4-1-La grande
Assemblée des anges et le refus de Lucifer
Dieu était heureux dans
son bonheur divin, tellement heureux qu’Il voulut faire partager son
bonheur à tous ses anges. Dieu convoqua une grande Assemblée au
cours de laquelle Il exposa son projet à tous ses anges. Tous les
anges applaudirent, tous les anges chantèrent la Gloire de Dieu.
Vraiment cela était très bon! Dieu le Père, uni au Fils dans
l’étreinte éternelle de la Trinité sainte, décida alors de révéler à
ses anges jusqu’où irait son Amour pour toutes ses créatures
vivantes: Dieu montra à tous ses anges la “photo” de son Christ, son
Fils Bien-aimé, incarné dans un corps d’homme...
Tous les chœurs des
anges admirèrent l’œuvre du Seigneur. Lucifer, l’Ange de lumière fut
d’abord surpris: il ne comprenait pas comment le Fils de Dieu
Lui-même s’abaisserait jusqu’à entrer dans un corps d’Homme, mais il
n’en fit rien paraître et continua à louer Dieu, comme tous les
autres anges...
Dieu était heureux.
Dieu dit alors: “Quand les hommes que je vais bientôt appeler à la
vie seront prêts, mon Verbe, mon Fils, mon Unique, pourra
s’incarner. Pour cela Je Lui donnerai une Mère humaine, Marie, et
son nom d'homme sera Jésus. En Jésus, il y aura deux natures: la
nature divine de mon Fils, que vous connaissez bien, et une nature
humaine. Jésus mon Oint, Jésus, Dieu et Homme, rassemblera tous les
hommes dans son Corps mystique, l’univers enfin unifié. Mon Fils,
Jésus-Christ, sera la tête et le Cœur de ce grand édifice, la
merveille de ma Création. Moi et mon Fils nous resterons unis dans
ce grand Corps, toujours UN dans la Trinité de l’Amour. Et vous,
vous M'adorerez, Moi et mon Fils dans Jésus. Et vous nous servirez.
Lucifer risqua une question:
– Père éternel, si j’ai
bien compris, dans le Corps mystique de ton Christ il y aura un Cœur
et une Tête: ton Verbe. Tout le reste de ce que Tu appelles les
membres et les organes seront constitués par ces petits êtres
insignifiants, les hommes, que Tu dis créer bientôt.
– Tu as bien compris,
dit Dieu. Dans ce Corps, Tu adoreras mon Fils. Et comme Moi et le
Fils nous sommes UN avec l’Esprit d’amour, c’est à travers ce Corps
que Tu adoreras Dieu, et que Tu Le serviras.
Lucifer se retira du
chœur des anges. Il semblait furieux. Il appela quelques-uns des
anges qui constituaient sa cour et leur dit:
– Cela n’est pas
possible! Jamais nous n’adorerons Dieu à travers ce Corps constitué
d’hommes. Jamais nous ne pourrons nous abaisser à servir ces hommes
de chair et de matière. Jamais!...
Lucifer et ses amis
quittèrent les chœurs des anges et décidèrent: dès que les hommes
seront créés, nous irons guerroyer contre eux, afin qu’ils soient
perdus pour Dieu, et que jamais nous ne devions servir ces êtres
misérables qui nous sont tellement inférieurs. Jamais!
Le mal : refus de
l’Amour et de la volonté de Dieu, était né.
C’est sûr, Toi Père
éternel, Tu es Amour et bonheur: et l’Amour que Tu es est éternel
bonheur, et bonheur sans faille ni douleur. Dieu-Amour, Tu veux
donner ce bonheur, ton bonheur, à toutes les créatures capables
d’aimer, et que Tu as créées pour le bonheur. Mais pour entrer dans
le Bonheur de Dieu, il y a une condition nécessaire: aimer Dieu et,
chaque être reconnaissant sa totale dépendance envers le Créateur,
faire sa Volonté avec humilité, une humilité capable de rejoindre
l’humilité divine. Toutes les créatures intelligentes doivent se
soumettre à cette condition nécessaire. C’est la condition sine qua
non de leur vraie liberté.
Ayant suivi Lucifer,
beaucoup d’anges avaient péché car ils ne voulaient pas comprendre
la grandeur, la majesté divine de ce "Pont Mystique": Jésus, le
Verbe incarné. Ils ne voulaient pas adorer le Christ, l’Homme
parfait qui était aussi la Deuxième Personne de la Sainte Trinité.
Ces anges perdus ne voulurent pas voir que le "Pont Mystique"
c'était Dieu uni à sa Création tout entière. Constitué de pierres,
de poussières humaines, créatures finies, imparfaites certes, mais
pierres vivantes dotées d’une âme immortelle, pierres-poussières
vivantes destinées à entrer dans la construction de l’œuvre la plus
parfaite et la plus étonnante de Dieu, ce "Pont Mystique" que Dieu
voyait déjà, c’était l’œuvre merveilleuse qui devait devenir le
Corps de Dieu voué à réaliser l’unité de la Création tout entière
avec Dieu: œuvre inconcevable où Dieu deviendrait Lui-même sa Maison
et la Maison de ses enfants, de tous ses enfants, anges et hommes.
Mais, et surtout, les démons ne voulaient pas admettre qu’une Femme,
Fille des hommes, Fille de Dieu et Mère de ce Corps Mystique,
devrait un jour régner sur eux.
Les anges perdus ne
voulurent pas s’incliner devant ce qu’ils croyaient leur être
tellement inférieur, mais qui, en réalité, les dépassait infiniment.
Alors, pour ne pas adorer le Corps, pour ne pas rendre hommage à la
Femme qui devait être leur Reine, ils décidèrent de perdre l’Homme.
Ce n’était pas très difficile: en effet, l’homme laissé à lui-même
n’est qu’une poussière, fragile et sensible, intellectuellement
limitée, mais curieuse et avide de savoir. Trop curieuse et trop
avide... et toujours prête à tenter les expériences même les plus
risquées. Le péché des anges entraîna le péché des hommes.
Pensons à l'amour des
hommes sur la terre pour mieux comprendre l'amour que Dieu donne à
l’Homme et l’amour que l’Homme devrait rendre à Dieu. Quel est cet
attrait irrésistible que ressentent deux êtres “sensibles”
lorsqu’ils s’aiment? Mais qu’est-ce que la “sensibilité” de Dieu qui
est un pur esprit, donc de “nature” fondamentalement différente de
la nôtre? Dieu est le Tout-Autre, et nous, nous sommes
essentiellement différents de Dieu. Alors, encore une fois,
qu’est-ce qu’aimer Dieu, et que signifie “sentir” qu’on aime Dieu
qui nous aime toujours le premier?
Dieu est le Tout-Autre,
mais un “jour” de son éternel présent de son éternité Il décida de
créer. Il créa des esprits: cela devait Lui être facile... Il créa
aussi la matière qui devait accueillir l’Homme. Mais qu’est-ce que
la matière par rapport à Dieu ? Le bouddhisme pense avoir résolu le
problème en parlant du Grand-Tout dans lequel se perdra l’âme
humaine après ses multiples réincarnations, mais cela suscite plus
de questions que ça n’en résout. Alors, il faut chercher autre
chose... Il faut aller dans une autre direction et “penser” le
Créateur.
Dieu est Esprit, pur
Esprit, et pourtant Il crée la matière!!! Il associe ensuite une
parcelle de son Esprit à la matière, et voilà l’Homme; et Dieu aime
l’Homme!!! Et l’Homme, librement, devra aimer Dieu. Mais qu’est-ce
que la matière? Les savants qui ont fait beaucoup de physique des
particules sont arrivés à définir les “composants” qui “constituent”
les atomes, lesquels sont de véritables systèmes solaires composés
d’une multitude de “particules”. On arrive à des chiffres infiniment
grands pour exprimer les infiniment petits. Et nous irons peut-être
encore plus loin dans ces découvertes; peut-on même imaginer que
nous puissions arriver, peut-être, non plus à une “particule”
matérielle, mais à quelque chose d’impalpable qui rejoindrait le
“constituant”, la "substance" même de Dieu.
Toutes ces choses sont
difficiles à exprimer! Nous savons tous que la lumière n’est qu’une
vibration, une force électromagnétique ayant une longueur d’onde.
Les astronomes découvrent dans l’univers d’autres vibrations,
d’autres forces qu’ils sont incapables de nommer ni de définir: ils
savent seulement qu’il y a des forces!!! Et si ces vibrations
d’infiniment petits ou de forces non définies rejoignaient l’Être
même de Dieu??? Alors la matière créée tout comme l’esprit (ou les
esprits) s’originerait directement en Dieu. Notre “matière” humaine,
sensible et animée d’un esprit, serait alors si proche de Dieu que
l’amour s’expliquerait tout “naturellement”. L’Homme fait d’un
“constituant” de Dieu retrouverait ce dont il est originaire, et
serait capable d’accueillir l’Amour et de L’aimer.
