Troisième partie
LES Œuvres
DE Marie Lataste
(1822-1847)

 

Chapitre VI
 

Spécificités de la morale chrétienne

 

2
Les vertus cardinales
(Livre 9, chapitre 1)

    

Après avoir longuement parlé des vertus théologales, Jésus va s'attarder sur les vertus morales de prudence, de justice, de force et de tempérance, vertus qui servent à diriger les mœurs du chrétien. Ces vertus morales sont données avec la grâce sanctifiante.

2-1-La prudence

Jésus continue à enseigner Marie Lataste. Il commence par dire que "la prudence est parmi les vertus morales ce qu'est la foi parmi les vertus théologales. Elle affecte l’intelligence dont l’action précède celle de la volonté et dirige toutes les forces, toutes les puissances qui sont dans l'homme... La prudence est cette inclination de l'âme qui fait que l'homme dirige ses actions avec une connaissance sûre pour opérer le bien."

Jésus indique qu'il y a plusieurs espèces de prudence et cite plusieurs vertus qui sont comme les compagnes de la prudence. "En conséquence, la mémoire, l’intelligence, la docilité, l’habileté, la raison, la prévoyance, la circonspection, les précautions, sont autant de parties intégrantes de la prudence. La mémoire rappelle le passé; l'intelligence donne la connaissance du présent; la docilité fait qu'on s’instruit par l'enseignement d’autrui; l'habilité interprète bien ce qui est passé; la raison par la connaissance d'une chose vous en fait connaître une autre; la prévoyance, par laquelle on devine les moyens pour arriver au but qu'on se propose; la circonspection, par laquelle on remarque les circonstances d'un événement, et la précaution, par laquelle on prévient les obstacles ou les dangers. Sans toutes ces choses, il n'y a point de prudence possible. "

Puis Jésus cite les trois puissances de la vertu de prudence qui sont le bon conseil, le jugement droit et une vue claire et distincte. Mais l'objectif de Jésus étant la vertu surnaturelle de prudence, il ne parlera  que de cette vertu et des vertus secondaires qui lui sont annexées: discrétion, docilité, la sollicitude et circonspection.

          2-1-1-La vertu surnaturelle de prudence

Jésus reprend la définition qu'il a donnée de la prudence: cette inclination de l'âme qui fait que l'homme dirige toutes ses actions avec une connaissance sûre d’opérer le bien. Puis il ajoute: "La prudence est la vertu de l'intelligence en action pour opérer le bien. Par la prudence, l'intelligence cherche dans le conseil le moyen d’arriver au bien, elle trouve ces moyens dans le jugement vrai de ce qu'elle voit, et elle emploie ces moyens en suivant la voie capable de la mener au but... La prudence surnaturelle est seule capable d’opérer le bien surnaturel... Elle vient de Dieu, c'est Dieu qui la donne et la place dans l’âme.

Il faut ardemment désirer cette vertu, car sans la prudence, l'homme risque de tomber dans de grands dangers; la prudence montre ce qu'il faut faire et ce qu'il faut éviter. Jésus rappelle la parabole des dix vierges de l’Évangile: les cinq vierges folles étaient des vierges sans prudence; les vierges sages, au contraire, possédaient la prudence, et leurs lampes étaient allumées quand l’époux arriva. Il faut demander à Dieu la prudence; il nous l’accordera, et nous la reconnaîtrons quand, dans nos actions, nous chercherons le bon plaisir et la gloire de Dieu, c'est à dire si nous consultons les lois de Dieu, si nous prions pour connaître en tout la volonté divine, et si nous recourons à notre intelligence. Nous sommes prudents si, dans les conseils que nous recevons, nous savons distinguer ce qui est bon de ce qui ne l’est pas, ce qui est en rapport avec notre vocation et nos forces, si nous savons distinguer ce qu'il y a de meilleur pour conduire notre vie. (Livre 9 chapitre 1)

          2-1-2-Le discernement (Livre 9 chapitre 1)

Mais il y a plus. Jésus précise: "La prudence s’exerce sur les actions extérieures des œuvres morales; il est une autre sorte de prudence qui s’exerce sur les œuvres intimes ou intérieures de l’âme, c'est le discernement. Le discernement, c'est la prudence spirituelle par laquelle on distingue, dans tout ce qui a rapport à l’intérieur, le bien du mal, le vrai du faux, le mieux de ce qui est bien, pour opérer ce qui est bien, saisir ce qui est vrai et répudier ce qui est faux... Ainsi le juste, par le discernement que lui donne la grâce, discerne toutes choses dans le monde qui est en lui, mettant toutes choses à leur place et réservant pour Dieu ce qui est et doit être à Dieu. Le discernement, c'est l’œil de l'âme; celui qui n’a pas le discernement est un pauvre aveugle, victime de mille maux qu'il ne peut éviter parce qu'il n'y voit point. Le discernement fait connaître ce qui est bien, ce qui est mieux, ce qui est parfait, ce qui est mal, ce qu'il y a de plus mauvais.

