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L'homme dans la création

 

2-1-Un rêve: un voyage dans l'espace

     2-1-1-Contemplation de l'univers

C'était un matin brumeux, propice à la méditation... Durant quelques secondes, je me suis vu transporté dans l’infini de l’univers, comme un astronaute bénéficiant d’une machine capable de voyager à travers tout l’univers, et pas seulement dans notre petit système solaire. Grâce à cette machine, je circulais dans les mondes stellaires et je pouvais contempler toute la merveille des univers. Les ténèbres interstellaires s’émaillaient des lucioles qu’étaient devenues les galaxies. Je circulais, et je me disais que toute cette mécanique était vraiment bien réglée. Je me souvenais aussi que Dieu, dès qu'Il eut terminé sa création, en avait confié le fonctionnement à ses anges, si intelligents et si rapides dans leurs déplacements: c’est sûr, avec eux, tout marcherait très bien...

Moi, dans ma nacelle, j’étais tout autre chose: je vivais dans une chair. Il y avait quelque chose d’étrange qui faisait que j’étais très différent de tout ce que je pouvais contempler. Oui, j’étais faiblesse infinie, très vulnérable au milieu de ces univers bien réglés, mais aveugles. Certes, les anges faisaient bien leur travail, mais on ne sait jamais... il peut toujours y avoir des ratés ou des négligences: d’ailleurs, on l'avait bien vu avec Lucifer, et il fallait se méfier.

J’étais faiblesse infinie dans ces univers que je traversais, que je contemplais, mais il y avait la vie en moi. Il y avait bien de la matière en moi, mais je n’étais pas que matière, il y avait autre chose d’infiniment plus complexe, il y avait la vie... Et la vie, quel mystère! Quelle force invisible, insensible et cependant présente, me permettait de me libérer des forces matérielles, de n’être pas soumis à ces seules forces mais à une autre force qui me donnait vie, intelligence et sensibilité, qui me permettait de contempler et d’aimer?

Cette force vitale m’étonnait beaucoup, mais elle m’étonna encore plus quand je pensai à sa présence dans ce qu’il y a de plus petit dans l’être vivant: l’embryon. Une cellule, infiniment petite et unique, peut se développer seule, sans même s’en apercevoir, et devenir un être complet, et même un homme adulte. Quelle est donc cette force mystérieuse, inconnue, qui donne vie, et vie capable d’intelligence et d’amour? Soudain je me sentis perdu au milieu de tous ces univers, et je me découvris tout autre. Quel mystère, et quel vertige!

Mais ce n’est pas tout. Je me mis à chercher la terre. Impossible de la trouver: bien trop petite, insignifiante, un simple microbe, et encore! perdu lui aussi, au milieu de la farandole bien orchestrée des galaxies et des mondes cosmiques. Je cherchais la terre: elle devait bien exister puisque c’est sur elle que j’avais été conçu, que j’avais grandi, que je m’étais développé... Et même, sur cette terre, je m’y trouvais souvent très bien. C’est qu’elle est bien jolie, la terre des hommes: jolie et accueillante... et confortable. Comme si elle avait été spécialement préparée pour m’accueillir avec tellement d’amour. Dans les univers cosmique, je ne découvrais rien de semblable...

Ô Seigneur! Quelle merveille étonnante qu’un homme sur la terre! On n’y pense pas assez. Je me mis “dans la peau” du Créateur. C’est bien prétentieux et bien inadapté ce que j’écris là, mais comment contempler notre Créateur et sa sollicitude autrement qu’avec nos moyens humains? Les hommes ne sont ni des dieux, ni des anges, ni des esprits, mais des êtres contingents, complexes, hybrides, composés d’esprit et de matière, de matière et de vie...

Oui, je me mis “dans la peau“ de mon Créateur et je contemplai la terre. Et j’imaginai Dieu façonnant la terre, semant d’innombrables plantes, toutes utiles, même si plus tard, bien plus tard, le péché de l’ennemi et des hommes sèmera de l'ivraie, plantera des orties ou fera naître des épines. J’imaginai l’Amour préparant des terrains fertiles, des sources généreuses, des brises salutaires, des rosées bénéfiques. J’imaginai Dieu créant les animaux dont l’hommes aura besoin...

Oui, Dieu aimait la terre, et s’attardait à la perfectionner, jusqu’au jour où l’Homme fut créé. C’était une merveille, faite à l’image de Dieu. Dieu aimait déjà toute sa création, mais là, devant l’Homme, Dieu fondit d’amour...

Et Dieu mit au cœur des hommes un peu de l’Amour qui est sa nature. Et Dieu, sachant tout ce qui devait arriver dans le temps de la terre, le temps qui serait celui des hommes, Dieu prépara le festin merveilleux qui donnerait aux hommes une étincelle de sa vie éternelle. Doucement, tendrement, dans son Cœur trinitaire, Dieu unique préparait l’Action de Grâce éternelle de son Cœur de Dieu, de son Cœur de Père, de son Cœur Fils et d’Esprit, Dieu préparait la Sainte Eucharistie, la nourriture céleste des hommes terrestres. Jésus nous donna sa Sainte Eucharistie et s'en alla vers Gethsémani...

Sans que je m'en aperçoive, mon voyage dans l'espace m'avait conduit à Gethsémani, là où s'est produit certainement le plus grands de tous les évènements cosmiques que l'univers ait jamais connu: la mort de son Créateur...

     2-1-2-Gethsémani

J'étais toujours dans ma nacelle spatiale, et je contemplais, effaré, Jésus dans son Agonie. Je ne pus retenir un cri:

– Ô Jésus, que s’est-il passé en Toi pour que là, à Gethsémani Tu aies crié: “Non Père, pas ça!” Puis Te reprenant vite, que Tu aies ajouté: “Cependant si ce Calice ne peut passer loin de Moi, que ta volonté soit faite!” Et puis, pourquoi, bientôt, l’abandon du Père, lorsque, sur ta Croix, Tu constateras que “Tout était accompli!”  et que Tu remettras l'Esprit entre ses mains. Pourquoi le Père T’abandonna-t-il alors?

Je me posais ces questions apparemment en contradiction avec les étonnantes merveilles que je venais de contempler. Et soudain je compris: c'était une décision trinitaire de sauver tous les hommes par l’incarnation du Verbe de Dieu, puis demeurer avec eux par sa présence dans son Eucharistie, sous l’apparence du pain et de vin. Mais pour cela, Il devait mourir sur une Croix, comme abandonné du Père....

Je poursuivis ma contemplation de Jésus à Gethsémani, contemplation qui me déconcertait car elle avait pris place en moi, bousculant la logique de mon rêve spatial. Jésus, Tu nous as vus tous, durant ton Agonie dans le Jardin des Oliviers, et il n’y avait pas de consolation pour Toi, car alors, le Père se taisait, le Père semblait T’abandonner et ne pas entendre ta soif des âmes. Pourtant, Jésus, Tu faisais la volonté du Père, la volonté trinitaire tout entière, sans omettre un iota! Tu accomplissais toutes les Écritures, tellement que Tu pus dire, à bout de souffle: “Tout est accompli!”

Tout était accompli, Tu pouvais remettre ton âme entre les mains du Père, et rendre l’Esprit. Oui, Tu le pouvais et Tu savais que le Père allait T’accueillir, que tes enfants étaient sauvés, par ton sang, par ta mort, par ton holocauste. Tu étais toujours Dieu! Tu es toujours le Tout-Puissant, Tu es toujours l’Amour! Et pourtant, Jésus, Tu es là, à Gethsémani, et Tu pleures, et Tu cries vers le Père! Et les hommes continuent à blasphémer... Et Tu restes, Jésus, à crier vers le Père, le Père qui T’abandonne...

