Liévin de Gand
Évêque, Martyr, Saint
† 657

Liévin , né vers l'an 580, en Irlande, était fils d'un puissant seigneur, nommé Théagne, et d'Agalmie, dame vertueuse et issue de sang royal. Il fut élevé sous la conduite de son oncle maternel, qui se nommait Menhalch, et était archevêque. Ayant déjà fait des progrès dans les belles lettres, et surtout dans la vertu, il entendit parler, vers l'an 598, du moine S. Augustin et des autres missionnaires italiens et français, que le Pape saint Grégoire-le-Grand avait envoyés à la conversion de l'Angleterre. Liévin alla trouver S. Augustin, et demeura auprès de lui cinq ans et trois mois, attentif à profiter des instructions et des exemples de cet habile maître. Celui-ci, jugeant son disciple capable du saint ministère, l'ordonna prêtre, et l'employa aux travaux de la mission. Après la mort de cet apôtre de la Grande-Bretagne, arrivée le 26 mai 604, Liévin repassa en Irlande, où l'on dit qu'il succéda à Menhalch, son oncle. On ne saurait déterminer toutefois jusqu'à quel point ce fait est authentique, attendu qu'on ne connaît pas la ville où était placé ce siège épiscopal. Quoi qu'il en soit, il est certain du moins que Liévin fut élevé à l'épiscopat. Il connaissait l'étendue des devoirs attachés à cette dignité. S'appliquant avec beaucoup de zèle à instruire les peuples confiés à ses soins, il soutint ses prédications par l'austérité de sa vie, ne se nourrissant d'abord que d'herbes et de fruits sauvages , ne buvant que de l'eau et portant un cilice sous ses habits. Il fut cependant obligé dans la suite de mettre des bornes à ses mortifications, et de manger du pain : mais pour en tempérer la saveur, il y mêlait de la cendre. Après ses fonctions épiscopales, il s'occupait à copier des livres, qu'il écrivait en beaux caractères, et il distribuait aux pauvres tout le profit qui lui en revenait[1]. L'hospitalité était une de ses vertus favorites ; il recevait chez lui les étrangers et les religieux, commençant toujours, suivant l'ancien usage, par leur laver les pieds.

Un- mouvement intérieur, auquel il ne crut point devoir résister , l'ayant sollicité d'aller annoncer l'Evangile aux païens , il laissa le soin de son diocèse à son diacre Silvain , passa la mer et aborda dans les Pays-Bas. Après avoir parcouru plusieurs endroits des environs de Térouane, et peut-être même une partie de la Zélande , il vint en 655 à Gand, où il fut reçu avec beaucoup de charité par l'abbé S. Florbert et ses moines. Déjà le tombeau de saint Bavon était célèbre par des miracles. Liévin avant d'entreprendre la tâche qu'il s'était proposée, voulut se placer sous la protection du Ciel ; à celte fin, il alla prier pendant trente jours sur le tombeau de S. Bavon, y célébrait chaque jour le saint Sacrifice de la messe. Après s'être aussi solennellement consacré au Seigneur, il commença à prêcher la parole de vie dans le pays d'Alost, qui faisait alors partie du Brabant. Il trouva à Houthem, entre Gand et Ninove, et dans les environs, des champs fertiles, un peuple robuste et bien fait de corps , mais presque entièrement dénué de toute connaissance du vrai Dieu, et livré, comme de vrais païens, à tous les vices. Ils le regardèrent comme leur ennemi, quand il vint leur prêcher la parole de Dieu. « Le peuple impie et barbare du Brabant, dit-il, se lève contre moi avec une fureur sanguinaire. Quel est donc le crime de celui qui vous n annonce la paix ? Pourquoi me traitez-vous en ennemi, moi qui vous apporte la paix ? Mais votre cruauté fera mon triomphe ; elle me fera gagner la brillante couronne du martyre. » C'est ce qu'il écrivait dans une épitre en vers adressée à l'abbé S. Florbert, où il lui témoigne en même temps sa reconnaissance, pour les vivres qu'il en avait reçus, tandis que ceux de Houthem le laissaient dans le plus grand besoin.

Liévin n'eut pas seulement à craindre la fureur des païens, mais aussi les embûches de l'esprit malin. Un énergumène lui cria un jour : « Liévin, serviteur de Dieu, pourquoi êtes-vous venu dans mon royaume ? Si vous m'en chassez, je vous ferai sur-le-champ souffrir beaucoup de maux. » Le Saint, plein de confiance en Dieu, somma l'esprit infernal de quitter le possédé, et fit sur lui le signe de la croix. On vit alors, en présence d'un grand nombre de personnes, le démon abandonner sa proie. Le possédé, après être demeuré pendant une heure couché par terre, comme s'il eût été privé de vie, se leva, et proclama de tous côtés les louanges de celui qui l'avait délivré.

Deux femmes, touchées de ce miracle et de la sainteté de Liévin, le prièrent de venir chez elles, pour les instruire. L'une, nommée Chraphaïlde, avait un fils qui s'appelait Ingelbert, et qui depuis treize ans était privé de la vue. Liévin le bénit en faisant sur lui le signe de la croix, et aussitôt il eut recouvré la vue. Le saint évêque alla prêcher aussi au village d'Esschen, situé à deux lieues de Grammont. Il y fut attaqué par ses cruels et ingrats persécuteurs, qui lui firent de nombreuses blessures, et finirent par lui couper la tête, le 12 novembre 657 , vers midi .

Le corps du Saint fut inhumé à Houthem, où il resta jusqu'à ce que Thierri, évêque de Cambrai, le levât de terre, en 842. Erembold, abbé de Saint-Bavon, voulant mettre ces saintes reliques en sûreté, les transporta dans son monastère en 1007. Radbod, évêque de Noyon et de Tournay, en fit, en 1083, une nouvelle translation, qui ne fut peut-être autre chose qu'une solennité particulière. En 1171, elles furent placées dans une châsse précieuse par Gautier, évêque de Tournay. Cette châsse, ainsi que les reliques, furent pillées et détruites au seizième siècle par les hérétiques.

SOURCE : Alban Butler : Vie des Pères, Martyrs et autres principaux Saints… – Traduction : Jean-François Godescard.


[1] On conserve encore dans la cathédrale de Gand un volume in-folio, dans lequel S. Liévin a écrit quelques parties du Nouveau-Testament.

 

 

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