Dans les psaumes il est
dit: “Vous êtes des dieux.” Quand Jésus reprend cette
expression, Lui qui ne parlait jamais pour ne rien dire, voulait-Il
nous faire comprendre que nous étions pour Dieu infiniment précieux
puisque nous étions comme une “particule” de Dieu-Trinité? De
l’Amour qu’est Dieu naît l’amour qui attire l’homme vers Dieu et cet
amour noyé en Dieu est forcément “senti”. Comment? Nous ne pouvons
pas savoir, mais peu importe, Dieu sait.
Mais alors, qu’est-ce
que le péché? Une des forces faites pour se rencontrer et
“travailler“ ensemble se dérègle soudain et refuse ce pour quoi elle
est faite. Est-ce cela le péché? Quelle extrême gravité, car tout
risque de se “défaire”.
La lune
Des savants astronomes
viennent de découvrir des choses surprenantes sur la formation de la
lune. Quand la terre se mit à exister, il y avait alors plus de
planètes que maintenant, mais c’étaient des petites planètes dont la
plupart ont disparu. L’une d’elles aurait été attirée par la terre
qu’elle finit par heurter: ceci n’est pas de la science fiction...
Quand la petite planète
heurta la terre, ce fut un beau vacarme, et le choc renversa la
terre qui s’inclina de 23° sur son axe (de rotation): heureux choc
qui donnait naissance aux saisons! Mais de multiples débris furent
projetés dans l’espace... Ce phénomène aurait fait que, peu à peu,
ces blocs tournant une ronde insensée, mais dirigée (un peu comme
les constituants des anneaux de Saturne) s’agglutinèrent tous,
donnant naissance à la lune, laquelle continua à tourner autour de
terre, mais à une distance bien inférieure à celle que nous
connaissons aujourd’hui (14000 kilomètres tandis qu'aujourd’hui la
lune est à environ 400000km de nous). Et la lune commença, et
continue, à s’éloigner de la terre: aujourd’hui, cette vitesse
d’éloignement est de 4 cm par an...
Sur la terre les eaux
réunies en océans furent soumises à des marées gigantesques (à cause
de la proximité de la lune) qui ravageaient les terres, mais
préparaient ainsi la soupe originelle dans laquelle la vie put
naître. Vertigineux! Étourdissant quand on pense que notre système
solaire n’est qu’un point minuscule du cosmos ...
Réflexion
Notre science se fait
de plus en plus pointue: elle devrait nous mener à Dieu, mais nos
savants ne savent pas dire qu’ils ont “approché” quelqu’un; ils ne
savent que dire: il y a “quelque chose” qu’ils ne comprennent pas...
Les chrétiens ne devraient-ils pas s’emparer de ces choses, de ce
“quelque chose” pour crier Dieu, pour faire connaître sa vérité,
pour révéler Jésus?
Une parabole
On peut maintenant
utiliser une sorte de parabole. Dieu, après avoir créé les anges,
les milliards d’anges, leur confia à chacun une tâche spécifique
pour “L’aider” dans sa création en cours d’évolution. Pour
surveiller les opérations délicates qui aboutiraient à la perfection
que nous connaissons de la terre, il fallait un ange
particulièrement intelligent, capable de gérer cet ensemble très
complexe: formation de la terre, régularité des climats, formation
de la vie en vue de l’Œuvre parfaite, “très bonne”, que le Père se
réservait: la création de l’Homme. Le Père choisit son ange de
lumière: Lucifer.
Lucifer regardait le
travail du Père, et il admirait. Il regardait le Père façonner
l’Homme, et il s’extasiait. Quand l’Homme fut achevé, il eut la
permission de “parler” avec l’Homme, et même de lui donner quelques
conseils. Tout se passait très bien, et le Prince de ce monde était
assez satisfait de “travailler” avec un être fait de matière,
certes, mais cependant très intelligent. Tout se passait donc très
bien jusqu’au jour où Dieu fit part à Lucifer de son “Idée”
fondatrice: l’être pour qui Il avait “fait” toute sa création,
c’était en vue de l’Incarnation du Fils. Un “jour”, Lucifer et tous
les anges de l’univers devraient adorer le Fils incarné dans un
Homme, dans un fils d’Homme.
Lucifer frémit: quoi?
Le Fils bien-aimé du Père, Un avec le Père dans l’unité de Esprit,
quoi? le Verbe de Dieu allait s’incarner dans un homme, cet être
charnel, qui n’était pas si mal, mais tout de même, une créature
faite surtout de matière... Quoi? Lui, Lucifer, être de Lumière,
subtil conseiller d’Adam et d’Ève, devrait s’incliner devant un de
leurs descendants, et l’adorer!... Jamais! C’était clair et net dans
l’esprit de Lucifer: jamais il n’adorerait cet homme, fut-il le Fils
de Dieu. Et puis, qu’est-ce qui lui prouverait alors que cet être
charnel, si fragile, si inférieur à lui, serait vraiment le Fils,
Verbe de Dieu? La décision de Lucifer était ferme et décisive: il
n’adorerait jamais un homme, non! Jamais!
Le Père essaya bien de
convaincre son ange de lumière, mais Lucifer s’obstina: Prince de ce
monde il était, Prince de ce monde il resterait. Et Lucifer s’en
alla avec une foule de ses serviteurs qu’il avait réussi à
convaincre: eux, de purs esprits, ne pouvaient pas adorer un homme,
être de chair! Lucifer s’en alla, mais il se jura à lui-même qu’il
mettrait tout en œuvre pour détruire les hommes, tous les hommes,
afin d’être sûr de détruire l’Homme, Verbe de Dieu incarné, qu’il
devrait adorer un jour.
Dieu le Père “pleura”
dans son Cœur; Il ne pouvait pas détruire ses anges, et Il ne
voulait pas qu’on touche à son Œuvre suprême, le Corps mystique de
son Fils. Alors, Dieu laissa Lucifer errer, même autour des hommes
dont il avait été le Prince, mais Il lui interdit de lui faire du
mal et surtout de le tuer.
C'est alors que Lucifer
eut cette idée démoniaque: je ne peux pas faire de mal à l’homme,
mais je ferai en sorte que l’homme se fasse à lui-même le mal qui le
détruira: le péché des hommes était comme conçu dans l’esprit de
Lucifer. Et Lucifer devenu le Menteur trompa l'homme; et l'homme
pécha, gravement, et Dieu chassa l'homme de son Paradis. L'homme
chassé de son milieu vital fut très malheureux, et Lucifer
jubilait...
Lucifer ne savait pas
encore que Dieu enverrait un Rédempteur sauver tous les hommes.
Lucifer ne savait pas encore qu’une Femme lui écraserait la tête...
Certains mystiques ont
dit: “Le péché, c’est le non-être.” Pourtant, le péché, ça existe.
Alors?
Il faut contempler le
Père lorsqu'Il commença à penser sa Création. On peut imaginer
n’importe quoi car nous ne sommes que des “hommes sans
intelligence”, qui n’ont pas accès à la pensée éternelle de
Dieu. Mais il faut bien essayer de raisonner un peu pour y voir
clair; c’est pourquoi nous nous aiderons de deux exemples, deux
orientations, à partir du Big-bang dont on parle si souvent.
Le péché
Dieu est immense,
infini, Dieu est la Puissance totale, sans limite, mais Puissance
paternelle et amoureuse. Et Dieu ne cesse de contempler l’Homme et
la terre: sa maison et son jardin. La terre est perdue dans
l’univers, mais elle est dans la main paternelle et amoureuse de
Dieu. Dieu est heureux et déverse ses grâces sur l’Homme et sur ses
travaux avec une munificence débordante de paix et d’Amour.
Pourtant, Dieu semble
inquiet: l'ange qu'Il avait créé lumière et qui a refusé son Amour,
l'ange devenu mensonge rôde près de la terre... Dieu voit l’Homme
écouter avec trop d'attention les dires de l'ange du mensonge. Alors
Dieu multiplie ses grâces et ses avertissements, mais l’Homme, comme
subjugué par de fausses lumières, mange le fruit défendu,
enfreignant ainsi la Loi qui est son bonheur. Hélas! les hommes ne
seront jamais comme des dieux; le désordre s’installe et Dieu n’est
pas content.
Et Dieu, dans sa
colère, détourne son regard de la terre et des hommes:
– Après tout,
puisqu’ils ne veulent pas de Moi, qu’ils se débrouillent tout seuls.
Je laisse agir les causes secondes, ils verront bien ce qui
arrivera... Moi, dit Dieu, Je ne m’occupe plus d’eux.
Et les hommes ont vu ce
que c’était que l’absence de Dieu: le malheur, l’esclavage, la
guerre, les calamités causées par des actions irréfléchies.
L’absence de Dieu, c’est l’Enfer.
– Tant pis pour eux,
dit Dieu, ils ont ce qu’ils ont cherché. Je les avais pourtant bien
avertis... Dieu, très fâché, continue à détourner son regard de la
terre des hommes...
