Troisième partie
LES Œuvres
DE Marie Lataste
(1822-1847)

 

Chapitre VI
 

Spécificités de la morale chrétienne

 

6
La vie consacrée

 

6-1-L'appel à la vie consacrée  (Livre 11, chapitre 12)

Une question est souvent posée: comment une âme entend-elle l'appel de Dieu, et comment doit-elle y répondre. Le sujet est grave, aussi Jésus va-t-il, encore une fois, répondre longuement aux questions de Marie Lataste qui écrit: "Je vous ai fait comprendre, ma fille, le bonheur et la dignité des âmes qui sont mes épouses. Cette grâce d’union avec moi, je la donne à qui il me plaît. Quand j’ai jeté mes regards sur une âme et que je veux l’attirer à moi, je souffle dans son cœur une pensée qui grandit et se développe comme un germe mystérieux. Puis cette âme manifeste cette pensée que j’ai déposée en elle, elle dit: 'Je serai l’épouse de Jésus.'

Heureuses ces âmes qui répondent à ma voix! Mais malheur aux parents qui veulent les détourner de moi, étouffer en elles la vocation que je leur ai donnée!... Quelle injustice envers Dieu et envers leurs enfants!... Quelle injustice et quel outrage!... Injustice à l’égard de leurs enfants... car les éloigner de la félicité, n'est-ce pas les rendre malheureux?...

Malheur aussi à ceux à qui je fais entendre ma voix et qui ne l’écoutent point!... Celui qui entend ma voix doit la suivre. Celui qui éprouve le souffle de mon esprit doit suivre l’impulsion de ce souffle et se diriger vers le but qui lui est indiqué."

Jésus poursuit: "J’aime à attirer vers moi les âmes par mille attraits différents, mille moyens divers.

– Il en est que je laisse dans le monde combattre vaillamment mes combats. Ces âmes sont fortes, ces âmes sont à l’abri de toutes les attaques...

– Il en est d’autres que j’appelle dans la solitude pour leur parler seul à seul, coeur à coeur, loin du monde...

– Il en est que j’attire uniquement, et dès le premier instant, par l’amour qu'elles ont pour moi,

– et d’autres par la crainte d’être séparées de moi pendant l’éternité."

6-2-Les dispositions pour répondre à l'appel de Dieu

"Le plus souvent, ma fille, je sépare du monde les âmes que je choisis pour épouses, et elles entrent en religion... Il y a quelquefois des âmes qui se croient appelées et qui ne le sont point; il y en a dont les sentiments ne sont ni purs ni désintéressés. C'est pour cela que je veux vous dire les dispositions nécessaires pour entrer en religion.

Une âme est appelée et correspond à sa vocation, quand elle répond à l’inclination donnée par Dieu pour un état de vie qui la sanctifiera par la pratique spéciale des vertus. Cette inclination est celle d'une âme qui accepte l’impulsion de Dieu... pour glorifier davantage le Seigneur en prenant un genre de vie plus parfait... Celui qui veut entrer en religion doit d’abord renoncer à sa volonté, et puis savoir se supporter lui-même patiemment et supporter autrui. Sans cela, cette détermination irréfléchie et dénuée d’un véritable fondement mettrait l'âme en danger de passer des jours tout à fait malheureux, une fois que serait éteint le premier feu excité dans un moment d’enthousiasme ou d’irréflexion. Le nombre de ceux qui agissent comme cela est grand, et au lieu de s’avancer dans la perfection en s’unissant de plus en plus à moi, ils scandalisent les autres et les empêchent d’avancer dans le bien et la vertu.

6-3-Répondre à l'appel de Dieu

Quand on a entendu l’appel de ma voix, on doit se préparer à en exécuter le commandement par une grande pureté de cœur, en suivant les avis de celui à qui on aura fait connaître sa vocation et qui l’aura reconnue véritable... Celui qui veut ainsi tout quitter pour me posséder et vivre avec moi doit se regarder comme mort au monde, au démon, à lui-même.

