Le Cœur divin est une cuisine

Étonnant! Reconnaissant son indignité Mechtilde déclara au Seigneur:

— ... Je suis indigne d’être employée dans votre cuisine à laver les écuelles!

Jésus répondit:

— Ma cuisine, c’est mon Cœur divin. La cuisine est une salle commune ouverte à tous, aux esclaves comme aux personnes libres; ainsi mon Cœur est sans cesse ouvert pour tous et disposé à fournir à chacun ce qui peut lui plaire. Le chef de cette cuisine est le Saint-Esprit, dont l’inestimable suavité remplit sans cesse mon Cœur avec une libéralité débordante. Mes écuelles, ce sont les cœurs des saints et de mes élus qui reçoivent continuellement de cette surabondance enivrante de mon Cœur divin. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XXIII, 20)

            2-2-6-Le nid de l’âme

Un jour, après la communion, Jésus dit à Mechtilde:

— Tu te feras un nid dans mon Cœur divin.

— Qu’est-ce que ce nid? dit Mechtilde.

Le Seigneur répondit:

— L’humilité gardée dans les dons et les faveurs que tu reçois de ma part; plonge-toi toujours dans l’abîme d’une humilité sincère. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XXIV, 21)

            2-2-7-Une flamme ardente

Mechtilde vit le Cœur du Seigneur ouvert... Son aspect était celui d’une flamme ardente plutôt que d’un brasier; sa couleur était admirable tandis que sa forme défiait toute description. Le Seigneur dit:

-Ainsi ai-je voulu que les cœurs de tous les hommes fussent embrasés du feu de l’amour. (Le Livre de la Grâce spéciale, troisième partie, chapitre X, 10)

            2-2-8-Les battements du Cœur de Jésus

Quatre battements du Cœur de Jésus

Pendant une messe de la Nativité, l’âme de Mechtilde saisit l’Enfant Jésus et entendit battre son Cœur. Or ce cœur donnait comme d’un seul élan trois vigoureuses pulsations, puis un coup léger... Jésus dit:

— Mon Cœur ne battait pas comme celui des autres hommes... il a toujours battu comme tu l’entends.: c’est pourquoi je suis mort si vite sur la croix.

            Le premier battement vient du tout puissant amour de mon cœur, amour si grand que j’ai vaincu dans ma douceur et ma patience les contradictions du monde et la cruauté des juifs.

            Le second battement vient de l’amour très sage par lequel le me suis gouverné moi-même et tout ce qui m’appartient d’une manière infiniment digne de louanges, amour qui m’a fait ordonner avec sagesse tout ce qui est au ciel et sur la terre.

            Le troisième battement vient de ce doux amour qui me pénétrait au point de me faire trouver douces les amertumes de ce monde, et de me rendre aimable et très agréable la mort si amère que j’ai endurée pour le salut des hommes.

            Le quatrième est faible battement est l’expression de la bonté que j’eus, comme homme, et par laquelle je paraissais aimable, de société facile et imitable en tous ses actes. (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre V, 9)

            2-2-9-Le miroir

Le Cœur du Christ est pour nous le miroir du plus ardent amour; nous pouvons y voir la tiédeur de notre cœur à l’égard de Dieu et du prochain. (Le Livre de la Grâce spéciale, troisième partie, chapitre XV, 15)

        2-3-Le Cœur de Jésus supplée à nos manques

            2-3-1-Le Seigneur supplée à nos négligences

Mechtilde n’avait pu arriver à l’heure à la messe, ayant dû, par obéissance, achever un travail.  Elle était fort désemparée. Le Seigneur vint la rassurer en lui disant:

— Ne me crois-tu pas assez de valeur pour payer tes dettes?... Est-ce que je ne suis pas d’une valeur assez appréciable pour suppléer à toutes tes omissions?... Donc, je répondrai complètement de tout devant Dieu le Père. (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre XXXI, 55)

Mechtilde se plaignait encore ses négligences, pensant qu’elle avait inutilement dépensé les dons reçus de Dieu, et qu’elle les avait consommés sans profit par son ingratitude. Mais le Seigneur lui dit:

— Ne te trouble pas, j’acquitterai toutes tes dettes et je suppléerai à toutes tes négligences... Si tu m’es parfaitement fidèle, tu dois préférer de beaucoup que l’Amour répare tes négligences plutôt que de les réparer toi-même, car il en aura ainsi la gloire et l’honneur. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XV, 13)