Que voulais-Tu nous enseigner, Seigneur, par ton apparente impuissance, par ta souffrance et par ta Croix? Que voulais-Tu nous dire, Jésus par ton humilité, par ta douceur, et par ta soumission au Père? Dis-nous ce que signifient ces expressions: "Faire la volonté de Dieu" et "Laisser faire Dieu"?

Laisser faire Dieu, c'est laisser les évènements venir en leur temps et comme Il le veut. C'est vivre abandonné entre ses mains, mais toujours attentifs aux besoins de l’autre... Car laisser faire Dieu, ce n’est pas se désintéresser de ce qui arrive ou arrivera, et encore moins de son prochain, mais c’est vivre unis à Dieu, à sa volonté, à ses désirs, en pleine conformité avec l’Amour.  

C'est alors que nous pouvons "voir" Dieu. Nous "voyons" Jésus montrant son Sacré-Cœur, puis ouvrant largement ses bras comme pour accueillir ses enfants destinés à devenir son Corps. Jésus regarde le Père, le Père qui Le regarde et qui L’aime, car, en Lui qui rassemble tous les mondes créés, tous les mondes vivants, le Père se reconnaît, le Père contemple sa Pensée créatrice et féconde. Le Père aime Jésus et Lui dit: “Je T’aime, mon Fils en qui j’ai mis tout mon Amour!” Le Père “sourit” à Jésus. Jésus “sourit” à son Père. Leurs sourires d’Amour, leurs sourires d’éternité se rencontrent et se mêlent, et de leur embrassement éternel et puissant jaillit l’Esprit d’Amour. Pourtant, Jésus, à Gethsémani Tu cries vers le Père qui semble T'abandonner...

     2-1-3-Le mystère du Verbe de Dieu incarné

Le problème est immense, infini, à la taille de Dieu; et nous, nous sommes infimes, d’une taille infiniment petite. Jésus était bien un homme, un homme à notre taille. Oui, mais Jésus avait deux natures: une nature humaine et une nature divine, tellement et si étroitement associées entre elles dans un corps humain qu’il n’y avait qu’un homme complet...

Dans l’Éternité de Dieu et dans son Être, il y a trois Personnes qui s’aiment tellement qu’elles ne sont qu’UN. Trois personnes séparées, mais unies de telle sorte qu’elles sont Dieu-Seul, Dieu-UN. L’Amour de Dieu Créateur a été bafoué, mais Dieu veut conserver son œuvre magistrale: l’homme que l’orgueilleux a sali. Les trois Personnes décident, ensemble, en plein accord: l’Une d’entre elles s’incarnera. C’est le Fils, le Verbe, Parole Créatrice du Père qui accomplira cette tâche, en bénéficiant de toute la faveur du Père et de l’Esprit.

Et le Verbe s’incarna. Le Verbe se façonna un corps parfait dont Il pénétra la chair pour l’animer des pensées divines et les manifester dans le langage des hommes, qui, ainsi, pourraient, tous, comprendre les désirs de Dieu. En s’incarnant, le Verbe se mettait à la portée des hommes...

Oui, le Verbe est Dieu, Dieu-Unique. Dieu est infini, donc partout. Donc le Verbe, malgré son incarnation dans le corps de Jésus, l’homme qu’Il imprégnait, le Verbe demeurait forcément au sein de la Sainte Trinité... Le Verbe agissait à travers l’homme Jésus tout en restant dans la Trinité.  Et jusqu’à l’Eucharistie, tout se passa bien. Jésus devait retourner au Père, mais, Dieu incarné, Il avait expérimenté dans sa Chair les contingences et les faiblesses de l’homme, et Il ne voulait pas l’abandonner, le laisser orphelin. C'est alors que le Verbe de Dieu se mit tout entier dans du pain et du vin, et multiplia ces espèces à l’infini: ainsi l’Amour de Dieu resterait avec les hommes qui aimeraient Dieu.

De tout ceci, la Trinité était parfaitement d’accord, puisque c’était en son sein que les décisions avaient été prises. Alors pourquoi, brusquement, Jésus, qui est l’incarnation du Verbe, qui est Celui à travers qui le Verbe de Dieu, donc la Trinité, s’exprime pour les hommes, pourquoi, brusquement, Jésus, Corps parfait que le Verbe s’était façonné, pourquoi Jésus a-t-Il semblé hésiter devant la volonté du Père qui était aussi sa propre volonté à Lui?  Et pourquoi le Père a-t-Il abandonné Jésus sur la Croix, s’abandonnant en quelque sorte Lui-même?

Ces choses sont inouïes! J'essayai pourtant d’imaginer la création blottie dans la grande Main de Dieu. La création entière est toute petite, blottie au fond de la Main de Dieu, de la Très Sainte Trinité qu’elle ne verra jamais. Alors que dire du microbe qu’est la terre, et des micro-micro-microbes que sont les hommes sur la terre? Pourtant, chose inexplicable pour nous, Dieu voit les hommes qu’Il aime, et Il voit chacun d’entre eux... Et Dieu voit les détresses des hommes; mais comment les atteindre? Et moi, dans ma nacelle spatiale je poursuivais mon incroyable contemplation.

     2-1-4-L'Incarnation du Verbe de Dieu

Pour sauver les hommes, Dieu avait décidé d'aller vers eux: le Verbe se ferait un homme parmi les hommes. Comment faire? Dieu infiniment grand ne pouvait pas entrer dans un homme infiniment petit. Alors la Trinité fit jaillir de son Cœur un fin rayon de son Amour, un fin rayon de son Verbe qui pouvait ainsi toucher la terre, après avoir traversé une grande partie de l'espace. Ce “fil” d’amour “transportait” l’Amour du Verbe, la deuxième nature du Christ.

Le Verbe s’incarna, se fit chair; le Verbe, pour délivrer les hommes de leurs péchés, prit sur Lui tous leurs péchés. Agneau de Dieu, Il pouvait prendre le Chemin de la Croix, ce Chemin qui avait été prévu et décidé dans le sein de la Trinité, en un accord parfait. Jésus, Verbe de Dieu était donc en plein accord avec le Père dont il avait toute la faveur, le Père qui ne pouvait pas l’abandonner car le “fil”, qui reliait Dieu à la terre et aux hommes, était Dieu Lui-même et indestructible. De plus, le Père et le Fils sont UN dans l’amour qu’est l’esprit...

Il me sembla appréhender un peu ce mystère insensé de l’abandon du Fils par le Père. Jésus s’était fait péché pour délivrer les hommes de leurs péchés, Jésus avait pris sur Lui tous les péchés des hommes. Mais voici que soudain le péché du monde faisait écran entre le Père et le Corps de Jésus, Jésus-Fils et Verbe de Dieu, mais aussi homme. Voici que le péché qui allait mourir avec Jésus sur la Croix assombrissait même le “fil” divin qui reliait le Verbe incarné à la Trinité Sainte. L’espace d’un instant, Jésus-homme se crut abandonné. Mais ce ne fut qu’une éclipse...

J'étais toujours dans ma nacelle qui, ayant comme quitté le mouvement des espaces célestes, stationnait maintenant au-dessus du Jardin des Oliviers où Jésus était en Agonie. Et je voulais comprendre.

Lorsqu’un homme est dans une grande angoisse intérieure à cause d’une décision qu’il doit prendre rapidement, décision grave qui engagera non seulement toute sa vie, mais également celle des autres, il ne peut s’empêcher d’envisager tous les cas de figure qui ne manqueront pas de se produire après son choix définitif.  Les conséquences les meilleures lui apparaissent avec netteté et le consolent; mais il y a aussi tout ce qui peut se produire d’imprévu, de mauvais, d’inévitable. Si l’homme qui doit prendre une telle décision mettant en cause tout l’avenir du genre humain, et si cet homme est l'Homme, le Verbe incarné, Dieu et homme à la fois, l’angoisse qui est sienne peut prendre des proportions de taille cosmique, et même davantage, et peser d’un poids tel qu’aucun corps humain ne pourra jamais l'assumer.