Le discernement fait connaître les devoirs envers les trois personnes de la sainte Trinité, envers le prochain... envers les saints et les élus de Dieu. Il fait connaître le temps du repos et du travail, de la parole et du silence... Pour que la prudence soit entière et parfaite, il faut qu'elle soit suivie de la docilité à écouter les conseils de Dieu... Tous les saints ont usé de docilité, et parce qu'ils ont été dociles, ils ont été prudents, et la prudence les a sanctifiés..."

Il y a une infinité de choses dictées par la prudence et le discernement, et il est impossible de les juger toutes par soi-même; en conséquence il faut savoir demander des conseil aux personnes réfléchies et sages, qui sont pleines de docilité et dont la parole est claire. Il faut suivre les avis de son directeur et lui dévoiler tout ce qui se passe dans l’intérieur de son cœur. Cette docilité supplée à ce qui pourrait nous manquer de prudence et de discrétion. Il convient donc d'être docile et rempli de sollicitude qui est la promptitude de l'âme à opérer ce que la prudence et le discernement nous montrent comme conforme aux règles du vrai et du bien.

          2-1-3-La sollicitude et la circonspection  (Livre 9 chapitre 1)

La sollicitude, c'est l’empressement chaleureux de l'âme à faire le bien. Jésus met en garde Marie Lataste: "La sollicitude arrête la tiédeur et empêche de tomber dans le péché. Voyez quelle sollicitude parmi les mondains pour accroître leur fortune, pour ramasser gloire et honneurs... Ils sont toujours en mouvement pour cela. Pourtant, qu’est-ce que la gloire du monde devant la gloire du ciel et les trésors de l’éternité? La sollicitude, ma fille, vous portera à faire vos bonnes œuvres avec empressement et attention, à l’heure convenable, dans le lieu opportun. Elle éloignera les obstacles et les difficultés, et vous fera accomplir chaque action comme si elle était la dernière de votre vie.

Enfin, ma fille, pour que la prudence soit entière et parfaite, il faut avoir encore la circonspection c'est-à-dire cette attention ferme de l'âme sur tout ce qui entoure l’action qu’on veut entreprendre, afin qu'elle se fasse selon les règles du vrai et du bien, et qu'on éloigne tous les obstacles, afin qu’une fois entreprise on ne soit point obligé de l’abandonner. Sans la circonspection, il est impossible d’opérer le bien; voilà pourquoi en envoyant mes disciples prêcher la bonne nouvelle de l’Évangile, je leur parlai ainsi: 'Voici que je vous envoie comme des brebis au milieu des loups; soyez simples comme des colombes et prudents comme des serpents.' Je voulais, par ces paroles, leur recommander la circonspection et la prudence:

– pour accomplir tout ce que je leur avais recommandé et se fier à moi;

– et être très avisés face aux crimes, aux vices et aux scandales qu'ils devaient trouver dans le monde...

Que de périls dans le monde. Satan est toujours prêt, comme un lion rugissant, à vous dévorer. Les passions sont toujours prêtes à se déchaîner... Il faut donc avoir l’œil ouvert pour apercevoir les dangers et aussi les moyens de les éviter..."

La circonspection évite les extrêmes, elle marche dans le droit chemin où se trouve la vertu. Elle consulte dans le doute; elle ne se hâte pas pour agir, mais attend le moment opportun. La circonspection mesure les pensées et tous les sentiments et elle ne dévoile pas ce qu'il faut tenir secret. Dans les dangers, qu'elle se fie à Dieu et demeure impassible, pour ne pas se laisser tromper ou séduire. La circonspection ne concède rien sans réflexion et ne fait pas de promesse qu’elle ne puisse tenir.

D'où la conclusion de Jésus: "Ô ma fille, soyez circonspecte, docile, pleine de sollicitude, acquérez le discernement et la prudence, même pour le bien de votre vie matérielle et terrestre; vous ferez toutes choses selon Dieu et son divin Fils, votre Sauveur, Dieu et homme tout ensemble, et la paix qui vous donnera la vie spirituelle, reposant dans le bien, vous donnera aussi la paix du cœur." (Livre 9, chapitre 1)

2-2-La justice  (Livre 9, chapitre 2)

La justice est, parmi les vertus morales, ce qu'est la charité parmi les vertus théologales. La justice commence dans le temps et durera jusqu'à  l’éternité. La vertu de justice est une inclination surnaturelle qui porte l'homme à rendre à Dieu, au prochain et à soi-même, ce qui est dû à chacun. La justice humaine consiste à rendre à chacun ce qui lui est dû. Jésus ne traitera pas de la justice humaine ou naturelle; il n'entretiendra Marie Lataste que de la vertu surnaturelle de justice. Jésus commence donc par rappeler les "devoirs de religion qu'il a prescrits et l’observation des commandements qu'il a donnés. On doit la reconnaissance à Dieu pour tous les bienfaits dont il nous a comblés, et, si nous l’avons offensé, nous lui devons réparation et repentir; tels sont nos devoirs envers Dieu."