Dieu détourne son
regard de la terre... Pourtant, comme malgré Lui, Dieu entend des
cris de détresse, des appels qui brisent le Cœur. Et il y a aussi,
déchirantes, les plaintes et les prières des justes, des justes qui
aiment Dieu et essaient d’aimer leurs frères. Alors Dieu n’y tient
plus. Maintenant qu’Il a entendu les cris de ses enfants, de ses
enfants si malheureux, Dieu va d’abord se manifester pour rendre
l’espérance avant d’envoyer son Fils réparer les dégâts et ramener à
Lui ses enfants dispersés...
Bientôt Jésus, Un avec
le Père et l’Esprit dans le Cœur de la Trinité-Amour, va s'incarner
et venir sur la terre. Il nous aimera jusqu'au bout. Il aimera même
les insensés qui, pour mieux Le chasser, Le crucifieront... Mais les
hommes de bonne volonté, ceux qui accepteront la volonté de Dieu,
ceux-là seront sauvés car ils laisseront faire Dieu. Laissez faire
Dieu c'est faire sa volonté, c'est vivre dans l'amour et la
miséricorde de Dieu.
La Peur
Parfois notre corps
frémit... comme Jésus avait parfois frémi dans son Corps quand Il
pensait à son Heure, cette Heure terrible que pourtant Il avait
désirée d’un grand désir. Et comme le serviteur n’est pas au-dessus
du Maître, il est normal que nous gardions encore, face aux
terribles évènements du monde, certaines appréhensions. Mais
pourquoi avoir peur? Oublions-nous que Dieu nous aime et qu'Il veut
que nous devenions amoureux de Lui? Nous n'avons plus peur quand
nous sommes amoureux, et, surtout, aucun être humain n’a peur de
celui qu'il aime. Quand on est amoureux on s’abandonne complètement
à celui que l'on aime; on lui fait confiance. Alors, comment
aurions-nous peur de l'Amour? Comment ne serions-nous pas amoureux
de Dieu qui nous a aimés le premier? Comment ne serions-nous pas
amoureux de Jésus qui a pris sur Lui tous nos péchés, et qui nous a
rendu ainsi la liberté d’aimer l’Amour?
Ces choses sont
inouïes, incompréhensibles... Nous ne pouvons plus que laisser
l'adoration jaillir de notre cœur:
Dieu béni, Trinité
Sainte que j’adore et que j’aime, mon Dieu, je suis amoureux de
Vous. Père infiniment bon, peu à peu je Vous découvre: je n’avais
pas bien l’habitude de me tourner vers Vous, Père. Peu à peu je Vous
découvre, et en Vous découvrant, je découvre Jésus, votre Fils,
votre Unique, Jésus votre Bien-aimé. Oui, je croyais connaître
Jésus, mais voici que je découvre que je Le connaissais mal...
Père infiniment Saint,
je Vous aime comme un Père Bien-Aimé, un Père tendre et plein de
tendresse et d’Amour, plein de Miséricorde, un Père merveilleux.
Mais Père, quand nous contemplons la Trinité Sainte, Père, Fils et
Esprit, quand nous contemplons l’Amour qui est Vous et le Fils,
quand nous contemplons l’Esprit, nous revenons presque toujours à
Jésus, car c'est bien plus facile d'être amoureux de Lui, amoureux
du Fils, amoureux de votre Unique. Votre Esprit d’Amour nous ramène
toujours à Jésus, car Il s'est fait homme.
Père infiniment bon,
que nous aimons comme un Père, souvent nous sommes amoureux de
Jésus. Nous L’aimons mal, c’est sûr, nous avons encore tant à
apprendre de Lui et sur Lui. Mais nous L’aimons Père, nous aimons
Jésus votre Fils, votre Verbe, votre Sainte Parole. Père, nous nous
confions en Vous, nous nous confions en Lui. Est-ce pour cela que
nous n’avons plus peur?
L’enfer
Et, lisant, ou
relisant, de nombreuses “prédictions” relativement récentes, surtout
de la fin du XIX ème siècle ou du XXème siècle, de mystiques ou de
nos papes, on peut être stupéfait de leur actualité. L’encyclique de
Pie XI, Divini Redemptoris, écrite en 1937 laisse ses
lecteurs sans voix. Que de fois dans ces textes on parle de l’enfer!
Mais personne n’écoute... Pourtant l’enfer existe, cela, c’est une
certitude. Mais comment comprendre ces prédictions de saints, y
compris de saint Padre Pio, qui ont “vu” l’enfer et les multitudes
qui s’y précipitaient? Donc, c’est sûr, l’enfer existe, d’ailleurs
Jésus Lui-même l’a souvent répété. Et pourtant, Dieu, Tout-Puissant
et infiniment bon ne peut pas s’amuser à créer des hommes, à les
façonner avec amour pour ensuite “s’amuser” à les envoyer en enfer.
Quel mystère!
Il y a autre chose: que
vont devenir ces milliards d’hommes qui n’ont jamais entendu parler
de Jésus? Que vont devenir ces millions d’enfants européens
complètement pervertis, pas à cause de leur responsabilité propre,
mais parce que, dans nos écoles, ce n’est plus le bien qu’on
enseigne, mais le mal et le vice... Ce n’est pas la faute de ces
petits s’ils ne connaissent pas Dieu, et pourquoi iraient-ils en
enfer?
Supplions Dieu de nous
envoyer son Esprit, de nous envoyer des apôtres au cœur de feu, des
prêtres brûlant d’amour...
Seigneur, par pitié,
fais que les moyens modernes de communication servent uniquement à
Te faire connaître et aimer, à répandre ton amour et à enflammer nos
cœurs de l’Amour de Dieu. Seigneur, écoute nos prières! Peut-être
seront-nous plus ouverts à ta miséricorde...
Dieu vit ses petits
enfants, les hommes pécheurs et si malheureux. Dieu vit ses enfants
qu’Il aimait et qu’Il ne voulait pas perdre. Il voulait toujours en
faire les pierres vivantes de son Corps Mystique. Il y avait
quelques réparations à effectuer dans la brèche ouverte par Satan,
mais cela était réparable. Et la Deuxième Personne de la Trinité, le
Verbe de Dieu qui avait décidé de s'incarner en Jésus, inventa la
Rédemption...
Les mérites de la
Rédemption sont incommensurables. Les mérites de la Croix sont
infinis. Tous les hommes, tous, sans exception, ont de quoi se
sauver, ont de quoi être sauvés et libérés du péché et de toutes les
concupiscences. Tous les hommes peuvent se libérer de Satan et de
ses mensonges. L’œuvre de Jésus est complète, et son Amour nous
attend, tous. De trop nombreux hommes cependant refusent l’Amour.
Ces hommes, Jésus les a achetés, rachetés chèrement. Ce n’est pas
pour continuer à les voir se perdre qu’Il a souffert sa Passion,
qu’Il est mort sur une Croix. Jésus a soif d’eux comme Il a soif de
nous.
Qui apaisera la soif de
Jésus?
Nous contemplons Jésus
pour connaître sa Miséricorde et voici que nous pensons à Adam et à
Ève; et voici que nous pensons à Satan... Il n’est pourtant pas très
intéressant celui-là, et sa présence chez les hommes nous gêne et
même nous terrifie. Nous pensons à Dieu qui, admirant son ami Job,
s’adresse au Satan et lui parle comme d’égal à égal: “As-tu vu
mon serviteur Job?” C’est fou! Comment le Père, toute bonté,
toute pureté, tout Amour peut-Il parler au Satan et le laisser
tenter Job? Comme Il le laissera plus tard tenter aussi son Fils...
Et puis, comment comprendre qu’un être, Lucifer, tout de lumière et
d’intelligence, connaissant Dieu et la Création, ait pu refuser
l’Amour, en toute connaissance de cause? Et comment Dieu peut-Il
encore le supporter, et le laisser vivre, et le laisser tenter et
détruire tant d’hommes, ses créatures privilégiées? Les mystères de
Dieu sont vraiment beaucoup trop grands pour nous, et nous sommes
infiniment dépassés... Pourtant il nous semble voir apparaître comme
un rayon de la Miséricorde divine.
Quand Dieu pense, Il
crée. Dieu ne peut pas détruire ce qu’Il crée car cela équivaudrait
à détruire sa pensée. Et la mémoire de Dieu, élément de sa pensée ne
peut rien effacer de ce qui est créé, car elle se détruirait aussi.
Pourtant quand Dieu nous pardonne nos péchés, c’est comme si ces
derniers n’avaient jamais existé... Est-ce cela la Miséricorde de
Dieu? Ainsi, Satan restera jusqu’à la fin des temps... Mais pourquoi
Dieu le laisse-t-Il nous nuire? Le mystère du mal, le refus de
Satan, son refus de l’Amour, son désir de détruire sont difficiles à
comprendre... car ce ne sont pas nos pensées.