Une autre fois, comme elle regrettait chez une personne de sa connaissance une négligence envers la sainte Vierge, la Vierge  Mère de Dieu lui donna le Cœur de Jésus-Christ, sous la forme d’une lampe ardente, en lui disant:

— Voici que je te donne le très digne et très noble Cœur de mon Fils bien-aimé afin qu’elle me l’offre avec la fidélité parfaite et le souverain amour qu’il m’a témoigné et me témoignera sans fin. Qu’elle me l’offre pour toutes ses négligences à mon service, et sa faute sera amplement réparée. (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre XLVI, 9)

            2-3-2-Comment le Seigneur supplée à ce qui nous manque

Mechtilde était tombée dans une grande tristesse et se croyait inutile puisque, après avoir reçu de si grandes grâces elle n’aimait pas Dieu comme elle l’aurait dû. Le Seigneur lui dit:

— Eh! ma bien-aimée, ne sois pas triste; tout ce qui est à moi est à toi.

Alors elle dit:

— Si vraiment tout ce qui est à vous est à moi, votre amour est donc mien, et il est vous-même, ainsi que dit Jean: “Dieu est amour”. Alors je vous offre cet amour pour qu’il supplée à tout ce qui me manque.

Le Seigneur accepta cette parole et répondit:

— C’est bien, et quand tu voudras me louer ou m’aimer et que tu n’arriveras pas à satisfaire ton désir, tu diras: “Je vous loue, ô bon Jésus; à tout ce qui me manque, suppléez vous-même, je vous prie.” Et quand il te plaira de m’aimer, tu diras: “Je vous aime, ô bon Jésus; à ce qui me manque, daignez suppléer en offrant à votre Père, pour moi, l’amour de votre cœur.” (Le Livre de la Grâce spéciale, quatrième partie, chapitre XXIII, 22)

            2-3-3-Jésus supplée aussi à nos insuffisances spirituelles

Un jour Mechtilde vit Jésus sous la forme d’un adolescent d’environ douze ans. Il lui dit:

— Qu’y a-t-il dans l’amour de la louange divine, sinon un certain gémissement de l’âme qui souffre de ne jamais louer Dieu autant qu’elle le désire? Eh bien! les désirs, la dévotion, la prière, la bonne volonté qu’une âme a de faire le bien, sont également un gémissement douloureux; et quand je viens suppléer par moi-même aux impuissances de cette âme, je la guéris de toutes ses blessures. (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre IX, 15)

            2-3-4-La réciprocité dans la suppléance

Un autre jour, le Seigneur, toujours à la recherche du salut de l’homme, fit comprendre à Mechtilde que, comme le Seigneur ne peut plus maintenant souffrir ses douleurs, il se fait suppléer par ses amis, par ceux qui adhèrent à lui dans la fidélité... Ainsi, les souffrances et les tribulations de ceux qui l’aiment contribueront au mérite des justes, au pardon des pécheurs et au bonheur éternel des défunts... (Le Livre de la Grâce spéciale, troisième partie, chapitre XXVI, 37)

Une autre fois encore, remplie de tristesse elle gémissait de se voir inutile, parce que la maladie l'empêchait de garder l'observance. Alors elle entendit le Seigneur lui dire:

— Ah! Viens à mon secours, laisse-moi rafraîchir en toi l'ardeur de mon Cœur divin.

Par cette parole, elle comprit que toute personne qui supporte volontiers les peines et les tristesses en union avec l'amour qui fit supporter à Jésus-Christ sur la terre tant d'afflictions et une mort ignominieuse, offre au Seigneur de rafraîchir en elle l'ardeur de son Cœur divin. N'est-il pas toujours à la recherche du salut de l'homme? En effet, comme le Seigneur ne peut plus maintenant souffrir lui-même, il se fait suppléer par ses amis, par ceux qui adhèrent à lui dans la fidélité. Et lorsque l'âme, qui aura été sur la terre le rafraîchissement du Cœur divin, entrera dans le ciel, elle volera droit vers le Cœur de Dieu, et elle ira, dans les flammes de ce Cœur embrasé, se consumer tout entière avec ce qu'elle aura supporté pour le Christ.

        2-4-Le cœur de Jésus, c’est la miséricorde

            2-4-1-Dieu est la Charité qui anime son Cœur et accueille les âmes

Un jour de l’Ascension Mechtilde semblait être sur une montagne. Elle vit  soudain l’Amour sous la forme d’une vierge qui lui dit:

 C’est moi qui ai conduit le Fils, du sein de son Père jusqu’en ce monde terrestre; c’est moi qui maintenant l’élève au-dessus de tous les cieux.