Jésus rappelle aussi le respect, l’amour et la vérité que nous devons à notre prochain que sont nos parents, nos supérieurs... nos égaux et nos inférieurs... Il faut rendre un amour spécial à nos parents parce qu'ils sont pour nous les représentants de Dieu. Il faut également rendre à nos supérieurs amour, obéissance, respect et reconnaissance. À nos inférieurs il faut rendre les secours et les soutiens que nous pouvons leur donner. "On pèche contre la justice: envers Dieu par négligence, envers son prochain par cupidité, envers soi-même par amour-propre." (Livre 9, chapitre 2)

2-3-La force  (Livre 9, chapitre 3)

La vertu de force repousse la crainte coupable qui empêche de faire le bien; elle chasse aussi la témérité qui ferait entreprendre une œuvre contraire à la raison. La force soutient toutes les autres vertus. Par la force l'homme conserve le bien qui est en lui. Grâce à la force, on ne craint ni les périls, ni la mort, ni les épreuves, ni les douleurs, ni les misères de la vie; on ne craint ni les attaques du démon, ni ses tentations, ni les assauts du monde ou de ses passions.

Avec la vertu de force, l'homme combat noblement tous ses ennemis, ne cherchant que la gloire de Dieu. Il entreprend avec sécurité tout ce que Dieu inspire; surtout il ne regrette rien de ce qu'il a donné à Dieu: fortune, tranquillité, bonheur, et il persévère dans le bien et évite le mal sans se lasser, jusqu'à sa mort. Certes, l'homme peut, parfois, soupirer vers la patrie du ciel, mais avec la vertu de force, il attend patiemment l’heure de Dieu. Jésus fortifie Marie Lataste: "Vous serez comme une colonne de fer assise sur un roc de l’océan. Vainement les flots et les vents se déchaînent contre elle, elle demeure inébranlable. Vous serez ainsi, ma fille, vous serez ferme comme la montagne de Sion." (Livre 9, chapitre 3)

2-4-La tempérance  (Livre 9, chapitre 4)

Jésus rappelle que les vertus morales sont celles qui dirigent le cœur de l'homme selon la raison, pour l’éloigner du mal et lui faire pratiquer le bien dans l’usage des créatures. On peut considérer la tempérance comme une règle qui gère les actions et l’usage de la vie, et qui dirige l'homme dans l’usage des choses pouvant le plus facilement le séparer du bien, à savoir: les plaisirs de la nourriture et des sens.

          2-4-1-Tempérance dans les plaisirs des sens

Jésus donne ici un enseignement peu courant; il dit: "Parmi les choses qui se portent contre la raison et voudraient l’opprimer, il n’en est pas dont l’empire soit plus puissant que celui des plaisirs des sens, d’autant plus sentis qu'ils viennent d'un acte plus naturel ou plus en rapport avec la nature; par conséquent, le plaisir sera plus grand dans les actes qui tendent à la conservation de la nature humaine. Ces actes peuvent être considérés par rapport à la conservation de l’individu, qui s’opère par le boire et le manger, ou par rapport à la conservation de l’espèce humaine, qui s’opère par la génération. Voilà les actes les plus naturels à l’homme, les actes où il éprouve le plus de plaisir, les actes, par conséquent, qui tendent le plus à l’éloigner de Dieu.

C'est donc sur ces actes que la raison... doit s’exercer d’une manière toute particulière. C'est l’exercice de cette raison, donc la règle par laquelle elle dirige ces actes, qui est la vertu de tempérance. Par la vertu de tempérance que Dieu lui donne, l'homme exerce une domination ferme et juste sur les plaisirs qui sont dans le goût et le toucher, pour vivre d’une manière raisonnable et conformément aux desseins de Dieu sur lui. Deux choses sont essentielles à la vertu de tempérance: la honte, sentiment qui éloigne de la turpitude de tout acte contraire à la tempérance, et l’honnêteté, sentiment qui fait aimer la beauté inhérente à la tempérance... La tempérance réclame cet honneur qui ressort de la vertu, et l’intempérance, le déshonneur qui ressort du vice."

          2-4-2-Le toucher

Dans les exposés qui suivent, Jésus entre profondément dans quelques sujets particulièrement délicats. Il dit: "La vertu de tempérance a pour objet principal le toucher, dont elle règle l’usage. C'est la tempérance qui règle la sensation de plaisir qu'on éprouve au toucher... C'est pourquoi les vertus qui agissent sur les mouvements intérieurs du cœur, sur les mouvements extérieurs et les actes du corps, et qui, en observant la valeur réelle des choses de la vie tendent à réfréner, à modérer ou à diriger une inclination quelconque vers le mal, sont une partie de la vertu de tempérance...

-la tempérance règle les mouvements de l'âme qui l’attirent vers quelque chose, attraction qui est le toucher intérieur de l'âme. On peut citer:

Le mouvement de la volonté émue par l’impétuosité de la passion, est maîtrisé par la continence, qui fait que l'homme, éprouvant les assauts de la concupiscence, loin d’être battu par elle, lui résiste et lui commande en maître.