Essayons de pénétrer
dans le secret de la Miséricorde de Dieu. Jésus, Homme parmi les
hommes, a connu l’être abject, et Il savait qu’il était totalement
coupable, totalement refus de la lumière et de l’Amour. Jésus savait
que Lucifer était totalement coupable, car son intelligence
somptueuse qui savait, refusait la décision de Dieu, se croyant
l’égale de celle de Dieu. Mais Adam et Ève? Eux, ils ne
connaissaient pas, eux ils n’avaient pas toute la lumière. Et même
si Adam et Ève n’étaient pas encore affaiblis par le péché, ils
n’avaient qu’une intelligence humaine, donc finie, et aucune
expérience, donc une naïveté profonde.
Contemplons la
Miséricorde de Jésus qui regarde Ève et qui s’apitoie sur Adam.
Jésus sait qu’ils ne savaient pas et qu’ils ne voulaient pas le mal
que d’ailleurs ils ne connaissaient pas. Et Jésus se dit que si
l’Ennemi ne s’était pas permis d’entrer là où il n’avait rien à
faire, jamais Ève n’aurait cueilli le fruit. D’ailleurs, elle avait
bien d’autres soucis: le jardin était si beau, Adam était tellement
gentil! Et Dieu comblait son cœur. Ce matin là, son cœur plein
d’amour et d’allégresse préparait un chant d’amour pour Adam. Et
pleine d’allégresse et de l’Amour divin elle composait des louanges
qu’elle réciterait ce soir, au Père, en compagnie d’Adam. Oui, Ève
avait bien d’autres choses à faire que de s’occuper d'un fruit qui
était alors très loin de ses préoccupations.
Le Cœur de Jésus, plein
d’une miséricorde infinie contemple sa pauvre petite Ève. Jésus
soupire aussi en constatant les dégâts causés par la faute du
maudit. Pourtant Jésus sait que l’homme ne peut vraiment aimer que
s’il est libre, qu’il ne peut choisir Dieu que librement, sinon, ce
ne serait pas de l’amour. Sinon, il ne serait qu'un robot bien
programmé. Alors, du Cœur de Jésus part un rayon de sa Miséricorde.
Le Rayon de la
Miséricorde se fond dans le Rayon d’Amour. Maintenant un Rayon de
Feu embrase la terre... Pour pénétrer dans le plus intime des cœurs
humains, le Rayon de l’Amour-Miséricorde semble pétiller comme un
brasier ardent. Des millions d’étincelles de l’Amour-Miséricorde
jaillissent du Cœur de ce Brasier incandescent qu'est le Cœur de
Jésus. Elles pénètrent dans les cœurs car l’Amour et la Miséricorde
ont visité les hommes, heureux du bonheur de la créature qui
contemple le Créateur, Dieu-Amour, Dieu-Miséricorde!
Que se passe-t-il dans
les âmes pécheresses quand elles se convertissent et reviennent à
Dieu. Quand l’âme qui veut se convertir est sortie de ses marécages
peccamineux et boueux, elle est tellement contente qu’elle ne voit
pas tout de suite son état. Une petite confession, et tout ira bien,
elle pourra rentrer à la maison...
Oui, mais quand elle
arrive à la maison, dans la lumière de Dieu, elle s’aperçoit avec
effroi qu’elle est encore très sale, et malade. Un grand nettoyage,
peut-être une confession générale ou plus approfondie s’avère
indispensable. Mais cela se révèle encore insuffisant, et elle doit
aller plus loin dans sa toilette, dans sa conversion; des plaies
apparaissent, car certaines conséquences du péché surgissent tout à
fait inopinément. Devenue plus délicate, l’âme perçoit la nécessité
de panser des blessures, les siennes, et celles dont elle est la
cause, et de réparer les conséquences visibles et invisibles de ses
péchés.
Puis, un jour, le cœur
en voie de guérison comprend que c’est le cœur de Dieu Lui-même qui
a été blessé par son péché. Le cœur coupable et cependant aimant
voit des choses qui lui étaient jusque-là cachées. Il devine à quel
point le mal s’était incrusté en lui sans qu’il en ait eu vraiment
conscience. Il comprend à quel point il a blessé le cœur de Dieu, de
Dieu-Amour. Il comprend un peu ce qu’est vraiment l’Amour, et
comment, sans le vouloir, sans même le savoir, on peut blesser
l’Amour.
Alors, pendant encore
longtemps, le passé de l’âme blessée, de l’âme au cœur meurtri, le
passé de l’âme convertie mais pas encore totalement purifiée lui
sera présenté pour qu’elle puisse retrouver la pureté sans laquelle
on ne peut rencontrer Dieu; et pour crier aussi sa reconnaissance
envers le Père qui nous a donné son Fils, le Fils qui a donné sa vie
pour que les pécheurs retrouvent la vie éternelle.
Toute confuse, l'âme
dit: ”Que rendrais-je au Seigneur pour tout le bien qu’Il m’a
fait?" La réponse arrive souvent, étonnante: “Rien! Que peux-tu
rendre au Seigneur, toi qui n’as rien? Il n’attend que ton amour, et
ton humilité.” Car pour rejoindre le Seigneur il faut aussi être
humble... C'est seulement alors que l'âme pardonnée et purifiée peut
chanter:
Vous êtes Trinité,
mon Dieu, et Trinité d’Amour !
Votre Esprit a soufflé
dans mon cœur, ô Trinité d’Amour,
Trinité bienheureuse!
Votre Esprit a soufflé
sur mon cœur et lui a dit d’aimer,
D’aimer le Fils de Dieu...
Vous preniez un grand risque, ô mon Dieu, en agissant ainsi.
Vous preniez un grand risque...
J’ai pris l’Esprit au
mot, et j’ai aimé Jésus.
Ô mon Dieu Trinité, Vous que je contemple, émerveillé d’amour,
Ô mon Dieu Trinité, Père, Fils et Esprit,
Esprit d’Amour, souffle de vie,
Ô mon Dieu que j’adore et que j’aime, laissez-moi Vous aimer...
Vous m’avez tant aimé,
ô Père, dans votre éternité,
Quand Vous me prépariez, quand Vous me modeliez.
Oui, Vous m’aimiez déjà.
Et votre cœur de Père tressaillait de bonheur
Quand Vous pensiez en Vous, dans votre éternité,
Qu’un certain jour du temps,
Le temps que Vous donniez aux hommes
pour aimer votre l’Amour,
Une très petite âme dirait oui à l’Amour et serait amoureuse,
Amoureuse de l’Amour, amoureuse du Fils.
Amoureuse de Jésus !
Pour dire les
merveilles de Dieu nous avons peu de mots mais nous pouvons toujours
chanter avec les chœurs des anges, avec les bienheureux, et
glorifier sa joie... Mais pour dire la Miséricorde de Dieu nous
n’avons qu'une contemplation émerveillée et muette, un silence
d’amour et de reconnaissance. Un silence qui pourtant ose dire:
Ô Mon Dieu, Trinité
merveilleuse, pour dire ta Miséricorde je contemple le Fils. Je
contemple le Fils, Un avec le Père, Un avec l’Esprit. Pour dire ta
Miséricorde, Trinité bienheureuse, je contemple Jésus, Jésus le
Fils, Jésus l’Unique, Jésus La Miséricorde incarnée. Car ta
Miséricorde, Trinité bienheureuse est si sublime qu’il n’existe pas
de langage pour l’expliquer: ta Miséricorde, elle EST. Ta
Miséricorde EST, mon Dieu, comme Toi Tu ES, car Tu ES Miséricorde
pour tes créatures égarées.
Jésus, nous contemplons
ta Croix qui est Miséricorde, qui est notre salut. Jésus, nous
sommes avec Toi à Gethsémani, nous sommes avec Toi sur ton chemin de
Croix, nous sommes avec Toi, avec Toi crucifié, crucifié pour nous,
pour chacun de nous, à cause de nos péchés, de nos manques d’amour.
Ta Miséricorde, Amour
compatissant de Dieu qui nous aime, nous plonge dans l’adoration. Tu
nous sauves, Jésus, Tu nous prends, Tu nous pardonnes, et comme au
premier jour, Tu dis à chacun de nous: “Aime-Moi!” Alors,
parfois Jésus, nous T’entendons. Nous T’entendons redire: “Ce
n’est pas pour rire que Je t’ai aimé.” Nous n’osons pas toujours
Te regarder car nous avons péché, Jésus. “Contre Toi, et Toi seul
j’ai péché!” dit le psaume. Notre confusion est grande, notre
repentir aussi. Nous savons que nous T’avons fait mal, que nous
avons blessé ton Amour, et pourtant nous T’aimions... Comment
comprendre ce mystère?