Jésus est cet Homme, et Il tremble. Le “fil” d’Amour qui Le relie au Père est comme “encombré” des multiples images que le Fils ne peut ignorer, et que le Mauvais déforme et caricature. L’espace d’un instant, la partie humaine de Jésus paraît défaillir, mais l’Amour l’emporte. Le “Fil” que la Trinité a envoyé pour toucher la terre et permettre au Verbe de s’incarner, ce “Fil” a été agité d’un léger frémissement, mais d’un frémissement d’amour. L’espace d’une seconde humaine, délaissant sa nature humaine, Jésus a laissé sa partie divine retrouver le Père... Jésus a rejoint le Cœur de la Trinité, son “chez Lui”, mais son corps fléchit ne pouvant supporter l'infinité de sa douleur. Mais le Verbe revient dans le corps de Jésus qui retrouve ses forces humaines, toutes ses forces. Jésus peut se lever et partir vers son Chemin de Croix, car c’est l’Heure désirée pour laquelle Il est venu...

Un brusque rayon de soleil est venu interrompre mon rêve.

2-2-Rencontrer quelqu'UN

     2-2-1-L'homme dans la Création

Tout est tellement inouï quand nous méditons sur la grandeur de Dieu et notre infinie petitesse... Tout est tellement inouï quand nous pensons à la réalité de notre intelligence qui peut contenir l’immensité des univers, quand nous contemplons l’Infini de l'Amour de Dieu, de l’Amour qu’Il nous donne, de l’amour que nous pouvons aussi Lui rendre. Nous demeurons confondus.

Quand nous regardons des films d’astronomie, nous  prenons conscience de ce que, peut-être, nous sommes, ou ne sommes pas. Et par moments, nous nous disons que, peut-être, le péché originel, c’est nous qui sommes en train de le commettre... “Tu ne mangeras pas le fruit de l’arbre de la connaissance!” Et nous sommes en train de le manger... et croyant devenir “comme des dieux”, nous nous perdons dans un vertige démesuré. “Tu ne mangeras pas le fruit de l’arbre de vie!” Et nous le mangeons, et peut-être allons-nous en mourir... Ô mon Dieu! Aie pitié de nous!...

Les hypothèses concernant la création de l'univers, concernant le bigbang évoluent encore: c’est normal, parce que ce que nous voyons aujourd'hui avec nos instruments les plus puissants s’est passé il y a plusieurs millions d’années-lumière; il est bien évident que l’on ne pouvons pas vraiment saisir la vérité... Mais ce que nous pouvons en appréhender est vraiment terrifiant. En effet, que sommes-nous, nous les hommes, qui avons osé faire entrer dans notre intelligence l’infinité de la Création? Le vertige est inévitable... et quel vertige!!!

Oui, que sommes-nous? Inévitablement voués à la mort? Alors, à quoi bon la vie... Et notre intelligence? Au fond, qu’est-ce que c’est? Penser, découvrir des merveilles, réaliser des œuvres, se donner de la peine puis disparaître... En un mot, avoir servir à quoi? Il nous semble que notre être se vide, se vide au sens propre: c’est étrange et atroce, car c’est comme le chemin du désespoir... Mieux vaut ne pas savoir, mieux vaut ne pas penser. Mais nous savons, et nous pensons... Ô Seigneur!...

Il y a un autre vertige, celui de l’infiniment grand de l’infiniment petit. Par rapport à l’immensité des univers, nous ne sommes rien, rien que des micro-microbes d’atome... Mais par rapport à l’infiniment grand de l’infiniment petit, chacun de nous est quelque chose, mais quoi? Rien, et pourtant quelque chose capable de construire autre chose si nous consentons à rester à notre taille, à notre échelle.

La vérité des cris de ceux qui ont écrit les psaumes, de ceux à qui Dieu a fait saisir un peu de sa Vérité prend alors tout son sens. C’est le même vertige, un peu atténué cependant, car ils connaissaient un peu moins que nous... Ils comprenaient aussi que Dieu était amour.

Regardons de nouveau la grande Main de Dieu qui contient tout l’univers. Le Père regarde son Œuvre, les merveilles qui sont dans sa main: elles sont bonnes. Dieu contemple les infiniment grands qui tiennent dans le creux de sa Main: ils sont tout petits dans leur immensité. L'Œuvre est belle, et Dieu l’aime... Il contemple aussi les infiniment grands de l’infiniment petit, car Dieu les voit ces infiniment petits, et Il les aime aussi... Nous pouvons imaginer l’infiniment grand de l'univers que le  Seigneur a créé: cela nous donne le vertige, mais nous pouvons imaginer. Par contre, notre esprit est totalement aveugle devant l’infiniment petit, et notre imagination morte. Nous savons que cela existe, mais nous ne savons pas vraiment ce que c’est... Et nous avons peur soudain...

Heureusement, voici qui est plus rassurant. Dieu a aussi créé les hommes et Il les a placés comme à la charnière des deux infiniment grands de sa Création, l’infiniment grand de l’infiniment grand, et l’infiniment grand de l’infiniment petit. L’Homme est en équilibre entre ces deux infinis. Pour qu’il puisse rester en équilibre, Dieu lui as donné des règles à respecter, des règles obligatoires, car Dieu aime l’Homme, et Il ne veut pas qu’il se perde. Et la plus grande Règle qu'Il lui ait donnée, c’est aussi la règle du bonheur: “Tu aimeras le Seigneur ton Dieu... Tu aimeras ton prochain... Heureux les amoureux de Dieu... Heureux les miséricordieux... ” La Règle de Dieu, c’est la Loi de l’Amour...

     2-2-2-Jésus

Nous adorons en silence mais une question surgit, une unique question qui contient tout. Qui était Jésus? Comment son Être à la fois humain et divin pouvait-Il vivre au milieu de nous? Sa nourriture, c’était de faire la volonté du Père. Mais comment pouvait-Il faire?...

Le matin, quand Jésus vivait chez nous avec ses apôtres, Il se levait très tôt, Il s’éloignait un peu, et dans le calme de la nature, sa nature, Il rencontrait le Père. Pendant quelques brefs instants, Père et Jésus se retrouvaient UN dans l’Esprit! À ces heures matinales, quand Jésus rencontrait le Père et que, Verbe de Dieu, Il “retrouvait” sa divinité, Il devait Se transfigurer. Sa divinité devait transparaître à travers le manteau de sa nature humaine, et Il devait être si beau. Mais personne n’a pu Le voir... Sauf, un jour, mais l’Heure était grave, quand Il Se transfigura devant trois de ses disciples qui en furent à jamais émerveillés...

Ces choses sont beaucoup trop grandes pour nous, car elles sont autres: elles ne sont ni de l’univers infiniment grand, ni des univers infiniment petits, elles ne sont pas humaines, elles ne sont pas de la Création, elles sont de Dieu, et elles sont indicibles... Nous devrions être épouvantés, mais en contemplant Jésus quand Il rencontrait le Père, nous L’aimons, car Il est l’Amour... Et Il met de l’Amour dans nos cœurs.

2-3-L'autre monde

Nous connaissons le monde visible, audible, sensible, le monde qui nous entoure, dans lequel nous sommes plongés. Ce monde, nous ne le connaissons que par nos sens, nos cinq sens adaptés pour en capter les informations et les envoyer à notre cerveau. Les infirmes à qui un ou plusieurs de ces sens manquent, ne connaîtront jamais le monde extérieur dans sa réalité, du moins sa réalité telle qu’il nous est donné de la saisir. Si, par miracle, un sens supplémentaire nous était donné, peut-être découvririons-nous un autre aspect de ce monde que nous croyons bien connaître, mais dont nous ne connaissons peut-être qu’une infime partie... Étonnante pensée!