Le mouvement que produit une espérance fausse et une audace criminelle, est réprimé par l’humilité... qui se croit incapable de tout par elle-même.

 Le mouvement de la colère, qui porte à la vengeance, est réprimé par la douceur et la clémence.

-La tempérance règle aussi les mouvements du corps en lui-même, par la modestie et les mouvements de la langue, par la réserve et le silence; elle règle enfin les mouvements du corps vers les choses créées, par la discrétion, la pauvreté et l’économie.

Jésus va maintenant s'exprimer sur la honte, l’honnêteté, l’abstinence, la sobriété, la continence, l’humilité, la douceur, la clémence, la modestie, le silence, la discrétion et l’économie. Il donne un éclairage précieux sur ces thèmes difficiles. (Livre 9 chapitre 4)

          2-4-3-La honte

Le Sauveur Jésus dit à Marie Lataste:

"Les sentiments de honte et d'honnêteté sont deux sentiments ou deux inclinations de l'âme nécessaires pour la vertu de tempérance. La honte est la crainte du déshonneur par l’accomplissement d'un acte mauvais.

Il y a quatre espèces de honte:

– La honte qui empêche de faire le bien est coupable, mauvaise; c'est le respect humain; ne craignez jamais de faire le bien, n’en rougissez jamais, ne craignez que le mal.

– La honte du mal qu'on commet est mauvaise, si elle ne produit rien que la fuite des regards d’autrui, si elle ne fait point éviter le péché.

– La honte du mal qu'on a commis est bonne, si elle porte à éviter le mal; elle est sans effet véritable, si elle ne fait point éviter le péché.

– La honte qui empêche non seulement de commettre le péché, mais encore qui le fait fuir et donne de l’horreur pour lui, est bonne et appartient à la vertu de prudence.

Dans la honte, il n'y a que tendance à fuir le mal. Ainsi la honte ne se trouve ni dans ceux qui sont endurcis dans le vice, ni dans les parfaits. Les uns ne font que le bien, les autres, loin de craindre l’opération du mal, vivent continuellement dans le mal.

– La honte n’est point dans les enfants, parce qu'elle suppose un jugement, et qu'ils n'ont point l’usage de la raison et ne peuvent juger de rien. La honte se trouve dans les imparfaits qui tendent vers la perfection; elle est d’autant plus forte, elle a d’autant plus d’empire sur les hommes, que le vice et le péché sont plus grands, qu'ils se trouvent en face de personnages probes et vertueux, ou de personnes qui les voient plus souvent et sont plus à même de s’apercevoir de leurs défauts." (Livre 9, chapitre 4)

Quelle attitude avoir par rapport à la honte?

Jésus examine les différents cas à propos desquels la honte peut se manifester. Mais Il commence par une mise en garde: "Pour que la honte ne soit pas nuisible et qu'elle soit avantageuse, il faut tantôt l’éviter et la mépriser, et tantôt la modérer ou l’exciter en soi."

Jésus précise: "Il faut éviter la honte dans tout ce qui est bon. Si vous rougissez de moi, ma fille, pendant votre vie, je rougirai de vous à la fin des temps. Il faut mépriser la honte quand il n'y a aucune raison de rougir... comme la pauvreté et la misère. Il faut modérer la honte que l'on a de ses péchés... afin qu'elle n’empêche point d’en faire l’aveu au ministre chargé de les pardonner. Il faut exciter la honte dans la tentation... quand on risque de tomber dans le péché. C'est alors le moment de considérer la noirceur de l’offense envers Dieu et l’opprobre dont on se couvre par cette faute, parce que cette vue fait éviter le péché.

L'honnêteté

Comme la honte, l'honnêteté, jugement intime de l'âme sur la valeur d'un acte, est essentielle à la vertu de tempérance. Elle fait aimer la beauté inhérente à la tempérance. Elle a son principe dans l’intérieur de l'homme, mais elle se manifeste par l’accomplissement de l’acte; et c'est l’acte bon accompli qui fait juger de l’honnêteté de quelqu'un. Jésus dit à Marie Lataste: "Comme la tempérance est la vertu qui incline à faire le bien et à éviter le mal, vous comprenez, ma fille, que l’honnêteté doit nécessairement précéder la tempérance et être constamment avec elle."

          2-4-4-L'abstinence et la sobriété

Vertu par laquelle on modère le plaisir et l’usage de la nourriture, l’abstinence consiste, non à se priver complètement de nourriture, au risque de détruire sa santé et sa vie, mais à prendre la quantité suffisante afin de ne pas trop exciter les mouvements déréglés de la nature. Jésus dit: "Je vous ai donné l’exemple de l’abstinence dans l’usage que je fis sur la terre des mets les plus communs et dans le jeûne que je supportai dans le désert. Suivez mon exemple et pratiquez l’abstinence telle que je vous l’ai indiquée... Elle disposera votre âme à prier avec plus de ferveur... Elle développera votre mémoire et la rendra apte à se rappeler tous les bienfaits dont Dieu vous a comblée... Celui qui ne pratique pas l’abstinence est toujours dans une sorte d’engourdissement qui empêche l’usage de ses facultés... Le matin, vous vous trouvez plus disposée, plus apte à la prière, votre esprit se porte plus naturellement vers moi... Voilà pourquoi je vous entretiens le matin, à l'heure de votre prière, et plus particulièrement dans le lieu saint, près de mon tabernacle.