Nous T’aimions, Jésus,
et pourtant nous avons péché, et nous fûmes très malheureux. Alors,
ta Miséricorde est venue nous prendre par la main pour nous redonner
vie, nous redonner espoir. Et tout bas, dans notre cœur, ton cœur
murmure: “Aie confiance, Je suis là, et Je t’aime.” Seigneur
Dieu, Père, Fils Esprit, nous Te chantons et nous bénissons les
merveilles de tes miséricordes...
Voulant parler de la
Miséricorde divine, Jésus propose une parabole: les ouvriers de la
dernière heure. Le Maître donne autant à ceux qui n’ont travaillé
qu’une heure qu’à ceux qui ont supporté tout le poids du jour et de
la chaleur. Quelle injustice! avons-nous envie de crier, oubliant
que les pensées de Dieu ne sont pas les nôtres... Mais comment
connaître les pensées de Dieu qui sont si différentes des nôtres?
Un “jour”, Dieu créa
les mondes visibles et invisibles. Puis Il créa l’Homme. Tout était
bon dans la Création, bon et si beau... Dieu était si content...
Pourtant, Il s’attarda longtemps dans la contemplation de l’Homme,
son chef-d’œuvre qui était très bon... Dieu aimait cette
créature libre, capable d’amour, et qu’Il avait ainsi faite pour
qu’elle devienne le Corps mystique et si parfait de son Fils: car
déjà, dans sa pensée originelle, Dieu-Père “voyait” son Fils unique,
Un avec Lui dans l’opération de l’Esprit d’Amour, déjà le Père
“voyait” son Fils incarné, Jésus, insérant dans le Corps merveilleux
de la Jérusalem nouvelle: son Corps, tous les hommes, ses enfants.
Dieu contemplait son
œuvre inégalable, mais Dieu savait aussi que l’Homme, libre pour
mieux aimer son Créateur, serait trompé par l’Ennemi, et pècherait.
Dieu était bien triste, mais sa pensée créatrice acceptait le
désastre, car l’Œuvre trinitaire de la Rédemption lui permettrait de
manifester encore mieux l’immensité de sa Miséricorde: la tristesse
du Père se transformait en un supplément d’amour et de
miséricordieuse tendresse. Dès lors, les choses “allèrent très
vite”. Enfin, très vite pour Dieu...
Ève et Adam avaient
péché, mais, comme Dieu l’avait voulu, ils donnèrent naissance à de
nombreux fils et filles. Certains furent fidèles comme Abel;
d’autres se conduisirent mal, comme Caïn. Mais Dieu ne supprima pas
Caïn qui, lui aussi, fut le père de nombreuses ethnies. Et c’est
ainsi que l’on vit naître ceux qui deviendraient les Européens, les
Asiatiques, les Africains, les Indiens d’Amérique, etc. Tous ces
peuples développèrent des civilisations différentes, chacun à sa
façon, mais curieusement, tous furent marqués par les mêmes péchés
d’Adam et de Caïn, et tous, oubliant qu'ils étaient frères se firent
des guerres incessantes, allant, parfois, jusqu'à s’exterminer, car
ils avaient oublié l’essentiel: la Loi d’amour de Dieu.
Dieu contemplait ses
enfants devenus très malheureux sans Lui. Dieu “entendit” les cris
des hommes... Dieu se façonna un peuple pour recevoir son Fils, car,
dans sa bonté et sa Miséricorde, Dieu allait devancer l’Heure de
l’Incarnation du Fils: c’était nécessaire pour la Rédemption... Dieu
savait le risque qu’Il prenait, Dieu savait que son Fils serait
rejeté et crucifié, mais Dieu savait ce qu’Il faisait. Il savait que
son Fils ressusciterait d’entre les morts... Il savait que ses
apôtres aimeraient Jésus-Christ, son Fils incarné. Il savait que des
hommes répondraient à l’ordre de son Fils: “Allez, enseignez
toutes les nations...” Dieu savait... Et sa Miséricorde allait
présider à l’œuvre de la conversion et du salut de tous les peuples.
Dieu, Père et Fils,
communiqua son Esprit et sa force à ses douze apôtres et les envoya
d’abord dans les mondes les mieux connus du temps du Christ. C’est
ainsi que les habitants de l’Empire romain, l’Europe d’alors,
devinrent les premiers ouvriers dans la vigne du Fils. Le travail
fut très éprouvant; les épreuves nombreuses; il y eut même beaucoup
de ces ouvriers qui s’épuisèrent à la tâche... Du renfort
s’imposait. Alors Dieu s’en alla chercher d’autres ouvriers qui
n’avaient pas encore trouvé de travail et les fit entrer dans sa
vigne.
Il y avait toujours
plus de travail dans la Vigne du Père, d’autant plus que l’Ennemi
était revenu et s’acharnait à démolir ce que les chrétiens
s’efforçaient de construire: il fallait toujours plus d’ouvriers. Et
tout se passait bien. Dieu était content car les nations, peu à peu,
étaient évangélisées: la Bonne Nouvelle de son Fils commençait à se
répandre sur toute la terre, et le Royaume se construisait...
Bientôt les ouvriers viendraient recevoir leur salaire: ils
recevraient tous le même salaire et ils verraient tous la
miséricorde du Père.
Le Pardon... de la
onzième heure
Un jour, un prêtre
commentant une page d'Évangile concernant les ouvriers de la
dernière heure qui reçoivent le même salaire que ceux qui ont
travaillé toute la journée, au grand scandale de ces derniers,
déclara: "La justice de Dieu ne ressemble pas à la nôtre. Il n’y
a pas de balance au ciel, il n’y a que de l’Amour!"
Comment ne pas être
d'accord? Mais ne faudrait-il pas ici associer ces paroles avec le
pardon que Dieu accorde à tous ses enfants qui reviennent vers Lui,
qui acceptent son pardon? N'y a-t-il pas un lien entre le pardon et
les ouvriers de la onzième heure?
Regardons la terre,
perdue dans le cosmos: à peine une minuscule tête d’épingle, une
poussière jetée dans une immensité infinie. Sur cette terre, il y a
nous, les hommes, proportionnellement encore plus petits, encore
moins que des atomes ou des composants d’atomes. Situation très
inconfortable: comment le Seigneur peut-Il nous voir, comment
peut-Il nous connaître, nous aimer, chacun individuellement? Nous,
si petits, tellement rien! dans l’univers.
Nous sommes pris de
vertige à cette pensée, mais laissons notre imagination vagabonder
un peu: elle nous aidera à mieux comprendre ce que nous sommes et
comment Dieu nous atteint.
Voici la terre, tête
d’épingle perdue dans l’infini incommensurable... et voici, partant
de cette minuscule terre, que s’élève un très mince filet de
lumière, de même diamètre que celui de la terre, ce qui n’est pas
grand chose. Ce mince filet grossit à mesure qu’il s’élève jusqu’à
disparaître dans une immense Croix de lumière, l’immense Croix du
Fils de Dieu, l’immense Croix du Verbe, Croix de lumière qui se
confond avec le Sacré-Cœur aux bras étendus pour nous accueillir
tous.
Ce mince filet de
lumière né de la terre semble aspirer les âmes pour les amener
jusqu’au Cœur de la Croix, jusqu'au Corps mystique du Christ,
l’Église. Toutes les âmes qui se laissent aspirer par ce courant
lumineux, ce courant d’Amour, peuvent entrer dans la Croix de
lumière et trouver leur place dans le Corps mystique, dans le Cœur
de Dieu.
Voici que tout devient
très clair, car tout est question d’échelle. Il y a deux échelles de
valeurs, et l’échelle de Dieu n’est pas la nôtre. À notre échelle à
nous, nous pensons que, pour Dieu, nous ne sommes que des tout
petits, des minuscules, une poussière sans intérêt, inutile aux yeux
de Dieu. C'est ce qui se passe pour les savants découvrant, à une
échelle infra-atomique, le presque inexistant qui prend alors de la
valeur; mais alors nous nous voyons très grands et nous nous enflons
d’orgueil, tandis que nous ne sommes que des riens.
Pour Dieu, à l’échelle
de Dieu qui utilise, avec son grand microscope et à une échelle
humaine infra-atomique pour Lui, n'en est-il pas de même quand Il
nous considère? Alors Dieu voit notre terre et les poussières qui
s’agitent dessus, mais des poussières qu’Il aime car elles sont
destinées, prédestinées, à constituer, à construire le Corps de son
Verbe, le Fils du Père. Et, comme nous sommes tous appelés à remplir
une fonction dans l’immense Corps du christ, nous sommes tous
regardés, tous utiles, et tous aimés... Ainsi, à l’échelle de Dieu,
il n’y a pas de différence entre tous ses petits qu’Il aime d’Amour.
A l’échelle de Dieu le travail de onze heures, ou le travail d’une
heure, c’est la même chose, surtout si le travail d’une heure a
donné autant d’amour que le travail de onze heures. Et Dieu pardonne
les péchés et les misères de tous les hommes, même ceux de la
dernière heure.