Imaginons que nous sommes à la charnière de deux mondes: le monde extérieur, connu par nos sens, et l’Autre monde, celui qui ne nous est ni extérieur, ni intérieur, dont nous ignorons tout, car nous n’avons pas de sens adapté pour en capter les manifestations. Pourtant, cet Autre monde doit bien exister. Cet autre monde n'est pas notre monde intérieur, propre à chacun de nous, ce monde assez mystérieux qui “contient” notre subconscient, notre inconscient, en un mot tout ce qui est nous, qui constitue ce que nous appelons notre psychologie, et que nous maîtrisons encore très mal. L'autre monde que nous essayons de percevoir est un monde qui nous entoure aussi, qui nous enveloppe, mais que nous ne discernons pas, que nous ne voyons pas, que nous ne sentons pas. Pourtant, il existe ce monde!... Le château de l’âme de Sainte Thérèse et ses sept demeures nous montrent bien qu’il existe, mais très peu de personnes ont pu le connaître de leur vivant sur terre. Alors? Comment faire pour y pénétrer?

Nous, les hommes, sommes comme situés à la charnière de ces deux mondes. Dieu est en dehors de nous, et cependant Il est au plus profond de chacun de nous et Il nous donne la vie. Dieu est en moi, dans mon monde intérieur qui est encore moi, et Dieu est en dehors de moi, dans l’Autre monde dans lequel je ne peux pénétrer. Parfois, nous pouvons "sentir" la présence intime de Jésus, mais c’est très fugitif. Nous n'avons pas, non plus, de sens ni de capteur pour détecter notre propre monde intérieur, pour y découvrir Dieu, plus intime à nous-même que nous. Comment, dans ces conditions, parler de cet Autre monde qui doit être aussi vaste et aussi merveilleux, plus, peut-être, que les mondes extérieur et intérieur à l’homme?

Vivons une nouvelle parabole! Nous voici sur un bateau. Nous sommes sur le pont. Nous découvrons la mer immense et les côtes qui se dessinent au loin. Le navire avance vite, grâce à ses hélices, cachées à nos yeux, mais vraiment efficaces. Nous quittons le pont et nous descendons vers les cabines. Des coursives nous font découvrir l’intérieur du navire. Nous ne craignons rien car des hublots nous maintiennent constamment en contact avec le monde extérieur, avec les vagues et les oiseaux qui volent autour du navire.

Descendons encore un peu: voici la salle des machines. Tout fonctionne à merveille car le mécanicien surveille de très près la mécanique bien huilée qui fait sa vie. C’est ce monde qui actionne les hélices et donne la vie au bateau. Mais nous sommes encore dans le monde propre à l’homme... Maintenant essayons de descendre dans la cale. On nous laisse aller, nous tâtonnons car il y a peu d’éclairage, mais nous nous sentons encore en sécurité. Soudain nous pensons: “Mais, à côté de moi, juste derriere la coque du navire, il y a l'eau, il y a un autre monde, un monde que je ne peux pas voir et qui pourtant existe...” Nous sommes perplexes.

Le capitaine du navire nous fait signe d’approcher. Nous entrons dans une pièce très particulière dont les cloisons avant sont recouvertes d’un store épais. Le capitaine ouvre le store et nous voyons "l’intérieur" de la mer. La lumière est verdâtre, assez foncée, mais nous devinons une vie derrière la coque transparente. Pour surveiller la mer, le constructeur a réservé la partie avant et a remplacé le métal opaque par du verre. Nos yeux s’habituent: nous sommes émerveillés... Nous sommes dans un autre monde, un monde que nous ne connaissons pas, mais qui se découvre peu à peu grâce aux projecteurs. Hélas! Nous voyons peu de choses car la vision possible est limitée aux faisceaux de lumière. Tout le reste est ténèbre.

Fermons les yeux. Nous ne voyons plus le monde extérieur, mais nous l’entendons. Un silence feutré se fait autour de nous; mais ce silence n'est pas total: il laisse passer le ronflement des machines, le monde intérieur du bateau, la vie du bateau.

Maintenant entrons dans l’Autre monde, le monde de Dieu qui est notre vie, qui est la vie de chacun de nous, qui est à la fois au plus profond de notre être et hors de nous. Nos sens ne captent rien, ils ne peuvent pas, ils ne sont pas adaptés aux merveilles de l’Autre monde, le monde de Dieu. C’est comme si nous étions dans la salle d’observation d’un navire dont les stores ne seraient pas ouverts.

Nous nous sentons comme placés à la charnière de deux mondes. Ces deux mondes que nous connaissons bien sont aussi merveilleux l’un que l’autre, aussi vastes, aussi surprenants. Mais ni nos sens extérieurs, ni nos sens intérieurs, nos sens courants, ne sont adaptés à l’Autre monde, ce monde que tant de nous voudraient découvrir... car c’est la demeure de Dieu.

2-4-Grandeur et petitesse de l'homme face à Dieu

     2-4-1-L'immensité de Dieu

Tous les hommes sont souvent comme hantés par la grandeur de Dieu, par son humilité sur la terre, et par la place de l’homme, d’abord dans l’immensité de l’univers, ensuite dans l’infinitude de Dieu. Parfois nos réflexions nous plongent dans un abîme de vertige incommensurable,  perdus que nous sommes dans l’infini de Dieu. Heureusement que Dieu s’est révélé Amour, sinon notre pauvre intelligence, ce presque néant, aurait tôt fait de nous conduire au désespoir. Une image peut nous aider à comprendre Dieu et ce vertige qu'Il suscite en nous.

Considérons une immense sphère, une immensité sans limite, sans dimension, présente partout dans l'infini présent de Dieu, dans son intelligence totale, dans son Amour qui est son Être; cette immensité EST. Elle EST, car elle est Dieu...

Cette immensité est Amour car Dieu est une famille, une Trinité: un Père qui aime le Fils, un Fils qui se reçoit du Père qu’Il aime, et dont l’Amour pour le Père se confond avec l’Amour du Père pour le Fils, ceci dans une éternité d’Amour qui génère l’Esprit, l’Esprit du Père et du Fils, Personne à part entière, engendrée mais non créée, Amour du Père et du Fils, venant éternellement du Père et du Fils et retournant sans fin, au Père et au Fils.

     2-4-2-La création des anges et des hommes

Or, un jour du présent de Dieu, cet éternel présent de l’Éternité divine, Dieu créa le monde des esprits, le monde des anges. Dieu, en créant les esprits, en ce même instant de son Éternel présent, créait aussi un monde matériel, émanation étonnante de l’Énergie divine, minuscule étincelle de l’Énergie fondamentale qui est Dieu. Cette minuscule étincelle de l'Énergie divine devait devenir l’énergie initiale de ce qui serait, dans le temps créé simultanément, l’univers matériel d'une autre créature de Dieu, la terre, destinée à être la demeure de l’Homme, la dernière créature de Dieu, celle qui devait achever la Création.

Dieu créa l’homme à son image de Dieu. Dieu fit de l'Homme une créature complète rassemblant en elle-même, pour en être le lien, le monde des esprits dans son âme, le monde de la matière dans son corps, et l’Amour de Dieu pour en réussir l’unité. Le Père aimait spécialement l'Homme car, nous le savons, ce sont les hommes qui devaient, qui doivent constituer le Corps de son Fils.

Les anges, ces esprits bienheureux, superbement intelligents, étaient destinés à gérer et protéger l'ensemble de la création. Ils devaient, venant de l’Amour, répondre librement à l’Amour, et pour cela accepter l’humilité de Dieu, et adorer Dieu dans une Personne humaine, de la race des hommes, donc apparemment très inférieure à la race des anges, mais Dieu Lui-même incarné. 

