Écrits patristiques
Lettre à Diognète
9-S'il a permis que l'homme,
jusqu'à ces derniers temps, suivît à son gré ses désirs corrompus et se
laissât emporter à travers tous les désordres, par
les voluptés et par les passions, ce
n'est pas qu'il approuvât le crime, seulement il le tolérait; non,
il n'approuvait pas ce règne de l'iniquité; il
préparait, au contraire, dans les cœurs, celui de la justice. Il
voulait nous laisser le temps de nous convaincre, par nos propres
œuvres, combien nous étions indignes de la vie avant que sa bonté
daignât nous l'accorder. Il nous fallait en effet reconnaître
que, par nous-mêmes, nous ne pouvions pas parvenir au royaume de
Dieu avant que Dieu vînt nous en offrir les moyens.
Lors donc que
notre malice fut montée à son comble, qu'il fut démontré que nous
n'étions dignes que de châtiment, et
que nous n'avions plus que la mort en perspective, arriva
le temps que Dieu avait marqué pour signaler tout à la fois sa bonté
et sa puissance, et montrer que son immense amour pour l'homme ne
laissait aucune place à la haine; qu'il
était loin de nous avoir rejetés; qu'ils ne se souvenait plus de nos
iniquités; qu'il les avait souffertes et supportées avec patience, alors
qu'a-t-il fait? Il a pris sur lui nos péchés; il a fait de son
propre fils le prix de notre rançon, substituant
le saint, le juste, l'innocent, l'incorruptible, l'immortel, à la
place de l'homme pécheur, inique, pervers, sujet à la corruption,
dévoué à la mort. Qui
pouvait couvrir nos crimes, sinon sa sainteté? Par
quel autre que par le fils de Dieu, l'homme injuste pouvait-il être
justifié? Ô doux échange! Ô artifice impénétrable de la sagesse
divine! Ô bienfait qui surpasse toute attente! L'iniquité
de tous est ensevelie dans la justice d'un seul, et la justice d'un
seul fait que tous sont justifiés!
Quand il eut, par les temps
écoulés, convaincu notre nature de son impuissance pour s'élever à
la vie, il nous a
montré le Sauveur, qui seul peut préserver de la mort ce qui
périssait sans lui. Par
ce double exemple du passé et du présent, il
a voulu que nous eussions foi en sa bonté et que désormais l'homme
le regardât comme un père qui le nourrit, comme un maître qui le
conseille, comme un médecin qui le guérit, comme son
intelligence, sa lumière, son honneur, sa gloire, sa force, sa vie,
et qu'il cessât de s'inquiéter du vêtement et de la nourriture.
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L'auteur
incite Diognète à embrasser
la foi et lui montre tous les avantages spirituels qu'il pourrait en
retirer, pour lui et pour son prochain. C'est l'objet du chapitre
10. L'auteur de la lettre
n'a fait que transmettre à son ami l'enseignement des apôtres. |