Il y a encore autre
chose. Dieu est hors du temps. En créant l’univers, Dieu a créé les
temps, oui, les temps, car chaque système solaire,
chaque univers, chaque galaxie a son temps propre. Et Dieu est hors
du temps. Et pour Lui, une heure de notre temps et onze heures de ce
même temps de l’humanité, c’est la même chose. Pour Dieu,
Dieu-Amour, la seule unité qui existe, la seule mesure qui compte,
c’est l’Amour. Et nous savons bien que la mesure d’aimer Dieu
c’est d’aimer sans mesure.
Voilà pourquoi le
pardon que Dieu nous donne, c’est toujours le pardon de la onzième
heure: car jusqu’à notre dernier soupir nous serons pécheurs, ou
susceptibles de le redevenir, tous. Et nous sommes tous les ouvriers
de la onzième heure. Dans ces conditions, il nous est plus que
salutaire que Dieu traite les ouvriers de la onzième comme ceux de
la première heure. Quelle miséricorde que le Cœur de notre Dieu!
Dieu dit: “Tu
aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur...” Dieu, sachant
aussi combien nous avons tendance à oublier ses consignes insiste
lourdement: “Ces commandements que je te donne aujourd’hui, tu
les rediras sans cesse, tu les répéteras sans cesse...” Ces
commandements de Dieu sont en effet si importants qu’il faut, non
seulement les mémoriser, mais se les redire constamment. Hélas! Ce
n’est pas suffisant tant nos pauvres petits esprits sont distraits
et oublieux. Alors Dieu nous donne des moyens mnémotechniques:
“Ces commandements tu les attacheras à ton poignet, comme un signe,
tu les fixeras comme une marque sur ton front, tu les inscriras à
l’entrée de ta maison...”
Merveille que l’amour
de Dieu! Qui pourrait oublier Dieu en agissant comme Il nous le
demande? Car il est indispensable de sentir de temps en temps la
présence de celui qu’on aime. Les petits rappels à l’ordre sont de
la bonne pédagogie, et le Seigneur est vraiment un Maître en la
matière; nous le constatons tous les jours...
Aimer, c’est d’abord se
plaire en la compagnie de quelqu’un, c’est désirer rester avec celui
que l’on aime. Aimer, c’est découvrir peu à peu l’être aimé, c’est
entrer dans sa volonté, dans son cœur, c’est désirer lui plaire et
le satisfaire, c’est, en un mot, lui vouloir du bien. Plus on aime
quelqu’un, plus on a le désir de s’unir à lui pour ne plus faire
qu’un avec lui. Par ailleurs, l’amour s’épanouit dans la
réciprocité, car l’amour demande l’échange, la communication.
Seulement alors, l’amour devient fécond. Car l’amour vrai et partagé
est et doit être toujours fécond, sinon il n’est qu’un égoïsme
déguisé: j’aime l’autre pour ce qu’il me donne ou m’apporte,
exactement comme j’aime le saucisson; je l’aime pour moi, pour ma
satisfaction propre, et pas pour la joie de celui que je dis aimer.
Quand on aime Dieu, on
éprouve curieusement des sentiments semblables aux sentiments qui
unissent deux êtres humains amoureux l'un de l'autre. Dans certains
cas, quand Dieu exige l’exclusivité de l’amour, les sentiments qui
lient Dieu et l’âme, utilisent, pour s’exprimer, le langage des
amants. L’être aimé de Dieu est d’abord irrésistiblement attiré,
comme par une force invincible. Puis il désire la présence du Dieu
adoré et aimé auprès duquel il se sent en sécurité, en confiance, en
paix... purifié et meilleur. Il cherche ensuite à entrer dans sa
volonté, dans ses désirs. Et puis, il veut l’union pour ne plus
faire qu’un avec Lui, pour s’écouler en Lui, pour se plonger en Lui
et disparaître en Lui et Lui laisser toute la place.
L'amour que l'on voue à
Dieu transforme bientôt le cœur de l’homme pour le faire
insensiblement pénétrer dans le cœur de Dieu, au cœur de la Trinité.
Contemplons l’icône de
la Sainte Trinité de Roublev. Les trois personnages au visage
identique s’aiment, d’un Amour Infini qui est leur Être même. Le
Père génère éternellement le Fils qui reçoit et donne éternellement
l’Amour au Père. De l’éternel Amour mutuel du Père et du Fils, de
cette Relation divine, jaillit l’Esprit, l’Esprit d’Amour, l’Esprit
du Père et du Fils... Ces échanges éternels au sein du Dieu Amour,
ces échanges ineffables, don d’Amour des trois divines Personnes,
complaisance éternelle, totale et infinie des trois Personnes entre
elles, créent, car Dieu est Don, Dieu est Création et Dieu aime sa
création.
Dieu aime sa Création,
mais, en retour, Dieu veut l’amour de sa créature qu'Il a dotée
d’une âme intelligente et libre. Dieu demande l’amour libre de sa
créature humaine, car cet échange d’Amour de Celui qui est, avec
celle qui n’est pas, c’est la vie de la créature, c’est la vie
de l’homme...
Maintenant regardons le
centre de l’icône, regardons l’Agneau Immolé que contemplent les
trois personnes de la Trinité. L’Agneau Immolé et Vivant, l’Agneau
Mystique est au cœur de la Trinité. L’Agneau Immolé et Vivant est le
Cœur de Dieu. Soudain nous prenons conscience d’une réalité
difficile à exprimer. L’Agneau de Dieu, l’Agneau Mystique, c’est le
Corps du Christ, c’est donc le Corps du Verbe, la seconde Personne,
le Fils qui s’est incarné, qui a pris une humanité terrestre pour
sauver l’humanité pécheresse et la ramener dans le cœur de Dieu
qu’elle n’aurait jamais dû quitter.
L’Agneau Immolé, c’est
la Grande Victime qui a été offerte pour racheter les péchés du
monde, c’est Jésus mort sur la Croix et ressuscité. C’est Jésus qui
s’offre au Père, c’est Jésus qui livre son Corps et verse son Sang.
C’est Jésus qui nous donne sa chair à manger et son sang à boire.
C’est Jésus qui nous donne l’Eucharistie. L’Agneau Immolé, Jésus qui
se donne, est au cœur de Dieu, dans le cœur de Dieu.
L’Agneau Immolé,
éternellement vivant au cœur de Dieu, symbole du Mystère Pascal,
l’Agneau Pascal qui livre son Corps et verse son Sang, c’est donc le
Cœur Eucharistique. Le Cœur de Jésus, le Cœur Eucharistique de
Jésus, l’Amour de Jésus qui se donne aux hommes par Amour, sera
éternellement dans le Cœur de Dieu, au cœur de la Trinité. Le Cœur
Eucharistique, c’est le Cœur de la Trinité!
C'est incroyable!
l’Agneau Immolé, le Corps du Verbe incarné, c’est le Corps du Christ
Immolé sur la Croix, c’est aussi le Corps mystique du Christ, ce
Corps dont le Christ est la tête et les hommes les membres. Ce Corps
mystique dont chaque homme est une pierre, un élément infime,
minuscule, mais un élément indispensable, élément éternellement
voulu par le Créateur, ce Corps dont chaque homme est une pierre
vivante, une pierre dont Dieu veut avoir besoin pour réaliser son
éternel dessein d’Amour, ce Corps, c’est nous!!!...
Ce Corps mystique du
Verbe Incarné dont chaque pierre, aimée personnellement, est appelée
à aimer Dieu d’un amour de préférence, ce Corps Mystique du Christ
qui assure le lien entre Dieu et la création, c’est nous... Le cœur
de l’Agneau, le Cœur de Jésus, c’est le Cœur de Dieu au Cœur de la
Trinité, c’est le Cœur de la Trinité.
Remarque: l'amour de
prédilection
À propos de l'amour de
préférence, on peut ajouter ici une petite parenthèse. À de nombreux
saints Jésus a dit ou fait comprendre: “Tu es mon (ma) préféré (e).”
Qu'est-ce que cela peut bien vouloir dire? Comment le Dieu-Juste
peut-il avoir des préférences, des âmes privilégiées? Comment
peut-on comprendre ce qui, dans un premier temps peut apparaître
comme une injustice. Mais nous sommes pourtant tous les préférés de
Dieu, toutes les âmes, toutes sans exception, sont les préférées du
Seigneur, ses privilégiées, car si on les considère à leur place
dans le Corps mystique du Christ, chacune, chaque âme est
indispensable à la place qui est la sienne. Nous sommes si petits,
mais tous, individuellement, les préférés de Dieu qui nous veut
indispensables à la place qu'Il a préparée pour nous, pour chacun
d'entre nous...
Poursuivons maintenant
notre raisonnement: puisque nous sommes les membres du Corps
Mystique, nous recevons la vie du Cœur de Jésus Lui-même, c’est son
Sang qui circule en nous. Nous sommes en Jésus et avec Jésus, dans
le Cœur de Dieu. Nous sommes donc avec Lui au Cœur de la Trinité,
dans le Cœur de la Trinité. Nous sommes dans le Cœur de Dieu, dans
le Cœur de la Trinité? Participant de la Divinité, de l’Amour?