     2-4-3-Réflexions sur la création

Nous ne pouvons maintenant nous empêcher de penser à la structure réelle de la matière, à la circulation invisible des électrons et de tant d'autres particules qui permettent la réalisation de ces matériaux si utiles... "Regardons" l’intérieur de la matière dont la réalité nous est cachée;  “voyons” les mondes microscopiques, ces univers infinitésimaux structurés, maintenus en place et consolidés par des forces énormes, invisibles elles aussi. Le moindre des électrons -il en est d’ailleurs de même pour les autres composants des atomes- obéit à des forces interactives dont nous ignorons à peu près tout. Nous voyons les effets de ces forces, mais ce qu’elles sont en elles-mêmes, mystère! Sans compter toutes les autres forces réparties dans l’univers, et dont nous ignorons tout, et jusqu’à leur existence, si elles existent...

On lit parfois des remarques curieuses concernant la Création. Certains parlent du chaos primitif qui aurait existé avant la Création du monde.  Dieu serait seulement intervenu pour mettre de l’ordre dans ce chaos, et créer les mondes... Mais alors, si le chaos existait avant la création, qui avait créé le chaos? Si Dieu n’avait pas créé le chaos mais s’en était juste servi, d’où venait ce chaos, et qui l’avait fait? Car “rien” ne peut pas créer quelque chose. Donc, seul Dieu, éternel, pouvait avoir créé le chaos dont il se servit plus tard, mais quand, puisque le temps n’existait pas?

2-5-L'amour. L'amour de Dieu pour les hommes et l'amour des hommes pour Dieu

     2-5-1-L'amour de Dieu pour les hommes

En Dieu, dans la pensée de Dieu, il y a les milliards d’anges et les milliards de galaxies du cosmos matériel comprenant chacune des milliards de mondes. Dans un de ces mondes, perdue dans le Cosmos, voici la Terre, le Jardin de Dieu. Sur cette Terre, des milliards d’hommes. Parmi ces milliards d’hommes, il y a chacun de nous, et il y a moi!...

Que sommes-nous? Et que suis-je dans cette immensité, grain d’énergie, donc matière, associé à une âme choisie parmi des milliards d’âmes, toutes créées à l’image de Dieu pour devenir un jour un élément, une pierre vivante irremplaçable de ce qui deviendra le Corps Mystique du Christ, le "Corps" de la deuxième Personne de la Trinité... Il faut avouer que nous tremblons devant ce mystère insondable du dessein de Dieu sur sa Création.

Nous sommes encore plus stupéfiés quand nous pensons que Dieu aime l’Homme, qu’Il nous aime, chacun individuellement, et qu'Il veut que nous L’aimions, librement; car nous sommes créés uniquement pour l’Amour, nous qui sommes si petits, si petits... Nous sommes créés par Dieu et pour Lui, l’Amour, nous qui ne savons même pas répondre à l’Amour, et qui osons nous croire quelque chose alors que nous devrions être anéantis d’humilité.

C'est surtout par le Christ que l'amour de Dieu se manifeste sensiblement pour nous, car Jésus nous a dit clairement au moment de mourir sur la Croix combien Il avait soif de nous. “J’ai soif!...”

Ce cri de Jésus sur la Croix est d'abord et incontestablement le cri de souffrance d’un être torturé, tremblant de fièvre et dévoré de soif. Cela c’est certain. Mais les saints mystiques qui, comme Padre Pio ou Marthe Robin, ont "vécu" ou "assisté" à la Passion de Jésus ont vu beaucoup d’autres choses dans ce cri. Jésus a soif de nous, de notre amour, de notre bonheur. Il a soif de tous les hommes, de tous les pécheurs qu’Il est venu sauver, qu’Il a rachetés par son sang versé pour nous à cause de nos péchés. Jésus a soif de nous parce qu'Il nous aime. Dieu aime les hommes, tous les hommes...

     2-5-2-L'amour des hommes pour Dieu

Dans la première lettre de Saint Jean, chapitres 4 et 5, nous lisons :

“Bien-aimés, aimons-nous les uns les autres, parce que l’amour vient de Dieu, et quiconque aime est né de Dieu et connaît Dieu. (1-Jean 4, 7) Donc l’amour vient d’abord de Dieu. Et aussi, au verset 10: “En ceci consiste l’amour: non pas que nous ayons aimé Dieu, mais que Lui nous a aimés et a envoyé son Fils expier nos péchés.” Ou encore: “Et nous, nous avons connu l’amour que Dieu a pour nous, et nous y avons cru. Dieu est amour, et celui qui demeure dans l’amour demeure en Dieu, et Dieu demeure en lui.” (1-Jean 4, 10 et 16)

Et voici l’essentiel: “Mais nous, nous aimons parce que lui, le premier, nous a aimés. Si quelqu’un dit: ‘J’aime Dieu’ et qu’il haïsse son frère, il est un menteur. Car celui qui n’aime pas son frère qu’il voit, est incapable d’aimer Dieu qu’il ne voit pas. Et nous avons ce commandement: que celui qui aime Dieu aime aussi son frère.” (1-Jean 4, 19 à 21) Cependant on ne doit pas exclure Dieu. D’ailleurs la suite, que curieusement on ne cite que très rarement, est très explicite: “À ceci nous reconnaissons que nous aimons les enfants de Dieu: quand nous aimons Dieu et que nous pratiquons ses commandements.”

     2-5-3-Réflexion méditative

Regardons encore la Grande Main de Dieu... Tout au fond, au creux de cette Main, il y a une minuscule terre, et des micro-minuscules êtres humains, et quelques micro-micro-minuscules âmes que le Seigneur a mises dans son Cœur. Dans la Main de Dieu, nous sommes aussi dans son Cœur... Comment cela peut-il se faire?

Fermons les yeux pendant un instant... Du Cœur de Dieu, donc du Cœur de Jésus, puisque Dieu est UN et Unique, du Cœur de Jésus partent les innombrables rayons de son amour... Ces rayons, touchant la terre, s’effritent en une multitude d’hosties consacrées: l’Eucharistie. Quand nous communions, une de ces hosties nous touche, nous atteint... Nous mangeons cette hostie, et c'est un peu comme si le rayon d’où elle provient nous aspirait: nous sommes à la fois sur la terre, et dans le Cœur de Dieu. Nous sommes dans notre nature humaine et terrestre tout en étant hors de la terre car Dieu nous aime, et nous aussi nous L'aimons. Quelle merveille!

2-6-La crainte de Dieu

     2-6-1-Il faut craindre de "faire du mal" à Dieu

Dieu n’est qu’amour, et c’est justement pourquoi nous devons Le craindre, car nous sommes entièrement dépendants de Lui; sans Dieu nous ne sommes rien, nous n’existons pas. Dieu peut faire de nous ce qu’Il veut, et nous, nous n’avons rien à dire; d’ailleurs nous sommes si peu de chose que la création ne s’apercevrait de rien si nous disparaissions. Dieu est tellement immense, tellement infini, que nous sommes bien obligés de Le craindre. Mais Dieu est Amour; mais Dieu nous aime et Il ne veut pas, Il ne peut pas renier son œuvre, Il ne peut pas ôter ce qui est dans sa pensée car sa mémoire est éternelle comme Lui.

Dieu ne peut pas nous détruire, car Il nous aime et Il veut que nous  L’aimions, et cela est magnifique, et cela est notre joie. Pourtant nous craignons. Oui, nous craignons de faire mal à Dieu, de Lui faire de la peine, nous craignons de Le blesser. Car quand on pêche, c’est Dieu que l’on blesse. Ces choses étonnantes, Jésus les a souvent dites à ses saints. Pourtant, Il est ressuscité, Il est Dieu, Il est hors du temps, et nous ne pouvons pas Lui faire mal, nous ne pouvons pas Le blesser... Alors?