L'abstinence produit aussi le développement de l’intelligence qui ne se trouve pas arrêtée dans son essor par le poids des choses sensibles...  Puisque l’abstinence est si avantageuse, pratiquez-la ma fille; elle servira non seulement à votre âme, mais aussi à votre corps, le temple de Dieu. Le temple de Dieu est saint, dit l’apôtre, et ce temple, c'est l'homme...

Le corps est l’instrument de l’âme, et l'âme par le corps opère des œuvres de vertu et évite le péché... Il pratique le bien et fait de bonnes œuvres parce qu'il a la vigueur nécessaire, et que les aliments qu'il a pris ne le retiennent point attaché à la matière. L’abstinence est donc comme une porte fermée au mal et ouverte à la vertu... L’abstinence est l’assaisonnement de la nourriture de l'homme et le soutien de sa santé. Celui qui pratique l’abstinence ne mange que ce qui lui est nécessaire... Et cette nourriture le soutient, le fortifie sans altérer sa santé..."

D'où les conseils pratiques, et quelques réflexions sur la sobriété: "Pratiquez l’abstinence, ma fille; elle est utile aux intérêts de votre corps comme à ceux de votre âme; elle conservera la santé de votre âme et celle de votre corps. Ne recherchez point les mets délicats et bien préparés. Ne mangez jamais autant que votre appétit vous le permettrait... Enfin ne vous occupez point de la nourriture que vous aurez pour en désirer une plus recherchée...

La sobriété est pour l’usage du vin[1] ce que l’abstinence est pour l'usage de la nourriture. C'est une vertu par laquelle on modère le plaisir et l’usage de la boisson. C’est une vertu morale qui dépend de la vertu de tempérance, car... elle défend le bien de la raison contre tout ce qui peut l’attaquer... L'usage du vin, quand il est immodéré, fait perdre la raison. Il faut donc un rempart contre ce vice: c'est la sobriété, la règle dans l'usage qu'on doit faire du vin que Dieu a donné à l'homme pour le désaltérer et réparer ses forces, non pour lui faire perdre sa raison.

En effet, la sobriété conserve la lumière de l’intelligence, car l'usage modéré du vin fortifie le cœur, d’où procèdent tous les actes naturels et vitaux de l'homme; elle développe la puissance de l'esprit en l’excitant doucement et avec mesure; elle conserve le cerveau dans toute sa pureté; enfin, elle réjouit l'âme dans toutes ses facultés, et en particulier, celle qui saisit la vérité pour perfectionner toutes ses œuvres et leur donner de la fermeté...

La sobriété réprime la concupiscence de la chair. Le vin en effet, ma fille, excite tout l’organisme de l'homme; il augmente le penchant qu'il a pour le mal et porte naturellement au vice d’impureté... La sobriété est la conservatrice de la paix parmi les hommes. La paix disparaît parmi les hommes quand ils perdent la raison, ou que leur intelligence est voilée, ou que leur esprit est surexcité. Or, la sobriété conserve la raison, empêche la raison de se voiler et les esprits ou les forces de l'homme de se surexciter...

La sobriété n'est pas l’abstention complète du vin, elle est la règle de son usage. Elle convient à tout le monde... Elle convient en particulier aux religieux, afin qu'ils puissent vaquer aux œuvres de piété que leur devoir leur impose, afin qu'ils mortifient leur chair et s’exercent facilement dans la pratique de toutes les vertus. Elle convient à la jeunesse, pour ne point augmenter l’entraînement qu'elle a vers le mal, et aux femmes pour conserver toujours intacte la dignité de leur sexe." (Livre 9 chapitre 4)

          2-4-5-La continence

Le Seigneur continue l'examen des vertus liées à la tempérance. Il explique à Marie Lataste l'intérêt de la continence: "La continence, ma fille, est une vertu qui donne la force de résister à toute passion... C'est, au sens large, la répression des entraînements mauvais provenant du toucher et de tous les autres sens. La continence s'entend aussi de la chasteté dans l’état de mariage. Enfin, c'est la répression des mouvements déréglés de la concupiscence qu'on éprouve dans son âme. De quelque manière que vous l’entendiez, la continence est la fermeté de la raison contre les passions pour qu'elles n’entraînent point au mal... Que de maux, que de peines, que de regrets, que de malheurs dont préserve la continence!... La continence donne une vie tranquille et pacifique, elle donne une vie estimable et estimée des hommes, des anges et de Dieu; elle assure la vie heureuse du ciel..."