Divinisés dans et par l’Amour? Oui, nous ne sommes rien disait Jésus
à sainte Catherine de Sienne. C'est vrai, nous ne sommes pas, et
pourtant nous sommes puisque Dieu nous désire, veut avoir besoin de
nous, et Il nous aime. Maintenant, dans une adoration éperdue du
Dieu Infini, du Dieu qui nous aime et que nous aimons, nous devons
dire à Dieu, notre Père: “Qu’est-ce que l’homme, que Tu te
souviennes de lui? Qu’est-ce que l’homme pour que Tu l’aimes tant?"
Les pierres du Corps
mystique que Dieu veut construire, sont toutes destinées à la
sainteté. Toutes les pierres nécessaires pour construire ce corps
sont différentes, donc tous les saints sont très différents les uns
des autres. Ils ont vécu à des époques souvent éloignées, séparées
par des siècles; ils se sont formés dans des milieux très divers aux
coutumes très multiples, voire contradictoires ou surprenantes.
Leurs caractères, leurs cultures et leurs milieux de vie, devraient
souvent les éloigner les uns des autres, et les éloigner de nous.
Or, curieusement, il n'en est rien et l'on constate que leurs
dénominateurs communs sont bien plus nombreux que tout ce qui
devrait les séparer: tous ont, un jour, été saisis par Dieu, tous
ont répondu à un appel irrésistible venu on ne sait d’où, tous ont
eu des relations étroites et privilégiées avec quelqu’Un de
généralement invisible, tous ont été soumis à des épreuves et des
souffrances dépassant de très loin les seules forces humaines, tous
ont abouti au don total d’eux-mêmes à Dieu, tous sont devenus des
chantres de l’Amour. Ils ont entendu et vu des choses que les autres
hommes ne voient pas. Ils ont parlé avec l’invisible... Ils ne sont
pas fous, ils ont simplement laissé faire Dieu.
L’amour, c’est fragile,
c’est comme une petite plante dont il faut prendre grand soin, qu’il
faut traiter avec beaucoup de douceur et de délicatesse. L’amour,
c’est fragile, c’est une merveilleuse petite plante qui répand la
joie et le bonheur, mais qu’il ne faut pas malmener, qu’il ne faut
pas rudoyer.
Avez-vous déjà
contemplé ces toutes petites plantes qui, discrètement, sans bruit
et sans forfanterie font la joie de nos jardins, de nos parcs, de
nos prairies? Regardez ces petites plantes: on les voit à peine:
elles ne se révèlent que par un parfum aussi suave qu’il est
discret. Regardez ces petites plantes: elles n’ont l’air de rien, et
ce n’est qu’après les avoir contemplées longuement que l'on découvre
leurs perfections, mais, hélas! une toute petite partie de leurs
perfections. Oui, une toute petite partie seulement, car ces petites
plantes sont si petites qu’on ne peut jamais apercevoir la totalité
de leurs richesses que pourtant l’on devine.
Regardez ces petites
plantes: un léger souffle d’air semble les raviver et les faire
sourire; mais un courant d’air violent les décoiffe et parfois les
arrache de leurs tiges ou de leurs branches. Regardez ces petites
plantes si fragiles: un peu d’eau doucement vaporisée sur elles ou à
leurs pieds leur plaît beaucoup, mais elles redoutent les averses
destructrices. Elles aiment aussi les petits cadeaux et les
attentions délicates les charment.
Regardez ces petites
plantes et ne les brutalisez jamais: un petit souffle d’air les
anime, un peu d’eau les ravive... mais craignez les grands jets
d’eau, les arrosoirs qui déversent trop vite leur contenu. Sous
l’avalanche, sous le torrent qui se précipite, les pauvres petites
plantes se courbent alors aussi bas qu’elles le peuvent, si elles ne
sont pas encore arrachées. Pauvres petites plantes que l’on croit à
l’abri de tous les cataclysmes parce qu’elles ne se plaignent
jamais, parce qu’elles sont humbles et douces, parce qu’elles
semblent résister aux intempéries. Elles résistent aux intempéries,
oui, mais à condition que les intempéries soient bien proportionnées
à leurs forces.
L’amour est comme ces
petites plantes fragiles. Il semble résister à bien des intempéries,
et réellement il résiste bien aux ondées estivales, mais attention,
c’est une petite plante fragile qu’il faut soigner avec
persévérance, qu’il faut manipuler avec soin pour ne pas la faire
mourir, et à qui il faut éviter les orages trop violents, les
tempêtes, les torrents ou les avalanches.
L’amour est, dit-on,
fort comme la mort, oui, mais à condition qu’on sache l’entretenir
convenablement et qu’on ne le soumette pas à des épreuves qui
pourraient le tuer.
L’amour est une petite
plante fragile qui demande beaucoup d’attentions, de douceur et de
délicatesse. C’est une petite plante que l’on peut conserver aussi
longtemps que l’on veut, à condition de ne pas la brutaliser.
L’amour, dit-on est immortel, peut-être, mais l’amour, s’il n’est
pas entretenu ou s’il est brutalisé, peut parfois être
dangereusement malade et tellement affaibli qu’il s’étiole jusqu’à
sembler disparaître. Certes, des racines peuvent demeurer cachées
dans le sol, mais pour que la petite plante renaisse, il faudra
beaucoup de soins, et surtout beaucoup d’amour. Car la plante
d’amour, vit surtout de beaucoup d’amour.
Mourir, c'est entrer
dans l'Amour Trinitaire, donc ce n'est pas mourir. Certes, il y a la
mort physique, obligatoire, mais même cette mort physique est encore
vie, car mourir, c’est aussi germer, c’est aussi porter du fruit:
“Si le grain de blé ne meurt, il ne peut pas porter de fruits.”
Thérèse de Lisieux n’a commencé à porter du fruit qu’après sa mort.
Le Père La Colombière, directeur de Marguerite-Marie, chargé par le
Seigneur de faire connaître son Sacré-Cœur, n’a véritablement
commencé sa mission qu’après avoir fait le sacrifice de sa vie. Les
exemples ne manquent pas: c’est comme ça! Mourir, c’est enfouir,
c’est s’enfouir pour germer. Et germer, c’est éclore.
Mourir sur la terre,
c’est éclore pour laisser jaillir toutes les richesses, toutes les
grâces que Dieu a déversées en nous pendant la période de gestation.
Mourir, c’est révéler la miséricorde de Dieu. Mourir, c’est éclore,
c’est s’ouvrir au soleil de Dieu pour laisser triompher la vie, car
la vie naît de la mort. La vie avant la mort, c’est un temps de
préparation, de mûrissement, pendant lequel Dieu a le temps de
préparer ce qui deviendra un chef-d’œuvre de son Amour, une image de
Lui-même. Pendant ce temps, il lui faut veiller au bon
développement, tailler ce qui dépasse, défroisser ce qui s’est
replié sur soi, gratter et huiler ce qui a grippé, reverdir ce qui
s’était fané. Quel travail de compassion, de patience, de
délicatesse, d’éducation, d’amour!... Quelle sollicitude, quelle
tendresse, quelle discrétion, quel Amour! De tout cela, rien ne se
voit et celui qui en est l’objet devine à peine tout ce travail que
Dieu accomplit en lui, qui ne doit que se laisser faire. Rien ne
paraît au dehors des beautés qui se préparent et dont le Maître
garde le secret...
Le grain de blé, le
bouton de rose, le bourgeon, ces espoirs de la vie, se façonnent
dans le silence et de l’intérieur, dans le seul vouloir de Dieu,
dans le secret du cœur de Jésus. Ils n’ont qu’à se laisser façonner
et modeler par l’Amour, pleins d’espérance, jusqu’au jour de la
mort, jusqu’au jour de la naissance, de l’éclosion riche des
promesses. Ce jour-là les grains de pollen ou les gouttes de sève,
ces grains de vie, ces gouttes d’Amour, pourront enfin s’épanouir
dans le soleil de Dieu pour, à leur tour, semer la vie et se
disperser pour retomber en pluies fécondes sur les âmes restées sur
la terre à achever leur gestation avant d’éclore elles aussi.
Mourir, c’est entrer
dans l’Amour. Mourir c'est germer, et c'est encore bien plus que
cela. Michel Quoist a écrit, un jour: “Dieu n’a que des désirs”.
Parlant des représentations du Ciel, de l’Enfer et du Purgatoire
il précise: “Le Ciel, le Purgatoire, l’Enfer, ne sont pas des
lieux, ne sont pas des endroits où nous allons, mais des états dans
lesquels nous entrons.” Ainsi, pour parvenir au Ciel il nous
faut purifier notre amour: c’est le Purgatoire: “Nous y sommes
dès maintenant, quand nous brûlons en nous toutes les scories du
non-amour (le péché) et assumons la souffrance de ne pas encore
aimer avec tout notre être.”