Jésus nous as fait comprendre que son Corps mystique, c’est Lui. Son Corps mystique, vivant, sensible, constitué des millions de cellules que nous sommes tous, son Corps mystique sent, vit, vibre, et souffre beaucoup quand on le blesse. En blessant son Corps, c'est-à-dire les hommes, c’est Jésus que nous blessons. Et blesser Jésus, cela, nous ne le voulons à aucun prix: c’est pourquoi nous craignons tant de Lui faire mal. Nous craignons parce que nous sommes si faibles, si fragiles qu’à chaque instant nous pouvons laisser échapper la faute, le manque, l’erreur qui blesse. Et cela nous ne le voulons pas... et pourtant! C’est pour cela que nous craignons, nous craignons Dieu, c’est-à-dire que nous craignons de blesser l’Amour.

Illusions que ces propos stupides? Alors tous les saints sont des "illusionnés". Ils ne le paraissaient pourtant pas quand ils vivaient et multipliaient leurs œuvres humaines pour laisser Dieu réaliser ses œuvres d’amour. Illusions que les charités de saint Vincent de Paul ou de Mère Thérésa? Illusions que les pédagogies de saint Jean Bosco ou de Jean-Baptiste de La Salle? Illusions que la patience des persécutés? Illusions que la force de saint Charles Borromée pour redresser l’Église de son temps, et malgré les innombrables résistances de ceux qui auraient dû le soutenir? Illusionnés, les saints prêtres, les saints évêques, les saints papes? Illusionnés ceux dont le cœur a été brûlé par l’amour de leur Seigneur?

Tant de gens ont donc été des illusionnés. Mais, est-ce être illusionné que d’aimer son Créateur? Quand nous pensons à Dieu, à Jésus, notre cœur n’est plus le même. Est-ce une illusion? Alors, continuons à réfléchir, et à aimer, et à laisser notre cœur brûler avec le Cœur de Dieu... Et puis nous continuerons à Le craindre, à craindre de Lui faire mal en blessant notre prochain ou en le blessant Lui.

     2-6-2-Tendre est le Seigneur pour qui Le craint

“Comme est la tendresse d’un Père pour ses fils, tendre est le Seigneur pour qui Le craint.” (Ps 103) Ô la tendresse de Dieu, la tendresse du Père éternel! Dieu est Amour et Dieu aime. Dieu est éternel, et pourtant Il crée les temps. Tout est en Lui, pleinement achevé dans son Cœur et sa pensée éternelle. Pourtant la Création continue. La Création est dans la pensée et le Cœur de Dieu depuis toute éternité, et elle sera dans le Cœur de Dieu éternellement. La Création est achevée depuis que Dieu l’a pensée, depuis, toute éternité, et pourtant, pour nous qui sommes dans le temps, elle paraît ne pas cesser de se construire, de se parfaire, de s’achever...

Dieu est Amour et cet Amour engendre le Fils, de toute éternité. Et de l’Amour du Père et du Fils jaillit l’Esprit, tendresse du Père, tendresse de Dieu. Et le Père, de toute éternité, construit ce qui sera, pour nous, mais ce qui est déjà, pour Dieu, le Corps du Fils qui rassemble (rassemblera pour nous qui sommes dans un temps) toute la Création. Et chacun de nous a (aura) sa place dans le Corps mystique du Fils, le Christ.

Dieu est Amour, et Dieu est “tendre pour qui le craint.” La tendresse de Dieu est liée à la crainte que l’on a pour Dieu, que l’on doit avoir envers Dieu. Mais qu’est-ce que la crainte de Dieu? Qu’est-ce que cette crainte aux multiples facettes qui s’est manifestée, au cours des siècles, sous des aspects différents en fonction des besoins des hommes.

Dieu est Créateur, Dieu est le Tout-Puissant. Sans Lui rien n’existe, rien ne se fait. Dieu aime ses créatures, et parce qu’Il les aime, Il leur a donné des Lois, c’est-à-dire des sortes de modes d’emploi pour la vie:

– si vous voulez fonctionner normalement, vous devez obéir aux lois de la mécanique cosmique afin de ne pas troubler la course des univers, et respecter les énormes forces qui vous meuvent, dit Dieu à tous les mondes matériels.

– si vous voulez vivre libres et heureux, si vous voulez utiliser correctement le monde que j’ai mis à votre disposition, vous devez respecter le mode d’emploi que je vous ai confié, dit Dieu plein de tendresse, en s’adressant aux hommes.

     2-6-3-Origine du péché

Toute œuvre qui vit, qui fonctionne, ne peut le faire qu’en respectant les règles, c’est-à-dire le mode d’emploi. Si le mode d’emploi est violé, tout se dérègle, et c’est le drame. Il faut donc obéir aux règles de bon fonctionnement, et craindre de ne pas les mettre en œuvre. Cela, c’est la première facette de la crainte de Dieu; elle est essentielle et vitale. Celui qui viole la Loi, c’est-à-dire celui qui pèche, en termes de relation avec Dieu, celui-là dérègle ce qui lui est vital, nécessaire et s’exclut du bon équilibre de la Création; il pénètre dans le malheur, car il se sépare de la communion qui associe toutes les œuvre de Dieu.

Voici que nous comprenons mieux ce qu’est le péché. Si l’homme ne craint pas Dieu, s’il ne respecte pas les lois fondamentales de la Création, les merveilleuses lois du Créateur, il devient très malheureux. L’homme, créé libre, doit librement respecter les lois de Dieu pour être heureux.

À partir de là, une autre facette de la crainte de Dieu se découvre. Dieu est le Tout-Puissant, mais Il est Amour: c’est sa nature. Dieu crée par Amour, pour constituer le Corps de son Fils, son Verbe, et Dieu demande l’amour de ses créatures en retour de son Amour.

– Respecte mes Lois, dit Dieu à sa créature, car je T’aime. Aime-Moi car je T’aime, car Tu ne peux être heureux que dans mon Amour. Craindre Dieu, c’est L’aimer, c’est répondre à son Amour. Et aimer Dieu, c’est l’intérêt de la créature qui ne peut être pleinement heureuse que si elle répond à l’amour qu’est Dieu. C’est la deuxième facette de la crainte de Dieu: j’aime Dieu, car je veux être heureux.

Mais il y a beaucoup plus. Dieu nous crée gratuitement; Dieu nous aime gratuitement. Pourquoi, imitant son Amour, ne L’aimerions-nous pas gratuitement? Alors, si j’aime Dieu gratuitement, seulement pour Lui-même, pour répondre à sa tendresse d’Amour, alors, je vais craindre de ne pas L’aimer assez, je vais craindre, en blessant ses lois, de blesser son Amour, de blesser l’Amour. La troisième face de la crainte de Dieu, c’est la crainte de “faire du mal” à Dieu.

Mais comment peut-on faire mal à Dieu? Est-ce possible? Comment faire du mal à Celui qui peut tout, qui peut nous engendrer ou nous effacer? Comment peut-on faire du mal à Dieu?

L’amour ne peut être que douleur, nous a fait comprendre Jésus sur la Croix. L’amour qui n’est pas aimé ne peut être que douleur. Et quand nous n’aimons pas l’Amour, nous faisons souffrir l’Amour, nous faisons souffrir Dieu. C'est le plus mystérieux des mystères que nous puissions méditer...

Ô mon Seigneur! Je sais que Tu m’aimes, et je veux T’aimer. Mais je suis plongé dans un monde malheureux parce qu’il n’aime plus, parce qu’il a chassé l’amour. Et je suis fragile. Et je peux tomber. C’est pourquoi, connaissant ma misère j’ai tellement la crainte de Dieu: j’ai tellement peur de faire mal au Cœur de Dieu. J’ai tellement peur de blesser l’amour que j’aime! J’ai tellement peur de blesser la tendresse du Seigneur, si tendre pour celui qui Le craint.