          2-4-6-L’humilité, la douceur et la clémence

Le Seigneur Jésus revient encore longuement sur la vertu d'humilité qu'il associe à la tempérance. C'est une vertu par laquelle l'homme, ayant une connaissance intime de la majesté de Dieu et de son propre néant, sait réprimer les mouvements qui le portent à s’élever au dessus de lui-même. Celui qui réprime ces mouvements désordonnés de lui-même est véritablement humble, parce que, s'il trouve en lui quelque chose de bien, il reconnaît ne l’avoir que par le don de la miséricorde de Dieu, se sachant indigne des biens que Dieu lui accorde. Il rapporte à Dieu toutes les faveurs qui lui viennent des hommes afin qu'elles retournent à Celui qui seul les a véritablement méritées.

Jésus décrit les attitudes le l'homme vraiment humble. Il dit, entre autres choses: "L'homme humble, parce qu'il se fait volontiers le serviteur de tous, cherche partout la dernière place et les emplois les plus vils. Il se tient vis-à-vis de Dieu comme un esclave soumis en toutes choses à la volonté de son maître, et comme un pauvre pécheur indigne de paraître devant lui..."

Un jour, Jésus avait déclaré à Marie Lataste que la foi était le fondement de toutes les vertus. Or voici qu'Il affirme que "la vertu d'humilité est la première des vertus, avant la foi, l’espérance et la charité. Elle est leur fondement." Marie s'étonne, et Jésus lui répond: "L'humilité est le fondement des vertus, mais d’une manière différente de la foi... La connaissance d’une chose précède le désir, et le désir précède les moyens pour acquérir sa possession. Les vertus théologales précèdent donc les vertus morales, parce qu'elles sont la connaissance, le désir et l’amour de Dieu, tandis que les vertus morales ne sont que les moyens pour atteindre Dieu. Or, la foi est la première des vertus théologales, donc elle est avant l’humilité, qui est une vertu morale, puisqu’elle se rattache à la tempérance, et, sous ce rapport, la foi est le fondement de toutes les vertus, même de l'humilité.

Par ailleurs, l’humilité est le fondement de toutes les vertus, même de la vertu de foi. Personne, en effet, n’aura la foi s’il ne commence par chasser l’orgueil de son âme et s'il n’y place l’humilité qui le soumet à la parole et à la révélation de Dieu. L’humilité est donc le fondement de la foi. L'humilité est aussi le fondement de l’espérance car elle dit: 'Je ne suis que faiblesse, je ne suis qu’impuissance, mais je puis tout dans Celui qui me fortifie.' L'homme humble, sachant qu'il ne peut rien par lui-même, met tout son espoir en Dieu, et dans son espérance, il s’écrie: 'Je puis tout dans Celui qui me fortifie.' Ainsi, l’humilité... met tout son espoir en Dieu. Enfin, l'humilité est le fondement de la charité. Celui qui s’estime ne pense qu’à lui, voilà pourquoi il oublie Dieu; L'humble ne pense qu’à Dieu... et cette pensée produit l'amour, l'amour pour Dieu...

Sans l'humilité, la foi chancelle; sans l’humilité, l’espérance diminue; sans l'humilité, la charité est détruite. Ce que je dis des vertus théologales, je le dis aussi des vertus morales. Sans l’humilité, la prudence est aveugle, la justice trompeuse, la force impuissante et la tempérance immodérée."

Jésus va encore plus loin dans l'éloge de l'humilité. "L’humilité, ma fille, est la grande voix de l'âme qui va de la terre au ciel et qui pénètre jusqu'au trône de Dieu. C'est la voix la plus agréable qui résonne aux oreilles de Dieu; c'est la prière la plus puissante qui monte jusqu'à lui, et voilà pourquoi elle obtient à l'âme les faveurs de Dieu les plus signalées. La Vierge Marie fut la plus humble des créatures et elle est devenue ma mère. Est-il faveur comparable à cette faveur? De plus, l'humilité préserve du péché, maintient dans le bien, enseigne la véritable sagesse, et donne enfin le bonheur véritable par la participation à la vue de Dieu.

Ma fille, aimez donc l’humilité. Marchez, sur mon exemple, dans la voie des humiliations ne cherchez point à vous produire, effacez-vous en tout... Comprenez que tout ce que vous avez, vous l’avez reçu de Dieu... Si je vous comble de mes faveurs les plus signalées, méritez-les encore plus par votre humilité, et en reconnaissant qu'il n'y a rien en vous qui vous rende digne de si grands témoignages de mon amitié pour vous...  et dans ces sentiments de l’humilité la plus profonde, tenez-vous toujours comme une servante devant Dieu... (Livre 9 chapitre 4)

La douceur et la clémence sont deux vertus qui ont une grande analogie... La douceur et la clémence concourent à refréner la colère, c'est là leur but commun, et en cela ces deux vertus paraissent se ressembler; elles diffèrent pourtant par leur manière d’opérer.