Le Seigneur Jésus parut soudain orné des vêtements de l’Amour, de la Charité. Ainsi Dieu était vêtu de lui-même, puisque Dieu est Charité, et que la charité, c’est Dieu.

Le Seigneur Jésus arriva alors devant son Père et lui présenta, renfermées en lui-même, les âmes de tous les élus, tant de ceux qui étaient déjà au ciel que les élus à venir avec toutes leurs œuvres, leurs souffrances et leurs mérites. Celles-là, même qui, pour le moment, étaient en état de péché, apparaissaient dans le Christ telles qu’elles seraient plus tard dans le ciel. Mais les âmes éprises d’amour et patientes dans la souffrance étincelaient en son Cœur d’un éclat particulier, tandis que les autres brillaient, selon leur rang, dans les diverses parties de son Corps.

Alors l’âme se prosterna aux pieds du Seigneur pour l’adorer. Puis elle demanda au Seigneur pourquoi tant de gens attendaient la mort avec frayeur. Le Seigneur répliqua:

 La crainte du trépas vient de la nature, car l’âme aime le corps et frissonne d’horreur devant l’amertume de la séparation. Mais toi, que crains-tu puisque tu as reçu mon Cœur en gage d’immortelle alliance, pour maison de refuge et pour demeure éternelle?

            2-4-2-Les larmes d’amour du Seigneur

L’Évangile rapporte quelques scènes où Jésus pleura; il expliqua:

 Chaque fois que sur la terre je pensais à cette ineffable union qui me fait un avec Dieu le Père, mon Humanité ne pouvait retenir ses larmes. Au souvenir de cet inestimable amour qui, m’attirant du sein du Père, m’a fait épouser la nature humaine, mon Humanité ne pouvait s’empêcher de verser des pleurs.

 Où sont donc ces larmes que l’amour seul fit couler de vos yeux? demanda Mechtilde.

 Elles ont une place spéciale dans mon Cœur, comme un trésor préféré que l’on garde seul dans un lieu choisi... Ces larmes sont conservées au plus intime de mon Cœur.

Et Mechtilde vit de nouveau le Seigneur ouvrir la plaie de son Cœur. Il lui dit:

 Regarde l’étendue de mon amour: si tu veux le bien connaître, tu ne le trouveras nulle part plus clairement exprimé que dans l’Évangile. On n’a jamais entendu formuler de sentiments plus forts et plus tendres que ceux-ci: Comme le Père m’ai aimé, ainsi je vous ai aimés. (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre XXI, 39)

            2-4-3-La source de miséricorde

Le Seigneur emmena Mechtilde au pied d’une montagne déserte et lui montra la fontaine de miséricorde qui prend sa source au bas de cette montagne. Les anges firent boire l’eau de la source à la glorieuse Vierge Marie pour l’accroissement de sa béatitude, puis à tous les habitants du ciel. Ensuite les anges firent boire de la susdite source de miséricorde à l’Église militante... Enfin, les anges firent boire de cette même fontaine de miséricorde aux âmes du purgatoire. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XXVIII, 25)

La nuit suivante, conduite de nouveau en esprit à cette fontaine de miséricorde, elle vit bouillonner, sortant de la même source, la veine d’eau très abondante de l’humble reconnaissance. Ce cours d’eau, après avoir traversé le Cœur de Jésus-Christ, retournait aussi pur vers sa source. Et ceci doit s’entendre de la manière suivante: puisque les dons de Dieu sont divers et que tous les hommes n’ont pas la même grâce, vu la division des dons, chacun doit veiller soigneusement sur le don qui lui a été conféré par Dieu, et le faire remonter à Dieu par la reconnaissance, s’estimant indigne de toute grâce et même de la vie. (Le Livre de la Grâce spéciale, deuxième partie, chapitre XXIX, 25)

Un autre jour parlant des saints, le Seigneur dit:

 En la fête de chaque saint tu peux me louer d’abord pour les avoir choisis de toute éternité... Même s’ils tombent dans de grands péchés (ceux qui sont encore sur la terre) je ne vois plus en eux que la gloire à laquelle ils parviendront... s’ils se convertissent, et grâce à ma miséricorde. (Le Livre de la Grâce spéciale, première partie, chapitre XXXIV, 60)

    

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