Dieu est UN, Dieu est Amour et l’Amour jaillit éternellement de Lui. Et l’Homme, s’il le veut, peut vivre en Dieu et de l’Amour de Dieu. Et l’Homme peut être heureux, ou aurait pu être heureux dans l’Amour de Dieu. Mais il y eut le péché et ses conséquences... Satan a tenté l’Homme par la connaissance: “Si tu manges le fruit de cet arbre, tu sauras tout, tu seras comme Dieu...” L’Homme mangea et découvrit qu’on l’avait trompé: au lieu de savoir, il s’aperçut qu’il avait perdu la connaissance... Et l’Homme est comme perdu, suspendu dans la création entre deux infinis, l’infiniment grand et l’infiniment petit. L’Homme a perdu Dieu, et en perdant Dieu il a perdu la vraie connaissance, il a perdu le bonheur...

Tout ce nous venons de lire paraît très logique. Pourtant, bien souvent, nous nous disons: Est-ce vrai? Ces raisonnements sont-ils justes? Ne me trompé-je pas? Dans ces moments-là, seule la foi peut nous venir en aide: mais qu'est-ce que la foi?

     2-6-4-La foi

La foi est difficile et certains jours il faut faire un gros effort pour se mettre en présence de Dieu, même devant un tabernacle. Pourtant nous savons que Jésus est là, présent. Mais c’est si difficile de croire cela! Alors nous gémissons:

– Jésus montre-Toi un peu, manifeste-Toi. Comment veux-Tu que l’on croie en Toi si Tu ne révèles pas ton existence? Certes, nous savons bien qu’il y a, en certains lieux privilégiés, de nombreuses conversions. Mais tout le monde ne peut pas, ou ne veut pas aller dans ces lieux privilégiés. Alors, fais quelque chose pour tous tes pauvres enfants. Cela Te réjouirait tellement s’ils revenaient au bercail. Souviens-Toi, Jésus, Tu as dit un jour: “Il y a plus de joie pour un seul pécheur qui fait pénitence que pour des milliers de justes qui n’ont pas besoin de se convertir.” Alors, imagine la joie qui serait la tienne si le monde se convertissait! Seigneur viens à notre aide: Tu sais bien que la foi, c'est souvent difficile!

Nous ne cessons de prier, de crier vers Dieu en disant: “Seigneur, je T’en prie, montre-Toi, manifeste-Toi, nous avons tellement besoin de Te voir, de T’entendre...” Nous ne cessons de prier ainsi, mais nous devons vivre dans la foi. Alors, parfois, le Seigneur qui a entendu nos prières, nous "parle", pas avec des mots parlés, mais en mettant sous nos yeux des phrases du style de celle de Saint Pierre Chrysologue quand il disait:

"L’amour ignore le jugement, il manque de raison, il ignore la mesure. L’amour ne se laisse pas consoler par l’impossibilité, il n’admet pas que la difficulté soit un remède. L’amour engendre le désir, s’enflamme d’ardeur, son ardeur le porte au-delà de ce qui lui est accordé. À quoi bon insister?

Il est impossible que l’amour ne voie pas ce qu’il aime; voilà pourquoi tous les saints ont jugé sans valeur tout ce qu’ils avaient obtenu, s’ils ne voyaient pas le Seigneur. Voilà pourquoi l’amour qui désire voir Dieu, s’il manque de jugement, a pourtant une piété ardente. Voilà pourquoi Moïse ose dire: “Si j’ai trouvé grâce à tes yeux, montre-moi ton visage.” Et le psalmiste insiste aussi: “Montre-moi ton visage.” 

Enfin quelqu’un qui parle d’or! Mais avec un nom pareil, comment ne pas parler d’or? Merci Saint Pierre Chrysologue, Pierre à la parole d’or. Nous comprenons soudain que nous ne sommes pas des malades, des anormaux désirant ce qu'il est impossible d'obtenir sur la terre, car tous ceux qui ont aimé le Seigneur ont désiré Le voir, et cela, d’un grand désir.

Lorsqu’un homme devient sourd, c’est que son capteur auditif est défaillant. Il n’entend plus. Il peut juste se souvenir des sons qu’il avait entendus avant sa surdité et que sa mémoire avait conservés. Il n’a pas à croire que les sons existent, il le sait, il sait qu’ils existent même si ses capteurs sont morts. Il n’a pas à avoir la foi, il sait. Mais un sourd de naissance ne sait pas ce qu’est un son. Il comprend que les entendants discernent des choses que lui, sourd de naissance, n’appréhende pas, car il n’a jamais eu de capteur auditif. Il croit seulement que quelque chose se passe. Et comme il a confiance en ses parents et ses amis, il croit ce qu’on essaie de lui faire comprendre en utilisant les seuls capteurs dont il dispose.

On pourrait dire exactement la même chose à propos des aveugles ou de ceux qui ne sentent pas les odeurs. Il ne captent pas, mais ils croient ceux qui leur disent que les odeurs existent, que les couleurs sont belles. Ils ne captent pas, mais ils font confiance: ils ont la foi.

     2-6-5-L'humilité nécessaire aux hommes

Il n’existe pas de mots pour exprimer les choix de Dieu pour chacun de nous, dans notre aujourd'hui qui demeure dans son inexprimable éternité.

Dans ces conditions, que signifie cette expression si souvent utilisée: "Dieu m'a choisi, Dieu a choisi tes ses ouvriers, Dieu a choisi..." De toute éternité, à un “instant” éternel de son Éternité, Dieu a pensé individuellement chacun de nous. Chacun de nous peut se dire:  Dieu m’a voulu, puis Dieu m’a créé. A cet instant où l’éternité et le temps, mon temps, se rejoignaient, Dieu m’a créé et Il m’a placé dans le monde. Il ne pouvait pas faire autrement car Il est l’Amour. Il voulait que je L’aime, et pour cela Il me voulait libre. Or l’amour ne peut se manifester que dans la liberté où l’épreuve est indispensable, car seule, l’épreuve prouve et manifeste l’amour.

Dieu qui m’aimait m’a donc mis dans le monde, un monde blessé par le péché de ceux qui n’avaient pas su aimer. Mais Dieu veillait; Dieu veillait sur moi et Il me protégeait, comme Il protège tous ses enfants et veille sur chacun de tous ses petits, ses petits qu’Il aime et qu’Il a prédestinés à devenir le Corps de son Christ, le Corps mystique de son Fils, son unique.

Dieu ne nous a pas choisis dans une foule, dans la masse, comme on dit aujourd’hui, si horriblement. Dieu nous a faits spécialement pour Lui, Il nous a tous modelés individuellement et façonnés avec Amour, pour Lui. Pour son bonheur et pour notre bonheur.

Ainsi chacun de nous peut se dire: Dieu m’a fait pour Lui, sans aucun mérite de ma part, sinon celui de naître, et encore, je n’avais pas le choix. Dieu m’a fait pour Lui, Dieu m’a prédestiné pour Lui, depuis toujours, mais le "toujours" éternel de l’Éternité divine.

Quelle que soit la vocation à laquelle Dieu nous destine, Dieu nous a prédestinés à n’être que pour Lui seul, qu’à Lui seul, mais libre, car la réponse d’amour à l’Amour ne peut être que libre: Dieu l’a voulu ainsi. Pour que je puisse répondre à son Amour, Dieu m’a placé, libre, dans le monde, ce monde qui est de ma race. Dieu m’a placé libre dans un monde blessé par le péché, Dieu m’a placé libre et blessé d’origine comme tous ceux de ma race pour que je puisse, malgré tout, et peut-être malgré moi, Le préférer à tout et Le préférer aussi à moi-même.