La colère porte à se venger d'une offense et à infliger une sévère punition. La douceur est une force qui empêche la colère et par conséquent qui prévient toute punition. La clémence porte à diminuer la peine ou la punition méritée et que la colère a augmentée. Ces deux vertus tendent donc à régler la colère; la douceur en la faisant disparaître, la clémence en diminuant la vengeance excitée par la colère; la douceur en combattant la colère, la clémence en combattant l’acte produit par la colère.

Ma fille... il n'est rien de plus suave dans la vie que les relations avec les personnes qui sont douces. C'est un parfum délicieux dont l’odeur se répandant sur toute la terre ravit tous les cœurs... Cette odeur si aimable s’insinue dans les âmes dont vous approchez, autant par votre air et vos manières que par vos paroles. C'est la compagne fidèle de l’humilité. Toute personne humble est douce en même temps. Mais une personne qui est douce peut n'être pas humble; alors elle n'a pas la véritable vertu de douceur, elle n'a qu'une douceur naturelle... la douceur de caractère...

Quand on a la douceur, on est affable, prévenant, aimable, patient, sans chercher jamais à déplaire en rien; on est toujours égal dans ses actions comme dans ses paroles... on a toujours une figure calme et sereine... on se possède même dans les torts ou les injures qu'on reçoit; on oublie le mal et on le pardonne; on fait du bien à ses plus grands ennemis. On m’imite dans ma manière d’agir... Quand on n'a pas la douceur, au contraire, on est brusque, froid, sévère, irascible; on éloigne les cœurs de soi. Exercez-vous, ma fille, dans la vertu de douceur. Elle convient à tous en général, mais en particulier aux supérieurs quels qu'ils soient, afin qu'ils puissent gagner la confiance et l’affection des inférieurs; elle convient en particulier aux prêtres, à cause de leurs relations intimes avec les consciences des fidèles... Demandez à Dieu cette belle vertu de douceur."

La clémence est une vertu qui porte à pardonner et à diminuer une peine méritée ou une partie de cette peine. La clémence est, par conséquent, une vertu morale, car elle soumet le mouvement du cœur à la raison. Jésus dit: "La sévérité est l’application rigoureuse de la loi. La clémence diminue la peine qui serait due, selon l’expression de la loi, parce que celui qui l’applique interprète l’intention du législateur plutôt que sa loi; aussi la clémence modère-t-elle le mouvement du cœur pour que la peine ne soit pas appliquée dans toute sa rigueur. La clémence doit être la grande vertu des princes, des prélats, des magistrats et des supérieurs. Ils doivent se rappeler la clémence de Dieu et de son Fils sur les hommes, et ne point punir selon l’étendue de leurs pouvoirs. La clémence guérit plus de maux que la sévérité...

Les passions sont apaisées par la clémence, qui souvent obtient ce que jamais n’aurait obtenu la sévérité. Rien de plus propre à exciter en vous la clémence que la considération de la fragilité humaine, de votre propre fragilité. Que de fautes aussi commises par mégarde ou par ignorance! Aussi ne faut-il point les punir selon la rigueur de la loi. Soyez clémente, ma fille, c'est-à-dire pardonnez toute la peine que mériteraient ceux qui pourraient vous offenser... Pardonnez-leur de grand cœur; traitez-les comme frères et amis. Rendez-leur service si vous le pouvez; témoignez-leur que vous avez tout oublié et que votre esprit n'a gardé aucun souvenir de leurs injures."

          2-4-7-La modestie et le silence 

Jésus nous a montré comment la tempérance réglait les mouvements intérieurs de l'âme par la continence, l’humilité, la douceur et la prudence. Il va maintenant expliquer à Marie Lataste comment elle règle aussi les mouvements personnels et extérieurs du corps par la modestie et le silence. La modestie règle les mouvements du corps, gouverne les sens, indique la manière dont on doit se récréer et préside à l’arrangement extérieur des vêtements, selon une juste pudeur. Jésus donne quelques précisions dont nos contemporains devraient bien tenir compte:

"La modestie est une vertu morale. Elle vous apprendra à régler les mouvements du corps; à ne point marcher avec précipitation ni avec trop de lenteur; à ne point agiter les bras d’une manière inconvenante; à ne point étendre votre corps avec mollesse; à vous tenir toujours, même seule, comme devant les personnes de distinction ou qui méritent votre respect... La modestie vous apprendra surtout à ne point tourner vos yeux de tous cotés, à ne point les fixer sur toutes choses; elle vous apprendra à regarder non avec fureur, mais avec bonté; non avec orgueil, mais avec humilité; non avec inconvenance, mais avec chasteté et pudeur... Elle vous apprendra à ne point garder un silence obstiné, mais à adresser quelques paroles dictées par la circonstance et toujours empreintes de dignité autant que de franchise et de sincérité.