C’est peut-être pour
cela que parfois, sans l'avoir cherché, nous revoyons notre passé,
mais avec une intensité, une réalité et une acuité bouleversantes.
Nous ne pouvons alors que nous convertir, changer de vie, faire
pénitence et réapprendre à aimer Dieu. Dès lors, si nous faisons
notre Purgatoire sur la terre, notre mort sera vraiment une entrée
dans l’Amour, instantanément.
Une question se pose
pourtant: que vont devenir ceux qui ne sont pas prêts? On peut se
demander si la vie n’est pas, en fait, une boucle que l’on a à
parcourir, dans le temps. Avant notre naissance sur la terre, nous
n’étions pas encore dans le temps, et, après notre mort, nous ne
serons plus dans le temps. Entre temps nous circulons sur la boucle,
et un jour, presque à la fin de la boucle, au moment où la boucle va
s'achever, il y a comme un nœud, un nœud essentiel car c'est
peut-être à cet endroit que notre vie terrestre va se nouer, avant
de quitter le temps.
Alors mourir, qu’est-ce
que c’est? C’est simplement quitter le temps, tout en continuant de
vivre. C’est entrer dans une autre dimension, tout en continuant
d’aimer toujours plus le Bien-Aimé comme Il veut qu’on L’aime,
totalement, dans la lumière de Dieu. Tout en continuant de servir
aussi, mais d'une autre façon... C'est peut-être aussi continuer à
pénétrer dans la volonté de Dieu.
Mais qu'est que la
volonté de Dieu, et qu'est-ce que pénétrer dans la volonté de Dieu?
Une volonté donnée à
Dieu, c’est une volonté qui ne peut plus rien décider par elle-même,
qui ne peut plus être agie que par le Maître. L’être humain qui a
ainsi remis à Dieu ce qu’il y a de plus noble et de plus précieux en
lui, sa liberté et sa volonté, devient-il pour autant un être
dévertébré psychologiquement, un être inconsistant, incapable de
décider, incapable d’efforts, un être déshumanisé, devenu robot, une
sorte d’androïde aveuglément et inexorablement conduit par une
intelligence maîtresse et absolue? Certainement pas.
Une volonté donnée à
Dieu par amour est une volonté qui est dans la Main de Dieu, seul
Maître d’œuvre, qui n’agit que mue par Dieu et selon ses désirs, ses
conseils, sa volonté. Celui qui a donné sa volonté à Dieu ne vit
plus (ne devrait plus vivre) que de l’Amour et dans l’Amour. C’est
le premier pas vers l’union avec Dieu. C’est pourquoi il est
nécessaire, sachant que nous ne sommes que des pauvres êtres
fragiles et pécheurs, capables de toutes les ruses, de bien border
le contrat, de bien verrouiller sa volonté propre pour que nous ne
puissions jamais, ni nous dérober, ni échapper. Et cela, pour
l’éternité.
Mais comment être
capables de tenir? Nous sommes si petits... si petits!
Nous savons que, par
deux fois, le prophète Amos est intervenu en faveur de son peuple.
Dieu, en effet n’était pas content du tout et avait décidé de
prendre des sanctions. Alors le prophète se fit implorant auprès de
Dieu: “Seigneur mon Dieu, pardonne, je t’en prie; Jacob
pourrait-il tenir? Il est si petit!” Il est si petit!
Il est si petit!
Revoyons l’univers, l’univers total dans la Main de Dieu. La terre
est bien petite, mais si jolie et le Père la regarde avec tendresse.
Il y a aussi la fourmilière humaine, tous ces petits êtres qui
s’agitent en tous sens sur la petite sphère. Que sommes-nous? Si
petits, si petits dans la Main de Dieu. Et nous avons des velléités
d’indépendance, et nous faisons ce que nous ne devrions pas faire,
ce qui est dangereux. Dieu nous a prévenus... mais bien sûr, c’est
tellement tentant d’aller voir là où il ne faut pas. Et puis Dieu a
beau nous dire qu’Il existe, nous ne Le voyons pas. D'ailleurs, qui
donc peut Le voir?
Jésus et la volonté
du Père. Contemplation
Je suis devant Vous,
Trinité Sainte. Dans la Trinité je contemple le Père, je contemple
Jésus, je reçois l’Esprit de leur amour. L’Esprit d’Amour en Dieu
m’est donné, tout comme m’est donnée la vie et tout ce que je suis.
Si je reste humblement dans la main de Dieu, blottie dans la
confiance que sa tendresse me prodigue, je suis dans l’Amour. Et
j’ai tout car je reçois tout, sans cesse; mon cœur sait que tout me
vient de l’Amour de Dieu... C'est le vrai bonheur car l’intelligence
du cœur s’épanouit dans l’Amour.
Jésus, je contemple
l’humilité de Dieu incarné en Toi, sur la terre. Le Père T’a envoyé
pour sauver tous les hommes, sans exception aucune. Le Père et Toi
Vous êtes UN, et la volonté du Père, et celle du Verbe, c’est la
même. Jésus-Homme, pour sauver les hommes Tu dois obéir à la volonté
divine. Tu as entre tes mains la puissance divine, mais Tu dois
vivre comme un homme de ton époque. Tu veux sauver tous les hommes,
mais “Tu n’as été envoyé qu’aux brebis perdues d’Israël.”
Tu aurais voulu montrer
la bienveillance divine à tous les hommes, à toutes les nations,
mais le Père avait limité ton action à la Palestine. Ton Cœur
missionnaire était comme empêché de faire plus, de faire tout ce
qu’il aurait fallu et voulu faire, car ta volonté divine devait
apprendre aux hommes la vertu essentielle: l’humilité. Par cela,
Jésus, Tu nous révèlerais l’humilité de Dieu.
Alors le Cœur de la
Miséricorde divine nous donna Marie. Et Marie reçut l’Amour. Marie
accueillit l’Amour comme toutes les créatures auraient dû le
recevoir. Contemplons la Miséricorde divine qui nous dépasse. Bien
sûr, nous ne “voyons” pas Dieu qui pleure, nous n’”entendons” pas le
Cœur du Père qui dit: “Mes pauvres petits, revenez donc à Moi,
revenez donc au bonheur, à l’Amour.” Nos sens humains ne sentent
rien, et pourtant notre cœur est comme s’il recevait et accueillait
cette Miséricorde divine avec une infinie reconnaissance. Seigneur
bien-aimé, nous ne pouvons plus rien que Te contempler et T’aimer.
Et rester dans ton Cœur de Miséricorde.
Prière au Père
Jésus aime que nous
priions le Père en son Nom. Il a même dit: “Tout ce que vous
demanderez à mon Père, en mon Nom, Il vous l’accordera.” Alors,
Père, au Nom de Jésus, ton Fils Bien-Aimé, au Nom de Jésus ton
Enfant crucifié pour nous, au nom de Jésus nous Te supplions: au Nom
de Jésus permets que tous les hommes retrouvent ton Amour. Père,
cela ne devrait pas T’être bien difficile: Tu es si grand, si bon,
si miséricordieux, et nous sommes si petits et si faibles... mais
créés pour T’aimer...
Prière à la
Miséricorde de Jésus-Eucharistie
Jésus, ton Cœur
Eucharistique, c’est ton Amour qui se donne pour rester avec nous.
Jésus, le Père vient de Te glorifier car Tu as pleinement accepté sa
volonté, la volonté de la Sainte Trinité dont Tu es. Tu regardes le
Père, Tu regardes les apôtres, Tu regardes tous les hommes qui
peuplent et peupleront la terre. Et Tu as pitié d’eux car, pour la
plupart, ils n’auront pas vu les pièges de Satan et ils se seront
laissé prendre. Tu vois tous les hommes, Jésus et Tu as pitié d’eux.
Tu vas vers la Croix. Oui, bientôt ta Grande Tâche, celle pour
laquelle Tu es venu, ta Grande Tâche sera accomplie: le monde sera
racheté, la Rédemption sera acquise...
Jésus, ton Cœur
d’Amour, ton Cœur devenu Cœur Action de Grâces, ton Cœur
Eucharistique en train de se donner s’émeut et pleure. Ton Cœur,
Jésus, ton Cœur en train de se donner, oublie que l’Acte que Tu vas
incessamment poser: le don de Toi présent dans le pain et le vin que
Tu contemples, ton Cœur, Jésus, oublie ta Passion imminente pour ne
plus penser qu’à ceux qui vont pécher et qui en seront plus tard
tellement malheureux. Ton Cœur, Jésus, oublie sa propre Passion pour
devenir Miséricorde, la Miséricorde que Tu manifesteras tout à
l’heure, quand l’épée Te transpercera le Cœur. Ton Cœur, Jésus, ton
Cœur Eucharistique, devient ton Cœur-Miséricorde. C'est cela l'amour
de Dieu. |