Dieu m’a placé libre dans un monde blessé, avec mes tares humaines, mes faiblesses humaines, les sollicitations de ce monde merveilleux mais dangereux à cause des tentations que l’Impur ne manque pas de susciter. Dieu m’a placé libre dans ce monde devenu dangereux, non pas à cause de Lui, mais à cause du péché des hommes.

Dieu m’a placé libre dans un monde dangereux pour y susciter l’amour, pour aimer, pour L’aimer. Pour que je puisse réussir l’épreuve obligatoire qui conduit à l’Amour, Dieu m’a comblé d’Amour, de son Amour. Bien sûr, il y a des chutes, elles sont presque inévitables: seule Marie, la toute sainte, la toute pure ne tomba jamais, tant son amour était fort.

On peut se poser des milliers de questions sur notre création, notre destinée, notre prédestination, l’Amour du Seigneur et nos chutes. Le Seigneur, dans sa grande bonté, nous répondra toujours, même si parfois Il nous fait attendre un peu, ou beaucoup.

On peut, de nouveau, se demander: “Le Seigneur nous veut tous; Il nous a créés pour Lui. Il nous aime et Il veut que nous L’aimions. Alors pourquoi nous a-t-Il “jetés” dans un monde pécheur, plein de sollicitations, au milieu de tentations multiples et souvent si subtiles et si pernicieuses qu’on ne les détecte pas toujours?” Bien sûr, c’est l’épreuve de l’Amour: Dieu m’aime. Il m’a créé à son image, et Il me veut pur et humble. Humble comme Dieu est humble. L’humilité de Dieu est un mystère qui nous dépasse tous infiniment, et les chemins par lesquels Dieu nous mène doivent nous faire acquérir, par sa seule grâce, un peu de l’humilité qu’Il désire pour chacun de nous.

Dieu nous aime. Il nous a créés à son image, donc Il nous veut humbles, à son image, c’est-à-dire d’une humilité divine, et non pas d’une humilité humaine qui n’a d’humble que le nom. En effet, quand nous prenons conscience de nos péchés, de nos faiblesses, de nos fautes sans nombre, des misères innombrables que peut cacher un passé apparemment vertueux, nous comprenons, comme l'ont fait tous les saints, que seule la vue et la prise de conscience de toutes ces misères, et de nos chutes passées et actuelles, peuvent nous ouvrir à la connaissance de nous-mêmes, à la réalité de notre néant, et à l’immensité de la bonté et de l’Amour de notre Seigneur.

Dieu nous forme, Dieu nous travaille. Dieu continue à nous former. Il nous place comme des créatures contingentes, entièrement dépendantes de Lui, devant la réalité, la puissance, et l’immensité de son Existence éternelle et nous fait découvrir la profondeur de son Amour et la vérité de notre pauvreté, de notre petitesse, de notre misère. Et nous découvrons que chaque chute, à condition qu’elle ne soit pas mortelle, chaque chute nous permet de nous rapprocher de Dieu. Chaque faiblesse nous ramène chaque fois un peu plus dans le cœur de Dieu. Nous nous sentons sans force, impuissants, mais tellement aimés. Dieu permet nos fautes, nos erreurs, dont beaucoup ne sont pas délibérément voulues. Dieu permet nos faiblesses, voire nos péchés, car dès que nous les regrettons et Lui en demandons pardon, Il nous fait comprendre, Il nous montre que nous blessons son Amour.

Nous blessons l’Amour de Dieu!!... Et nous sommes responsables de toutes ces blessures infligées à l’Amour et qui ont conduit Jésus à Gethsémani puis à la Croix!...

Seigneur, c’est terrible de méditer ces choses! Nos fautes blessent Jésus. Nos péchés blessent l’Amour qui continue à nous aimer et qui nous dit: “Viens!” Jésus blessé nous pardonne et nous appelle à plus d’amour. Étrange! La faute, nos fautes, celles que nous regrettons, nous mènent à toujours plus d’amour et plus d’humilité. Nos faiblesses nous font découvrir le Cœur de Dieu, le Cœur de Jésus, le Cœur si miséricordieux de Dieu, l’Amour donné et livré pour le salut des hommes. Oh! la miséricorde de Dieu pour tous ses petits! Comme il faut craindre de blesser Dieu!

Nos péchés, nos fautes, nos misères, nos faiblesses nous conduisent vers l’Amour et nous apprennent l’humilité, l’humilité à l’image et ressemblance de l’humilité de Dieu. Seule la grâce de Dieu et l’Amour miséricordieux du Cœur de Jésus peuvent nous faire entrevoir de telles merveilles. Alors, confondus d’amour, nous ne pouvons que crier l’Amour de Dieu et dire: “Mon Dieu! Laissez-nous découvrir encore un peu de votre Cœur, votre Cœur de Père, votre Cœur de Fils, votre Cœur de Dieu doux et humble car c’est le Cœur de l’Amour, de l'Esprit d'Amour.”

Maintenant, Père, donnez-nous quelques mots pour dire et chanter votre Cœur, votre Cœur de Père.

Père, nous sommes si petits, si faibles et si fragiles que nous nous  réfugions au fond de votre Cœur pour en saisir au moins quelques battements. Et les quelques battements de votre Cœur, ô Père, ceux que nous pouvons saisir, que Vous permettez que nous saisissions, ces quelques battements de votre Cœur résonnent de tendresse dans nos pauvres cœurs d'hommes pécheurs. Nos pauvres cœurs recueillent avec tout l’amour dont ils disposent, celui que Vous leur avez donné, nos pauvres cœurs recueillent les attentions, les soins, et les délicatesses de votre Cœur de Père. Les battements de votre Cœur de Père nous disent l’Amour que Vous avez pour nous, que vous avez pour chacun de nous.

Père, les regards de nos âmes croisent vos regards d’Amour, vos regards qui nous enveloppent d’Amour, vos regards qui nous appellent et qui nous disent: “Venez! N’ayez pas peur!” Vos regards, les regards de votre cœur de Père captent les yeux de nos âmes, comme pour nous encourager, pour nous aider à poursuivre l’ascension commencée. Père, avec tant de bonté Vous nous accompagnez dans notre vie, Vous nous formez, vous nous éduquez, Vous nous aidez à marcher. Vous nous grondez aussi, et Vous nous reprenez lorsque nous éloignons de Vous.

Mais surtout, Père, quand nous voulons nous éloigner de Vous, quand notre amour, notre pauvre amour humain se fatigue ou se lasse, alors Vous mettez dans nos âmes des sentiments nouveaux. Nous sentons alors au plus profond de nous, un amour différent. Car votre Cœur de Père, votre Cœur si aimant nous fait comprendre qu’Il souffre quand nous nous éloignons, que nous blessons l’Amour quand nous cessons d’aimer ou que nous aimons moins. Père, se peut-il? Père, ne permettez pas que nous cessions d’aimer. Gardez-nous près de Vous, cachés dans votre Cœur, dans votre Cœur de Père.

Père, quand nous contemplons votre Cœur de Père, Vous nous conduisez à Jésus, votre Verbe incréé, votre Fils Bien-aimé, votre Unique, en qui Vous Vous complaisez. Le Fils, et le Père, c’est tout UN, mais le Fils s’est fait l’un de nous, et quand Vous voulez nous montrer le chemin qui mène à Vous, Vous nous montrez Jésus. Car votre cœur de Père, et le  Cœur de Jésus c’est tout UN, car c’est le Cœur de Dieu. Vous nous montrez Jésus qui s’est fait l’un de nous. Vous nous montrez Jésus et nous dîtes: “Aimez-Le! J'ai mis en Lui tout mon amour!”

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