– Mort au monde, c'est-à-dire ne plus penser à ses parents ou à ses amis d'une manière naturelle, mais n'y penser que devant Dieu.

– Mort au démon qui fait la guerre particulièrement aux âmes qui se donnent à moi.

– Mort à lui-même, n'écoutant pas les suggestions perverses de la chair et des sens. Cette mort est une victoire véritable et la plus difficile.

Cette triple mort est une vie véritable et la seule qui puisse mériter le nom de vie, car être dans cette mort, c'est être uni à moi, c'est me posséder, et je suis la vie de tous ceux qui sont dans ce monde et qui veulent vivre dans l’éternité de la vie à laquelle je les initie ici-bas. Le monde, le démon et la concupiscence luttent contre ces âmes que je me choisis... Mais je donne à ces âmes trois armes qui abattent le monde, le démon et la concupiscence: le vœu de pauvreté contre le monde, le vœu d’obéissance contre le démon, le vœu de chasteté contre la concupiscence."  (Livre 11, chapitre 12)

6-4-Les vœux religieux  (Livre 11, chapitre 13)

Jésus va toujours au bout de ses enseignements. La vie religieuse étant une chose grave, Il développe avec précision la nature des vœux religieux et leurs obligations. Il dit à Marie Lataste: "Le vœu, ma fille, est un soutien, un appui, un abri, une défense pour l'âme... Le vœu est quelque chose d’essentiellement libre; mais le vœu est quelquefois une chose souverainement nécessaire. Il peut être et devenir aussi chose très importante. Aussi ne faut-il faire des vœux qu’avec circonspection.

Le vœu est une promesse faite à Dieu, par serment, de l’accomplissement d’un acte bon. Il y a le vœu conditionnel, et celui par lequel on s’engage sans condition. La condition réalisée, on doit accomplir le vœu qu'on a fait; le vœu absolu, qui ne renferme pas de condition, doit être toujours accompli.

Le vœu est une chose fort agréable à Dieu... On ne pèche point en ne faisant pas des vœux; mais on pèche si on ne les accomplit pas, et le péché est d’autant plus grave que la chose promise est grave, à moins qu'on ne se soit réservé expressément de ne vouloir point s’engager à l’observation du vœu, sous peine de péché mortel.

Il est prudent de ne jamais faire de vœu sans l’autorisation de son confesseur, et un confesseur ne doit jamais permettre des vœux perpétuels et pour la vie, qu’après s’être bien assuré de la vertu, de la fermeté et de la vigueur de celui qui veut s’engager ainsi. Que de peines on se crée par des vœux prononcés légèrement!... Que de grâces on attire sur soi quand on correspond au désir que Dieu manifeste de l’émission d’un vœu!... Oh! bienheureux sont ceux qui résistent au monde et à ses richesses par le vœu de pauvreté... Bienheureux sont ceux qui résistent au démon et à son esprit de révolte et d’orgueil par le vœu d’obéissance, et qui demeurent fidèles dans l’observation de ce vœu! Je serai leur richesse dans l’éternité; je serai leur gloire dans l’éternité; je serai leur félicité dans l’éternité." (Livre 11, chapitre 13)

Nous ignorons la date de la rédaction de ces textes concernant les vœux; peut-être avant l'entrée de Marie Lataste dans la Congrégation du Sacré-Cœur... Nous savons, par contre, que Marie Lataste mourut jeune, à moins de 26 ans, et elle le savait. Ce qui suit, et qui termine les chapitres consacrés aux vœux de religion, est-il une consolation offerte à Marie? Peut-être, car Jésus lui dit: "Nos relations auront commencé dans le temps, elles dureront dans les siècles des siècles. Ayez espoir, ma fille, vous triompherez de tout. Je vous cacherai comme ma colombe dans le trou du rocher; je vous enlèverai au monde, je vous donnerai une place dans la famille sainte consacrée à mon divin Cœur; là vous serez tout à moi et je serai tout à vous."  (Livre 11, chapitre 13)

   

 

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