La modestie vous apprendra à user de délassements convenables à votre âge, à votre condition, à votre sexe, pour récréer et refaire votre esprit et ne point le tenir toujours tendu. Elle vous apprendra... à fuir dans vos récréations tout ce qui peut blesser l’honnêteté ou la politesse et à ne vous récréer que dans les lieux et aux moments convenables. Elle vous apprendra à vous habiller d'une manière digne et en rapport avec votre position, sans chercher des habits de luxe ou des formes trop élégantes qui favorisent le dérèglement des passions. Elle vous apprendra à être au contraire toujours vêtue avec simplicité, ordre et propreté..."

La modestie est la première vertu qui règle les mouvements extérieurs du corps; voici la seconde, le silence. Le silence peut être l'abstention de langage et la modération de la parole ou l'amour du silence. "L'amour du silence est une vertu qui a pour but d’interdire à la langue toute parole illicite, comme la médisance, la calomnie, le mensonge, le parjure, toute parole déshonnête, impure, oiseuse ou inutile; il interdira à la langue des paroles même utiles ou licites quand il n'y a point de nécessité. Vous reconnaîtrez en vous l'amour du silence, si vous ne prononcez jamais de paroles déplacées, si vous ne parlez que dans le lieu où vous pouvez parler, c'est-à-dire hors du lieu saint... si vous vous abstenez non seulement du langage extérieur, mais encore du langage intérieur de votre esprit, en contenant votre imagination... si vous ne parlez jamais pour votre propre satisfaction, par amour-propre, mais toujours par charité et pour la plus grande gloire de Dieu...

Ma fille, je vous recommande l'amour du silence. Suivez l’exemple que je vous ai donné. Je suis la parole éternelle de Dieu le Père, et j’ai demeuré les trente premières années de ma vie en ne me manifestant qu'une seule fois dans le temple de Jérusalem... Gardez le silence et vous aurez la paix avec Dieu, avec le prochain, avec vous-même. Gardez le silence et vous avancerez rapidement dans la perfection, car vous fuirez de nombreuses occasions de péché... "

          2-4-8-La discrétion et l’économie

Contre toute attente, Jésus établit un lien entre la discrétion, vertu morale, et le don de science ou de la connaissance. La discrétion est le contraire de la curiosité. Il nous rappelle "qu'il y a des sciences utiles, d’autres dangereuses et d’autres coupables... La discrétion apprend à connaître celles qui sont utiles et... aussi, à réprimer le désir trop grand des sciences même utiles, parce que la science enfle le cœur et engendre l’orgueil. La discrétion apprend à connaître les choses utiles et incite à les étudier..." Jésus énumère les sciences les plus importantes dont la première est la science de Dieu, donc la connaissance de la religion et du salut. Puis il passe aux sciences secondaires.

Il ne faut pas oublier que Marie Lataste vécut dans la première moitié du 19ème siècle, époque où relativement peu de personnes du peuple savaient lire et écrire, et que ce que l'on appelle aujourd'hui 'la science moderne', commençait à peine à se développer. Il ne faut donc pas s'étonner que Jésus commence par citer ce qui facilitera le moyen de perfectionner la science du salut: la lecture et l’écriture...

Jésus revient aussi à la discrétion qui apprend à repousser les sciences inutiles pour le bien... et les sciences dangereuses, notamment la science du mal, parce que l'homme qui connaît le mal peut l’opérer très facilement: "La discrétion apprend à réprimer le désir qu'on a de connaître ce qui regarde autrui, elle porte aussi à ne point communiquer ce qu'on a appris quand il y a des motifs suffisants pour ne point faire ces communications. Demandez à Dieu la discrétion, ma fille, et vous croîtrez comme votre Sauveur en âge, en sagesse et en grâce devant Dieu..."

L’économie est la vertu qui règle l'usage convenable et nécessaire des choses, surtout les objets matériels dont nous avons besoin pour vivre.  "L’économie règle les forces de l'âme en mesurant leur emploi, en donnant celles qui sont indispensables. Elle règle les forces du corps en mesurant la manière dont l'homme doit travailler, le travail qu'il doit faire, l'heure et le temps dans lequel il doit le faire. Enfin, l’économie règle l'emploi des choses extérieures que l'homme a à sa disposition, afin d’en user selon ses besoins, et de ne point les dissiper d'une manière inutile.

L'économie est essentiellement une conservation des forces de l'âme et du corps et des biens de la fortune... Cette conservation des forces, tant de l'âme que du corps, tend à les augmenter pour conserver à l'âme qu'il renferme sa vigueur et sa fermeté, et permettre ainsi, au corps soumis à l'âme d’accomplir les actions nécessaires à la vie naturelle et surnaturelle.

La conservation des biens de la fortune tend à les augmenter, afin de s’en servir ensuite selon les desseins de Dieu, afin de secourir les pauvres et les malheureux, et de pourvoir soi-même à des malheurs imprévus qui pourraient advenir. Ainsi, ma fille, l’économie se rapporte à la tempérance et règle en vous toutes vos actions selon l'ordre et la raison."  (Livre 9, chapitre 4)


[1] Aujourd'hui on parlerait de l'usage du vin et de l'alcool.

   

 

pour toute suggestion ou demande d'informations